Norman G. Finkelstein parle de la membre du Parlement Naz Shah, de Ken Livingstone, et de la controverse sur l’«antisémitisme» au parti travailliste.
Norman Finkelstein
Propos recueillis par Jamie Stern-Weiner – Le 3 mai 2016 – Source Opendemocracy.net
Norman Finkelstein n’est pas étranger à la controverse. L’intellectuel juif américain est l’un des plus grands experts internationaux du conflit israélo-palestinien et de l’héritage politique de l’holocauste nazi. À part ses parents, tous les membres de la famille de Finkelstein, des deux côtés, ont été exterminés dans l’holocauste nazi. Il a écrit en 2000 L’industrie de l’Holocauste. Le livre, qui a été publié en feuilleton dans le Guardian, est devenu un best-seller international et a déclenché une tempête médiatique. Mais la dernière incursion politique de Finkelstein est le fruit du hasard.Continuer la lecture →
Jeudi dernier, le 24 mars, un soldat de Tsahal, les forces de défense israéliennes, a été filmé en train d’exécuter un Palestinien blessé soupçonné d’avoir mené une attaque à l’arme blanche contre des soldats de Tsahal dans le quartier Tel Rumeida d’Hébron. Le vidéaste ayant filmé la scène est Imad Abu Shamsiya, un cordonnier palestinien qui a depuis reçu des menaces de mort et d’intimidation de la part de colons israéliens d’extrême-droite, avec la menace d’une éventuelle poursuite judiciaire. Continuer la lecture →
Par Ramzy Baroud – Le 31 décembre 2015 – Source CounterPunch
Lorsque j’étais petit garçon, je rêvais de renaître hors de la misère du camp de réfugiés de Gaza, à une autre époque et en un autre lieu, où il n’y aurait pas de soldats, pas d’occupation militaire, pas de camps de concentration et pas de corvée quotidienne – mon père luttant pour notre survie et ma mère s’efforçant de compenser l’humiliation de la vie par son amour constant.
Par Dmitry Orlov – Le 30 novembre 2015 – Source Club Orlov
Cher Alien,
Nous sommes très heureux que vous ayez choisi de venir dans notre merveilleux pays. Nous sommes très honorés de vous recevoir parmi nous. Il n’y a que quelques formalités sans chichi, pour s’assurer que vous et mon pays sommes compatibles.
Alors qu’une nouvelle génération de jeunes palestiniens prend de plus en plus conscience que le futur état palestinien n’est qu’un leurre avancé pas Israël pour gagner du temps et continuer à grignoter, barricader et ghettoïser le peu qui en reste, la frustration et la colère s’emparent d’eux.
Voici une carte qui montre ce qui reste de la Palestine après 68 ans de grignotage bien planifié par Israël. Cette carte démontre l’impossibilité d’aboutir maintenant à un état palestinien viable. Il n’en reste plus qu’un archipel de bantoustans arabes dans une mer inamicale de murs de séparation, de check points, de villages de colons israéliens, de routes et de zones interdites.
Une palestinienne tentant de démolir le mur de séparation israélien
Les habitants y subissent quotidiennement l’humiliation coloniale, un traitement discriminatoire et arbitraire et l’impossibilité d’envisager toute amélioration de leur condition politico-sociale.
Gaza est une prison à ciel ouvert enfermant 1,5 millions de personnes n’ayant le droit d’en sortir que sous des conditions draconiennes. Ce n’est pas leur propre gouvernement qui les y enferme mais une puissance étrangère occupante.
Carte des implantations de colonies israéliennes en Cisjordanie
Les jeunes palestiniens en colère, des terroristes ou des résistants ? L’Onu a répondu régulièrement à cette question depuis bientôt 50 ans
La presse israélienne, docilement suivie par la presse occidentale, s’évertue à poser l’étiquette terroriste sur ces jeunes palestiniens. Il serait donc bon de rappeler, afin de rééquilibrer le débat que :
La Résolution 2621 XXV, du 12 octobre 1970 des Nations Unies affirme « le droit inhérent des peuples colonisés à lutter par tous les moyens nécessaires contre les puissances coloniales qui répriment leur aspiration à la liberté et à l’indépendance.»
