Pas prêt pour le Prime Time : La Saga du F35 pour les nuls [1/3]

Lorsque l’idéologie du technologisme implose sous l’effet de ses propres contradictions

Avant-Propos

Le projet US du F35, appelé aussi JSF [Joint Strike Fighter] auto-désigné par l'Empire du Bien et de la Vertu comme unique avion de combat universel du XXIsiècle globalisé, a été lancé en 1996. Soit depuis bientôt vingt ans. Il est d'une furtivité extrême confinant au néant. Tellement furtif qu'il ne vole toujours pas et ne volera jamais.

Fruit de l'orgueil technologique post-moderne, il a dés l'origine été conçu pour ne pas avoir de prototype, étant entendu que la nation exceptionnelle ne pouvait produire que des objets exceptionnels, loin des tâtonnements et expérimentations vulgaires auxquels la réalité soumet les industriels des nations ordinaires.

Résumons: un projet, entièrement conçu par algorithmes informatiques, donc parfait dés son immaculée conception technocratique, qui a coûté, pour l'instant, mille quatre cent milliards de dollars au contribuable américain et européen, un avion non certifié, qui ne vole pas mais qui est déjà produit à 125 exemplaires et acheté !

Cette aventure est typique du système politico-mafieux étasunien. Complicité entre les politiciens, le complexe militaro-industriel, les multinationales, bancaires et autres, pour racketter le monde. À l'instar des banques trop grosses pour faire faillite, ce projet F35 ne peut être ni arrêté, ni amendé, ni réussir. Il ne sert qu'à faire tourner la lessiveuse à essorer les contribuables étasuniens et européens qui ont décidé d'acheter cet avion. À l'instar aussi d'une grande guerre globalisée contre la terreur qui n'a jamais fabriqué autant de terroristes en enrichissant autant de monde.

L'important c'est la bottom-line, la ligne du bas, le résultat, le bénéfice ou la perte.

Nous vous proposons, en plusieurs épisodes, un état des lieux extrêmement détaillé du projet, à partir des meilleures sources. Ces articles ne sont pas un inventaire des déboires vécus depuis vingt ans par le projet, dont vous pourrez certainement faire votre miel ailleurs, ici en français et depuis son origine.

Extrait du rapport:
"...Le programme F-35 est conçu de telle sorte qu'il n'a pas l'obligation de prouver sa capacité au combat avant d'avoir atteint un taux de production annuel de 57 avions, un taux sans précédent pour tout avion de chasse avec si peu d'essais opérationnels accomplis et tant de problèmes non résolus." 

Le Saker Francophone

Photograph of Mandy Smithberger

Par Mandy Smithberger – Le 12 mars 2015–- Source pogo.org

Mandy Smithberger est directrice du projet de réforme militaire Straus au Centre d’information de la Défense en charge de la surveillance du gouvernement.

Selon le dernier rapport de la Direction des tests opérationnels et des évaluations [DOT&E], le F-35 n’est pas prêt pour les Contrôles opérationnels initiaux [IOC] et ne le sera pas de sitôt

Continuer la lecture

L’Ukraine : Un État béni qui a misérablement échoué [1/2]


Par Rostislav Ishchenko – Le 22 mai 2015 – Source vineyardsaker.de

Les élites ukrainiennes qui, lors du partage de l’héritage soviétique ont reçu tout ce qui était nécessaire pour construire un État prospère, ont par leurs propres agissements amené le pays au bord du gouffre.

Des conditions de départ idéales

La politique et l’histoire ne sont pas prédéterminées. Le projet Ukraine, qui vit actuellement ses derniers jours, n’était pas condamné à la ruine dès le départ.

Le nouveau pays soudainement apparu était la dixième économie du monde. Sur son territoire se trouvaient 40 % de l’industrie soviétique et 60 % de l’industrie lourde. L’agriculture bien développée pouvait non seulement suffire pour répondre aux besoins locaux, mais pouvait même permettre d‘exporter des produits agricoles. Le réseau de voies ferrées et d’autoroutes, de vastes pipelines et plusieurs ports en mer chaude répondaient aux besoins commerciaux lointains et offraient en sus un potentiel quasi illimité pour le transit. La population de l’Ukraine était de 52 millions d’habitants et la dynamique démographique en 1991-1992 restait positive. Le pays disposait d‘une main-d’œuvre instruite et était un lieu de haut niveau de qualification scientifique. Tous ces biens étaient protégés par la force d‘un demi-million d‘hommes faisant partie de l’armée soviétique – la plus grande de l’URSS – équipée des armes les plus avancées, puisqu’elle était le lieu prévu d‘une possible offensive militaire majeure.

