Le mythe du libre-échange mondial


Pepe Escobar

Pepe Escobar

Par Pepe Escobar – 16 juin 2015 – Source : Sputnik News

L’élément clé du TTIP, c’est le Mécanisme de règlement des différends entre les investisseurs et les États qui, pour l’essentiel, donne aux grandes sociétés toute la latitude requise pour poursuivre les gouvernements en invoquant un défaut de mise en place des mesures appropriées lorsque les politiques ou la législation de l’État nuisent à leurs profits. Mais est-ce que cela s’applique exclusivement aux questions commerciales ?

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L’Europe vassale des US : panorama et perspectives

Bryan MacDonald

Par Bryan MacDonald – le 17 juin 2015 – Source Russia Today.

En suivant servilement la politique de Washington face à la Russie, les dirigeants européens sont surtout en train de planter des aiguilles dans des poupées vaudous à leur propre effigie. Je veux dire que leurs actes sont aussi inutiles que ridicules.

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Georges Soros génial !
La corruption dans tous ses états, du grand art


F.William Engdhal

F.William Engdhal

Par F. William Engdahl – Le 14 juin 2015 – Source neo.org

Le public a rarement l’occasion de pouvoir jeter un œil dans le monde corrompu des oligarques occidentaux et les manipulations éhontées qu’ils fomentent pour accroître encore leur fortune aux dépens des biens publics. L’occasion nous vient ici d’avoir accès à la correspondance du milliardaire né hongrois, spéculateur maintenant naturalisé américain, George Soros.

Georges Soros

Le groupe de hacker CyberBerkut a mis en ligne des lettres présumées écrites par Soros qui ne le montrent pas seulement comme le marionnettiste en chef du régime pro-américain de Kiev. Elles montrent aussi les machinations en accord avec le gouvernement américain et des responsables de l’Union européenne dans une combine qui, si elle réussit, pourra lui faire gagner des milliards grâce au pillage du patrimoine ukrainien. Tout cela, bien sûr, aux dépens des citoyens ukrainiens et des contribuables de l’UE.

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La Chine va injecter des milliards de dollars dans des fonds de l’UE


Le 14 juin 2015 – Source thebricspost

Chinese Premier Li Keqiang (R) and German Chancellor Angela Merkel meet with delegates attending the first meeting of Sino-German Advisory Committee on Economy in Beijing, capital of China, July 7, 2014 [Xinhua]

Le premier ministre chinois Li Keqiang (d.) et la chancelière allemande Angela Merkel se réunissent avec les délégués participant à la première réunion du Comité consultatif sino-germanique organisée à Beijing, capitale de la Chine, 7 juillet 2014 [Xinhua]


«Le gouvernement chinois va injecter des milliards de dollars dans un projet beaucoup vanté par l’UE qui veut lancer un plan d’investissement de $315 Mds pour réveiller une économie en difficulté», a déclaré un communiqué de Reuters dimanche.

Le nouveau Fonds européen pour les investissements stratégiques (EFSI) servira à financer des projets d’infrastructure dans des domaines tels que les réseaux de transmissions de données à large bande, l’énergie, le transport, l’éducation, la recherche et l’innovation.

L’investissement sera annoncé par le premier ministre chinois Li Keqiang  lors du sommet Chine-UE à Bruxelles le 29 juin.

Le plan de Pékin d’investir dans des fonds de l’UE fait suite à la décision de plusieurs pays européens de participer à la banque asiatique d’investissement dans les infrastructures (AIIB), dirigée par la Chine.

«La Chine a annoncé qu’elle allait cofinancer des investissements stratégiques d’intérêt commun dans toute l’UE, le montant n’a quant à lui pas été annoncé», a rapporté l’agence Reuters en citant le projet de déclaration finale.

Le fonds de l’UE «sera une opportunité pour la Chine d’investir dans l’UE, en particulier dans le secteur des infrastructures et dans l’innovation» a ajouté le projet de communiqué.

Le fonds proposé est conçu pour être la pierre angulaire de l’ordre du jour de la Commission européenne pour faire repartir l’économie moribonde de l’UE, qui n’a pas réussi à se redresser efficacement depuis la grande récession, et se trouve plongée dans le chômage de masse, risquant ainsi de sombrer dans la déflation.

Pendant ce temps, de plus en plus de pays européens sont tentés de suivre la voie de la Hongrie en s’engageant officiellement dans l’ambitieux projet chinois de Route de la soie, un programme de plusieurs milliards de dollars pour mettre en place les infrastructures permettant de commercer le long des voies terrestres et maritimes de l’antique route de la soie, qui s’étendait à travers l’Asie et l’Europe.

Traduit par Freddy, relu par jj pour le Saker Francophone

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Guerre des chefs : Schloss Elmau contre Ufa


Par Andrew Korybko – Le 8 juin 2015 – Source thesaker.is

Les grands médias adulent les leaders du G7 et leur dernière rencontre en date, se plaisant à rappeler que, comme prévu, la Russie en a été exclue. Ils ont décidé d’en rajouter sur le côté cool de l’événement en soulignant la décontraction de tous les leaders, donnant l’impression que Poutine est passé à côté d’une soirée feu de camp sympa avec ses copains plutôt que de l’une des réunions pro-Occident les plus importantes de l’année. Bien que certains regrettent l’absence de la Russie, ils oublient les sommets relativement plus importants que cette dernière accueillera le mois prochain. Les sommets des BRICS et de l’OCS, qui se succéderont début juillet à Oufa, dans l’Oural, rassembleront les acteurs et les agitateurs les plus importants du monde actuel. Par rapport au G7, on voit clairement que les sommets du monde multipolaire et du monde unipolaire se retrouvent dos à dos, et que, in fine, la Russie a plus à gagner en se rangeant du côté des premiers plutôt que du second.

