Business As Usual ?
Les relations tourmentées germano-russes


Par Natalia Meden – Le 5 novembre 2015 – Source strategic-culture

Sigmar Gabriel, vice-chancelier et ministre des Affaires économiques et de l’énergie de l’Allemagne, s’est rendu à Moscou du 28 au 29 octobre. L’homme politique allemand avait auparavant visité la capitale russe en mars de l’année dernière, avant un référendum mémorable sur la réunification avec la Crimée. Devons-nous comprendre que la glace est brisée ? Et que la communauté des affaires en Allemagne a finalement convaincu ses politiciens que les sanctions contre la Russie ne vont nulle part, et, si oui, qu’il est temps de faire un effort pour trouver une stratégie de sortie ? Hélas, ce serait une évaluation trop optimiste.

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Oh Pétrole, où est ton pic?


Par F. William Engdahl – Le 09 octobre 2015 – Source journal-neo.org

675675444Il y a deux grands mythes utilisés au cours des dernières années pour convaincre le monde de la catastrophe imminente si nous ne changeons pas radicalement notre style de vie vers plus d’austérité. Les deux mythes sont basés sur une fraude scientifique et sur leur propagation dépourvue d’esprit critique par des médias complaisants et même par certains médias alternatifs. L’une est l’idée que le climat du monde se réchauffe, ou tout au moins change, en raison presque exclusivement de notre comportement, par nos émissions anthropiques. Le deuxième grand mythe, a été lancé en 1956 à Houston au Texas par un employé de l’une des plus grandes compagnies pétrolières du monde, puis il a été dépoussiéré il y a 15 ans au début de l’administration Dick Cheney-Bush. Il a été appelé la théorie du pic pétrolier.

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Les Shadocks européens en majesté. L’idéologie dans tous ses états (baltes)


La Lituanie veut en finir avec sa dépendance énergétique en construisant un gazoduc relié à la Pologne… qui ne produit pas de gaz !

 

Les pays baltes désirent en finir avec leur dépendance énergétique à la Russie en construisant pour $500 millions un gazoduc connecté au réseau gazier européen... Réseau qui lui-même reçoit son gaz de la Russie. Génial !!!

RI Le 16 octobre 2015 – Source Russia Insider 

La Pologne et la Lituanie ont signé un accord formel sur la construction d’un gazoduc reliant les deux pays, a déclaré la Commission européenne ce jeudi.

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Réduire la techno-sphère, Partie II

Dmitry OrlovPar Dmitry Orlov – le 14 octobre 2015 – Source Club Orlov

Partie I

 

 

Les technologies politiques ont trois objectifs principaux:

1. Changer les règles du jeu entre les participants dans le processus politique.
2. Introduire dans la conscience de masse de nouveaux concepts, des valeurs, des opinions et des convictions.
3. Manipuler directement le comportement humain à travers les médias de masse et les méthodes administratives.

Les technologies politiques poursuivent ces objectifs tactiques en conformité avec des impératifs stratégiques, plus élevés, et c’est seulement la nature noble de ces impératifs élevés qui peuvent justifier l’utilisation de ces moyens non démocratiques, tenus d’une main ferme. Oui, la fin justifie les moyens, de temps en temps. Il vaut mieux, pour sauver l’humanité et le monde naturel, utiliser des moyens non démocratiques que de les laisser s’éteindre en adhérant à ceux qui sont strictement démocratiques.

Mais souvent, les impératifs sont beaucoup moins nobles. Ils peuvent être séparés en deux catégories:

1. Améliorer le bien-être de tout le monde par la poursuite du bien commun de toute la société, tel qu’il est compris par ses membres les plus instruits, les plus dignes et responsables, les plus intelligents. Les technologies politiques de ce genre résultent d’un cercle vertueux, se fondant sur les succès précédents pour renforcer la cohésion sociale, la solidarité et la mise en scène pour de grandes réalisations. (Ce sont les bons côtés.)

