La situation en Ukraine, analysée par le Saker :
pas d’espoir pour la paix


The Saker

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Le Saker original – Le 26 avril 2015 – Source thesaker.is

Aujourd’hui, je vais commencer par citer en entier deux posts du blog du colonel CASSAD

 

 

 

À propos de l'intensité du Voentorg [aide militaire, NdT] de l'Otan.

Les instructeurs en provenance du Canada sont arrivés pour former des agents de sécurité ukrainiens. Les autorités de la République nationale de Donetsk annoncent une augmentation du nombre d'instructeurs militaires étrangers dans le territoire contrôlé par l'Ukraine.
Le président du Conseil national de la DNR, Andrey Purgin, déclare à la presse:
 
«Aujourd'hui, il a un très grand nombre d'instructeurs de différents pays qui y opèrent: 200 personnes sont venues du Canada, il y a des Anglais et d'autres. Maintenant, rien qu'en comptant ceux qui sont légalement sur le territoire ukrainien, il y a environ 1 500 instructeurs militaires, qui ne sont pas eux-mêmes aux combats, mais instruisent et forment les autres. Et cela n'inclut pas, évidemment, les instructeurs illégaux, les mercenaires et les agents spéciaux.»
A en juger par ses paroles, des experts étrangers effectuent une formation en science militaire pour les membres des groupes de sabotage et des bataillons territoriaux, qui ont déjà «les mains jusqu'au coude dans le sang".
Andrey Purgin continue :

«Il y a aussi des mercenaires qui se battent aux côté des agents de sécurité ukrainiens. En général, ils viennent de Géorgie et se joignent aux bataillons territoriaux, ce qui d'ailleurs est absolument interdit par la législation ukrainienne. Je ne sais pas qui paie leurs salaires. Après tout, généralement les bataillons territoriaux reçoivent peu, vivent de rapine et de vols.» 
Rappelons-nous que la junte ukrainienne avait jeté, dans la bataille de Volnovakha, 70 mercenaires américains de la société militaire privée américaine Academi.
Le représentant du ministère de la Défense de la DNR, Édouard Basurin:

«Selon les données disponibles, sur le territoire contrôlé par le VSU, en particulier dans Volnovakha, la présence de 70 représentants de la société militaire privée Academi a été révélée. Cette société s'appelle Blackwater.»
Il a également expliqué que les mercenaires de cette compagnie exécutent les ordres du Département d'État des États-Unis sur des points chauds, et sont engagés dans le trafic d'armes.

Peu à peu, il y a une augmentation naturelle de la présence militaire étrangère, à la lumière du fait que la situation commence de plus en plus clairement à rappeler le scénario de la guerre de Corée. Tout comme dans le cas du soutien de la Russie à la DNR et à la LNR, l'opération américaine Voentorg avec le soutien des alliés et satellites, est à deux niveaux – légal et illégal.

 Sur le plan légal, on observe:

 1. L'apparition d'instructeurs, qui forment les officiers et le personnel sur les doctrines et la préparation du personnel;
 2. le transfert d'information du groupe de satellites américains prétendument avec un jeu restreint;
 3. les livraisons de tenues (uniformes, gilets pare-balles, casques, etc.);
 4. les livraisons des dispositifs spéciaux (viseurs thermiques, appareils de vision nocturne, indicateurs de cibles):
 5. la livraison d’équipements spéciaux (radar anti-mortier, dispositifs contre la guerre biologique, véhicules blindés);
 6. la concentration en Europe orientale des unités mécanisées de l'armée des États-Unis.

 Au niveau illégal on observe:

 1. le fonctionnement actif des sociétés militaires privées (Academi, ASBA Otago, Greystone, Vert Groop);
 2. les livraisons illégales d'armes légères en provenance d'Europe orientale et occidentale;
 3. les livraisons illégales de matériel blindé de l'Europe orientale;
 4. le développement des infrastructures d'information et de reconnaissance sur la base des organismes d'État de l'Ukraine ou sous le couvert des organisations internationales du type de l'OSCE;
 5. l'activité des instructeurs et des conseillers militaires dont la présence en Ukraine n'est pas officiellement déclarée ni révélée.
 
Ce pour quoi nous n'avons pas encore confirmation:

 1. les livraisons d'artillerie en provenance des pays d'Europe orientale
 2. les livraisons d'équipements blindés de pays d'Europe occidentale

 Canaux logistiques de distribution de l'aide militaire étrangère:

 1. Les aérodromes du Sud de l'Ukraine par lesquels transitent les fournitures et le personnel spécial dans des avions de transport militaire des États-Unis
 2. Les jonctions ferroviaires de l'Ukraine occidentale à travers lesquelles passent les armes et les munitions en provenance d'Europe de l'Est
 3. Les aérodromes d'Europe centrale et de l'ouest de l'Ukraine par où sont livrées les aides légales en équipement et en personnel – instructeurs, inspecteurs, et observateurs
 4. Le port d'Odessa est utilisé pour les livraisons d'armes illégales par mer, ainsi que pour le trafic illégal d'armes.