Cette légitimation du droit à la résistance est confortée par l’article 1er §4 du premier protocole additionnel de Genève du 08.06.1977 aux termes duquel, parmi les conflits armés internationaux, figurent ceux « dans lesquels les peuples luttent contre la domination coloniale et l’occupation étrangère et contre les régimes racistes dans l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes…»
Résolution 37-43 des Nations Unies : « Tout peuple a le droit de résister à l’oppression, l’occupation, l’annexion ou colonisation par une force étrangère. Cette opposition légitime la résistance armée « .
La résistance palestinienne est donc légale face au droit international en cours aujourd’hui.
Car il faut aussi rappeler que la résolution 3236 de l’Assemblée générale de l’ONU du 22 novembre 1974, entre autres points :
Réaffirme les droits inaliénables du peuple palestinien en Palestine, y compris :
(a) Le droit à l’autodétermination sans ingérence extérieure ;
(b) Le droit à l’indépendance et à la souveraineté nationales ;
Réaffirme également le droit inaliénable des Palestiniens de retourner dans leurs foyers et vers leurs biens d’où ils ont été déplacés et déracinés, et demande leur retour ;
Reconnaît que le peuple palestinien est une partie principale pour l’établissement d’une paix juste et durable au Moyen-Orient ;
Fait appel à tous les États et organisations internationales pour qu’ils aident le peuple palestinien dans sa lutte pour recouvrer ses droits, conformément à la Charte.
L’année suivante, l’AG adopte la résolution 3376 créant le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien pour soutenir la résolution 3236, et la résolution 3379 qui « décrète que le sionisme est une forme de racisme et de discrimination raciale ».
Elle a été révoquée le 16 décembre 1991 car c’était la condition que posait Israël pour sa participation aux accords d’Oslo.
Sans oublier que déjà en 1968, le conseil de sécurité de l’ONU protestait :
Résolution 252 (21 mai 1968). Le Conseil de sécurité déclare « non valides » les mesures prises par Israël, y compris l’« expropriation de terres et de biens immobiliers », qui visent à « modifier le statut de Jérusalem », et demande à celui-ci de s’abstenir de prendre de telles mesures.
Rebelote dix ans plus tard :
Résolution 446 (22 mars 1979). Le Conseil de sécurité exige l’arrêt des « pratiques israéliennes visant à établir des colonies de peuplement dans les territoires palestiniens et autres territoires arabes occupés depuis 1967 », déclare que ces pratiques « n’ont aucune validité en droit » et demande à Israël de respecter la convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre.
Il parait donc évident, en faisant preuve d’un minimum d’impartialité, de voir qui est hors la loi et qui ne l’est pas dans ce conflit. C’est pourtant un exercice difficile, mais surtout socialement risqué, pour la majorité de nos journalistes, analystes et hommes politiques.
Nous devons donc constater qu’en 2015 la fameuse loi internationale reste toujours celle du plus fort, malgré ce qu’on voudrait nous faire croire.
Mais le plus fort s’avère souvent être le plus bête, complètement aveuglé par sa propre puissance.
Car si la solution à deux états n’est plus viable que reste-t-il ? L’éradication totale ou la déportation forcée des 6 millions de palestiniens vivant en Palestine étant physiquement et moralement impossible, il ne reste que la solution d’un seul état. C’est-à-dire qu’en rendant impossible la solution à deux états le gouvernement israélien se place lui-même dans la position de devoir accepter un seul état englobant tous les habitants de la région, qu’ils soient juifs, musulmans, chrétiens ou autres, tous devenus citoyens israéliens.