2. Enrichir, donner du pouvoir et protéger les intérêts particuliers au détriment du reste de la société. Ces types de technologies politiques ne réussissent pas à surmonter leurs contradictions internes ou sont entraînées dans un cercle vicieux, dans lequel ceux qui en bénéficient s’acharnent à obtenir des niveaux toujours plus élevés de comportements égoïstes au détriment des autres, préparant le terrain pour des résultats sociaux désastreux, une stagnation économique, une violence de masse et une guerre civile éventuelle avec une désintégration politique. (Ce sont les mauvais côtés.)

Prenons les États-Unis à titre d’exemple. Les États-Unis prennent actuellement plus que leur juste part de cette seconde description. Passons brièvement en revue une douzaine de références à ces comportements, parmi les plus importantes.

1. Le lobby des combustibles fossiles.

Objectif : Convaincre la population américaine qu’un changement catastrophique climatique anthropique ne se produit pas.

Moyens : Mener des campagnes de diffamation contre les scientifiques du climat, publication de faux articles scientifiques, dénigrement de la science dans son ensemble, présentation du mouvement pour arrêter le changement climatique catastrophique comme une conspiration, etc.

Ce lobby montre quelques signes de défaillances avec une contradiction interne, comme quoi certaines parties de Caroline du Sud, un État soi-disant conservateur, finiraient sous l’eau dans un prétendu «déluge de mille ans» (qui sera bientôt rebaptisé «crue centennale», puis  «crue décennale» et, enfin, en inondation blub-blub-blub). Contrairement à la Caroline du Nord, la Floride (un autre État blub-blub-blub) et le Wisconsin, la Caroline du Sud n’a pas interdit l’utilisation du terme «changement climatique» aux employés de l’État; non pas que quiconque l’ayant entendu puisse les utiliser comme il veut. Lorsque les technologues politiques commencent à interdire l’utilisation de mots, vous savez qu’ils sont de plus en plus désespérés. Au niveau de la technologie méta-politique, quand un technologue politique montre des signes de défaillance par une contradiction interne, il est souvent préférable de laisser les choses suivre leur cours. Après tout, qu’importe si les responsables en Caroline ou en Floride utilisent le terme changement climatique ou le terme blub-blub-blub?

2. Les fabricants d’armes.

Objectif : Convaincre la population américaine que la propriété privée des armes à feu met les gens à l’abri, qu’elle est efficace pour prévenir la tyrannie du gouvernement, et qu’elle est un droit devant être défendu à tout prix.

Mais là aussi, on voit apparaître quelques signes de défaillance avec une contradiction interne, comme l’augmentation du nombre de fusillades de masse aux États-Unis. Le niveau de lavage de cerveau ici est assez élevé, et les autorités américaines pourraient se trouver contraintes de recourir à la manipulation directe pour ramener la situation sous contrôle (enfin c’est ce qu’ils espèrent). Cela peut impliquer une sorte de bras de fer féroce entre le gouvernement et les fous des armes à feu, dans lequel ces derniers sont décrits comme des terroristes, des hors-la-loi qui, dans un exercice de démonstration, seraient instantanément anéantis par l’armée, la marine et l’armée de l’air. Mais cela ne ferait que mettre en évidence la prochaine couche de contradictions internes: en démontrant de façon décisive que la possession d’une arme à feu ne vous met pas à l’abri, et que les armes sont inutiles dans la prévention de la tyrannie, le gouvernement serait forcé d’admettre tacitement qu’il est, de fait, une tyrannie en guerre avec son propre peuple. Et cela nuirait à un certain nombre d’autres technologies politiques dont le gouvernement dépend pour sa survie politique.

3. Le système politique à deux partis, avec les lobbyistes et ses sponsors parmi les corporations, le big money et des étrangers.

