Syrie : Les fronts djihadistes s’effondrent – L’Égypte entre dans la lutte


Moon of Alabama

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Le 27 novembre 2016 – Source Moon of Alabama

L’armée arabe syrienne (AAS) et ses alliés ont fait d’énormes progrès dans Alep-Est. Là, comme apparemment partout ailleurs, les fronts du Djihad s’effondrent. Les dissensions dans l’opposition, qui reflètent celles de ses sponsors, perturbent tous leurs mouvements. La discrète campagne aérienne russe, à l’arrière des fronts «rebelles», a réduit leurs réserves en matériel et en hommes.

Les forces égyptiennes vont bientôt se joindre à l’alliance syrienne. Du fait que plusieurs enclaves «rebelles» ont été éliminées, soit par les combats, soit par des accords de paix, des troupes syriennes vont pouvoir se rendre disponibles pour de nouvelles campagnes. Il a été indiqué en termes clairs à la Turquie qu’elle devait renoncer à ses plans pour la Syrie (et l’Irak). Avec plus de forces disponibles et la solide protection (aérienne) russe, l’AAS va pouvoir faire mouvement vers Idleb dans le nord du pays, ainsi que vers Raqqa à l’est.

Le front du Djihad dans la partie nord-est du chaudron d’Alep, a été percé hier, et toutes ses défenses se sont complètement effondrées. Les djihadistes ont dû faire retraite et le tiers nord d’Alep-Est détenu par les djihadistes est en train de tomber rapidement aux mains des forces gouvernementales syriennes. La principale raison de leur défaite est – tenez-vous bien – le «manque d’hôpitaux» :

«Les révolutionnaires se battent farouchement, mais l’intensité des bombardements et des combats, le nombre de morts et les blessés et le manque d’hôpitaux, jouent tous un rôle dans l’effondrement de leurs fronts», a déclaré un responsable de Jabha Shamiya, un des plus grands groupes qui luttent contre Assad dans le nord de la Syrie.

C’est sûrement la destruction du dernier hôpital pour les chats transsexuels d’Alep par un missile thermobarique nucléaire, qui a fait basculer la situation. C’est, je crois, la première fois qu’un argument de propagande aussi ridicule est apporté pour expliquer une défaite totale.

En réalité, les forces syriennes évitent les pertes en utilisant leur écrasante puissance de feu pour ouvrir la voie avant que leur infanterie n’avance. Cela écrase toutes les lignes de défense que les «rebelles» peuvent mettre en place avant même le début des combats réels. Seuls des soldats bien entraînés au combat et très disciplinés pourraient soutenir un tel feu et offrir une réelle résistance. Les «rebelles» n’en sont pas capables.

La carte d’Electronic Resistance montre les progrès de l’AAS aujourd’hui :

Environ 1 500 civils se sont échappés d’Alep-Est vers l’AAS (de nouveaux rapports parlent de 4 000 – cela prouve que les rebelles ont retenu ces civils en otage). On a vite fait de s’apercevoir que la propagande des 200 000, 250 000, 300 000 civils d’Alep-Est, martelée par les États-Unis et les Nations Unies, est bien l’absurdité (et le racket financier) qu’on pensait. Les zones récupérées sont presque vides de toute population civile. Comme nous l’avons montré à la mi-octobre, il y avait dans Alep-Est probablement de 4 000 à 5 000 djihadistes (moins maintenant), la moitié d’entre eux d’al-Qaïda même, et probablement 20 000 civils, la plupart des membres de la famille des combattants. (Il est fort possible que même ces estimations soient trop élevées).

À l’est de la ville d’Alep, un mouvement turc vers Al-Bab a été stoppé par un raid aérien syrien sous protection russe. Les plans d’Erdogan pour une entité alignée sur la Turquie comprenant au moins Al-Bab, Raqqa et Manbij sont partis en fumée. Elijah Magnier fait une excellente analyse des intérêts qui président aux différents mouvements dans la région et à ce qui s’y passe : Un an après, jour pour jour, la Russie se venge et arrête la Turquie aux portes d’al-Bab.

Au sud de la Syrie, autour de Damas, deux autres petites enclaves «rebelles» ont renoncé et ont conclu des accords de paix avec le gouvernement. On laisse aux combattants qui disent vouloir mourir sur le champ de bataille la possibilité de se relocaliser à Idleb, où ils seront ensuite éliminés (ou – plus vraisemblablement – d’où ils fuiront vers l’Europe).

La poche du Djihad à l’est de Ghouta a diminué au cours des dernières semaines et se réduit à une ville vide de taille moyenne et à quelques villages. Elle sera nettoyée dans les jours prochains. Une tentative djihadiste pour libérer une poche djihadiste dans l’ouest de Ghouta a échoué :

Qalaat Al Mudiq @QalaatAlMudiq – 3:49 – 26 nov 2016

Les rebelles ont commencé une nouvelle bataille dans #la province de Quneitra pour briser le siège de W. # Ghouta. Le bombardement préventif est en cours.

[…]

[Beaucoup de tweets parlant de «progrès» et de «succès»]

[…]

Qalaat Al Mudiq @QalaatAlMudiq – 6h53 – 27 novembre 2016

@QalaatAlMudi. La bataille s’est arrêtée après des désaccords entre les groupes impliqués pour briser le siège de W. # Ghouta & Khan Ash Sheikh. L’évacuation va commencer.