C’est pourtant la pire des solutions pour ce gouvernement car elle marquera la fin du concept d’état juif, concept qui est pourtant la pierre angulaire de sa doctrine et qu’il s’évertue à vouloir faire reconnaître au reste du monde. C’est une éventualité qui terrorise tellement le gouvernement israélien actuel qu’il ne la voit même pas arriver, qu’il ne réalise même pas que c’est celle qu’il est, inconsciemment, en train de provoquer. Un cas flagrant d’aveuglement idéologique.
Alors dans quel camp sont les terroristes ?
Wayan est membre actif du Saker Francophone, il vit en Indonésie.
Par Norman Pollack – Le 7 septembre 2015 – Source CounterPunch
Cliff Palace, vestiges d’un site anasazi dans le parc national de Mesa Verde. Colorado. USA
Le terrifiant problème des réfugiés que nous voyons aujourd’hui, qui rappelle tellement les mouvements de populations pendant la Seconde Guerre mondiale, proches de l’Holocauste lui-même dans les annales de l’histoire des crimes contre l’humanité, et auquel ils ont été ensuite reliés, reste, à notre époque, sous l’écran radar moral, quelque chose de quasiment inévitable, sans solution, seulement quelque chose qui arrive. Voilà à quel point le monde est devenu blasé. Des épaves humaines, voilà tout ; l’humanité, comme principe organisateur central de la vie, empuantit les narines fragiles de nations préoccupées par d’autres futilités. Voilà ce que je veux dire en parlant d’effondrement des institutions sociales, sans contre-feu ni fil directeur – où est l’ONU par exemple ou toute autre alternative appropriée, si c’est encore possible? – pour empêcher l’humanité de sombrer dans un trou noir, où règne le vide d’un pouvoir qui a renoncé à sa responsabilité globale sur la vie et la dignité des gens.
«... J'en suis arrivé à reconnaître la sagesse de l'approche qu'avait Gandhi de la politique. Sa doctrine exprimait l'idée que la politique ne devait pas chercher à changer l'opinion publique, mais devait tenter d'amener les gens à agir sur ce qu'ils estimaient mauvais... L'un des dangers qui menacent les politiques radicales est leur aspiration à aller au-delà du sentiment populaire. Vous définissez vos propres conceptions du bien et du mal, et vous tentez de vous distinguer d'un public ignorant. Au final, vous aurez une posture politique des plus impressionnantes, mais au détriment de son efficacité.» Norman Finkelstein
Voir aussi la série d'articles de Finkelstein publiée par le Saker Francophone sur les rapports d'Amnesty concernant l'opération israélienne Protective Edge à Gaza en juillet 2014 évoqués dans cette entrevue.
Le Saker Francophone
Norman Finkelstein est un grand connaisseur, bruyant et controversé, du conflit israélo-palestinien, et l’un des critiques d’Israël les plus assumés et les plus incisifs. Aux côtés du célèbre historien israélien Benny Morris, il a récemment annoncé son association avec Byline, une plate-forme de financement participatif pour le journalisme indépendant. Il a l’intention d’utiliser ses articles pour récolter 100 000 dollars, qui seront donnés à l’hôpital Al-Awda de Gaza. Vous pouvez soutenir son travail et la campagne de financement à cette adresse. Nick Mutch a pu parcourir un premier jet de l’étude de Norman centrées sur les rapports émis par Amnesty International concernant la guerre de Gaza, et a pu discuter avec lui de ce nouveau projet par téléphone.
Nick Mutch (NM) : Votre dernier article présente une critique acérée des rapports émis par Amnesty International à propos de l’opération Bordure Protectrice, l’assaut israélien contre Gaza, l’été dernier. Vous vous attaquez notamment aux différences de traitement entre «des attaques de mortiers et de roquettes, illégales et meurtrières, par un groupe armé palestinien» (Unlawful and Deadly: Rocket and Mortar Attacks by Palestinian Armed Groups) et «Des familles sous les décombres : attaques israéliennes sur des maisons habitées» (Families Under the Rubble – Israeli Attacks on Inhabited Homes). Pourriez vous nous en dire plus?
