L’opération américaine « appâter et allumer « cible les « causes premières » de Poutine


Par Alastair Crooke – Le 21 novembre 2025 – Source Conflicts Forum

Nous avons donc maintenant les détails du soi-disant « plan de paix » en 28 points qu’un parlementaire ukrainien, Goncharenko, a fourni en affirmant qu’il s’agissait d’une traduction de l’original.

Le texte – écrit comme un traité juridique putatif – frappera tout lecteur expérimenté comme étant le produit d’un amateur, articulée en plusieurs parties sur des « discussions ultérieures » et sur des « attentes« .

C’est-à-dire que beaucoup d’aspects de cet accord restent ambigus et vagues. Un tel plan est, bien sûr, dans l’ensemble inacceptable pour Moscou (bien qu’ils ne puissent pas le désavouer purement et simplement). Malgré cela, le plan a suscité fureur et recul en Europe. The Economist (reflétant le point de vue de l’Establishment) qualifie le document de « terrible proposition américano-russe qui acquiesce à bon nombre des demandes maximalistes [de la Russie] et en ajoute quelques-unes de plus« .

Les Européens et la Grande-Bretagne veulent la capitulation russe, purement et simplement.

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Courants croisés occidentaux : populisme culturel vs structures profondes


Par Alastair Crooke – Le 7 Novembre 2025 – Conflicts Forum

Le coup d’envoi des élections de mi-mandat de 2026 aux États-Unis a été lancé cette semaine avec trois élections consécutives et un scrutin clé de redécoupage organisé en Californie. Les Démocrates ont largement remporté trois élections majeures (NY, NJ, VA) et ont remporté la proposition de redécoupage en Californie. Le redécoupage californien pourrait donner aux Démocrates cinq sièges supplémentaires à la Chambre.

Car la lentille par laquelle comprendre ces événements est peut-être meilleure que celle des dernières élections générales britanniques : le parti au pouvoir était à la fois discrédité et largement détesté. L’électorat britannique a voulu lui infliger une gifle retentissante ; ce qu’il a dûment fait. Le problème était que les électeurs n’aimaient pas tellement les autres choix de partis non plus. Mais, pour porter leur message, ils devaient voter pour quelque chose. Le Parti travailliste a donc remporté une majorité écrasante, mais aucun mandat réel. Le Premier ministre Starmer et son parti (en fin de compte) sont aussi détestés que son prédécesseur.

La politique au Royaume-Uni est brisée pour le moment. C’est en grande partie la même chose en France.

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La politique étrangère américaine en lice : Trump est-il autorisé à conclure un accord avec la Chine (mais pas avec la Russie ou l’Iran) ?


Par Alastair Crooke – Le 30 octobre 2025 – Source Conflicts Forum

La politique étrangère américaine, trempée dans l’orgueil par le fait que les États-Unis ont gagné la guerre froide militairement (en Afghanistan) ; l’ont gagné économiquement (marchés libéraux) ; et culturellement aussi, (Hollywood) – et mérite donc à juste titre, comme le dit Trump, le “plaisir” de “diriger à la fois le pays et le monde”. Eh bien, cette politique est maintenant en litige pour la première fois.

Est-ce que cela aura de l’importance ?

Ce mois-ci, l’organisation RAND, une institution dont l’ombre plane depuis longtemps sur les sujets de politique étrangère étasuniens, a défié l’orgueil hérité de la Guerre froide à l’égard de la Chine.

Bien que le rapport se concentre sur la préoccupation de l’Amérique face à la menace de l’ascendant chinois, les implications d’une remise en question de la doctrine selon laquelle aucun challenger de l’hégémonie américaine, financière ou militaire, ne peut être toléré touchent au cœur absolu de la pratique de la politique étrangère américaine.

La principale conclusion de la RAND est que « la Chine et les États-Unis devraient s’efforcer de parvenir à un modus vivendi » ensemble en « acceptant chacun la légitimité politique de l’autre, limitant les efforts visant à se saper mutuellement, au moins dans une mesure raisonnable« .

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Le cadre financier et géopolitique mondial à l’aube d’un désordre imminent


Par Alastair Crooke – Le 23 Octobre 2025 – Source Conflicts Forum

La tentative de Trump de construire un « scénario de Budapest » (c’est-à-dire un sommet Poutine-Trump fondé sur « l’agrément » antérieure en Alaska) a été unilatéralement annulée (par les États-Unis) en pleine acrimonie. Poutine avait initié l’appel de lundi, qui a duré 2 heures et demi. Poutine aurait eu des mots forts dénonçant le manque de préparation des États-Unis pour un cadre politique – à la fois en ce qui concerne l’Ukraine, mais aussi de manière cruciale en ce qui concerne les besoins de sécurité plus larges de la Russie.

