Comment les magnats d’Amérique — dans la Silicon Valley en particulier — se préparent au krach de la civilisation
Par Evan Osnos – Le 30 janvier 2017 – Source New Yorker
Un garde armé se trouve à l’entrée du Survival Condo Project, un ancien silo de missiles au nord de Wichita, au Kansas, qui a été transformé en appartements de luxe pour les gens qui s’inquiètent de la fissuration de la civilisation. Photographie de Dan Winters – The New Yorker
Pourquoi la pulsion dystopique [qui s’oppose à l’utopique, NdT] se manifeste-t-elle à certains moments et pas à d’autres ? Le fatalisme apocalyptique, à l’instar d’une prophétie, d’un style littéraire ou d’une affaire en vue, reste indéfinissable ; il change, au gré des inquiétudes de la foule.
Pour exemple, les émigrés puritains de la première heure arrivant en Amérique, émerveillés ou remplis de crainte à la vue de cette immensité sauvage à coloniser, la prirent, les uns pour une malédiction, les autres pour la terre promise.
De même, en mai 1780, les agriculteurs de la Nouvelle-Angleterre, effrayés par un nuage aussi soudain qu’obscur et qui ne s’en allait pas, perçurent le phénomène comme une catastrophe annonçant le retour du Messie. Il s’agissait en fait de cendres volatiles issues d’énormes feux de forêt dans l’Ontario.
Pour D. H. Lawrence, cet attentisme effrayé prend une coloration particulière aux États-Unis : « Ténèbres ! Malédiction ! écrivait-il en 1923. C’est l’indicible qui murmure dans les arbres très sombres de l’Amérique. »
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