Norman G. Finkelstein (NGF) : Je me suis plongé dans les rapports d’Amnesty, plein d’espoir et avec des attentes élevées, car j’avais en mémoire leur rapport 22 jours de massacres et de destructions (22 Days of Death and Destruction), qui avait été publié après l’opération Plomb Durci en 2008-2009. Je m’attendais à lire un rapport rigoureux, honnête et légalement cadré de ce qui a pu se passer sur place. Dans la bataille menée pour gagner l’opinion publique, nous avons besoin d’organisations comme Amnesty, qui possèdent une autorité morale certaine, pour faire pièce à la propagande israélienne qui fonctionne comme une machine bien huilée.
Mais je suis un lecteur des liens donnés dans un article, et je n’ai pu m’empêcher de remarquer que certaines sources, par exemple le ministère des Affaires étrangères israélien, étaient citées de façon extensive. Cette véritable antenne de propagande était citée comme une source sûre, alors que les enquêtes par des organisations humanitaires gazaouies respectées, comme al-Mezan, n’étaient même pas mentionnées. J’en suis arrivé à réaliser que les rapports d’Amnesty ne faisaient que reprendre la propagande israélienne, c’est à dire une image retouchée et embellie des horreurs infligées par Israël à Gaza.
Israël a détruit ou rendu inhabitables 18 000 maisons. Dans ‘Des familles sous les décombres’, Amnesty insinue que dans l’intégralité des cas étudiés, Israël ciblait des objectifs militaires, mais a utilisé une force disproportionnée. C’est un alibi parfait pour Israël. Toute personne familière avec le droit humanitaire international (les lois de la guerre), sait qu’il est impossible de prouver la disproportion. C’est un concept sans pré. Comment faites vous pour estimer combien de vies civiles valent un objectif militaire? C’est un cas classique de comparaison entre des pommes et des oranges.
Y avait-il vraiment 18 000 militants du Hamas dans ces 18 000 maisons? Si vous vous référez aux témoignages de combattants israéliens publiés par l’organisation Breaking the Silence, vous verrez qu’ils montrent qu’Israël avait deux objectifs à Gaza. Tout d’abord, lorsque les troupes entraient sur le champ de bataille, les règles d’engagement qui leur étaient imposées étaient les suivantes : tirez sur tout ce qui bouge, voilà tout. En d’autres termes, il n’y a pas de civil dans les zones de guerres identifiées comme telles. Ensuite : à chaque fois que vous entrez dans une maison, détruisez-là en sortant. Leurs bulldozers blindés D-9 fonctionnaient jour et nuit pour détruire les maisons rencontrées. En quoi cela avait-il un quelconque rapport avec le fait de prendre des militants pour cible?
Tirez sur tout ce qui bouge, voilà tout.
NM : Vous indiquez dans votre article qu’«Amnesty retombe dans ses vieux travers», mais vous considérez également que l’opinion publique dans le reste du monde est en train de se tourner contre Israël. Comment expliquez-vous ce paradoxe?
NGF : De façon extraordinaire, malgré la propagande médiatique et l’immense pouvoir du lobby sioniste, l’opposition populaire à la politique d’Israël ne fait que croître. De plus en plus de gens ont vu au travers de la toile des mensonges, et sont en mesure de discerner la vérité. Quand les partisans d’Israël ont compris qu’ils avaient perdu la bataille pour l’opinion publique dans les segments libéraux des sociétés, comme les campus des universités et les organisations humanitaires, ils ont cessé d’agir avec des pincettes. Ils se sont mis à accuser quiconque était vaguement critique de la politique d’Israël d’être antisémite, et se sont mis à appliquer toutes sortes de pressions en sous-main. Par exemple, sur les campus universitaires, où l’opinion majoritaire s’oppose avec vigueur à la politique israélienne, des réseaux d’anciens étudiants juifs ont été mobilisés pour menacer de retirer leurs subventions.