Le sommet du G7 (Otan + Japon)

Le sommet organisé en Allemagne serait plutôt à considérer comme un rassemblement des alliés les plus importants de l’Otan. Pour l’essentiel, il fonctionne comme un club de discussion transatlantique déguisé en forum économique. La présence du Japon tient au fait qu’il représente le bastion géopolitique de l’Occident en Orient. Au-delà des commentaires rituels sur le dérèglement climatique, cette rencontre a vu ses membres condamner unanimement la supposée agression russe en Ukraine et plaider en faveur du maintien des sanctions malgré le retour de bâton économique qu’elles impliquent pour certains d’entre eux. Cette année, on y a également vu une poignée de pays non européens coopératifs, les dirigeants de l’Ethiopie, de l’Afrique du Sud, de l’Irak, de la Tunisie, du Nigeria et du Sénégal étant accourus à Schloss Elnau pour parler politique avec les grands. Chacun d’eux recherche une assistance quelconque de l’Occident, par exemple dans la lutte contre le terrorisme, leur participation devant alors être considérée comme révélatrice des lieux où le monde unipolaire s’apprête à frapper.

Certains de ces États non européens sont de purs vassaux, comme l’Irak, la Tunisie et le Sénégal, tandis que les autres (Éthiopie, Afrique du Sud, Algérie et Nigeria) oscillent entre les mondes unipolaire et multipolaire, leurs dirigeants s’efforçant de trouver le bon équilibre (ou le plus profitable). Il est évident que plus ils se rapprocheront de l’Occident, plus ils lui seront inféodés sur le plan stratégique. L’Algérie, par exemple, constitue toutefois un cas à part, car il lui est extrêmement difficile de manœuvrer hors de son confinement géopolitique. L’Afrique du Sud, par contre, n’a aucune bonne excuse à proposer pour sa présence au G7 sans son allié BRICS, la Russie, hormis le fait que Zuma tient à s’afficher aux côtés des grands manitous occidentaux. Quoi qu’il en soit, dès qu’on prend un peu de recul, on voit clairement que l’Occident compte utiliser ces États comme têtes de pont dans leurs régions d’Afrique respectives (l’Irak jouant déjà ce rôle pour l’ensemble du Moyen-Orient).

Les sommets des BRICS et de OCS (multipolaires)

Le sommet multipolaire d’Oufa est bien différent de celui du G7 au château d’Elmau. Pour commencer, les BRICS réunissent les forces géopolitiques parmi les plus notables d’Eurasie, d’Afrique et d’Amérique du Sud, chacune d’elles ayant un intérêt dans la construction d’un monde multipolaire. En ce qui concerne l’Afrique du Sud, comme nous l’avons vu, Zuma veut jouer à la politique avec les marionnettistes occidentaux alors que, en même temps, l’establishment de son pays est lancé sur une trajectoire multipolaire. Cette identité politique bipolaire fait de l’Afrique du Sud le plus faible et le plus instable des BRICS. Il est probable qu’il n’y a été intégré que pour servir de porte d’entrée économique au reste du continent, en commençant par les pays relativement stables du cône méridional. Cela dit, et quoi qu’il en soit de l’Afrique du Sud, il reste acquis que les BRICS poursuivront la mise en place de leur architecture financière non occidentale en renforçant la Nouvelle banque de développement (souvent appelée Banque des BRICS) dont la naissance a été annoncée il y a peu. Des déclarations fermes de rejet des sanctions unilatérales faisant clairement référence à la politique occidentale à l’encontre de la Russie sont probablement à l’ordre du jour, tout comme pourraient l’être quelques projets bilatéraux ou multilatéraux inattendus entre les membres du groupe.

La seconde partie de l’assemblée multipolaire, le sommet de l’OCS, s’annonce encore plus passionnante que celui des BRICS. Les principaux membres du groupe seront rejoints par tous les observateurs et partenaires du dialogue, la majorité de l’Eurasie étant représentée sous une forme ou une autre. On rapporte que l’Inde et le Pakistan seront finalement admis en tant que membres à part entière, tandis que la Russie a laissé entendre que la même chose pourra avoir lieu avec l’Iran si les sanctions internationales sont levées d’ici le 30 juin, juste avant le début de l’événement. De plus, le secrétaire général du groupe, Dimitri Mezentsev, a annoncé début février que la Syrie, l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Biélorussie et le Bangladesh demanderaient le statut d’observateur, tandis que les Maldives et le Népal ont demandé à participer au dialogue. Tout cela signifie que l’OCS est en passe de rassembler la plus grande partie de l’Asie en vue de constituer un jour un concert des grandes puissances dans les questions de sécurité de l’Eurasie. Les synergies envisagées entre des membres officiels et officieux aussi divers présentent certainement des difficultés, mais ce qu’il faut retenir, c’est que l’OCS s’emploiera à les faciliter par la mise en place d’un mécanisme de coopération plus étroite.

Cui Bono ? À qui profite le crime ?

Ayant vu ce qu’il en est des sommets du G7 et des BRICS/OCS, il convient de déterminer lequel des deux est le plus avantageux pour la Russie, et lequel lui est en fait stratégiquement préjudiciable.

G7 (OTAN + Japon) :

Le G8, comme on l’appelait lorsque Moscou en faisait partie, visait largement à rassurer l’Occident (Otan + Japon) et la Russie quant à leur sentiment réciproque d’insécurité. Les premiers avaient l’impression que les dirigeants russes pouvaient être influencés par la position pro-occidentale du groupe et que, si on leur laissait suffisamment de temps (comme le soutiennent toujours les atlantistes), ils finiraient par intégrer la communauté des nations occidentales en tant que partenaire junior. De son côté, la Russie avait une perception entièrement différente du groupe. Elle n’y voyait pas un abandon de ses intérêts ou de son identité, mais plutôt une reconnaissance triomphante de sa puissance et de son influence. Le fait que le chef de la Fédération russe était assis côte à côte avec ses pairs occidentaux dans les discussions autour des grands thèmes de l’année était une puissante marque de prestige. Cela montrait que, en dépit de ses objections permanentes concernant la démocratie, l’Occident traitait in fine la Russie sur un pied d’égalité.