Au moment de son indépendance, l’Ukraine avait bien plus que le nécessaire pour construire un État prospère. En outre, la situation géopolitique était en sa faveur. Le pays n‘avait pas d’ennemis puissants, pas même de concurrents sérieux . Au contraire, en 1992 les dirigeants ukrainiens étaient heureux d’annoncer l’absence de menaces extérieures. Les relations avec tous les voisins étaient cordiales et les principaux acteurs dans le monde souhaitaient eux-mêmes de bonnes relations avec Kiev. Rappelons-nous que lorsque le format G7+ est né en 1994-1997, étendant les contacts à Moscou (G7 + Russie) et Kiev (G7 + Ukraine). Cependant le format, avec la Russie seule, s‘est développé au fil du temps pour former le G8 à part entière, tandis que l’Ukraine a disparu dans l’espace et le temps ; pourtant, en 1990, ces formations étaient représentées ensemble.

Il y avait un petit problème : l’Ukraine n’avait pas assez d’énergie pour faire fonctionner son industrie. Pas dans tous les secteurs, mais au moins pour le pétrole et le gaz. Malgré un niveau relativement élevé de la production nationale – de 4 à 5 millions de tonnes de pétrole (autant que la Roumanie) et 20 milliards de mètres cubes de gaz (plus que l‘Azerbaïdjan) – l’Ukraine couvrait seulement un cinquième de ses besoins environ, en pétrole, et un quart de son gaz. Il existait une potentialité théorique d’augmenter la production nationale, mais elle a été négligée. De même, les options permettant de réduire la dépendance énergétique de l’industrie ont été négligées.

La Russie a livré, dans tous les cas, les quantités de pétrole et de gaz traditionnellement nécessaires. Étant donné que 60 % à 80 % des exportations énergétiques russes passaient, dans les années 1990, par des pipelines ukrainiens, il n’a pas été difficile de se mettre d’accord sur les termes d’un échange avantageux pour les deux partenaires. C’est ce que Koutchma a fait quand il a signé en 2002 un accord de dix ans avec Gazprom sur des ventes de gaz à $50 les 1000 mètres cubes. Le contrat devait être valable jusqu’en 2012 et procurer d‘énormes avantages concurrentiels à l’industrie ukrainienne sur le marché mondial qui (compte tenu de l’augmentation rapide des prix du pétrole et du gaz) devaient augmenter d’année en année.

Le considérable potentiel géopolitique et économique de l’Ukraine reposait pareillement sur la dépendance de son commerce extérieur, et l’efficacité de son industrie, aux ressources énergétiques du marché et des partenaires russes. Les années 1993-2003 ont vu arriver la crise politique de la Russie, qui a amené le pays au bord de la guerre civile en déclenchant une division à long terme de la société, deux guerres en Tchétchénie et une faillite nationale en 1998. La Russie, totalement prise dans ses problèmes intérieurs, aggravés par l’augmentation des conflits géopolitiques avec ses partenaires euro-atlantiques, avait besoin d‘une loyauté politique minimum de la part de Kiev (la Russie ne réclamait pas plus que la neutralité) et était prête à le payer par des concessions économiques importantes (et elle l’a payé).

Aujourd’hui, quand à Moscou les gens parlent  de $35 Mds de dollars qui ont été investis dans l’économie ukrainienne, cela ne prend en compte que l’argent qui peut être décompté. Cela inclut autant les largesses sur les prix du pétrole et du gaz que les crédits à des conditions favorables ainsi que les investissements dans des projets communs. Les pertes que la Russie a subies en raison des clauses à long terme de partenariat préférentiel accordé à l‘Ukraine et d’autres formes indirectes de soutien de l’économie ukrainienne ne peuvent même pas être calculées théoriquement (des experts parlent d’un total de $200 à $300 Mds de dollars, mais c‘est une évaluation).