Les principaux pays impliqués dans le soutien militaire à la junte sont les  États-Unis et la Pologne.

Les objectifs principaux de l'appui militaire sont l'amélioration du niveau des capacités de combat des Forces armées ukrainiennes (VSU) et la contrôlabilité de l'état d'avancement de la guerre. Par conséquent, les changements structurels de base dans les forces armées ne sont pas tant associés à des livraisons d'armes (qui en règle générale sont obsolètes), mais à un changement de la logistique de l'organisation, de la reconnaissance, de l'information et des structures de commandement, ce qui devrait accroître l'efficacité des opérations de l'armée.

Dans l'ensemble, la question de la présence militaire étrangère continue à se développer et devient de plus en plus systémique. Les fruits de l'activité de l'étranger, le Voentorg, peuvent commencer à se manifester en juillet-août. À ce stade, la transformation intérieure de la VSU est en cours et va assez lentement en raison de l'irrégularité des structures organisationnelles et du faible niveau des structures de commandement, à quoi s'ajoute un niveau élevé de corruption, d'incompréhension des exigences de la guerre moderne par une grande partie du corps des officiers, le faible niveau de la préparation technique du personnel lors de l'utilisation de technologies inconnues. Mais il ne faut pas se tromper, ce sont des problèmes qui sont surmontables dans une certaine mesure, et avec lesquels les conseillers militaires et les instructeurs sont maintenant bien engagés. En conséquence, les États-Unis et leurs alliés tentent de refaire l'armée de la junte dans le cadre de la guerre pour leur propre compte et pour résoudre les questions nécessaires. Pour cette raison, ils ne doivent pas être en guerre sur la ligne de front, et donc à ce stade de la guerre, vous aurez du mal à voir les Marines américains ou toute unité mécanisée dans la première ligne. Ils ne peuvent apparaître que dans les scénarios catastrophiques pour la partie ukrainienne.

Pour l'instant, un Voentorg semi-légal est suffisant, ce qui reflète en principe la ligne de l'administration Obama pour l'opposition à long terme sans la participation militaire directe des États-Unis. Hawks souhaite ajouter aux points énoncés ci-dessus la livraison ouverte des armes meurtrières américaines et une participation plus active du Pentagone dans cette guerre. Tout cela se produit sur fond de combats de basse ou moyenne intensité (les deux côtés utilisent activement l'artillerie lourde et les tanks), qui en fait a commencé le 12 avril, et je ne pense pas que cela va s'arrêter, puisque même le tout premier point du cessez-le-feu n'est de facto pas respecté. Sans même parler de retrait des armes lourdes. Dans l'ensemble, la présence militaire étrangère sera progressivement dans la nature même de la guerre en cours, qui deviendra de plus en plus systématique, organisée et centralisée, des deux côtés. Ce n'est déjà plus une demi-guerre entre la VSU et la milice. C'est une guerre entre des armées régulières, formées, et qui continuent à être formées par des conseillers militaires et des instructeurs étrangers.
Situation sur le front au 23 avril

1. Les opérations militaires sont, comme avant, de faible intensité sur la plupart des fronts et d'intensité moyenne dans un certain nombre de sites – Bakhmutka, Peski, et maintenant aussi sous Schastye. Les opérations militaires de haute intensité concernent principalement Shirokino, où pratiquement tout le spectre des armes est utilisé.
2. Les bombardements de villes continuent, et principalement toutes les régions devant Donetsk sont exposées à des attaques d'artillerie de la junte. Il n'y a pas de victimes gravement blessées parmi la population civile. Bien que les bombardements soient systématiques, leur intensité varie de moyenne à faible.
3. Le renseignement militaire de la DNR a signalé que la concentration de groupements de la junte est terminé et qu'ils sont prêts pour l'approche. Les lieux de concentration des groupes de combat sont toujours les mêmes – aucun changement de fond sur les positions de l'adversaire n'a été remarqué. Aucun retrait des armes lourdes n'est enregistré, bien au contraire.
4. Depuis environ une semaine, le VSN (forces novorusses) est dans un état de préparation au combat accrue, et une proportion considérable de l'équipement lourd est déjà déplacé en position. Dans la LNR, les opérations d'ingénierie sur les sites d'attaques possibles par la VSU se poursuivent.

Dans l'ensemble, après que les opérations d'intensité moyenne à grande ont repris 12 avril, les parties ont poursuivi les travaux préparatoires pour des opérations de haute intensité et de grande envergure sur fond de manœuvres diplomatiques, et ce n'est pas un secret pour les deux parties qui s'accusent régulièrement les uns les autres d'attaquer la première.