Malheureusement, il est apparu que cette perception du G8 par la Russie était erronée, et que celle des pays occidentaux était plus proche de la réalité (également parce qu’ils représentent les 7/8 de ses membres). Cette pensée collective unipolaire a conduit à l’éviction de la Russie du G8 au début de la Nouvelle guerre froide, le groupe ayant annoncé clairement la couleur en se présentant comme une réunion unipolaire. Il n’a peut-être pas exercé explicitement cette fonction quand la Russie en faisait partie (1988-2014), mais c’est uniquement parce qu’il rongeait son frein à dessein en vue d’amener la Russie à se rapprocher (en particulier dans les dernières années Eltsine, lorsque la Russie s’est jointe à lui). Désormais, il n’a plus besoin de cette main de fer dans un gant de velours. Il peut se lâcher, d’où tout le battage agressif autour de la Russie et des sanctions. La Russie a semblé un peu déçue d’être évincée par le G8 l’année dernière, mais, rétrospectivement, c’est peut-être un mal pour un bien comme nous allons le voir.

BRICS/OCS (réunion multipolaire)

La Russie a mal calculé les avantages du G8, probablement parce qu’elle pensait pouvoir renforcer son influence en traitant d’égal à égal avec ses membres. Seulement, les deux seuls à être égaux dans le groupe étaient la Russie et les États-Unis, tous les autres étant inféodés à Washington et non des membres indépendants. La plus grande erreur de Moscou a donc été de penser que ces derniers poursuivraient logiquement leurs intérêts économiques et n’oseraient pas sanctionner leur partenaire ; la mise en œuvre des sanctions l’a démontré clairement. Ce rappel des faits en introduction de la section relative à l’assemblée multipolaire vise à montrer que celle-ci représente l’exact opposé des BRICS et de l’OCS. Dans ces organisations, tous les membres sont considérés comme égaux, aucun d’eux ne pouvant être décrit par quiconque comme une marionnette. La raison en est qu’ils ont tous suivi une trajectoire multipolaire au cours des deux dernières décennies, qui les a conduits à trouver un équilibre avec leurs principaux partenaires, comme dans le cas des pays d’Asie centrale vis-à-vis de la Russie et de la Chine. L’Inde, le Pakistan et l’Iran font de même, mais de manière plus affirmée que les pays d’Asie Centrale, en partie du fait de leur population plus nombreuses, d’une économie plus puissante et d’une plus grande liberté de mouvement géopolitique.

Rien de tout cela n’enlève cependant quoi que ce soit au fait que tous les membres des BRICS et de l’OCS sont des États indépendants ayant un programme de coopération commun. Les membres des BRICS s’attachent à instaurer un modèle économique plus équitable, d’où leurs initiatives de mise en place d’une architecture financière non occidentale et de renforcement de la coopération entre eux. Les membres de l’OCS, quant à eux, se caractérisent par leur opposition partagée aux fléaux que sont le terrorisme, le séparatisme et l’extrémisme. Ils sont très conscients des menaces existentielles que fait peser chacune de ces armes asymétriques. Si l’unité de vues entre l’Inde et le Pakistan laisse à désirer, il n’en demeure pas moins que tous deux souhaitent intégrer la même organisation régionale. Ils montrent ainsi que leur rivalité a ses limites et suscitent l’espoir que l’OCS pourra tempérer leur antagonisme mutuel. Après tout, tout le monde sait en Eurasie que les États-Unis profitent de tous les conflits et font tout pour y entretenir la division, et qu’ils ne répugnent pas à recourir au terrorisme, au séparatisme ou à l’extrémisme. Plus l’Eurasie est divisée, plus il est facile pour les États-Unis d’atteindre leurs objectifs stratégiques ; à l’inverse, plus elle est unie au travers de diverses structures (telles que l’OCS), mieux elle est armée pour résister et repousser toute ingérence extérieure superflue.

Conclusion

L’éviction de la Russie par le G7 a eu surtout pour conséquence, imprévue, le réveil de Moscou, qui rêvait jusque-là d’être acceptée par l’Occident et a brusquement pris conscience de sa situation cauchemardesque. En effet, l’Occident n’a jamais été un vrai partenaire, et tous ses gestes amicaux et déclarations de soutien ne visaient qu’au désarmement stratégique des décideurs russes. En réponse à la douche froide de la rhétorique anti-russe et aux agissements actuels de l’Occident (prétendument en bons termes avec Moscou il y a seulement quelques années), la Russie s’est tournée vers l’est et a déclaré fermement son intention de construire un monde multipolaire. Bien qu’annoncée de longue date, cette initiative n’a jamais été autant prise au sérieux qu’aujourd’hui. L’Occident a fait la preuve qu’il ne pourra jamais cohabiter pacifiquement avec la Russie tant que le caractère unipolaire restera à l’ordre du jour, et que la seule possibilité pour la Russie d’être traitée sur un pied d’égalité (sans même parler de sa survie sous sa forme politique et territoriale actuelle) consistera à se tourner résolument et définitivement vers l’Eurasie.