Contre la tendance

Comment se fait-il alors que l’Ukraine, en dépit de toutes ces bénédictions, ait atteint le point où une fin terrible semble meilleure qu’une horreur sans fin ?

Nous avons beaucoup parlé de la vénalité des élites qui ont littéralement pillé le pays. Cependant, cela soulève une question légitime : pourquoi 52 millions de personnes ont-elles porté au pouvoir avec insistance et à plusieurs reprises précisément ce genre de personnes ? Pourquoi, malgré toutes les différences de styles entre les dirigeants des élites russes, biélorusses et kazakhs, l’expression intérêts nationaux a-t-elle un sens pour ces derniers, alors que pour les dirigeants ukrainiens, c‘est – au mieux – totalement inintelligible ? Dans le pire des cas, la référence aux intérêts de l’État en Ukraine n‘est rien d‘autre qu‘une façon de tromper la population. Comment des millions de personnes ont-elles pu accepter avec enthousiasme d’être trompées, volées et dépouillées d’un avenir, au profit d‘un symbole parfaitement étranger et vide de sens – un symbole qui n’a rien de commun avec la civilisation soviétique dont ces gens sont issus, ni avec la civilisation européenne à laquelle ils étaient supposés vouloir se joindre, ni même, plus important encore, avec la vie réelle ?

À mon avis, la réponse à ces questions réside dans une différence essentielle et tout à fait évidente entre les principes de construction de l’État, qui ont été acceptés par l’élite ukrainienne d‘une part et par les élites russe, biélorusse et kazakh d‘autre part. Dans ces trois derniers cas, des citoyennetés ont été construites. Au Bélarus, les partis nationalistes mènent une existence misérable à demi-marginalisée. Rien que ces trois ou quatre dernières années, Minsk a officiellement commencé à promouvoir un nationalisme d’État loyal, qui d’une part se détache du nationalisme de l’opposition et, d’autre part, doit fournir aux dirigeants du Bélarus une base à opposer à l’écrasante domination russe dans l’Union économique eurasienne.

Au Kazakhstan, le nationalisme kazakh est relativement fort, mais pas structurellement défini (en tant que parti politique) et il s‘exprime principalement dans la vie quotidienne et au niveau de groupements bureaucratiques. Néanmoins, il faut noter les déclarations de Nursultan Nazarbayev qui, dès les premiers jours de l’indépendance du Kazakhstan, a considéré le nationalisme kazakh comme la plus grande menace pour la stabilité, l’intégrité territoriale et même l’existence du pays. Le concept d’un État kazakh – par opposition à une kazakhitude – a été introduit. Les nationalistes ont dû se contenter de la domination d’un personnel national kazakh dans la politique et les affaires. Cependant, cette domination n’a jamais été absolue et les droits des autres nationalités, tout d’abord les Russes (russophones de culture russe) ont été protégés par la loi. En ce qui concerne la Russie, les nationalistes continuent à se plaindre que le discours impérial présent dans la politique russe n’a jamais été remplacé par le discours national. En d’autres termes, la Russie n’a pas développé un État national de Russes de souche mais comme l’État des citoyens russes et, ces dernières années, du monde russe.

Par conséquent, Moscou, Minsk et Astana ont atteint la stabilité interne, à travers le compromis entre nations, couplé avec le rejet de la politique nationaliste. La politique nationale adéquate, basée sur des compromis, a permis une politique étrangère constructive. Malgré tous les problèmes, la Russie, la Biélorussie et le Kazakhstan s‘emploient depuis le milieu des années 1990 à réintégrer l’espace post-soviétique, sur la base des nouvelles réalités politiques, économiques et idéologiques.

