Les Etats-Unis poussent à l’escalade en armant Kiev par l’intermédiaire d’Abu Dhabi

Le 24 février 2015 – Source Moon of Alabama

En dépit des profondes inquiétudes exprimées par leurs alliés européens, les États-Unis trahissent leur propres déclarations de ne pas livrer d’armes à l’Ukraine et augmentent ainsi les chances de l’élargissement d’une guerre catastrophique en Europe.

Le président issu du coup d’État ukrainien Porochenko est allé  au salon international des armes à Dubaï. Là, il a rencontré le chef des ventes d’armement militaire états-unien.

ABU DHABI – Le président ukrainien Petro Porochenko doit rencontrer, ici, des entreprises de défense américaines, mardi, lors du grand salon de l’armement, même si le gouvernement américain n’a pas autorisé les firmes à vendre des armes létales à Kiev.

Frank Kendall, le responsable des achats du Pentagone doit rencontrer une délégation ukrainienne lundi soir, cependant Porochenko ne devrait pas être là. Kendall, dans une interview, a dit qu’il apportera un message de soutien des États-Unis.

«Je pense que la conversation portera sur leurs besoins, a déclaré Kendall au site d’information Défense One quelques heures avant la réunion. Nous sommes limités pour l’instant dans ce que nous sommes en mesure de leur fournir, mais quand nous pouvons rendre service, nous le faisons.»

Porochenko, poussé par ses sponsors américains néocons, veut la guerre totale avec la Russie. Le vice-ministre des Affaires étrangères de Porochenko, actuellement en visite au Canada, a relayé le message:

Le vice-ministre des Affaires étrangères de l’Ukraine dit qu’il se prépare à une guerre totale contre la Russie et veut que le Canada l’aide en lui fournissant des armes létales et la formation qui va avec.

Vadym Prystaiko, qui jusqu’à l’automne dernier était l’ambassadeur d’Ukraine au Canada, dit que le monde ne doit pas avoir peur de se joindre à l’Ukraine dans sa lutte contre une puissance nucléaire.

Dans l’esprit de ces gens mener une guerre totale contre une superpuissance nucléaire comme la Russie n’est pas un problème. Ce sont vraiment des fous.

La Russie dit que si les États-uniens livrent des armes à l’Ukraine, cela créera un vrai problème. Les Russes ne parlent pas pour ne rien dire. Juste pour donner un aperçu de la manière dont elle contrecarrerait un tel problème, la Russie vient de proposer à l’Iran de lui vendre un système de défense antimissile S-300 amélioré :

Sergei Chemezov, directeur général de la société de défense russe Rostec, a déclaré que Téhéran envisageait de leur acheter un système Antey-2500, un système de défense anti-aérienne à capacités anti-balistiques.

L’Antey-2500 est un système mobile de missiles sol-air qui offre des capacités améliorées de combat, permettant la destruction d’avions et de missiles balistiques à une distance d’environ 2 500 km, selon son fabricant, Almaz-Antey.

Le système a été développé à partir d’une version moins avancée – le système S-300V des années 1980 – qui a une portée de 200 km. Un contrat de 2007 pour fournir le système S-300 à l’Iran avait été annulé en 2010, sous la pression des Etats-Unis et d’Israël…

Un tel système en Iran, en cas de conflit, mettrait en danger tous les avions états-uniens au Moyen-Orient.

Mais cette menace n’a pas fait reculer les États-Unis. Comme l’a dit le marchand d’armes des États-Unis à Abu Dhabi : «Quand nous pouvons rendre service, nous le faisons.» Les États-Unis vont maintenant blanchir leur programme d’armement de Kiev grâce à leurs dictatures-clientes du Moyen-Orient :

Christopher Miller @ChristopherJM

Porochenko, les Émirats arabes unis sont d’accord pour livrer certains types d’armements et de matériel militaire à #Ukraine.

Les Émirats arabes unis ne sont pas connus pour être des fabricants d’armes. Mais ils achètent beaucoup d’armes américaines. Ils vont maintenant les transférer à l’Ukraine pendant que les États-Unis jureront leurs grands dieux qu’ils n’arment pas l’Ukraine. S’imaginent-ils qu’on va les croire ?