Vous pouvez aussi vous référer au conseil d’administration d’Amnesty au Royaume-Uni, qui a récemment contribué à une nouvelle campagne anti-antisémitisme. Ils ont donné leur accord à la mise en place d’une campagne absurde. Avez-vous jeté un œil aux statistiques à ce sujet? D’après tous les sondages menés par des sources sérieuses, comme Pew, l’antisémitisme au Royaume-Uni concerne moins de dix pour cent de la population. Par contre, soixante pourcent de la population du Royaume-Uni a des préjugés envers les gitans, et quarante pour cent envers les musulmans. Et l’autre jour, une manifestation nazie au Royaume-Uni a été l’occasion d’un grand ramdam médiatique. Savez-vous combien de nazis se sont vraiment rendus à cette manifestation? Vingt. Mais le Guardian a tout de même cru bon de présenter en une un sondage a la fiabilité douteuse, annonçant des taux d’antisémitismes alarmants dans le pays. Les gens ont plus de préjugés envers les gens gros, petits ou laids [qu’envers les juifs]. Je suis prêt à parier que si vous demandez à n’importe quel Britannique s’il préfère être chauve ou juif, il choisira juif.
NM : Avez-vous déjà été personnellement en contact avec des manifestations d’antisémitisme ?
NGF : J’ai grandi dans un environnement totalement judaïsé, de la maternelle à l’université. Je ne connaissais pratiquement que des juifs. C’était comme si les non-juifs de l’école étaient inexistants, car les meilleures classes étaient entièrement constituées de juifs. Je connaissais bien quelques non-juifs, comme ça, mais nous ne nous mélangions pas. Ma génération de faisait pas grand cas de l’antisémitisme. Nous étions trop occupés à préparer nos plans pour nos futures carrières. En fait, beaucoup de mes anciens camarades ont brillamment réussi. Un grand nombre d’entre eux ont pu faire carrière dans leurs champs respectifs et ont fini directeurs de département dans une université de l’Ivy League, professeurs à l’Ecole médicale de Harvard, gérants de grandes corporations, directeurs de fonds spéculatifs, sénateurs. Ils étaient intelligents, bien sûr, vous aurez du mal à trouver votre place dans le monde, en partant d’en bas, si vous n’êtes pas intelligent. Mais ils étaient également très ambitieux, sans doute trop. Déjà, à l’époque, et je doute que cela ait changé, il ne s’agissait pas de gens très sympathiques. Ils n’auraient rien laissé se mettre en travers de leur ascension de l’échelle de la gloire, que ce soient des sentiments ou des principes. L’antisémitisme n’était même pas un sujet de discussion, car nous étions persuadés, et la suite à prouvé que nous avions raison, que si nous travaillions assez dur, tous les chemins vers le pouvoir et les privilèges nous seraient ouverts.
NM : Par le passé, vous avez émis des positions extrêmement critiques envers le mouvement Boycott, Divestment and Sanctions [BDS pour Boycott, Désengagement et Sanctions, NdT], le qualifiant de culte et d’«historiquement criminel». D’où vient votre désaccord avec ce mouvement?
NGF : Je suis en accord avec quatre-vingt-quinze pour cent des actions menées par BDS, mais pas avec leur charte officielle. La tactique qui consiste à utiliser divers instruments nonviolents comme les boycotts, le désengagement, les sanctions économiques, est évidemment appropriée. Il est inutile de tenter de convaincre les Israéliens au moyen d’arguments rationnels ou moraux. Vous ne pourrez pas plus les convaincre de la validité de la lutte palestinienne que vous n’auriez pu convaincre un blanc du Sud des USA de la pertinence des mouvements pour les Droits Civiques. Toute approche critique de l’action de BDS doit commencer par reconnaître la ténacité, l’ingéniosité et l’intelligence des activistes qui forment la base de BDS, et qui ont pu remporter un nombre impressionnant de victoires contre Israël.