Depuis le premier jour de son existence, l’État ukrainien a été établi en tant qu’État de la nation titulaire. Priorité a été donnée au développement national et les mots attribués au comte de Cavour – «Nous avons créé l’Italie, nous devons maintenant créer les Italiens.» – ont été repris par les nationalistes ukrainiens sous la forme: «Nous avons créé l’Ukraine, nous devons maintenant créer des Ukrainiens.» Au lieu d’une idée de l’égalité des citoyens, ils ont introduit le concept de discrimination positive, selon lequel des siècles d’oppression auraient prévalu dans le domaine, afin de justifier la nécessité de favoriser les Ukrainiens.

L’unité des bureaucrates post-soviétiques et des nationalistes

Dès les premiers jours de la construction de l’État ukrainien, les nationalistes ont été confrontés à une forte dissonance cognitive, lorsque les objectifs annoncés se sont révélés en forte contradiction avec les véritables objectifs et les moyens utilisés pour y parvenir. Autrement dit, ils mentaient simplement en pleine connaissance du fait que s’ils avaient dit la vérité sur leurs objectifs, non seulement ils n’auraient jamais pu les atteindre, mais il leur aurait été difficile de simplement rester en politique. Les habitants de l’Ukraine ne l‘auraient pas supporté. Du début au milieu des années 1990, le niveau élevé d’activité politique s‘était maintenu après la perestroïka dans la population ukrainienne, qui ne s‘était pas encore transformée en une masse facile à diriger comme cela a été le cas au début des années 2000.

Il convient de noter que les nationalistes inconditionnels qui avaient adopté une telle position avant même la fin du système soviétique, les nationalistes qui avaient le droit de déclarer qu’ils avaient effectivement combattu pour l’indépendance ukrainienne, constituaient une minorité infime dans la politique ukrainienne des années 1990. Stepan Khmara, Levko Lukyanenko, Vyachelsav Chornovol et Gorin Brothers forment plus ou moins l’ensemble des dirigeants connus. Des organisations telles que l’Assemblée nationale ukrainienne (UNA) et l’Autodéfense populaire ukrainienne (UPSD) étaient marginales et avait peu de membres. Le Mouvement populaire de l’Ukraine pour la perestroïka s‘est révélé, même après sa conversion en Mouvement populaire de l’Ukraine, comme représentant un vaste mouvement démocratique (quoique avec des accents nationalistes). Avant la définition d‘une structure partidaire, c‘était un organe politique amorphe dans lequel des nationalistes radicaux fréquentaient d’anciens communistes opportunistes (comme Yavirivskiy et Pavlichko), ainsi que l’intelligentsia libérale.

L’électorat n‘était pas particulièrement intéressé par les nationalistes qui généralement obtenaient 20 à 25 % des voix (en moyenne nationale). Les forces nationalistes n‘avaient de réel soutien politique que dans les trois régions de Galicie (Lvov, Ternopol et Ivano-Frankisk). Dans toutes les autres régions, même en Ukraine occidentale, ils ont toujours eu moins de 50 % des voix et, dans les régions de Novorussie, pas plus de 5 à 10 %. Dans ces conditions, les nationalistes auraient dû soit rester dans l’opposition perpétuelle, soit se trouver un allié solide. Et ils l’ont trouvé.

Les anciens dirigeants du parti et de l’État soviétique qui ont abjuré leur passé afin de conserver leur position recherchaient à l’époque une idéologie qui pourrait les aider à rester au pouvoir. Ils avaient déjà renoncé à l’idéologie communiste et craignaient la rhétorique de la réintégration. Ils croyaient que la reconstruction d’un État uni permettrait de rétablir le contrôle de Moscou sur les élites de province et donc limiterait considérablement leur capacité à contrôler leurs possessions présentes sur le territoire de l’Ukraine, et même en Union soviétique. En un sens, l’Ukraine a été victime de la richesse de l‘héritage soviétique. Il semblait inépuisable et l’élite ukrainienne était soucieuse de le protéger contre les anciens collègues qui avaient moins reçu. Toute initiative dans le sens d’une réintégration n’était pas vue comme une tentative d’organiser une coopération mutuellement bénéfique entre des économies complémentaires, mais comme un affrontement avec les élites des républiques voisines, qui convoitaient la propriété de la partie ukrainienne.