Objectif : Garder les gens dans la croyance que les États-Unis sont une démocratie et que les gens ont le choix. D’une part, cette technologie semble fonctionner. Beaucoup de gens ont voté pour Obama (certains d’entre eux deux fois!), puis ont eu un grand moment de solitude face au fait qu’il n’était qu’un imposteur, à peine différent de son prédécesseur, et que tout ce qu’il avait dit pour obtenir leur vote était seulement une musique de l’espoir. Et maintenant, beaucoup de ces mêmes personnes sont prêtes à voter de nouveau, pour un quelconque autre politicien de carrière, démocratique, jouant le même genre de musique de l’espoir. Mais malgré tout, cet aspect de la technologie politique semble être   plutôt en déclin. L’appareil des partis paraît incapable de produire des candidats viables. Les républicains sont dans le désarroi interne et semblent particulièrement vulnérables, risquant d’être relégués au second plan par des étrangers comme Trump. En outre, la plupart des électeurs ne s’identifient plus avec l’un ou l’autre des partis, un développement troublant pour les technologues politiques chargées de les faire paître d’un côté ou de l’autre de l’échiquier politique.

4. Les entreprises de défense et les élites autour de la défense nationale.

Objectif : Justifier les budgets de défense exorbitants au prétexte qu’ils gardent la nation en sécurité en déjouant les malfaiteurs et autres absurdités. Les États-Unis ont un système de défense très coûteux, mais très inefficace.

Affaire en cours : Les hostilités en Syrie menacent de dégénérer. Les États-Unis ont ordonné au porte-avion USS Theodore Roosevelt de quitter le golfe Persique, laissant ce golfe sans un seul porte-avions américain pour la première fois en 6 ans.

La raison est simple : Bien qu’issus d’une recherche de pointe très coûteuse, les porte-avions américains ne sont efficaces que contre des adversaires très faibles et désorganisés. Quand on en vient à affronter de grandes puissances comme la Russie, la Chine et l’Iran, ils ne sont pas plus que des canards d’eau douce, sans défense contre les attaques de missiles de croisière supersoniques et de torpilles à super cavitation [1] – qu’en outre les Américains ne possèdent tout simplement pas. Ces signes évidents de faiblesse (et il y en a beaucoup d’autres) sapent les fondements de ces demandes en dollars pour la défense, selon lesquelles c’est de l’argent bien dépensé. Avec le temps, ce message est amené à sombrer comme la mise en place de la défense des États-Unis produit des cafouillages militaires inutiles, des rapports sans fondement, ceux des services de renseignement prenant leurs désirs pour la réalité, ce qui entraîne une contradiction interne grave.

Si on couple cette relative impuissance des armes de haute technologie américaines contre des adversaires équipés de façon similaire avec l’incapacité ou le refus de déployer des troupes au sol (après les grandes réussites dans les hachoirs à viande de l’Irak et de l’Afghanistan), on a une superpuissance d’antan dont la capacité à projeter sa force est plutôt circonscrite. Pourquoi, alors, est-ce que ça coûte autant? Une défaite aurait pu être obtenue pour beaucoup moins cher. Un signe de désespoir vient de cette dernière initiative américaine de déposer des palettes de munitions d’armes légères et de grenades à main dans les déserts du nord de la Syrie, dans l’espoir que certains terroristes modérés (mort de rire) seraient les premiers à les trouver pour les utiliser contre le gouvernement syrien.

La liste est longue, mais, pour des raisons de concision, et comme exercice pour le lecteur, je vais laisser celui-ci remplir en détail les exemples restants de mauvaises technologies politiques que l’on trouve aux États-Unis. Les informations ne sont pas difficiles à trouver. Demandez-vous si ces technologies vont échouer grâce à une contradiction interne, par le déclenchement d’un conflit plus large ou en provoquant une dégénérescence généralisée dans la population qu’elles oppriment.

5. L’industrie médicale.

Objectif : Maintenir les gens dans la conviction qu’une assurance maladie privée est nécessaire, que les frais médicaux exorbitants sont justifiés, que la médecine socialisée est en quelque sorte le mal incarné, et qu’ils reçoivent des soins médicaux de bonne qualité, en dépit de toutes les preuves du contraire.