Mon différend avec BDS vient du fait que je considère qu’il est impossible de gagner l’opinion publique sans affirmer clairement le droit à l’existence de l’État d’Israël, à l’intérieur des ses frontières reconnues par des accords internationaux. BDS refuse catégoriquement de prendre une telle position : ils affirment n’avoir aucune opinion quand au droit d’Israël à exister. C’est le meilleur moyen de se couper d’une grande partie du public.
BDS affirme être ancré sur le droit international, mais le droit international admet l’existence de l’État d’Israël. C’est pourquoi le pays est membre de l’ONU. Vous ne pouvez à la fois demander la reconnaissance des Palestiniens au nom du droit international et refuser cette reconnaissance à d’autres. Vous ne pouvez pas choisir quelle partie de la loi accepter, et en refuser le reste. Vous devez admettre l’ensemble de ce que stipule le droit international concernant les deux parties du conflit, et pas seulement vous occuper du côté qui a votre préférence. Si vous demandez que vos droits soient respectés, alors vous avez automatiquement l’obligation de respecter les droits des autres. Au final, chaque victoire atteinte par BDS l’a été en dépit de leur charte.
Vous ne pouvez pas choisir quelle partie de la loi accepter.
Les diverses résolutions votées dans les campus US américains, qui demandent le désengagement, s’attaquent à l’occupation [de Gaza par Israël], tout en reconnaissant explicitement l’État d’Israël. Si BDS se définit par sa charte officielle (ce que ses dirigeants affirment), il est difficile d’admettre que ces résolutions puissent être considérées comme des victoires pour BDS. En effet, celles-ci soutiennent directement la solution de deux États, sans que cette solution soit reconnue par la charte de BDS, et alors que de nombreux dirigeants et activistes du mouvement s’y opposent fortement.
De plus, BDS entretient l’illusion qu’en agissant seul, et sans le soutien d’une résistance populaire massive dans les territoires occupés, le mouvement sera capable de libérer la Palestine. Un dirigeant de BDS est allé jusqu’à proclamer récemment que ‘«BDS pourrait bien être la plus puissante forme de résistance du peuple palestinien jamais formée‘». Vraiment? Cela suppose donc que le nombre de Palestiniens qui ont participé activement à BDS est plus important que ceux qui ont prix part à la Grande Révolte arabe de 1936-1939 ou à la première intifada? Ce dirigeant semble confondre le peuple palestinien avec les ONG financées par l’étranger qui fleurissent à Ramallah. Un autre dirigeant de BDS vient d’affirmer: «Concernant Gaza, nous considérons que le seul espoir restant passe par un boycott d’Israël, et son isolation complète, jusqu’à ce que les résidents des camps de réfugiés gazaouis, qui forment la majorité de la population sur ce territoire, puissent retourner dans leurs villes et villages dont ils ont été chassés en 1948.»
Il est étrange d’entendre ces gens qui d’une part, fustigent les colons-impérialo-racistes-blancs-libéraux-sionistes occidentaux pour leur négligence envers la volonté palestinienne, alors que d’autre part, ils souhaitent voir la Palestine libérée, non pas par son peuple, mais par des pressions exercées depuis l’étranger. Ces affirmations, et les nombreuses autres semblables, provenant de la direction du BDS, s’apparentent à des illusions, mâtinées de délire et entrelacées de mégalomanie. Le révolutionnaire africain Amilcar Cabral a un jour affirmé : «Ne pas mentir, ne pas revendiquer les victoires faciles.» A mon avis, ce sage conseil devrait être mieux médité.
NM : De nombreux étudiants britanniques ont exprimé un soutien massif au mouvement BDS. Que pensez-vous du soutien apporté par les étudiants à ce mouvement ?