Ici, les intérêts de l’ex-chef du parti ex-communiste ukrainien et des nationalistes ukrainiens se sont réunis. Les nationalistes voulaient construire, dans un pays russe – ce que l’Ukraine était au début des années 1990 –, un État non russe (à l’époque, il n’avait pas encore été planifié comme anti-russe). L’ancienne élite du Parti communiste voulait son propre État, en vue de garantir son droit à piller les possessions héritées de l‘URSS. Comme tous les processus d’intégration post-soviétique ne pouvaient avoir d’autre centre que Moscou (comme centre politique traditionnel, lien entre les républiques européennes et asiatiques et propriétaire de ressources naturelles illimitées), la Russie était objectivement un adversaire, à la fois pour les nationalistes et pour les bureaucrates étatiques. D’où la popularité du mythe de la lutte séculaire pour la liberté de la nation éternellement opprimée (évidemment contre la Russie). Cela a aussi été  l’origine du mythe de l’intégration dans l’UE comme principale voie de développement de l’Ukraine. Les politiciens ukrainiens ne se demandaient absolument pas si leurs projets d’adhésion à l’UE étaient réalistes ; l’objectif le plus important était le refus de participer à des projets visant à intégrer l’espace post-soviétique afin de légitimer une orientation différente.

La combinaison des bureaucrates et des nationalistes a réussi à mettre la gauche influente (les socialistes et les communistes) de côté. Les conflits de carrière internes entre les dirigeants des partis communistes et socialistes y ont contribué. Le contrôle de fait des bureaucrates sur l’appareil d’État est tout aussi important, ainsi qu’une certaine déception de la population en termes d’idéologie de gauche (l’Union soviétique venait d‘être désintégrée). En conséquence, les bureaucrates ont gagné le contrôle des entreprises et de la finance ainsi que l‘occasion de s‘enrichir sans entrave, tandis que les nationalistes s‘emparaient de la sphère de l’idéologie et du culturel (culture, science, éducation).

Symbiose nationaliste oligarchique

Au cours de ces vingt dernières années, non seulement deux générations d‘élèves et d’étudiants ont subi un lavage de cerveau, mais l’idéologie nationaliste nazie a été absorbée dans tous les domaines où une forme de processus éducatif a eu lieu : l’armée, les structures du ministère de l’Intérieur, les services de sécurité ukrainiens, y compris toutes les forces militaires ou de police.

Au départ, le nationalisme ukrainien a été présenté dans une version soft. Plus précisément, jusqu’au début des années 1990, les nationalistes ont reconnu la nature douteuse des pratiques de l’Armée insurrectionnelle ukrainienne Bandera (UPA), et les ont différenciées de l’organisation purement politique des nationalistes ukrainiens (OUN). Ils ont même condamné publiquement les activités de formations telles que les bataillons de nationalistes ukrainiens Roland, Nightingale, la division Galicia et les bataillons de milice dits Schutzmannschaft. A cette époque, il était non seulement inconcevable de déclarer Bandera et Choukhevytch héros de l’Ukraine, mais même en tant que  personnalités politiques positives.

Mais avec l’émergence de nouvelles générations dans l’arène politique, l’insistance a commencé à s’accentuer, aidée par le comportement de la Russie. Celle-ci, absorbée par ses problèmes internes, a de fait abandonné la lutte dans le domaine de l’information en Ukraine. Au milieu des années 1990, les chaînes de télévision russes de l’Ukraine ont été exclues et, entre la fin des années 1990 et le début des années 2000, il s’est passé la même chose avec la presse russe. La machine de propagande ukrainienne, qui n’était pas vraiment performante et manquait totalement de composante intellectuelle, s‘est révélée très efficace dans des conditions de monopole de l’information. Bien sûr, tous ceux qui étaient suffisamment intéressés pouvaient facilement obtenir une information alternative, mais la majorité de la population reçoit toujours les informations politiques par les sources les plus facilement accessibles.

Quand le climat social a changé, le nationalisme ukrainien est devenu de plus en plus radical et s’est lentement transformé ouvertement en nazisme. Les nationalistes institutionnalisés civilisés du début des années 2000 (avant Iouchtchenko) ont cessé de manifester du dégoût envers les militants nationalistes. Ils ont rapidement trouvé une justification à leur radicalisme. Il semble que les nationalistes soient nazis parce qu’ils sont offensés par le maintien des symboles soviétiques, par le fait que la majorité de la population célèbre le 9 mai, parle russe et n’est pas pressée de déclarer héros les adeptes meurtriers de Bandera, qui ont survécu jusqu’à nos jours seulement grâce à l’humanisme stalinien.