6. L’industrie de l’enseignement supérieur.

Objectif : Maintenir les gens dans la conviction que l’enseignement supérieur aux États-Unis est une valeur sûre en dépit de ses coûts exorbitants, de la crise de la dette étudiante et du fait que plus de la moitié des diplômés universitaires et du collège ont été incapables de trouver un emploi professionnel.

7. Le complexe industriel des prisons.

Objectif : Maintenir les gens dans la conviction qu’emprisonner un pourcentage plus élevé de la population que ne l’a fait Staline, surtout pour des actes non violents, des crimes sans victimes, permet d’assurer en quelque sorte la sécurité de la population en dépit de l’inexistence de preuves.

8. L’industrie automobile.

Objectif : Maintenir les gens dans la conviction qu’une automobile à soi est la marque d’une liberté personnelle tout en dénigrant les transports en commun, en dépit du fait que si vous prenez en compte tous les coûts et les externalités des voitures particulières en les traduisant en heures de travail nécessaires pour payer pour cela, conduire une voiture se révèle moins rentable que la marche.

9. L’industrie agro-alimentaire.

Objectif : Maintenir les gens dans la conviction qu’un régime alimentaire constitué de nourriture pas chère, chargée de produits chimiques, produite industriellement est en quelque sorte acceptable en dépit du niveau élevé d’obésité, de maladies cardiaques, du diabète et d’autres affections qui en sont les conséquences.

10. L’industrie financière.

Objectif : Maintenir les gens dans la conviction que leur argent est en sécurité même s’il disparaît dans le trou noir sans cesse croissant d’une dette impossible à rembourser.

11. La religion organisée.

Objectif : Maintenir les gens dans la conviction que se prosterner devant un grand homme blanc dans le ciel, qui pourrait vous envoyer en enfer en dépit du fait qu’il vous aime, et qui, bien que tout-puissant, a toujours besoin de votre argent, l’emporte sur l’utilisation de votre propre raison se fondant sur des faits pour trouver votre propre chemin dans le monde. Cela amène les gens simples d’esprit à affirmer avec insistance que l’histoire fabriquée du dieu égyptien Horus, à laquelle on ajoute des morceaux de l’épopée de Gilgamesh et d’autres mythes anciens, est la parole de Dieu et la vérité littérale absolue. Il faut garder vivante la fiction que les personnes religieuses sont en quelque sorte plus morales ou plus éthiques que les personnes non religieuses.

12. Le système juridique.

Objectif : Maintenir les gens dans la conviction que le système juridique produit en quelque sorte la justice au lieu de se vendre au plus offrant, seulement pour nourrir une énorme armée d’avocats bien payés qui mériteraient leur argent, et que l’obéissance à un codex de lois si volumineux et si compliqué qu’il en est complètement incompréhensible pour une personne moyenne et même pour la plupart des avocats, signifie être un bon citoyen.

Comme vous le voyez, les États-Unis supportent un certain poids de parasitisme dû aux mauvaises technologies politiques. Chaque groupe d’intérêt particulier peut faire appel à des technologues politiques pour mettre en place un système qui lui assurera un morceau disproportionné du gâteau, au détriment de tout le monde.

Tout ceci est déjà assez mauvais, mais les mauvaises technologies politiques provoquent un problème supplémentaire: elles affaiblissent l’esprit de ceux qu’elles oppriment. Leur principal objectif est de maintenir les gens dans la conviction de choses qui sont fausses. Une fois qu’elles réussissent, ces gens deviennent personnellement investis dans ces mensonges, viennent à s’y identifier et prennent toute information qui les contredit soit comme un affront personnel ou, à tout le moins, comme une source de dissonance cognitive inopportune. Cela les rend imperméables à de bonnes technologies politiques, celles qui cherchent à les convaincre de choses qui sont vraies et d’approches qui travaillent sur les faits pour les orienter dans le sens de faire ce qui est nécessaire. Ils sont ce que Andy Borowitz a appelé l’«homme résistant aux faits».