Voilà encore une dangereuse escalade du conflit en Ukraine due aux machinations américaines. Cela se produit au moment même où la Russie, la France, l’Allemagne et l’Ukraine se réunissent à Paris pour essayer d’accélérer la mise en œuvre de l’accord de Minsk 2 sur le cessez-le-feu et trouver une solution politique de la guerre civile en Ukraine:

Lundi, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères d’Ukraine, Yevhen Perebyinis, a dit que pendant leur réunion à Paris, le quatuor des ministres des Affaires étrangères se concentrera sur la mise en œuvre des accords de Minsk et le retrait de l’artillerie lourde dans le Donbass.

Le gouvernement ukrainien a déclaré qu’il ne retirerait pas son artillerie aussi longtemps qu’il y aurait des escarmouches autour de quelques points chauds le long de la ligne du cessez-le-feu. A Shirokyne, à l’est de Marioupol, le bataillon néo-nazi Azov pro-gouvernemental continue d’attaquer les fédéralistes. La propagande ukrainienne soutient que les fédéralistes se préparent à attaquer Marioupol. C’est absurde et les fédéralistes ont nié avoir l’intention de poursuivre les combats. Contrairement au gouvernement ukrainien, les fédéralistes ont commencé à retirer leur artillerie et continueront à le faire.

Le gouvernement ukrainien viole l’accord de Minsk 2 en ne retirant pas son artillerie lourde de la ligne du cessez-le feu. Les États-Unis arment l’armée ukrainienne et vont bientôt entraîner les forces volontaires néo-nazies de la garde nationale.

Les grandes puissances européennes, l’Allemagne, la France et la Russie, essaient de calmer le conflit. Les États-Unis et leurs caniches de Kiev continueront à jeter de l’huile sur le feu. Si les Européens ne parviennent pas à contrecarrer Washington, l’Ukraine s’enflammera et l’Europe avec elle.

Dans la prochaine escalade, les livraisons états-uniennes d’armes à Kiev seront blanchies par l’intermédiaire d’Abu Dhabi.

Traduit par Dominique, relu par jj pour le Saker Francophone

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Le Maïdan un an après

Le Saker Original

Le Saker Original

Par Le Saker original – Le 22 février 2015 – source: vineyardsaker 

Aujourd’hui, c’est le premier anniversaire de l’accord passé entre Ianoukovitch et l’opposition, et garanti par les ministres des affaires étrangères de la Pologne, Radosław Sikorski, de la France, Laurent Fabius, et de l’Allemagne, Frank-Walter Steinmeier. Comme nous le savons tous, l’affaire a abouti à un retrait des forces de sécurité du centre de la ville de Kiev, immédiatement suivi par une insurrection armée qui a renversé le gouvernement. De façon prévisible, la Pologne, la France et l’Allemagne ne s’y sont pas opposées. Je ne vais pas raconter tous les événements qui ont eu lieu depuis ce jour infâme, mais je pense qu’il est important de regarder ce qui a changé en un an. Je pense qu’il est également judicieux de comparer ce que j’avais prédit qui allait se produire avec ce qui s’est réellement passé. Cela simplement pour voir si une personne qui n’a aucun accès aux données confidentielles et qui n’utilise que des sources libres d’accès pour son analyse aurait pu prédire ce qui s’est passé ou si ce n’était qu’une énorme surprise, totalement imprévisible.

Voici donc mes prédictions dans un ordre chronologique.

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Les US regardent la Chine
La Chine regarde le monde

Pepe Escobar

Pepe Escobar

Par Pepe Escobar – Le 20 février 2015 – Source Russia Today

Proverbe chinois: quand le sage montre la lune, l’imbécile regarde le doigt

La première économie mondiale est à la fête au moment d’entamer une nouvelle année du zodiaque chinois. Bienvenue dans l’année du mouton. Ou de la chèvre. Ou du bélier. Ou, techniquement, le mouton (ou la chèvre) de bois vert. Même les meilleurs linguistes chinois ne parviennent pas à s’entendre sur la traduction en anglais. Mais qui s’en soucie?

Reuters/Bobby Yip

Le Chinois moyen hyper-connecté – qui jongle avec ses cinq appareils intelligents (smartphones, tablettes, liseuses) – avance bravement vers une véritable révolution commerciale. En Chine (et dans le reste de l’Asie), les transactions en ligne représentent maintenant le double de la valeur combinée des transactions aux Etats-Unis et en Europe.

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Errare humanum est
Perseverare autem diabolicum

Le 23 février 2015 – Source vestnikkavkaza

L’Occident admettrait-il qu’il a commis des erreurs?