NGF : Je peux comprendre ces jeunes gens qui soutiennent la charte de BDS et la solution de l’État unique. Dans ma jeunesse, j’aurais agi comme eux. Cela vient en partie de l’idéalisme inhérent à une jeune personne. Un État séculier unique, sous lequel chacun puisse bénéficier des mêmes droits, est bien plus attirant à une sensibilité éclairée, que deux États basés sur des critères ethniques. Mais il s’agit aussi d’une posture qui se veut radicale : on cherche plus de pureté, à être plus en avant que tous les autres, quand une solution à deux États semble triste et pleine de compromis. L’âge n’a pas éteint mon radicalisme, mais mon investissement en politique se concentre moins sur moi-même, sur mon ego et mon souhait de présenter une pose radicale à la face du monde. Je cherche bien plus à trouver une solution efficace.
J’en suis arrivé à reconnaître la sagesse de l’approche qu’avait Gandhi de la politique. Sa doctrine exprimait l’idée que la politique ne devait pas chercher à changer l’opinion publique, mais devait tenter d’amener les gens à agir sur ce qu’ils estimaient mauvais. Chacun sait que le système a déjà une multitude de défauts inacceptables. Le problème vient du fait qu’il est rare que les gens agissent à ce propos. L’un des dangers qui menacent les politiques radicales est leur aspiration à aller au-delà du sentiment populaire. Vous définissez vos propres conceptions du bien et du mal, et vous tentez de vous distinguer d’un public ignorant. Au final, vous aurez une posture politique des plus impressionnantes, mais au détriment de son efficacité.
NM : Pourriez-vous nous parler de vos parents et de l’influence qu’ils ont eu sur vous ?
NGF : Cette année marque le vingtième anniversaire de leur mort. Mon père est mort en janvier 1995, et ma mère en octobre de la même année. J’aimerais pouvoir poser une plaque en leur mémoire dans un hôpital de Gaza (ce que je tente d’accomplir avec Byline.com). Bien sûr, il me faut considérer la possibilité qu’Israël, dans son délire abyssal, puisse bombarder l’hôpital pour détruire cette plaque. Cela s’appelle «apprendre les leçons de l’Holocauste».
Tout ce que j’ai pu accomplir dans ma vie l’a été en rétribution des souffrances que leur a causé la Seconde Guerre mondiale, et qui les ont marqués pour le restant de leur vie. J’ai eu l’occasion de dîner un soir avec deux honnêtes vétérans de la Seconde Guerre mondiale et leurs femmes, nées allemandes. La conversation en est venu à leur mariage avec ces deux vétérans, en Allemagne, après la guerre. Elles avaient toutes deux participé aux Jeunesses hitlériennes. Cela ne me dérangeait pas fondamentalement. De nombreuses personnes avaient rejoint l’organisation pour gravir les échelons de la société nazie, tout comme ils auraient rejoint les boys scouts. Ils avaient dû faire des compromis moraux, tout comme le reste d’entre nous. Mais à un moment, l’une de ces femmes s’est exclamée, avec comme un gémissement dans la voix: «Combien de temps les allemands auront-ils à vivre avec cet Holocauste?» Ma première pensée a été: «Mes parents ont dû vivre avec jusqu’à la fin de leur vie, alors peut-être est-il juste que les Allemands de votre génération (elle devait avoir 70 ans) vivent aussi cela le reste de leur vie.»
Au moins, faites briller le soleil, je vous en prie, rien qu’un rayon de soleil.
NM : Seriez-vous capable de nous parler d’un moment qui vous a profondément marqué ?
NGF : Il n’est pas exagéré d’affirmer que l’Holocauste nazi était partout présent chez mes parents, depuis ce nombre bleu tatoué sur le bras de mon père, en passant par les images de la famille de ma mère, accrochées au mur du salon, la vision de ma mère scotchée à l’écran de télévision durant le jugement d’Eichmann, et jusqu’à sa réaction hystérique en voyant des vidéos du Viêt Nam au journal du soir. A chaque fois que je coupe une échalote, je vais jusqu’à la racine, me rappelant la valeur que pouvait prendre le moindre légume dans la soupe qui était distribuée dans les camps de concentrations.