En raison de la forte charge parasitaire des mauvaises technologies politiques, la population des États-Unis ne peut pas comprendre l’importance d’en mettre de bonnes sur pied, comme celle visant à prévenir un changement climatique catastrophique. Un grand nombre de ces mauvaises technologies politiques sont sur le point d’échouer, soit par le biais de contradictions internes, soit en raison de leurs effets néfastes sur les personnes prises dans leurs sortilèges. Il est donc logique d’attendre.

En outre, le problème des États-Unis comme pollueur et perturbateur majeur du climat peut se résoudre de lui même : les États-Unis sont un pays qui souffre énormément du changement climatique, avec la côte Ouest et le Sud-Ouest courant vers des pénuries l’eau, le Sud décimé par des vagues de chaleur et la côte Est en passe de disparaître sous les vagues. Gardez à l’esprit que cela concerne moins de 5% de la population mondiale, un nombre important, mais pas assez important pour tenir en otage le reste de la planète.

Essayer de négocier avec les États-Unis pour prévenir un changement climatique catastrophique commence à ressembler à une perte de temps. Pourquoi les 95% devraient attendre de voir les 5% se creuser un trou assez profond pour eux-mêmes? Mais qu’est-ce qui ne serait pas une perte de temps? Telle est la question que nous allons traiter bientôt.

Dmitry Orlov

Traduit par Hervé, relu par Diane pour le Saker Francophone

[1] Précisions de l’Auteur

  • Les États-Unis disposent d’un missile de croisière supersonique air-sol lancé mais de  courte portée. Idem pour la France. Ils n’ont rien qui se compare avec le Kalibr russe, qui dispose d’un rayon d’action de plus de 1500 km et a été récemment testé en Syrie en conditions réelles avec 100% de réussite.
  • Les États-Unis n’ont pas de torpilles fonctionnant sur le principe de la super-cavitation.
  • La vitesse Mach 1 commence à 1,470km/h, et la vitesse de propulsion de la torpille US à hélice la plus rapide est de 500 km/h, moins de la moitié.
  • La Russie et l’Irak ont la torpille Shkval, qui nage à plus de 500 km/h.
  • Les porte-avions peuvent abattre des cibles subsoniques, mais ils ont pas de défense antimissile contre les supersoniques.
  • Contrairement aux Tomahawk subsoniques des Américains, le Kalibr peut être lancé depuis des petits navires.
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Peak Oil : Les éléments de base

Note du Saker Francophone 

Cet article vient compléter la série précédente sur le démontage de la théorie classique du Peak Oil. Comme il est court et assez synthétique, on vous le propose en digestif alors qu'il aurait mieux été à sa place en apéritif. L'ensemble étant maintenant disponible, on vous laisse donc y goûter à votre guise, bon appétit.

Par Allan Stromfeldt Christensen – Le 1er septembre 2015 – Source fromfilmerstofarmers.com

Préambule 

Contrairement à l'opinion reçue, nous ne vivons pas à l'ère de l'information. Nous vivons à l'âge du pétrole. Regardez autour de vous et essayez de trouver quelque chose qui ne soit pas lié au pétrole, tâche pratiquement impossible, que ce soit une arthroplastie de la hanche, les petits morceaux de plastique enroulés autour des extrémités de vos lacets ou la vaste infrastructure qui rend possible le soi-disant âge de l'information.

Le Saker Francophone

Le parallèle entre les prix alimentaires (en bleu) et ceux du pétrole (en rouge) Les prix des aliments et du pétrole. Ils sont étroitement liés. Après une période de stabilité à bas prix dans les années 1990, les deux ont maintenant atteins des sommets. Le récession de 2008 a poussé les prix vers le bas brièvement.