En conséquence, la Russie et la Chine se sont attachées à simplifier leur partenariat stratégique pour en faire le moteur de l’intégration pan-eurasienne (qui a déjà fait ses preuves dans le passé, mais pas à une échelle aussi ambitieuse) et instaurer la vision multipolaire qu’elles partagent. Dans ce contexte, les réunions multipolaires des BRICS et de l’OCS à Oufa peuvent être considérées comme la prochaine étape majeure de cette initiative. Il est d’ailleurs hautement symbolique qu’elles soient accueillies cette année par la Russie (et en plus, consécutivement). Rien d’autre ne saurait montrer à l’Occident avec plus d’éclat que la Russie le rejette autant qu’il rejette lui-même la Russie, aussi surprenant que cela puisse lui paraître de prime abord. Moscou indique que toute coopération entre la Russie et l’Occident devra dès lors obéir à ses conditions multipolaires de respect et d’égalité géopolitiques authentiques, et que l’époque où la Russie se précipitait dans les structures mises en place par l’Occident est depuis longtemps révolue. À la place de reliques unipolaires telles que le G7, des institutions multipolaires émergentes telles que les BRICS et l’OCS sont devenues les acteurs les plus dynamiques des événements mondiaux. Les intérêts souverains de la Russie sont mieux servis et protégés par l’alternative multipolaire que l’Occident lui a imposée involontairement.

Andrew Korybko

Traduit par Gilles Chertier, relu par jj  pour le Saker Francophone

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Obama et Merkel : déclaration étonnement molle sur la Russie

Le 7 juin 2015 – Source Deutsche Wirtschafts Nachrichten

Le président Barack Obama et Angela Merkel ont décidé avant le sommet du G7 d’avoir une position moins exigeante envers la Russie. Washington à besoin de la Russie dans plusieurs conflits globaux. L’UE est massivement sous pression, surtout à cause des réfugiés.

Angela Merkel et Barack Obama ne peuvent, malgré toute la rhétorique, ne peuvent pas faire de la politique globale sans la Russie.

Le président des États-Unis Barack Obama et la chancelière Angela Merkel ont donné le ton envers la Russie avant le sommet du G7. Il est relativement modéré. La Maison Blanche à indiqué : «Les deux dirigeants ont discuté de la crise persistante en Ukraine et ont décidé que les sanctions doivent être explicitement liées à l’implémentation complète des accords de Minsk par la Russie et le respect par celle-ci de la souveraineté de l’Ukraine.»

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Le rêve américain : du G1 + supplétifs, à Bilderberg

«...WikiLeaks a publié, au moment opportun, l’annexe sur les soins de santé de la version provisoire et secrète du chapitre du PTP portant sur la Transparence, de pair avec la position de négociation de chaque pays. Pas étonnant que la version préliminaire soit secrète. Et l’accord n’a rien de transparent; il s’agit carrément d’un braquage flagrant des autorités sanitaires nationales par les grandes sociétés pharmaceutiques.

Pour résumer, ces trois mégas accords (PTP, TTIP et ACS) représentent le modèle absolu de ce qu’on pourrait poliment décrire comme une gouvernance d’entreprise mondiale, qui fait saliver Bilderberg. Les perdants : les États-nations et le concept même de démocratie occidentale. Les gagnants: les méga-multinationales..."
Pepe Escobar

Pepe Escobar

Par Pepe Escobar – 11 juin 2015 – Source Russia Today

Quel est le lien entre le sommet du G7 en Allemagne, la visite du président Poutine en Italie, la réunion du groupe Bilderberg en Autriche et les négociations en cours à Washington à propos de l’accord de libre-échange TTIP [Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement] USA-UE ?

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Europe : les emplois fictifs et le contrôle social


CounterPunch

Par Bill Blunbden – le 7 juin 2015 – Source: Counterpunch

Alors que l’économie en Europe périclite, le New York Times rapporte que les millions de chômeurs de la zone euro se consolent en participant à une curieuse économie parallèle peuplée de milliers d’entreprises fictives qu’on appelle des entreprises d’entraînement. Cet univers alternatif ne produit pas de biens ni de services concrets, mais il offre aux personnes des postes non rémunérés qui leur donnent un cadre, une structure et un sentiment d’intégration. Le fait de participer à ce marché du travail bidon apporte, certes, un certain soulagement à un niveau superficiel, mais quand on sait où regarder, on voit clairement qu’il s’agit de contrôle social.

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Petite mise à jour sur la (très dangereuse) situation en Ukraine


The Saker

The Saker

Par le Saker original – Le 5 juin 2015 – Source : thesaker.is

Chers amis,

Tout d’abord, je voulais juste vous faire savoir que je suis en train de travailler sur deux entretiens dont je pense que vous les trouverez intéressants : l’un avec Michael Hudson et l’autre avec un expert sur la Syrie, qui préfère rester anonyme. Les deux devraient être passionnants. Merci de me donner quelques jours de plus pour vous les communiquer.

Maintenant, à propos de l’Ukraine. S’il vous plait, lisez ce rapport
 et regardez celui-ci.

En définitive, cette situation est très tendue.

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L’Ukraine : Un État béni qui a misérablement échoué [1/2]


Par Rostislav Ishchenko – Le 22 mai 2015 – Source vineyardsaker.de

Les élites ukrainiennes qui, lors du partage de l’héritage soviétique ont reçu tout ce qui était nécessaire pour construire un État prospère, ont par leurs propres agissements amené le pays au bord du gouffre.

Des conditions de départ idéales

La politique et l’histoire ne sont pas prédéterminées. Le projet Ukraine, qui vit actuellement ses derniers jours, n’était pas condamné à la ruine dès le départ.

Le nouveau pays soudainement apparu était la dixième économie du monde. Sur son territoire se trouvaient 40 % de l’industrie soviétique et 60 % de l’industrie lourde. L’agriculture bien développée pouvait non seulement suffire pour répondre aux besoins locaux, mais pouvait même permettre d‘exporter des produits agricoles. Le réseau de voies ferrées et d’autoroutes, de vastes pipelines et plusieurs ports en mer chaude répondaient aux besoins commerciaux lointains et offraient en sus un potentiel quasi illimité pour le transit. La population de l’Ukraine était de 52 millions d’habitants et la dynamique démographique en 1991-1992 restait positive. Le pays disposait d‘une main-d’œuvre instruite et était un lieu de haut niveau de qualification scientifique. Tous ces biens étaient protégés par la force d‘un demi-million d‘hommes faisant partie de l’armée soviétique – la plus grande de l’URSS – équipée des armes les plus avancées, puisqu’elle était le lieu prévu d‘une possible offensive militaire majeure.