Cependant, lorsqu’elle a été annoncée par la partie américaine, la proposition de Trump était revenue (encore une fois) à la doctrine de Keith Kellogg (l’envoyé américain pour l’Ukraine) d’un « conflit gelé » sur la ligne de contact existante précédant toute négociation de paix, et non l’inverse.

Trump devait savoir, bien avant que les pourparlers de Budapest ne soient évoqués, que cette doctrine Kellogg avait été rejetée, à maintes reprises, par Moscou. Alors pourquoi a-t-il répété la demande à nouveau ? Quoi qu’il en soit, le scénario du sommet de Budapest a dû être annulé après que l’appel préétabli entre le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et le Secrétaire d’État Marco Rubio se soit heurté à un mur. Lavrov a de nouveau insisté sur le fait qu’un cessez-le-feu de type Kellogg ne convenait pas.

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Un bref audit géopolitique du Moyen Orient à l’occasion du deuxième anniversaire de l’opération Al-Aqsa flood


Par Alastair Crooke – Le 17 Octobre 2025 – Source Conflicts Forum

D’abord, le contexte :

  • Une doctrine promouvant la « domination » américaine, basée sur le « pouvoir » implacable de l’armée américaine et du marché, a donné naissance dans les cercles de Trump 2.0 à un zeitgeist qui non seulement écarte les craintes d’une guerre, mais impose plutôt aux États-Unis de frapper, rhétoriquement ou littéralement, dans de multiples directions à la fois ; principalement parce que la guerre unidirectionnelle contre la Russie a échoué de manière inattendue. De plus, le temps presse sur la crise du déficit et de la dette des États-Unis.
  • De manière plus visible, cela a entraîné des pressions accrues sur la Russie ; des menaces contre le Venezuela ; le contrôle des exportations chinoises ; et des préparatifs de frappes contre l’Iran.
  • Les guerres ouvertes d’Israël dans la région qui sont parallèles à la belligérance trumpienne ne sont pas terminées : l’envoyé américain Tom Barrak (citant Netanyahu) a déclaré : “Israël pense que ce qu’il a fait contre le Hezbollah, le Hamas et les Houthis ne sera terminé que quand la tête du serpent à Téhéran sera coupée”.

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En attendant les abjectes images de soumission qui n’apparaissent pas


Par Alastair Crooke – Le 9 Octobre 2025 – Source  Conflicts Forum

Trump : « Le problème avec le Vietnam…Nous avons arrêté de nous battre pour gagner. On aurait gagné facilement. Nous aurions gagné l’Afghanistan facilement. Nous pouvions gagner toutes les guerres facilement. Mais nous sommes devenus politiquement corrects. Ah, Disons le simplement ! Nous ne sommes plus politiquement corrects. Juste pour que vous compreniez : Nous gagnons. Maintenant, nous gagnons« . Tout cela aurait pu être facile, même l’Afghanistan.

Quel est le sens de cette référence de Trump au Vietnam ? « Ce qu’il dit, c’est que « nous » aurions gagné le Vietnam facilement, si nous n’avions pas été woke et DEI. Certains vétérans pourraient même dire : « Vous savez, nous avions assez de puissance de feu, nous aurions pu tuer tout le monde« .

« Peu importe où vous allez« , ajoute Trump, « peu importe ce que vous en pensez, il n’y a rien qui équivaut à la force de combat que nous avons, [y compris] Rome. Personne ne devrait jamais vouloir se battre contre les États-Unis« .

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« Aller vite et tout casser » : une nouvelle doctrine prend racine ; une nouvelle ère de domination par la force


Par Alastair Crooke – Le 2 Octobre 2025 – Source Conflicts Forum

Des changements sous-jacents mais tonitruants sont en cours en Occident. Une nouvelle doctrine politique prend racine : la pensée populiste conservatrice occidentale (et plus jeune) est en train d’être reconstruite comme quelque chose de plus rugueux, de plus méchant et de beaucoup moins sentimental ou tolérant.