Nous dépendons du pétrole non seulement pour le superflu, mais aussi pour ce qui ne l’est pas, comme la nourriture. Ce n’est pas simplement une question de nourriture expédiée dans le monde entier grâce aux combustibles fossiles, le fait est que les combustibles fossiles sont utilisés pour planter et récolter nos aliments, et pour bien d’autres étapes. Les engrais que nous étalons sur nos champs sont extraits du sol et dérivés des combustibles fossiles eux-mêmes (l’ammoniac et l’urée que nous appliquons à nos champs pour l’azote sont des produits d’atomes d’azote appariés dans l’air autour de nous qui ont été subdivisés et combinés avec de l’hydrogène à partir de gaz naturel). Autrement dit, le pétrole et le reste des combustibles fossiles sont la pierre angulaire de la civilisation industrielle et de notre mode de vie moderne.

Découvrez le pic pétrolier.

Prévision en 1956 de Hubbert des futurs niveaux d’extraction pour les USA (source pdf)

D’abord conceptualisé par le géologue pétrolier M. King Hubbert dans les années 1950, le /pic pétrolier est une méthode dans laquelle Hubbert a utilisé les caractéristiques de production des champs de pétrole et prédit quand ils atteindraient leur mi-point d’extraction, un baromètre approximatif pour déterminer le sommet de leurs niveaux de production. Tout en travaillant pour Shell Oil à Houston, Hubbert a prédit en 1956 que sur la base du pic de découvertes de champs de pétrole dans les 48 États américains, soit le pic des niveaux de production des États-Unis, aurait lieu vers 1970. Pour faire court, il a été ridiculisé mais cela n’a eu aucun effet sur ses prédictions qui se sont réalisées en… 1970 [Pour être exact, il a aussi fait d’autres prédictions erronées, mais pas celle-là, NdT].

Peu de temps après, alors que les États-Unis ne pouvaient plus augmenter leurs niveaux de production de pétrole, ils ont perdu leur position de premier producteur mondial. Le rôle de producteur d’appoint, le ou les pays en mesure d’ouvrir et de fermer les robinets à volonté, est échu à l’Opep (Organisation des pays exportateurs de pétrole). Il s’en est suivi des embargos sur le pétrole du Moyen-Orient et toutes sortes de manigances géopolitiques à travers le monde au cours des décennies suivantes.

Niveaux de découverte de pétrole à travers le monde par rapport à l’extraction (source)

Bien que beaucoup de gens aient fait de grands efforts pour nier le pic pétrolier, d’une manière ou d’une autre, le pic de production de pétrole des États-Unis en 1970 est la preuve de sa réalité, qui n’est pas une théorie bizarre, mais un fait. En outre, alors que le pic de découverte de champs de pétrole dans le monde a eu lieu en 1964, 1981 est la première année où les niveaux d’extraction à travers le monde ont dépassé celui des nouvelles découvertes. Si on saute à 2008, et alors que 31 milliards de barils ont été pompés cette année là, seulement 7 milliards ont été découverts. En termes strictement géologiques, la question principale est alors : quand est-ce que le pic pétrolier va se produire à l’échelle mondiale ? Ou même, quand a-t-il déjà eu lieu ?

Le fait que ce soit une question litigieuse est dû aux définitions variables du pétrole. Si nous regardons ce qu’on appelle le pétrole conventionnel, qui est issu de forage et de pompage sous le sol, les déserts et autres surfaces assimilées, le pic a réellement eu lieu en 2005. (Un nombre croissant d’auteurs prend d’ailleurs ce pic de 2005 comme l’élément déclencheur principal pour les effondrements économiques récents et les récessions en cours, vues partout dans le monde, puisque les économies fondées sur la croissance nécessitent une  augmentation du niveaux d’extraction de pétrole afin de continuer à croître.)