Au moment de son indépendance, l’Ukraine avait bien plus que le nécessaire pour construire un État prospère. En outre, la situation géopolitique était en sa faveur. Le pays n‘avait pas d’ennemis puissants, pas même de concurrents sérieux . Au contraire, en 1992 les dirigeants ukrainiens étaient heureux d’annoncer l’absence de menaces extérieures. Les relations avec tous les voisins étaient cordiales et les principaux acteurs dans le monde souhaitaient eux-mêmes de bonnes relations avec Kiev. Rappelons-nous que lorsque le format G7+ est né en 1994-1997, étendant les contacts à Moscou (G7 + Russie) et Kiev (G7 + Ukraine). Cependant le format, avec la Russie seule, s‘est développé au fil du temps pour former le G8 à part entière, tandis que l’Ukraine a disparu dans l’espace et le temps ; pourtant, en 1990, ces formations étaient représentées ensemble.

Il y avait un petit problème : l’Ukraine n’avait pas assez d’énergie pour faire fonctionner son industrie. Pas dans tous les secteurs, mais au moins pour le pétrole et le gaz. Malgré un niveau relativement élevé de la production nationale – de 4 à 5 millions de tonnes de pétrole (autant que la Roumanie) et 20 milliards de mètres cubes de gaz (plus que l‘Azerbaïdjan) – l’Ukraine couvrait seulement un cinquième de ses besoins environ, en pétrole, et un quart de son gaz. Il existait une potentialité théorique d’augmenter la production nationale, mais elle a été négligée. De même, les options permettant de réduire la dépendance énergétique de l’industrie ont été négligées.

La Russie a livré, dans tous les cas, les quantités de pétrole et de gaz traditionnellement nécessaires. Étant donné que 60 % à 80 % des exportations énergétiques russes passaient, dans les années 1990, par des pipelines ukrainiens, il n’a pas été difficile de se mettre d’accord sur les termes d’un échange avantageux pour les deux partenaires. C’est ce que Koutchma a fait quand il a signé en 2002 un accord de dix ans avec Gazprom sur des ventes de gaz à $50 les 1000 mètres cubes. Le contrat devait être valable jusqu’en 2012 et procurer d‘énormes avantages concurrentiels à l’industrie ukrainienne sur le marché mondial qui (compte tenu de l’augmentation rapide des prix du pétrole et du gaz) devaient augmenter d’année en année.

Le considérable potentiel géopolitique et économique de l’Ukraine reposait pareillement sur la dépendance de son commerce extérieur, et l’efficacité de son industrie, aux ressources énergétiques du marché et des partenaires russes. Les années 1993-2003 ont vu arriver la crise politique de la Russie, qui a amené le pays au bord de la guerre civile en déclenchant une division à long terme de la société, deux guerres en Tchétchénie et une faillite nationale en 1998. La Russie, totalement prise dans ses problèmes intérieurs, aggravés par l’augmentation des conflits géopolitiques avec ses partenaires euro-atlantiques, avait besoin d‘une loyauté politique minimum de la part de Kiev (la Russie ne réclamait pas plus que la neutralité) et était prête à le payer par des concessions économiques importantes (et elle l’a payé).

Aujourd’hui, quand à Moscou les gens parlent  de $35 Mds de dollars qui ont été investis dans l’économie ukrainienne, cela ne prend en compte que l’argent qui peut être décompté. Cela inclut autant les largesses sur les prix du pétrole et du gaz que les crédits à des conditions favorables ainsi que les investissements dans des projets communs. Les pertes que la Russie a subies en raison des clauses à long terme de partenariat préférentiel accordé à l‘Ukraine et d’autres formes indirectes de soutien de l’économie ukrainienne ne peuvent même pas être calculées théoriquement (des experts parlent d’un total de $200 à $300 Mds de dollars, mais c‘est une évaluation).

Contre la tendance

Comment se fait-il alors que l’Ukraine, en dépit de toutes ces bénédictions, ait atteint le point où une fin terrible semble meilleure qu’une horreur sans fin ?

Nous avons beaucoup parlé de la vénalité des élites qui ont littéralement pillé le pays. Cependant, cela soulève une question légitime : pourquoi 52 millions de personnes ont-elles porté au pouvoir avec insistance et à plusieurs reprises précisément ce genre de personnes ? Pourquoi, malgré toutes les différences de styles entre les dirigeants des élites russes, biélorusses et kazakhs, l’expression intérêts nationaux a-t-elle un sens pour ces derniers, alors que pour les dirigeants ukrainiens, c‘est – au mieux – totalement inintelligible ? Dans le pire des cas, la référence aux intérêts de l’État en Ukraine n‘est rien d‘autre qu‘une façon de tromper la population. Comment des millions de personnes ont-elles pu accepter avec enthousiasme d’être trompées, volées et dépouillées d’un avenir, au profit d‘un symbole parfaitement étranger et vide de sens – un symbole qui n’a rien de commun avec la civilisation soviétique dont ces gens sont issus, ni avec la civilisation européenne à laquelle ils étaient supposés vouloir se joindre, ni même, plus important encore, avec la vie réelle ?