À un moment donné, la bureaucratie, qui était désireuse de détruire la base sociale de la gauche au moyen des privatisations (un processus similaire a eu lieu en Russie), a engendré l’oligarchie. Maintenant ce n‘étaient plus les bureaucrates qui désignaient n‘importe qui pour devenir millionnaire, mais les milliardaires qui achetaient tous les groupes parlementaires, ministres, premiers ministres et présidents. Le consensus bureaucratique-nationaliste a été remplacé par le consensus oligarchique-nationaliste. À l’époque, la situation en Ukraine est apparue en Occident (en particulier aux États-Unis) comme mûre pour y exercer une influence active. Peut-être que l’Occident n‘aurait pas osé intervenir directement, et n’aurait pas exercé de vraie contrainte si les élites ukrainiennes n‘avaient pas décidé de leur propre chef de suivre une voie anti-russe. Cependant l’Ukraine voulait se séparer de la Russie, éteindre en elle toute russitude pour longtemps ; toute la russophobie nourrissait trop bien les forces les plus sombres, habituellement négligées et inutilisées.

En outre, depuis le début des années 2000, avec son nouveau président, la Russie se concentrait de plus en plus sur ses intérêts nationaux et moins sur les valeurs universelles. Cette politique a amené la Russie sur une trajectoire de choc avec les intérêts américains et l’Ukraine anti-russe est apparue à Washington comme un moyen efficace de contrer la Russie. Il n‘est pas vraiment surprenant que les États-Unis se soient ainsi appuyés sur les forces qui soutenaient le consensus oligarchique-nationaliste et contrôlaient complètement la politique ukrainienne (indépendamment de la compétition formelle, voire de l’hostilité, entre les parties), en particulier compte tenu du fait que ces forces étaient russophobes non seulement pour des raisons idéologiques, mais aussi en raison de leurs intérêts pratiques.

L’Ukraine est devenue le lieu principal pour les États-Unis

Nous ne pouvons pas dire que les États-Unis n‘ont pas suivi la situation en Ukraine dans les années 1990 et n’ont réuni aucun groupe fidèle de politiciens, bureaucrates et personnalités publiques. C’était une procédure normale, au cas où (chaque service de renseignement utilise toujours toutes les occasions d’acquérir des atouts précieux dans les pays en position stratégiquement importante, surtout si elles ne coûtent pas cher). Mais dans les années 1990, les États-Unis ont pu remercier la Russie d’Eltsine pour sa bonne volonté à se mettre à leur remorque sur la plupart des questions, en échange d’une certaine reconnaissance du contrôle de Moscou sur l’espace post-soviétique comme sphère russe d’influence vitale, et ils essayaient de ne pas accentuer leur ingérence dans les affaires des pays post-soviétiques.

Au début des années 2000 la politique étrangère russe est devenue de plus en plus indépendante. Bien sûr, de nombreux politiciens en relation avec Washington sont restés au pouvoir, mais l’influence du lobby pro-américain n‘est plus resté longtemps décisif et la dynamique et l’orientation du changement laissait peu de doute sur la voie que la nouvelle élite politique russe allait suivre, une voie de restauration de l’indépendance des politiques nationale et étrangère. Poutine était prêt à rester un ami et un allié des États-Unis, mais sur un pied d’égalité et non pas comme un vassal.