La croissance de l’approvisionnement en pétrole augmente temporairement en raison du pétrole de schiste US ( source)

Cependant, depuis 2005, la forme statistique des approvisionnements mondiaux de pétrole est représenté sous forme d’un plateau ondulé, en légère augmentation, grâce aux sources de ce qui est connu comme le pétrole non conventionnel, les sables bitumineux, le pétrole en eau profonde, et en particulier, les pétroles de schiste. Il y a un problème, cependant, c’est que ces sources non conventionnelles de pétrole sont loin d’être aussi nombreuses [et rentables, NdT] que les sources conventionnelles, et leur ajout ne va pas compenser très longtemps la baisse des niveaux d’extraction du pétrole conventionnel.

En outre, alors que les champs de pétroles de schiste ont vu une forte augmentation des niveaux d’extraction (d’où la récente révolution du pétrole de schiste), les courbes d’extraction montrent aussi une diminution très rapide du volume par tête de puits. En d’autres termes, alors que les sources non conventionnelles ont seulement repoussé un peu plus le jour du jugement dernier – profitant des bulles spéculatives autour des pétroles de schiste, dont certains prédisent un éclatement proche – Wall Street ayant, jusqu’à présent, suivi scrupuleusement son script depuis la récente bulle immobilière, l’effet de la baisse globale d’approvisionnement sera encore pire. (Quand la bulle des pétrole de schiste va-t-elle éclater ? Quelque part entre 2015 et 2017 semble être le consensus parmi les moins épris des oracles de Wall Street et de ses profiteurs.)

Enfin, et contrairement aux espoirs et aux attentes des évangélistes technologiques et de nombreux écologistes, les énergies dites renouvelables sont loin d’être capables de remplacer l’énorme quantité de combustibles fossiles que nous utilisons actuellement (près de 90 millions de barils de pétrole par jour, et seulement pour le pétrole). Cela étant dit, les énergies renouvelables ne sont même pas renouvelables. Les installations de fabrication photovoltaïque ne sont pas alimentées par des panneaux solaires sur leurs toits, elles sont construites avec des combustibles fossiles. En d’autres termes, l’énergie renouvelable produite ne suffit pas à répondre à nos besoins ni même à entretenir, réparer et remplacer ses équipements de façon autonome (les panneaux solaires, onduleurs et batteries sont à changer tous les vingt ans, par exemple).

De même, les biocarburants exigent des engrais pétrochimiques pour les cultures, du diesel pour les tracteurs qui font la récolte, des combustibles fossiles pour construire les installations de traitement ainsi qu’une vaste puissance à base d’autres carburants pour le transport des combustibles obtenus jusqu’à leur point d’utilisation. Leur EROEI (Retour énergétique sur énergie entrante, le rapport de ce qui entre et de ce qui sort) sont si bas, au point d’être négligeables pour les besoins des sociétés fondées sur des exigences élevées en matière d’énergie, et entraînent même dans certains cas une perte globale d’énergie (les subventions gardent ces entreprises en activité). Alors que les premières découvertes de pétrole ont donné des EROEIs de 100:1, et un approvisionnement en pétrole pour le monde entier, maintenant, on atteint péniblement un rendement d’environ 20:1. Les sources de renouvelables comme les panneaux photovoltaïques ont un EROEI d’environ 2,5:1, et pas du tout autour de 15:1, estimation nécessaire pour maintenir la civilisation industrielle et tous ses accoutrements auxquels beaucoup d’entre nous se sont habitués et prennent pour acquis, la santé, l’éducation, les importations mondiales pas chères, les voyages pas chers, et ainsi de suite.

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Mettons les niveaux de consommation d’énergie actuels en perspective (source)

L’un des deux grands enjeux de notre temps, alors, est de savoir comment nous allons gérer le début de la fin des énergies fossiles et de notre civilisation industrielle.

Allan Stromfeldt Christensen

Traduit par Hervé, relu par jj et Diane pour le Saker Francophone

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Pic pétrolier – Cul par dessus tête [3/3]


Oubliez l’austérité et le Grexit – C’est l’heure du Gretaway !