À mon avis, la réponse à ces questions réside dans une différence essentielle et tout à fait évidente entre les principes de construction de l’État, qui ont été acceptés par l’élite ukrainienne d‘une part et par les élites russe, biélorusse et kazakh d‘autre part. Dans ces trois derniers cas, des citoyennetés ont été construites. Au Bélarus, les partis nationalistes mènent une existence misérable à demi-marginalisée. Rien que ces trois ou quatre dernières années, Minsk a officiellement commencé à promouvoir un nationalisme d’État loyal, qui d’une part se détache du nationalisme de l’opposition et, d’autre part, doit fournir aux dirigeants du Bélarus une base à opposer à l’écrasante domination russe dans l’Union économique eurasienne.

Au Kazakhstan, le nationalisme kazakh est relativement fort, mais pas structurellement défini (en tant que parti politique) et il s‘exprime principalement dans la vie quotidienne et au niveau de groupements bureaucratiques. Néanmoins, il faut noter les déclarations de Nursultan Nazarbayev qui, dès les premiers jours de l’indépendance du Kazakhstan, a considéré le nationalisme kazakh comme la plus grande menace pour la stabilité, l’intégrité territoriale et même l’existence du pays. Le concept d’un État kazakh – par opposition à une kazakhitude – a été introduit. Les nationalistes ont dû se contenter de la domination d’un personnel national kazakh dans la politique et les affaires. Cependant, cette domination n’a jamais été absolue et les droits des autres nationalités, tout d’abord les Russes (russophones de culture russe) ont été protégés par la loi. En ce qui concerne la Russie, les nationalistes continuent à se plaindre que le discours impérial présent dans la politique russe n’a jamais été remplacé par le discours national. En d’autres termes, la Russie n’a pas développé un État national de Russes de souche mais comme l’État des citoyens russes et, ces dernières années, du monde russe.

Par conséquent, Moscou, Minsk et Astana ont atteint la stabilité interne, à travers le compromis entre nations, couplé avec le rejet de la politique nationaliste. La politique nationale adéquate, basée sur des compromis, a permis une politique étrangère constructive. Malgré tous les problèmes, la Russie, la Biélorussie et le Kazakhstan s‘emploient depuis le milieu des années 1990 à réintégrer l’espace post-soviétique, sur la base des nouvelles réalités politiques, économiques et idéologiques.

Depuis le premier jour de son existence, l’État ukrainien a été établi en tant qu’État de la nation titulaire. Priorité a été donnée au développement national et les mots attribués au comte de Cavour – «Nous avons créé l’Italie, nous devons maintenant créer les Italiens.» – ont été repris par les nationalistes ukrainiens sous la forme: «Nous avons créé l’Ukraine, nous devons maintenant créer des Ukrainiens.» Au lieu d’une idée de l’égalité des citoyens, ils ont introduit le concept de discrimination positive, selon lequel des siècles d’oppression auraient prévalu dans le domaine, afin de justifier la nécessité de favoriser les Ukrainiens.

L’unité des bureaucrates post-soviétiques et des nationalistes

Dès les premiers jours de la construction de l’État ukrainien, les nationalistes ont été confrontés à une forte dissonance cognitive, lorsque les objectifs annoncés se sont révélés en forte contradiction avec les véritables objectifs et les moyens utilisés pour y parvenir. Autrement dit, ils mentaient simplement en pleine connaissance du fait que s’ils avaient dit la vérité sur leurs objectifs, non seulement ils n’auraient jamais pu les atteindre, mais il leur aurait été difficile de simplement rester en politique. Les habitants de l’Ukraine ne l‘auraient pas supporté. Du début au milieu des années 1990, le niveau élevé d’activité politique s‘était maintenu après la perestroïka dans la population ukrainienne, qui ne s‘était pas encore transformée en une masse facile à diriger comme cela a été le cas au début des années 2000.

Il convient de noter que les nationalistes inconditionnels qui avaient adopté une telle position avant même la fin du système soviétique, les nationalistes qui avaient le droit de déclarer qu’ils avaient effectivement combattu pour l’indépendance ukrainienne, constituaient une minorité infime dans la politique ukrainienne des années 1990. Stepan Khmara, Levko Lukyanenko, Vyachelsav Chornovol et Gorin Brothers forment plus ou moins l’ensemble des dirigeants connus. Des organisations telles que l’Assemblée nationale ukrainienne (UNA) et l’Autodéfense populaire ukrainienne (UPSD) étaient marginales et avait peu de membres. Le Mouvement populaire de l’Ukraine pour la perestroïka s‘est révélé, même après sa conversion en Mouvement populaire de l’Ukraine, comme représentant un vaste mouvement démocratique (quoique avec des accents nationalistes). Avant la définition d‘une structure partidaire, c‘était un organe politique amorphe dans lequel des nationalistes radicaux fréquentaient d’anciens communistes opportunistes (comme Yavirivskiy et Pavlichko), ainsi que l’intelligentsia libérale.

L’électorat n‘était pas particulièrement intéressé par les nationalistes qui généralement obtenaient 20 à 25 % des voix (en moyenne nationale). Les forces nationalistes n‘avaient de réel soutien politique que dans les trois régions de Galicie (Lvov, Ternopol et Ivano-Frankisk). Dans toutes les autres régions, même en Ukraine occidentale, ils ont toujours eu moins de 50 % des voix et, dans les régions de Novorussie, pas plus de 5 à 10 %. Dans ces conditions, les nationalistes auraient dû soit rester dans l’opposition perpétuelle, soit se trouver un allié solide. Et ils l’ont trouvé.

Les anciens dirigeants du parti et de l’État soviétique qui ont abjuré leur passé afin de conserver leur position recherchaient à l’époque une idéologie qui pourrait les aider à rester au pouvoir. Ils avaient déjà renoncé à l’idéologie communiste et craignaient la rhétorique de la réintégration. Ils croyaient que la reconstruction d’un État uni permettrait de rétablir le contrôle de Moscou sur les élites de province et donc limiterait considérablement leur capacité à contrôler leurs possessions présentes sur le territoire de l’Ukraine, et même en Union soviétique. En un sens, l’Ukraine a été victime de la richesse de l‘héritage soviétique. Il semblait inépuisable et l’élite ukrainienne était soucieuse de le protéger contre les anciens collègues qui avaient moins reçu. Toute initiative dans le sens d’une réintégration n’était pas vue comme une tentative d’organiser une coopération mutuellement bénéfique entre des économies complémentaires, mais comme un affrontement avec les élites des républiques voisines, qui convoitaient la propriété de la partie ukrainienne.