Hier, je faisais visiter le Washington Square à un ami néerlandais. Je lui parlais de tous ces hippies qui venaient s’y retrouver dans les années 1960. Puis je lui ai montré une vidéo de Hair, le spectacle de Broadway. La chanson la plus connue de la pièce était Let the Sun Shine (Laissez briller le soleil), qui était filmée au Washington Square dans la vidéo. Pourquoi est-ce que je vous parle de cela? Parce que lorsque ma mère entendait cette chanson, qui parle de hippies adorant le soleil, à chaque fois elle s’effondrait en larmes. Elle se revoyait déambuler dans les rues du ghetto de Varsovie, et prier «Au moins, faites briller le soleil, je vous en prie, rien qu’un rayon de soleil».
Et moi, qui ai atteint l’âge mûr de 61 ans, lorsque j’entends cette chanson, je ne pense pas aux hippies. Mais je pense à ma mère, parcourant le ghetto de Varsovie, dévastée, ravagée, sa famille exterminée, toute en os et sans muscles, contemplant les cadavres qui couvraient les rues, et elle qui ne pouvait que supplier: «Faites briller le soleil.»
NM : Le soleil est-il jamais revenu dans sa vie ?
NGF : Non. Elle a porté ce fardeau jusqu’à son dernier jour. Elle n’a jamais pu admettre l’idée que sa famille avait été exterminée. Ses deux sœurs, son frère, sa mère, son père. Elle n’a jamais pu l’accepter. En fait, même si elle l’avait pu, elle n’aurait pas laissé s’apaiser sa peine, elle ne voulait pas laisser leur disparition et continuer son chemin. Même arrivée à un âge où ses parents seraient morts de morts naturelle (elle est morte à 74 ans, mon père à 75), elle continuait à porter leur mémoire à chaque minute de chaque jour, et ce jusqu’à la fin de sa vie.
NM : Cela met-il nos problèmes en perspective ?
NGF : J’ai mon ego, j’ai mes bassesses, je souffre de chacune des faiblesses humaines, de nos afflictions narcissiques. Je suis bien souvent incapable de voir le choses de haut. Nihil humani a me alienum put, rien d’humain ne m’est étranger, était la maxime favorite de Marx. Nous sommes ainsi faits ; vous ne pouvez supprimer l’ego pour vous libérer et voir les choses de haut.
Traduit par Etienne, relu par jj et Diane pour le Saker Francophone.
La vidéo (en anglais) ci-dessous vous en dit plus sur la campagne de financement lancée par Norman Finkelstein sur Byline, pour soutenir l’hôpital Al-Awda de Gaza
La France et la résurgence de l’indéracinable parti de l’étranger : la tradition collaborationniste française*
*NDLR: Ce n’est pas l’éternel entarté qui nous contredira : L’idéologie française (B-H Lévy)
Par Sayed Hasan – Le 12 août 2015–- Source sayed7asan
Le 13 août 2015, Paris-plages deviendra, pour 12 heures, Tel-Aviv-sur-Seine. Une idée brillante et, n’en doutons pas, très courageuse de la maire socialiste de Paris, Anne Hidalgo. Elle vient à point nommé pour commémorer le massacre israélien à Gaza durant l’été 2014, dans lequel plus de 2200 Palestiniens ont péri, dont 551 enfants, et alors même que les cendres du bébé palestinien Ali Dawabcheh, brûlé vif par des colons israéliens, sont encore fumantes. Il est vrai que cette fois-ci, ce n’était pas du phosphore blanc, mais de simples cocktails Molotov, et qu’ils ont causé à peine deux victimes : il faut décidément être aveugle pour ne pas voir qu’Israël est réellement engagé dans une saine voie de modération de sa politique palestinienne.
Par Alexander Mercouris – Le 29 juillet 2015 – Source Russia Insider
La Révolution Maidan n’est finalement pas une question de démocratie ou de droits humains, ni d’intégration européenne de l’Ukraine. Comme l’article ci-joint le montre, elle est plutôt l’expression de la haine paranoïaque de certains Ukrainiens envers la Russie.