Par Allan Stromfeldt Christensen – Le 30 septembre 2015 – Source fromfilmerstofarmers.com

Note du Saker Francophone

Dans ce dernier épisode, Allan propose un constat douloureux : sans énergie, des gens et même des pays peuvent se trouver exclus de la civilisation industrielle. Je vous laisse le plaisir de découvrir son Gretaway et la fin de son analyse.

“Prenez mon argent! Pleeeeeease!”

Donc nous sommes ici devant une sorte de précipice, en regardant le crépuscule de l’économie industrielle, dû au pic des approvisionnements énergétiques mais aussi au pic de l’offre de crédit (comme expliqué dans la partie 2 de cette série en 3 parties).

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Pic pétrolier – Cul par dessus tête [2/3]


L’effondrement des prix du pétrole n’est pas dû à une surproduction de pétrole, mais à une destruction de la demande et à un pic du crédit


Par Allan Stromfeldt Christensen – Le 11 septembre 2015 – Source fromfilmerstofarmers.com

Note du Saker Francophone

Ce second épisode permet de relier les problématiques de crédit et d'endettement à la production d'énergie, base de notre système économique.

Confusion naissante chez les hommes les plus intelligents de la salle
(photo de Rafael Matsunaga)

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Pic pétrolier – Cul par dessus tête [1/3]


Le pic pétrolier à la rencontre des réserves fractionnaires des banques, ou les liens entre la dette et l’énergie


 

Par Allan Stromfeldt Christensen – Le 1er septembre 2015 – Source fromfilmerstofarmers.com

Note du Saker Francophone

Je vous présente aujourd'hui le premier d'une série de trois articles qui reprennent la tonalité des textes récents de Gail Tverberg ou de Gérard Foucher, en liant énergie, dette et économie. Il aborde aussi un élément cardinal de la réinformation, appliquée à ces trois domaines : la prise de conscience.

image de Viktor Hertz

Cette année, l’effondrement des prix du pétrole, auquel s’est ajouté la semaine dernière son effondrement sur les marchés boursiers, m’a pris au dépourvu concernant les implications économiques du pic pétrolier.

Je présente dans cet article ce que j’en ai appris puis m’étendrai davantage à ce sujet dans les articles qui suivront.
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Pétrole pas cher – Pourquoi faut-il s’inquiéter?


«La fin du modèle de croissance perpétuelle équivaut à ce qui pourrait être appelé un pic des ressources de toutes sortes, à peu près au même moment.» Gail Tverberg


 

Par Gail Tverberg – Le 29 septembre 2015 – Source OurFiniteWorld

 

Note du Saker Francophone

Gail est décidément très prolifique en ce moment, signe que sa réflexion évolue avec la dégradation de la situation. Du coup son style qui n'est pas toujours extraordinaire, en pâtit encore. La traduction est donc parfois un peu lourde, nous nous en excusons par avance, mais ne vous y trompez pas. Pour avoir suivi assidûment le sujet des prix du pétrole depuis trois ans maintenant, je constate que le présent semble donner raison à ses analyses.

L'autre aspect de son travail, c'est la production de statistiques, ajustées des variations de change, de l'inflation et l’agrégation de sources. C'est un travail exceptionnel qui ouvre des pistes de réflexions à d'autres analystes. L'article vaut donc autant pour les graphiques que pour l'analyse qu'elle en fait.

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La plupart des gens croient que les prix bas du pétrole sont bons pour les États-Unis, puisque le revenu discrétionnaire des consommateurs va augmenter. C’est un élément supplémentaire qui indique que le pic pétrolier doit être loin devant nous, puisque les partisans du pic pétrolier parlaient de prix élevés du pétrole. Aussi, les prix bas du pétrole sont considérés comme un point positif, tout compte fait.

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L’ultime arme fatale de la Russie contre l’agression occidentale


Pepe Escobar

Pepe Escobar

Par Pepe Escobar – Le 21 septembre 2015 – Source reseauinternational 

Un défaut russe sur ses $700 milliards de dette extérieure enverrait des ondes de choc dans le système financier occidental.

 

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