Des politiciens et des analystes occidentaux d’opinions diverses parlent de plus en plus souvent des mêmes choses ces derniers temps: la reconnaissance des erreurs commises par l’Occident dans l’évaluation du jeu de la Russie dans l’arène géopolitique.

Par exemple, un contributeur régulier du quotidien allemand Frankfurter Allgemeine, Klaus-Dieter Frankenberg, a accusé l’Europe d’erreur de calcul catastrophique: «L’Union européenne et le Royaume-Uni ont douloureusement mal jugé l’humeur à Moscou, la crise ukrainienne, ils se sont comportés comme des fous qui marchaient dans leur sommeil. En fait, l’Union européenne pourrait être accusée d’erreur de jugement, qui résulte de la croyance naïve que la Russie est en train de devenir un Etat démocratique», écrit Frankenberg.

Une position moins radicale a été annoncée aujourd’hui par le ministre des Affaires étrangères de Slovaquie, Miroslav Lajcak. Il a pressé l’Occident d’entamer un dialogue avec la Russie, faute de quoi il ne sera pas possible de trouver une solution au conflit en Ukraine ni de garantir la sécurité en Europe. «Nous avons besoin de communiquer. Il est nécessaire d’écouter les points de vue de ceux avec qui nous sommes en désaccord. Il est absolument indispensable de les connaître et de les analyser», a-t-il déclaré.

A son tour, le journaliste britannique Graham Phillips, a dit qu’il avait honte de la position de la Grande-Bretagne par rapport aux événements du Donbass. Il a fait cette déclaration en réponse à une lettre du ministère des Affaires étrangères britannique, qui lui recommandait de quitter le Donbass. Phillips a dit qu’il y resterait, car le but de son travail est d’éduquer les citoyens sur la situation dans la région, contrairement à la propagande diffusée par les médias occidentaux et à la position erronée de Londres.

Finian Cunningham, un journaliste américain, accuse les Etats-Unis d’invoquer le prétexte de la nécessaire protection contre la Russie pour exploiter l’Europe: «Qui paie pour cette mégalomanie américaine ? Comme d’habitude, l’Europe. La guerre à nos portes et les sanctions, la destruction de l’économie européenne – c’est le prix de l’alliance avec les Américains narcissiques», affirme Cunningham.

Traduit par Diane, relu par jj pour le Saker Francophone

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Kiev ferme 23 points frontière avec la Russie

Le 21 février 2015 – Source Sputnik

Les autorités ukrainiennes ont fermé 23 postes frontières avec la Russie. Ceci a été annoncé par le Service de la protection des frontières, ce samedi 21 février à Kiev.

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Iatseniouk: Kiev doit contrôler la frontière avec la Russie

Il s’agit des points de contrôle de la frontière des districts de Lugansk, Donetsk, Tchernigov, Soumy et de Kharkov.

«Avec la fermeture, le réseau des points de contrôle doit être optimisé et plus de moyens et de forces doivent être concentrés sur les sections importantes de la frontière avec la Russie

Auparavant, le conseil des ministres ukrainien avait déjà fermé six points de passage dans la région de Donetsk et huit dans la région de Lougansk.

Ainsi, à la frontière russo-ukrainienne se trouvent actuellement 39 points de passage ouverts: 3 dans la région de Tchernigov, 14 dans la région de Soumy, 15 dans la région de Kharkov, 6 dans la région de Lougansk et un seul point dans la région de Kiev.

Traduit par Toma, relu par jj pour le Saker Francophone

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Méchant Assad, méchant Kadhafi et maintenant méchant Poutine: Comment l’Ouest vend ses guerres (et commet ses massacres)

Par Ghada Chehade – Le 21 février 2015 – Source Russia Insider

Politiques de distraction et variables économiques en Ukraine
Parallèle avec la Syrie, la Libye et l’Irak.

L’ennemi N°1

Alors que le conflit en Ukraine persiste et que les pourparlers de paix entre Poutine et les dirigeants d’Europe occidentale (Merkel et Hollande) continuent, il est important de s’intéresser aux acteurs et aux intérêts économiques qui bénéficient du conflit et du changement de régime en Ukraine, et de faire la comparaison avec la situation de pays comme la Syrie, la Libye et l’Irak.