Analyse

Il y a très peu de doutes dans l’esprit de tout le monde que la junte reprendra une attaque à grande échelle sur la Novorussie. De même, il apparaît que tous les espoirs d’un affaiblissement du soutien des États-Unis et des Européens à la junte nazie sont maintenant morts. Si la longue série de meurtres d’opposants politiques, y compris une figure bien connue et emblématique comme le journaliste Oles Buzina, n’a choqué personne  (ni aucun des millions d’Européens Charlies!), alors tout est possible. En outre, il n’y a aucun signe d’un autre Maidan qui pourrait renverser la junte. Oui, il y a des protestations ici et là, mais rien qui pourrait menacer gravement le régime. Au contraire, tous les signes montrent que les États-Unis tiennent l’Ukraine d’une main de fer et que le plan américain prévu est de redémarrer une guerre à grande échelle entre l’Ukraine occupée par les nazis et la Novorussie, avec la possibilité d’impliquer la Russie (ce qui a été le plan depuis le début).

Le régime ukrainien est clairement va pour le tout et ne fait même pas semblant d’essayer de résoudre l’un quelconque des problèmes innombrables de l’Ukraine occupée par les nazis. Porochenko et la Rada [le parlement ukrainien, NdT] consacrent tous deux leur temps et leurs efforts à provoquer la Russie en discutant sérieusement d’une loi de nationalisation de tous les actifs russes en Ukraine, en réécrivant les livres d’histoire, et en adoptant des résolutions disant que la Russie a envahi l’Ukraine, etc.

Les escadrons de la mort nazis, maintenant formés par les États-Unis, crucifient et brûlent vivants les séparatistes, tandis que le Gauleiter des États-Unis à Kiev [l’ambassadeur US, NdT] tweete des photos de système de défense aérienne russe prises à Moscou en 2013 comme preuve d’une invasion russe en Ukraine en 2015.

Dans l’intervalle, les États-Unis font exactement ce qu’ils font toujours: ils envoient des forces américaines former des escadrons de la mort locaux tout en construisant une coalition de volontaires (US + UK + Canada + Pologne) sans aucun mandat ou autorisation, qu’ils ne pouvaient pas obtenir légalement (ni par l’ONU, ni même par l’Otan!). Il semble que le débat à l’intérieur de l’État profond US sur les risques de la stratégie actuelle est terminé, [s’il a jamais eu lieu! NdT] et que les néo-conservateurs ont prévalu.

En termes pratiques, cela signifie que nous sommes de retour à la case départ: la question est maintenant: «La Novorussie peut-elle résister à l’assaut nazi seule avec l’aide de la Voentorg ou la Russie va-t-elle être obligée d’intervenir?»

Honnêtement? Je ne sais pas. Et personne ne le sait.

En tout état de cause, les forces de la junte se sont améliorées, mais celles des Novorusses aussi. Zakharchenko a récemment annoncé que la récente mobilisation volontaire a réussi à 110%, ce qui semble très bon, en particulier grâce aux seuls volontaires, mais ne nous dit pas si la Novorussie aura les 100 000 hommes sous les armes en juin comme promis par Zakharchenko. En outre, il semble y avoir un manque d’équipements pour une aussi grande force, mais à en juger par ce qui est arrivé cet hiver, nous pouvons nous attendre à un Voentorg russe complètement opérationnel à son niveau maximum dès que les services de renseignement russes concluront qu’une attaque nazie est inévitable.

Maintenant, soyons honnêtes; ici, l’aide offerte par la coalition otanesque USUKCNDPL est à la limite inutile, tant que la direction des opérations est confiée aux forces de la junte. Le rôle de l’aide est davantage de paraître faire quelque chose de grand que d’obtenir réellement un résultat quelconque. Non seulement faut-il beaucoup de temps pour former une force, la (dé-) sélection naturelle a fait un bien meilleur travail jusqu’ici, sur le champ de bataille, que n’importe quel conseiller des États-Unis pour accroître la qualité des forces de la junte en éliminant les inaptes. Pourtant, l’avantage moral et les compétences tactiques devraient rester du côté de la Novorussie.

Il faut toujours garder à l’esprit que le but réel de la prochaine offensive ukronazie ne sera pas destiné à vaincre la Novorussie, mais à attirer la Russie dans la guerre pour que l’Ukraine soit vaincue par celle-ci. Une telle défaite aux mains de l’armée russe fournira probablement à l’Otan une justification pour les cinquante prochaines années et évacuera complètement les désirs européens de se débarrasser de leur statut actuel de colonie sans voix des Etats-Unis. Si cela se produit, la très attendue nouvelle guerre froide sera en plein essor, le complexe militaro-industriel des États-Unis dans le bonheur complet et la population américaine convenablement re-terrifiée par le prochain ennemi global.

Il y a quelques indications que de plus en plus de politiciens européens commencent à comprendre les risques, mais ils sont trop faibles pour s’opposer significativement à l’hégémonie anglo-sioniste .

Avoir une guerre en Europe sur une base régulière a toujours été la pierre angulaire de la politique étrangère britannique et cette tradition a été entièrement assimilée par son successeur impérial américain (qui a bénéficié immensément des deux dernières guerres mondiale). Ce que les Américains veulent, c’est évidemment simple: une guerre majeure en Europe, mais aussi confinée à l’Europe.

La guerre semble donc inévitable. Son ampleur ne dépendra maintenant que des femmes et des hommes qui défendent la Novorussie contre le Ukronazis.

Le Saker

Traduit par jj, relu par Diane pour le Saker Francophone.

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