Ici, les intérêts de l’ex-chef du parti ex-communiste ukrainien et des nationalistes ukrainiens se sont réunis. Les nationalistes voulaient construire, dans un pays russe – ce que l’Ukraine était au début des années 1990 –, un État non russe (à l’époque, il n’avait pas encore été planifié comme anti-russe). L’ancienne élite du Parti communiste voulait son propre État, en vue de garantir son droit à piller les possessions héritées de l‘URSS. Comme tous les processus d’intégration post-soviétique ne pouvaient avoir d’autre centre que Moscou (comme centre politique traditionnel, lien entre les républiques européennes et asiatiques et propriétaire de ressources naturelles illimitées), la Russie était objectivement un adversaire, à la fois pour les nationalistes et pour les bureaucrates étatiques. D’où la popularité du mythe de la lutte séculaire pour la liberté de la nation éternellement opprimée (évidemment contre la Russie). Cela a aussi été  l’origine du mythe de l’intégration dans l’UE comme principale voie de développement de l’Ukraine. Les politiciens ukrainiens ne se demandaient absolument pas si leurs projets d’adhésion à l’UE étaient réalistes ; l’objectif le plus important était le refus de participer à des projets visant à intégrer l’espace post-soviétique afin de légitimer une orientation différente.

La combinaison des bureaucrates et des nationalistes a réussi à mettre la gauche influente (les socialistes et les communistes) de côté. Les conflits de carrière internes entre les dirigeants des partis communistes et socialistes y ont contribué. Le contrôle de fait des bureaucrates sur l’appareil d’État est tout aussi important, ainsi qu’une certaine déception de la population en termes d’idéologie de gauche (l’Union soviétique venait d‘être désintégrée). En conséquence, les bureaucrates ont gagné le contrôle des entreprises et de la finance ainsi que l‘occasion de s‘enrichir sans entrave, tandis que les nationalistes s‘emparaient de la sphère de l’idéologie et du culturel (culture, science, éducation).

Symbiose nationaliste oligarchique

Au cours de ces vingt dernières années, non seulement deux générations d‘élèves et d’étudiants ont subi un lavage de cerveau, mais l’idéologie nationaliste nazie a été absorbée dans tous les domaines où une forme de processus éducatif a eu lieu : l’armée, les structures du ministère de l’Intérieur, les services de sécurité ukrainiens, y compris toutes les forces militaires ou de police.

Au départ, le nationalisme ukrainien a été présenté dans une version soft. Plus précisément, jusqu’au début des années 1990, les nationalistes ont reconnu la nature douteuse des pratiques de l’Armée insurrectionnelle ukrainienne Bandera (UPA), et les ont différenciées de l’organisation purement politique des nationalistes ukrainiens (OUN). Ils ont même condamné publiquement les activités de formations telles que les bataillons de nationalistes ukrainiens Roland, Nightingale, la division Galicia et les bataillons de milice dits Schutzmannschaft. A cette époque, il était non seulement inconcevable de déclarer Bandera et Choukhevytch héros de l’Ukraine, mais même en tant que  personnalités politiques positives.

Mais avec l’émergence de nouvelles générations dans l’arène politique, l’insistance a commencé à s’accentuer, aidée par le comportement de la Russie. Celle-ci, absorbée par ses problèmes internes, a de fait abandonné la lutte dans le domaine de l’information en Ukraine. Au milieu des années 1990, les chaînes de télévision russes de l’Ukraine ont été exclues et, entre la fin des années 1990 et le début des années 2000, il s’est passé la même chose avec la presse russe. La machine de propagande ukrainienne, qui n’était pas vraiment performante et manquait totalement de composante intellectuelle, s‘est révélée très efficace dans des conditions de monopole de l’information. Bien sûr, tous ceux qui étaient suffisamment intéressés pouvaient facilement obtenir une information alternative, mais la majorité de la population reçoit toujours les informations politiques par les sources les plus facilement accessibles.

Quand le climat social a changé, le nationalisme ukrainien est devenu de plus en plus radical et s’est lentement transformé ouvertement en nazisme. Les nationalistes institutionnalisés civilisés du début des années 2000 (avant Iouchtchenko) ont cessé de manifester du dégoût envers les militants nationalistes. Ils ont rapidement trouvé une justification à leur radicalisme. Il semble que les nationalistes soient nazis parce qu’ils sont offensés par le maintien des symboles soviétiques, par le fait que la majorité de la population célèbre le 9 mai, parle russe et n’est pas pressée de déclarer héros les adeptes meurtriers de Bandera, qui ont survécu jusqu’à nos jours seulement grâce à l’humanisme stalinien.

À un moment donné, la bureaucratie, qui était désireuse de détruire la base sociale de la gauche au moyen des privatisations (un processus similaire a eu lieu en Russie), a engendré l’oligarchie. Maintenant ce n‘étaient plus les bureaucrates qui désignaient n‘importe qui pour devenir millionnaire, mais les milliardaires qui achetaient tous les groupes parlementaires, ministres, premiers ministres et présidents. Le consensus bureaucratique-nationaliste a été remplacé par le consensus oligarchique-nationaliste. À l’époque, la situation en Ukraine est apparue en Occident (en particulier aux États-Unis) comme mûre pour y exercer une influence active. Peut-être que l’Occident n‘aurait pas osé intervenir directement, et n’aurait pas exercé de vraie contrainte si les élites ukrainiennes n‘avaient pas décidé de leur propre chef de suivre une voie anti-russe. Cependant l’Ukraine voulait se séparer de la Russie, éteindre en elle toute russitude pour longtemps ; toute la russophobie nourrissait trop bien les forces les plus sombres, habituellement négligées et inutilisées.