Il y a des aspects de ces conflits, et des intérêts qui les sous-tendent, qui échappent au public parce que les médias subventionnés occidentaux les passent sous silence et que les gens, submergés par les difficultés humaines et politiques, ne pensent pas à les rechercher. Par exemple, les médias subventionnés passent tout leur temps à diaboliser un ennemi après l’autre, que ce soit Poutine du fait de la situation en Ukraine, Assad en Syrie, Kadhafi en Libye ou Saddam Hussein en Irak, etc., au lieu d’enquêter sur la manière dont des acteurs externes exploitent ou renforcent ces conflits et ces situations pour en tirer des profits politico-économiques, comme l’accès au pétrole, l’obtention de prêts du FMI aux conditions d‘octroi destructrices ou l’interruption de politiques nationales qui nuisent aux intérêts économiques et à l’influence de puissances étrangères.

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Le suprématisme compulsionnel finit par lasser

Par Philippe Grasset – Le 19 Février 2015 – Source dedefensa

Armé de son demi-siècle d’expérience de chroniqueur US installé à Paris, William Pfaff observe ce 18 février 2015 la Compulsion to Dominate de Washington, affection mentale entrée dans sa phase aiguë après la chute du communisme, accélérée irrésistiblement par 9/11 et qui est désormais précipitée dans sa phase complètement compulsive; cela commence à lasser même ses plus fidèles serviteurs formés aux écoles transatlantiques de la soumission standard. Pfaff décrit surtout, dans son texte, les résultats de cette sorte d’obsession assez proche de la manie compulsive et servant de politique aux USA au Moyen-Orient, d’ISIS en Daesh et en «État islamique» qu’il est nécessaire d’abattre absolument et immédiatement, avec l’installation d’un désordre sur le désordre, cela d’une façon telle qu’on en constate aisément la création et l’accouchement du désormais fameux hyperdésordre.

Profitant d’un moment d’inattention de Washington, qui s’est allongé sur un divan pour sa consultation habituelle, Pfaff décrit aisément son diagnostic qui n’est pas dépourvu d’une ironie fatiguée…

«Il y a aux États-Unis une incorrigible conviction que seule l’indispensable nation peut amener la paix dans d’autres nations par toujours plus d’interventions et de guerres, provoquant des guerres civiles, tribales et sectaires dans lesquelles les États-Unis choisissent leur camp, nomment les dirigeants, et accordent les institutions.»

«Ainsi, le président Obama a-t-il demandé récemment au Congrès l’autorisation de mener une guerre contre ISIL pour trois ans. Washington est déjà occupé à réaliser des frappes aériennes et fournit de l’armement et de la formation aux troupes du Moyen-Orient, affirmant comme justification un droit inhérent à l’auto-défense individuelle et collective.

Quelle est la menace que représente ISIL  pour les États-unis? S’il existe une menace pour les forces américaines dans la région, ce serait facilement résolu par le retrait de ces forces.

«Cela laisserait les Arabes à eux-mêmes pour se défendre contre peu importe quoi ou peu importe qui les menace. N’est-ce pas mieux de cette façon? La raison principale pour laquelle la guerre au Moyen-Orient a continué depuis près de quarante ans, c’est que les troupes américaines ont été déployées en permanence sous une forme ou une autre, avec une justification ou une autre, depuis l’opération Bouclier du désert en 1990. (Auparavant, l’administration Reagan avait envoyé les forces US au Liban pendant trois mois, avec des conséquences désastreuses pour les  Marines US, provoquant le retrait de la force).»

«Washington a été obsédé par le Moyen-Orient depuis 1990, en raison du pétrole qui s’y trouve, d’Israël et de la reconnaissance du fait que la région constitue le centre et le dynamisme de la religion islamique, même si la majorité des musulmans dans le monde sont en Indonésie, au Pakistan, et ailleurs en Asie, et en Afrique…»

En fait, parlant de son ironie fatiguée (celle de Pfaff), nous faisions allusion plus précisément au dernier paragraphe de son commentaire qui n’est pas cité ci-dessus, qui le conduit tout de même, et fort justement, à en venir à l’Ukraine et à Poutine. Ce raccourci-là était nécessaire, tout comme ses dernières observations où il implique le couple Merkel-Hollande et ses escapades poutiniennes, et l’incompréhension béate des experts et commentateurs washingtoniens qui continuent à vouer la Russie aux gémonies absolument… Il est vrai que, dans une analyse prémonitoire, le même Pfaff avait prédit, aux premiers signes de la phase aiguë de la manie compulsive, que tout cela se terminerait en A Burlesque of an Empire («To Finish in a Burlesque of Empire?», dans l’International Herald Tribune du 12 mars 1992, voir le 23 novembre 2003 sur ce site) ; traduction inutile, «a burlesque of an empire» … Au contraire pour la conclusion de l’article d’hier de Pfaff, et, disons, au moins pour le plaisir de la plume:

«Depuis la chute de l’Union soviétique, la politique de Washington a été conduite par une obsession compulsive de domination, et pas seulement au Moyen-Orient. C’est ce qui, plus récemment, a inspiré le coup en Ukraine: compléter l’érection d’un mur de l’OTAN autour de la Russie, et intimider Vladimir de manière à faciliter son remplacement. Cela a conduit à l’intervention d’Angela Merkel et de François Hollande ce dernier week-end pour bloquer le programme américain d’envoi d’armes à ce pays, selon une démarche bien dangereuse, toujours pour intimider Vladimir Poutine. Les principaux pays européens n’ont plus confiance dans le gouvernement américain. Cela peut être considéré, peut-être même devrait-on dire que cela doit être considéré comme un développement rassurant, bien que nombre d’Américains n’aient pas encore compris pourquoi.»

Finalement, ce que marque l’article de Pfaff, c’est la mise en évidence soudaine d’une certaine fatigue, voire d’une grosse fatigue de l’Empire. Nous parlions plus haut, comme on dispose d’une image symbolique pour permettre une transition, «d’un moment d’inattention de Washington, qui s’est allongé sur un divan pour sa consultation habituelle»; il est vrai que, depuis quelques jours, disons une grosse semaine, on a soudain la perception d’une baisse de rythme de la folie compulsive de l’Empire. Deux événements servent d’explication de circonstance à cette sorte de passage à vide, qui ne sont que des occasions, des exutoires opérationnels de quelque chose de plus profond…

• La comédie grotesque d’un Obama demandant au Congrès des pouvoirs de guerre pour partir-en-guerre contre ISIS/Daesh, sur lequel on tape déjà et qui n’en a cure, qui est une créature de la nébuleuse Washington-Riyad et Cie, cette comédie devait donner un certain lustre à l’entreprise impériale saisonnière contre la menace-contre-la-civilisation de service. Le Congrès soutenant la chose, ce serait une sorte de légalisation au moins pour une saison de l’illégalité permanente où barbote l’Empire, ou plutôt le Système dans son appendice à prétention impériale au sein du bloc BAO. Cela permettrait de maintenir un rythme languissant, mais un rythme tout de même dans la marche en avant de cette machine destructrice d’entropisation. Mais Washington étant ce qu’il est devenu, une machine dans la machine fabriquant de l’impuissance et de la paralysie, le Congrès rechigne. Là où Obama croyait la piètre partie aisément jouable, il rencontre une étrange coalition des deux ailes, aussi bien des républicains super-hawks que des démocrates qui jouent à être effarouchés par les risques de l’aventure extérieure. Il y a même des commentateurs pour croire que l’occasion est bonne pour monter un procès, comme le propose Andrew J. Bacevich le 14 février 2015 :

«La demande du Président Obama pour l’Autorisation d’utiliser la Force Militaire (AUMF) ne pouvait pas arriver à un moment plus propice. Le projet d’AUMF représente pour le Congrès une extraordinaire opportunité de ne pas entériner les mesures déjà prises et de faire le bilan d’une entreprise qui dépasse déjà la guerre du Vietnam en longueur tout en ne montrant pas le moindre signe de succès final. L’effort de l’armée américaine, afin de stabiliser, de pacifier, de dominer ou de démocratiser le Grand Moyen-Orient a échoué irrémédiablement. Taper plus fort encore, avec des frappes aériennes ou des raids d’opérations spéciales ou même avec une opération offensive durable au sol ne donneront pas un résultat différent.»

• Sur le front ukrainien, ces quinze derniers jours ont constitué un revers majeur pour Washington. L’entrée en piste du couple Hollande-Merkel sous la houlette d’un Poutine qui s’avère increvable, la médiocrité exceptionnelle, – tout est exceptionnel avec Washington – de la direction ukrainienne, le chaos lunaire qu’est devenu l’armée ukrainienne dans ses expéditions intérieures, tout a conspiré, comme dans un vaste complot dont nul ne connaît l’instigateur, pour repousser l’Empire et ses livraisons d’armes sur la touche. Washington a encaissé tout cela sans riposter, il a même voté à l’ONU en faveur d’une motion déposée par la Russie haïssable et promise à être détruite. Depuis le sommet de Moscou, à Canossa-sur-la-Moskova, les USA semblent paralysés dans l’affaire ukrainienne, là aussi brusquement privés de leur rythme, à bout de souffle et à court d’idées déstabilisatrices. Comme l’observe Pfaff, les principaux pays européens n’ont plus confiance dans le gouvernement américain – et Dieu sait si ces gouvernements européens sont les derniers à encore soutenir les USA puisqu’ils considèrent en général se trouver dans la même galère (le bloc BAO). Et le gouvernement américain reste là, sans réaction, et le Congrès n’en fait pas plus, avec sa pile de lois votées pour soutenir et surarmer l’Ukraine contre la Russie, ces lois qui semblent brusquement devenues dérisoires.