Elle aspire à émerger aussi, comme étant « dominante« , délibérément coercitive et radicale. Lancer en l’air les composants de l’ordre établi pour voir s’ils peuvent atterrir de manière bénéfique (c’est-à-dire procurer des profits plus importants) pour les États-Unis.

Le soi-disant Ordre basé sur des règles (s’il a vraiment existé au-delà du simple narratif) a été déchiré. Aujourd’hui, c’est la guerre sans limites ; sans règles ; sans loi ; et au mépris total de la Charte des Nations Unies. Les frontières éthiques, plus particulièrement, sont rejetées dans certaines parties de l’Occident comme un étant du « relativisme moral« , preuve de « faiblesse« . Le but est de laisser les adversaires abasourdis et en état de choc.

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Le huitième front de la guerre que mène Israël se situe aux Etats-Unis


Par Alastair Crooke – Le 25 septembre 2025 – Source Conflicts Forum

La deuxième étape du « transfert » de la guerre en Ukraine par Trump aux Européens a été clairement exposée dans son post sur Truth Social, le 23 septembre. Dans la première phase de cette passation de pouvoir, Trump s’était retiré du rôle de principal fournisseur d’armements pour Kiev et avait indiqué, qu’à partir de maintenant, l’Europe devrait payer pour pratiquement tout – avec des armes achetées à des fabricants américains.

Bien sûr, Trump sait que l’Europe est en faillite financière. Elle n’a pas l’argent pour se financer elle-même, encore moins pour une guerre majeure. Il a ensuite « frotté du sel » sur cette blessure de crise budgétaire en mettant au défi les États de l’OTAN d’être les premiers à sanctionner tous les carburants russes. Cela n’arrivera pas non plus, bien sûr. Ce serait de la folie.

Dans ce dernier post sur Truth Social, Trump pousse le narratif de Keith Kellogg à sa reductio ad absurdum : « L’Ukraine, avec le soutien de l’UE, peut ramener le pays [l’Ukraine] à sa forme originale – faire ressembler la Russie à un « tigre de papier » et, qui sait, peut-être aller encore plus loin que ça! « 

Sûr, Kiev est aux portes de Moscou ? Avancez l’autre jambe, M. Trump. Bien sûr, il se moque de Kellogg et des Européens.

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Le dominant génie « Israël d’abord » est sorti de sa lampe


Par Alastair Crooke – Le 18 septembre 2025 – Source Conflicts Forum

« Gaza est en feu ; l’État juif ne cédera pas« , proclame avec enthousiasme le ministre israélien de la Défense Katz : « Tsahal frappe d’une main de fer les infrastructures terroristes« . En fait, au cours des dernières semaines, Israël a frappé des « infrastructures » en Cisjordanie, en Iran, en Syrie, au Liban, au Yémen et en Tunisie en plus de Gaza.

Le soi-disant plan directeur de « l’Ordre fondé sur des règles » (s’il a vraiment existé, au-delà du narratif) a été déchiré en faveur d’un sionisme violent et génocidaire, d’attaques sournoises sous couvert de négociations de paix en cours, d’assassinats et de décapitation des dirigeants politiques. C’est une guerre sans limites, sans règles ni lois et au mépris total de la Charte des Nations Unies. Les frontières éthiques, plus particulièrement, sont rejetées comme étant du simple « relativisme moral« .

Quelque chose de profond est en train de remodeler la politique étrangère israélienne. La transformation doit être comprise comme un demi-tour au cœur même de la pensée sioniste (un voyage de Ben Gourion à Kahane), comme l’a écrit Yossi Klein.

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Maintenir la domination : Trump et l’emprise dominante des « Israël d’abord »


Par Alastair Crooke – Le 11 septembre 2025 – Source Conflicts Forum

La frappe contre l’équipe de négociation du Hamas réunie à Doha pour discuter de la « proposition Witkoff pour Gaza » n’est pas qu’une autre « opération menée par Tsahal » à passer sous silence (comme pour la décapitation de presque tout le cabinet civil au Yémen).

Elle marque plutôt la fin de toute une époque et “une nouvelle réalité” pour le Qatar.

C’est un événement marquant car pendant des décennies le Qatar a joué un jeu très rentable : soutenir les djihadistes radicaux d’Al-Nosra en Syrie comme levier contre l’Iran, tout en maintenant des bases militaires américaines et un partenariat stratégique avec Washington. Doha se présente comme un médiateur pouvant dîner avec les djihadistes tout en agissant comme un facilitateur du Mossad.

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