En outre, depuis le début des années 2000, avec son nouveau président, la Russie se concentrait de plus en plus sur ses intérêts nationaux et moins sur les valeurs universelles. Cette politique a amené la Russie sur une trajectoire de choc avec les intérêts américains et l’Ukraine anti-russe est apparue à Washington comme un moyen efficace de contrer la Russie. Il n‘est pas vraiment surprenant que les États-Unis se soient ainsi appuyés sur les forces qui soutenaient le consensus oligarchique-nationaliste et contrôlaient complètement la politique ukrainienne (indépendamment de la compétition formelle, voire de l’hostilité, entre les parties), en particulier compte tenu du fait que ces forces étaient russophobes non seulement pour des raisons idéologiques, mais aussi en raison de leurs intérêts pratiques.

L’Ukraine est devenue le lieu principal pour les États-Unis

Nous ne pouvons pas dire que les États-Unis n‘ont pas suivi la situation en Ukraine dans les années 1990 et n’ont réuni aucun groupe fidèle de politiciens, bureaucrates et personnalités publiques. C’était une procédure normale, au cas où (chaque service de renseignement utilise toujours toutes les occasions d’acquérir des atouts précieux dans les pays en position stratégiquement importante, surtout si elles ne coûtent pas cher). Mais dans les années 1990, les États-Unis ont pu remercier la Russie d’Eltsine pour sa bonne volonté à se mettre à leur remorque sur la plupart des questions, en échange d’une certaine reconnaissance du contrôle de Moscou sur l’espace post-soviétique comme sphère russe d’influence vitale, et ils essayaient de ne pas accentuer leur ingérence dans les affaires des pays post-soviétiques.

Au début des années 2000 la politique étrangère russe est devenue de plus en plus indépendante. Bien sûr, de nombreux politiciens en relation avec Washington sont restés au pouvoir, mais l’influence du lobby pro-américain n‘est plus resté longtemps décisif et la dynamique et l’orientation du changement laissait peu de doute sur la voie que la nouvelle élite politique russe allait suivre, une voie de restauration de l’indépendance des politiques nationale et étrangère. Poutine était prêt à rester un ami et un allié des États-Unis, mais sur un pied d’égalité et non pas comme un vassal.

C’était le bon moment pour utiliser les postes avancés anti-russes dans les pays post-soviétiques. Presque toutes les révolutions de couleur réussies ou ratées dans la Communauté des États indépendants (CEI) ont eu lieu entre 2003 et 2008 (depuis la révolution des roses en Géorgie jusqu’à la guerre du 08/08/08). Le but de ces coups d’État n‘était pas simplement de couper la Russie de l‘espace post-soviétique, mais de créer une chaîne d’États hostiles le long de ses frontières ouest et sud (jusqu’à la frontière avec la Mongolie et la Chine). En conséquence, les possibilités de la Russie de mener une politique étrangère et économique indépendante seraient bloquées, ses ressources auraient été immobilisées du fait de l’environnement hostile provenant des anciennes républiques soviétiques. La réputation du gouvernement russe, à l’intérieur comme à l’extérieur, aurait été constamment sapée par de toujours nouvelles provocations (comme celles que Saakachvili a délivrées de façon excessive). Dans le même temps, la capacité de Moscou à réagir à de telles provocations aurait été limitée, parce que chaque coup aurait déclenché une guerre ouverte avec un bloc d‘États post-soviétiques (Iouchtchenko a tenté d’associer l’Ukraine au conflit russo-géorgien, mais d‘après ce plan, cela aurait dû donner naissance à 10 ou 11 Géorgie et Ukraine). La Russie aurait affronté un groupe de pays allant du lac Baïkal à la Baltique. Les États-Unis auraient pu interpréter cela comme une guerre d’anciennes colonies contre la Russie néo-colonialiste et auraient pu appliquer à la Russie la Déclaration des Nations unies sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux du 14 décembre 1960, et toute autre résolution sur ce thème (adoptées d‘ailleurs par l’Assemblée générale à l’initiative de l’URSS).

La Russie a échappé aux coups en Géorgie en 2003 et en Ukraine en 2004. La propagation de l’infection colorée aurait pu entraver Moscou (les coups d‘État ne sont pas allés au delà de Bichkek, mais même au Kirghizistan la révolution a été suivie de la même contre-révolution de couleur).

La Russie a lancé sa contre-offensive géopolitique pendant la guerre de cinq jours d’août 2008. A partir de ce moment, toute la puissance de Washington a été utilisée, non pas afin de marginaliser Moscou, de l’empêcher de devenir un challenger géopolitique, mais afin de détruire le rival géopolitique déjà existant. Les efforts russes ont apporté une paix en Asie centrale (bien que fragile et instable) et bloqué les intérêts américains dans le Caucase. Ce dernier fait a été dû principalement à deux facteurs : Kadyrov [en Tchétchénie, NdT] a pris sur lui de stabiliser la situation dans le nord du Caucase et le régime pro-américain de Saakachvili s‘est complètement discrédité par sa défaite dans la guerre (les politiciens qui ont succédé à Saakachvili ne se sont pas réconciliés avec la Russie, mais sont devenus plus raisonnables, ce qui a permis de stabiliser la relation). Tous ces facteurs ont fait de l’Ukraine, pour les États-Unis à la fin 2010, un pays décisif dans l’espace post-soviétique.

Rostislav Ishchenko

A suivre...L’Ukraine, un État béni qui a misérablement échoué [2/2]

Traduit par Hiéronymus, relu par Diane et jj pour le Saker Francophone

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