Pour survivre dans l’occurrence actuelle qui réunit tous les ingrédients de l’effondrement, l’Empire a besoin de mouvement, c’est-à-dire du mouvement perpétuel en avant, de ce qu’on nomme la fuite en avant, courir toujours plus vite pour ne pas risquer de tomber si l’on cesse de courir, fuir la réalité de cette manie compulsive de la domination qui semble désormais s’exercer sur le vide. Pour cela, il faut du rythme, et pour maintenir le rythme, il faut du souffle. Si l’un et l’autre viennent à manquer et imposent une pause qui peut être fatale, alors se découvre le paysage où l’on évolue, qui est le produit direct des actes additionnés depuis des années, qui sont des actes de destruction, de désolation, de désertification nihiliste. Nous sommes dans un de ces moments, sans savoir bien entendu s’il est décisif ou passager. L’Empire s’est arrêté, brusquement épuisé, et il contemple sans rien voir précisément ni y comprendre grand-chose le produit de sa domination.

Comme le notait Pfaff il y a plus de vingt ans, cet Empire-là n’a même pas la grandeur de ses plus grands prédécesseurs, qui avaient le sens de la tragédie qu’est l’Histoire, et de la tragédie que leur propre sort constituait. L’incompréhension de ce qu’il est réellement, l’aveuglement pour contempler la production de sa politique nihiliste, l’empêchent d’atteindre à cette dimension qui fait qu’on reste à la hauteur de ses ambitions même contrariées jusqu’à l’effondrement, et qu’on peut prétendre avoir eu un destin historique. Effectivement, malgré les destructions, les souffrances, le mensonge général, l’hypocrisie élevée à la grandeur d’un des beaux-arts de l’esprit, malgré la puissance, le poids des armes et la rapacité de l’argent, malgré le pouvoir de l’illusion et du simulacre, l’Empire se retrouve nu dans ces moments-là, pauvre prisonnier d’une pathologie convulsive alimentée par un hybris dévorant, caricaturé impitoyablement par ses propres discours – A Burlesque of an Empire, décidément…

Philippe Grasset

Extraits en anglais traduits pas Toma, relus par Diane pour le Saker Francophone

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La «guerre du gaz» entre la Russie et l’Ukraine menace l’approvisionnement des Républiques de Donetsk et de Lougansk

Le 20 février 2015 – Source Fort Russ

Medvedev , Premier Ministre russe

Medvedev: Si l’Ukraine ne paie pas le gaz, nous devrons prendre une décision difficile 

Vladimir Poutine a tenu une réunion d’urgence avec les membres permanents du Conseil de Sécurité de la Russie. Le président a donné à son gouvernement l’ordre d’appliquer strictement les termes du contrat signé avec l’Ukraine sur les livraisons de gaz.

Je demande au gouvernement de la Fédération de Russie d’observer strictement les obligations contractuelles, et de les remplir à la lettre,” a souligné le président.
Dmitri Medvedev, à son tour, a déclaré que Kiev devrait payer pour toutes les livraisons de gaz à l’Ukraine, y compris les livraisons qui prennent le chemin du Donbass. Si l’Ukraine ne paie pas pour l’intégralité du gaz, la Russie sera obligée de prendre une décision difficile.

Soit nos partenaires ukrainiens paient tout le gaz que nous livrons, soit nous serons obligés de prendre, à nouveau, une décision difficile“, a déclaré le Premier ministre.

Il y a quelques jours l’Ukraine a arrêté les livraisons de gaz aux républiques de Donetsk et de Lougansk. Cela a provoqué une situation d’urgence. La Russie disposait encore sur son territoire de réserves de gaz payées par l’ukrainien Naftogaz et donc le gouvernement russe a ordonné à Gazprom de rediriger une partie de ce carburant vers la RPD et la RPL.