C’était le bon moment pour utiliser les postes avancés anti-russes dans les pays post-soviétiques. Presque toutes les révolutions de couleur réussies ou ratées dans la Communauté des États indépendants (CEI) ont eu lieu entre 2003 et 2008 (depuis la révolution des roses en Géorgie jusqu’à la guerre du 08/08/08). Le but de ces coups d’État n‘était pas simplement de couper la Russie de l‘espace post-soviétique, mais de créer une chaîne d’États hostiles le long de ses frontières ouest et sud (jusqu’à la frontière avec la Mongolie et la Chine). En conséquence, les possibilités de la Russie de mener une politique étrangère et économique indépendante seraient bloquées, ses ressources auraient été immobilisées du fait de l’environnement hostile provenant des anciennes républiques soviétiques. La réputation du gouvernement russe, à l’intérieur comme à l’extérieur, aurait été constamment sapée par de toujours nouvelles provocations (comme celles que Saakachvili a délivrées de façon excessive). Dans le même temps, la capacité de Moscou à réagir à de telles provocations aurait été limitée, parce que chaque coup aurait déclenché une guerre ouverte avec un bloc d‘États post-soviétiques (Iouchtchenko a tenté d’associer l’Ukraine au conflit russo-géorgien, mais d‘après ce plan, cela aurait dû donner naissance à 10 ou 11 Géorgie et Ukraine). La Russie aurait affronté un groupe de pays allant du lac Baïkal à la Baltique. Les États-Unis auraient pu interpréter cela comme une guerre d’anciennes colonies contre la Russie néo-colonialiste et auraient pu appliquer à la Russie la Déclaration des Nations unies sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux du 14 décembre 1960, et toute autre résolution sur ce thème (adoptées d‘ailleurs par l’Assemblée générale à l’initiative de l’URSS).

La Russie a échappé aux coups en Géorgie en 2003 et en Ukraine en 2004. La propagation de l’infection colorée aurait pu entraver Moscou (les coups d‘État ne sont pas allés au delà de Bichkek, mais même au Kirghizistan la révolution a été suivie de la même contre-révolution de couleur).

La Russie a lancé sa contre-offensive géopolitique pendant la guerre de cinq jours d’août 2008. A partir de ce moment, toute la puissance de Washington a été utilisée, non pas afin de marginaliser Moscou, de l’empêcher de devenir un challenger géopolitique, mais afin de détruire le rival géopolitique déjà existant. Les efforts russes ont apporté une paix en Asie centrale (bien que fragile et instable) et bloqué les intérêts américains dans le Caucase. Ce dernier fait a été dû principalement à deux facteurs : Kadyrov [en Tchétchénie, NdT] a pris sur lui de stabiliser la situation dans le nord du Caucase et le régime pro-américain de Saakachvili s‘est complètement discrédité par sa défaite dans la guerre (les politiciens qui ont succédé à Saakachvili ne se sont pas réconciliés avec la Russie, mais sont devenus plus raisonnables, ce qui a permis de stabiliser la relation). Tous ces facteurs ont fait de l’Ukraine, pour les États-Unis à la fin 2010, un pays décisif dans l’espace post-soviétique.

Rostislav Ishchenko

A suivre...L’Ukraine, un État béni qui a misérablement échoué [2/2]

Traduit par Hiéronymus, relu par Diane et jj pour le Saker Francophone

   Envoyer l'article en PDF   

Syrie : La France et le Royaume-Uni soutiennent ISIS par des sanctions de l’UE


Par Gordon Duff – Le 31 mai 2015 – Source veteranstoday

Le sénateur Flamand Frank Creyelman : la politique étrangère de l’UE soutient les intérêts US 

La Syrie a officiellement fustigé la décision du Conseil de l’Union
européenne (UE) d’étendre les mesures restrictives imposées
unilatéralement contre elle pour une autre année, les qualifiant d’«injustes et préjudiciables» à la vie quotidienne et au bien-être du
peuple syrien.

Continuer la lecture

Les banquiers planifient en secret une réunion à Londres sur la «fin du cash»

«Nous ferions mieux de garder l'œil bien ouvert pour cette naissance d'une société sans argent liquide qui vient  beaucoup plus rapidement que prévu. Pourquoi la réunion est-elle secrète? Quelque chose ne sent pas bon par ici»

Par Paul Joseph Watson – Le 27 mai 2015 – Source InfoWar

Secret Meeting in London to "End Cash"

L’économiste Martin Armstrong affirme qu’il est prévu une réunion secrète sur la fin du cash qui aura lieu à Londres avant la fin du mois impliquant des représentants de la BCE et la Réserve fédérale.