Commentaire de J. Hawk, traducteur du russe

Après avoir perdu la guerre sur le champ de bataille, la junte la poursuit par d’autres moyens. Ils ont pris plusieurs mesures, dont l’arrêt de l’alimentation en gaz de la RPD et de la RPL, qui semble destiné à couper les deux républiques du reste de l’Ukraine et à forcer la Russie à les intégrer davantage dans ses propres systèmes énergétiques.

La réaction de la Russie est tout à fait appropriée – la Russie va simplement soustraire le gaz qu’elle envoie directement au Donbass du volume que l’Ukraine à déjà payé. Si l’Ukraine ne parvient pas à effectuer un prépaiement total, la Russie cessera de livrer du gaz à l’Ukraine. C’est cela la décision complexe ou compliquée ou difficile (le mot est particulièrement difficile à traduire parce que sa signification dépend du contexte) dont Medvedev a parlé.

Traduit de l’anglais par Dominique, relu par jj pour le Saker Francophone

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Londres: Chambre des Lords L’UE «somnambule» en Ukraine

Le 20 février 2015 – Source Russia Today

le cauchemar la réveille
[Note du saker francophone]

De gauche à droite les ministres des Affaires étrangères, Fabius (France), Lavrov (Russie), Steinmeier (Allemagne) et Klimkin (Ukraine). (Reuters/Thomas Peter)

L’UE est entrée comme une somnambule dans la crise ukrainienne, du fait de son incapacité à prendre en compte l’inquiétude que les politiques occidentales suscitaient à Moscou, selon un rapport parlementaire britannique. Les Européens ont perdu toute capacité d’analyse en ce qui concerne la Russie.

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Leonid Koutchma commente la réunion de Minsk:
s’est-il montré trop bavard?

Le 19 février 2015 – Source Fort Russ

En disant : Obama a discuté quatre heures avec Poutine, Koutchma s’est-il montré trop bavard?

Leonid Koutchma, ancien président ukrainien

Leonid Koutchma, ancien président ukrainien

[Les commentaires entre crochets sont de Kristina Rus, la traductrice du russe à l’anglais]

Notre président a trouvé les négociations très difficiles [Koutchma est un fidèle ami de Porochenko!], parce que ce n’étaient pas des négociations, mais une guerre dont les armes étaient les mots. [Porochenko a dû en prendre pour son grade!].

Vous pouvez aisément vous représenter la tension qui régnait pendant les négociations avec les représentants des soi-disant Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk, parce que, vous le comprenez bien, ils n’avaient aucun désir de parvenir à un consensus ni, plus important encore, de redonner la paix à ce, comment dirait-on, pauvre territoire. [Lire: ils n’ont aucun désir d’en passer par les conditions de l’Ukraine, mais, à en juger par son ton, on dirait que Koutchma lui-même ne croit pas vraiment à ses propres paroles quand il dit qu’ils ne veulent pas la paix.]

Il était prévu que le groupe de contact, ainsi que Zakharchenko et la République populaire de Lougansk, signent le document, le transmettent ensuite aux quatre présidents, et enfin qu’ils viennent tous ensemble voir les journalistes pour bénir le document et dire: «Les gars, soyons amis !» [Porochenko a été pris dans une embuscade!]

Mais quand nous nous sommes assis autour de la table avec Zakharchenko et Plotnitsky pour signer le document, ils ont déclaré : «Nous ne signerons pas ce document, il ne nous convient pas!» Et ils ont ajouté: «Vos gars sont aujourd’hui pris au piège dans le chaudron près de la gare, la principale voie de chemin de fer en Donbass, nous leur offrons de se rendre, de déposer les armes et de les laisser sortir en paix», et des choses du même genre, selon ce document. [Zakharchenko et Plotnitsky avaient comme atout Debaltsevo et les victoires militaires de la Novorussie; ils étaient donc en meilleure position pour négocier et avaient une longue liste de demandes.]

Bien sûr, c’était un dialogue de sourds [embuscade!], les QUATRE en ont été immédiatement informés. Ils ont failli repartir chez eux. Ils sont sortis un moment pour faire un break. [Personne n’a voulu laisser sortir Porochenko.]

Et la seule chose qui a changé dans ce document, la SEULE, bien que le Donbass ait proposé de nombreux amendements – c’est que le cessez-le-feu a commencé à 00H00 le 15 février au lieu de 08H00 le 14. C’est la seule chose qui a changé dans le document. [Pour se donner plus de temps pour en finir avec le chaudron Debaltsevo… Mais, vraiment – seize heures pour une SEULE chose? Je ne pense pas! Et pas un mot sur les concessions de Donbass?]

Mais les négociateurs ont si mal vécu la situation qu’au lieu de se présenter ensemble devant la presse (environ 500 journalistes les attendaient), comme ils étaient censés le faire, pour annoncer et bénir cette décision, ils sont venus tout seuls, l’un après l’autre. [Porochenko s’est vraiment pris de bec avec Poutine et a catégoriquement refusé de sortir avec lui.]

Pour moi, le fait que nous ayons mis les Européens, Poutine et l’Ukraine autour d’une table est un grand progrès. [Oh, et tout ça grâce à l’artisan de paix qu’est Porochenko – est-ce que c’est ce qu’ils lui ont dit pour se sentir mieux?] Et aussi le fait que les Européens et Poutine aient pris la responsabilité de ces documents signés à Minsk. C’est une chose d’observer la situation de l’extérieur et tout à fait autre chose de prendre des décisions. [Puisque l’accord entérinait la capitulation de l’Ukraine, c’est certain qu’obtenir de Poutine qu’il signe quoi que ce soit est en soi déjà une victoire pour l’Ukraine!!]

Bien sûr, il n’est pas exhaustif, bien sûr, nous aurions voulu davantage. Mais je pense que l’Ukraine a adopté la position qu’il fallait sur les questions majeures. [Bravo à Poutine et à Merkel qui ont réussi à convaincre au moins Koutchma qu’une autonomie de facto du Donbass est une victoire pour l’Ukraine.]

Si, après le 15 février à 00h00, les opérations militaires se poursuivent, alors je pense qu’il y aura un entretien d’un ton très différent avec la Russie et Vladimir Poutine. [Koutchma est-il certain que seul Poutine se bat dans le Donbass?]

Pouvez-vous imaginer dans quelle situation seraient Merkel et Hollande? Et même Obama, qui a eu une conversation de quatre heures hier avec Poutine? Poutine est-il quelqu’un avec qui on peut négocier et parvenir à un consensus, ou ce à quoi nous avons assisté jusqu’à aujourd’hui va-t-il continuer ? [Koutchma regarde trop la télévision ukrainienne!]

Pour nous, la question principale, c’est la frontière russo-ukrainienne. Si nous n’arrivons pas à contrôler la frontière, alors nous ne pouvons pas espérer une paix durable. [Entourer le Donbass avec du fil de fer barbelé et terroriser la population, ou mieux encore remplacer la population par des Ukrainiens patriotes permettra sûrement d’arriver à une paix durable.] Dans ce contexte, la Russie continuera à mettre du bois sur le feu pour alimenter l’incendie qui ravage l’Ukraine. [Pour empêcher l’Ukraine de poursuivre le génocide de la population du Donbass.]

On ne pourra pas empêcher l’incendie de se propager comme le choléra, du territoire du Donbass à nos autres régions. [Des régions qui n’acceptent pas non plus la junte de Kiev.] Par conséquent, c’est le cœur du problème, et je pense que nos autorités devraient faire de cette question une priorité.

J’aimerais que les Européens adoptent une position plus active. [Les Européens ont laissé choir l’Ukraine et les États-Unis.] Je crains que sous la pression des entreprises de leurs pays, ils ne veuillent régler la question ukrainienne au plus vite pour pouvoir retrouver des relations normales avec la Russie, du fait que l’Europe a désespérément besoin de l’énorme marché russe. [Koutchma, le parrain des oligarques ukrainiens, sait de quoi il parle! Mais alors pourquoi fermer cet énorme marché russe au business ukrainien?]

Après le 15 février, soit la situation se débloque, soit l’Europe devra adopter des sanctions plus sévères contre la Fédération de Russie [nous y revoilà, seul Poutine se bat dans Donbass!], parce qu’elle n’aura pas le choix. Surtout que Mme Merkel a mis sa réputation sur l’autel de la patrie.

La paix ne viendra pas tout de suite, mais au moins nous retirons l’équipement lourd et, surtout, nous avons donné notre parole. Nous verrons ce que vaut cette parole… [Il n’est même pas sûr lui-même que la parole ukrainienne vaille quelque chose!]

Traduit de par Dominique, relu par jj et Diane pour le Saker Francophone

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