Armstrong, qui est connu pour avoir prédit avec succès en 1987 le crash du lundi noir ainsi que l’effondrement financier de 1998 en Russie, a exprimé avoir été choqué, qu’aucune information n’ait filtré sur cette prochaine conférence.

Continuer la lecture

Lutte des classes en Ukraine, créanciers contre travailleurs


Michael Hudson

Michael Hudson

Par Michael Hudson – Le 28 mai 2015 – Source thesaker.is

 

 

 

 

Avant-propos du Saker US 

Je suis absolument ravi de vous proposer aujourd’hui un article de Michael Hudson que je considère comme le meilleur et le plus visionnaire ici en matière économique. Michael a gentiment accepté de me permettre de publier cet article et, même mieux, il a aussi accepté une interview questions réponses avec moi. C’est peu de dire que je suis honoré.

The Saker

L’effondrement de l’Ukraine depuis le coup d’état de février 2014 est devenu un prétexte au pillage généralisé. C’est la main d’œuvre qui subit les dommages collatéraux du c’est gratuit pour tout le monde. De nombreux ouvriers ne sont tout simplement pas payés et ce qui leur est effectivement payé est souvent illégalement bas. Les employeurs prennent tout l’argent qui est dans les caisses de leur entreprise et l’engrangent en douce – de préférence à l’étranger ou au moins dans une monnaie étrangère.

Continuer la lecture

L’attaque financière contre le rouble en décembre est confirmée


Alexander Mercouris

Alexander Mercouris

Par Alexander Mercouris – Le 29 mai 2015 – Source Russia Insider

German Gref, économiste libéral renommé, et PDG de la Sberbank, divulgue une tentative provenant de l’étranger pour provoquer une panique bancaire [bank run] pendant le crise du rouble en décembre .

Continuer la lecture

La Chine féconde son influence en Amérique Latine à travers la Route de la Soie


Par Ariel Noyola Rodríguez – Le 25 mai 2015 – Source Russia Today

Chaque fois que les États-Unis insistent sur leurs schémas d’intégration régionaux conjoints pour contenir l’ascension de la Chine en tant que puissance mondiale (Accord de Partenariat Transpacifique, Alliance Pacifique, etc.), celle-ci construit des couloirs économiques par les voies aériennes, terrestres et maritimes dans divers zones régionales.

Continuer la lecture

Santiago du Chili : la place financière du yuan en Amérique Latine

Les relations économiques entre la Chine et l'Amérique latine connaissent des tensions croissantes du fait de la déflation (baisse des prix) à l'échelle mondiale, l'Amérique latine souffre. En effet, l'essentiel de  ses exportations vers la Chine se concentre sur les matières premières. Toutefois, l'installation du premier centre financier du yuan en Amérique latine à Santiago du Chili, convenu lors de la visite du Premier ministre chinois, Li Keqiang, promet de déclencher une tornade d'investissements technologiques qui stimulera l'industrialisation périphérique et commencera à réduire la domination du dollar dans les pays du Cône Sud.

Ariel Noyola Rodríguez

Par Ariel Noyola Rodríguez – Le 28 mai 2015 – Source alainet.org

Au cours de sa visite au Brésil, en Colombie, au Pérou et au Chili, le Premier ministre Li Keqiang a monnayé l’influence de la Chine en Amérique latine grâce à la mise en œuvre de deux objectifs fondamentaux : la transformation de la carte économique de la région pour renforcer le rôle de l’Asie-Pacifique, et pousser le yuan sur le territoire sud-américain par l’établissement d’une plate-forme financière pour la négociation de la devise chinoise à Santiago du Chili.

Continuer la lecture

Le système bancaire US est une bombe à retardement


Valentin Katasonov

Valentin Katasonov

Par Valentin Katasonov – Le 23 mai 2015 – Source Strategic Culture

Depuis 2009, toutes les grandes banques états-uniennes ont l’obligation de se soumettre à un examen nommé stress test. Le test vérifie la capacité des banques à résister aux changements des conditions économiques et financières. Dit simplement, il évalue la capacité des banques à survivre si l’Amérique était confrontée à une crise financière semblable à celle de 2007-2009.

Continuer la lecture