De puissants courants égyptiens, surtout militaires, avaient réussi à chasser les Frères musulmans du gouvernement [coup d’État du 3 juillet 2013, NdT]. Les Frères musulmans soutenaient les djihadistes en Syrie et en Libye et devenaient de plus en plus radicaux. L’armée égyptienne a agi sous la pression des Saoudiens, qui avaient offert une énorme quantité d’aide économique à condition qu’il y ait un nouveau gouvernement. Riyad considérait les Frères musulmans comme un danger. Puis, les priorités saoudiennes ont changé. Les wahhabites se sont subitement réconciliés avec les idéologues de l’islam politique des Frères musulmans. Avec la Turquie gouvernée par les Frères musulmans et le Qatar qui les soutient, les nouveaux dirigeants saoudiens ont renforcé leur campagne pour faire appliquer la loi islamiste en Libye, en Irak, en Syrie et au Yémen.

Cela a changé la situation pour l’Égypte. La Turquie et le Qatar sont devenus des ennemis, ainsi que leurs forces par procuration en Libye. Lorsque les Saoudiens ont officiellement demandé au gouvernement de Sissi en Égypte de soutenir les Frères musulmans, ça a sonné la fin de l’alliance. Les Frères musulmans sont l’ennemi de l’Égypte, et on ne les laissera plus jamais revenir au pouvoir. L’Égypte a également rompu avec les États-Unis, qui avaient soutenu les Frères musulmans partout. Par contre, les relations avec la Russie sont redevenues amicales.

Le Caire croit que l’installation de n’importe quelle sorte de régime islamiste en Syrie mettrait en danger l’Égypte. (Israël pourrait facilement envoyer les djihadistes qu’il soutient activement dans les hauteurs du Golan syrien, vers la péninsule du Sinaï.) L’Égypte croit également que le régime saoudien actuel tombera avant la fin de 2017, à cause des luttes internes. Elle offre donc maintenant son aide efficace à la Syrie pour combattre ses ennemis.

Il y a quelques semaines, une délégation militaire égyptienne composée de hauts gradés est venue en Syrie, pour discuter de leur participation à la campagne sous commandement syrien et russe. On dit que des avions et des hélicoptères égyptiens ont été envoyés sur un aéroport du gouvernorat syrien de Hama. L’Égypte dispose d’une grande armée terrestre et d’un accès maritime à la Syrie. Voilà quelques informations sérieuses sur les troupes au sol.

La France avait construit deux navires d’assaut amphibie Mistral pour la Russie mais, dans le cadre des sanctions contre l’Ukraine, elle n’a pas eu le droit de les livrer à la Russie. Ils ont finalement été vendus à l’Égypte. Là, ils ont été équipés d’hélicoptères et d’appareils électroniques russes. On dit que ce sont des officiers russes qui les commandent.

Chaque navire peut amener sur la côte un bataillon complet, environ 400 à 900 hommes et tout leur équipement. Il suffit que les deux navires égyptiens fassent deux voyages chacun, de Suez à Lattaquié, pour qu’une brigade d’infanterie complète, avec tout son soutien logistique, arrive en Syrie en quelques jours. Les hélicoptères russes à bord des Mistrals assureraient le soutien aérien. La flotte russe, stationnée à l’est de la Méditerranée, couvrirait les mouvements.

Il s’agirait d’une unité militaire entièrement organisée, capable de se battre de façon cohérente et indépendante. Une telle unité est beaucoup plus précieuse que les forces chiites irrégulières que les Iraniens ont engagées pour aider en Syrie. Ces dernières ont besoin de l’appui logistique et du commandement de l’armée syrienne. Les Égyptiens peuvent faire tout seuls ce qu’on leur donne à faire. Pour des raisons géopolitiques (à savoir le canal de Suez) ni les États-Unis, ni la Turquie, n’oseraient leur faire quoi que ce soit.

Actuellement, environ 4 000 Irakiens et 4 000 Iraniens forment les forces chiites fournies par l’Iran en Syrie. Quatre cents officiers des Services de renseignement iraniens sont là pour les conseiller et les diriger. Le Hezbollah a envoyé quelque 2 000 soldats de ses unités spéciales Redwan. En plus de son système de défense aérienne, la Russie a des forces spéciales et des éléments de commandement sur le terrain. La force égyptienne avec quelque 4 000 soldats ne représenterait pas une énorme force numérique, mais ce serait une force de combat unie et efficace. Le soutien politique qu’une telle unité symbolise est certainement d’une importance similaire, sinon plus grande.

La France, qui soutient fiévreusement les djihadistes en Syrie, serait très embarrassée par un tel mouvement. Le monde entier ferait des gorges chaudes de sa sanction contre la Russie, si les Mistrals «égyptiens» venaient soutenir le gouvernement syrien sous commandement russe.

Si un tel mouvement égyptien se produit, une campagne du gouvernement syrien vers Raqqa devient tout à coup non seulement possible, mais même probable. L’armée égyptienne a une certaine expérience de la lutte contre les djihadistes dans le Sinaï. Elle n’a pas trop peur d’avoir des pertes et elle déteste les islamistes. Elle peut aisément renforcer ses propres unités sur le terrain autant que nécessaire. Si l’Égypte se décide, ISIS à Raqqa ne sera qu’un apéritif et tous les plans américains pour une «principauté salafiste» dans l’est de la Syrie et l’ouest de l’Irak s’écroulent.

Avec tout ce qui précède et un président Trump susceptible de retirer le soutien des États-Unis aux djihadistes en Syrie, la fin de la guerre est en vue.

Même si le Qatar, et d’autres, continuent leur soutien, comme ils le disent, les djihadistes n’auront aucune chance contre une alliance beaucoup mieux organisée autour du gouvernement syrien.

Le Conseil européen pour les affaires étrangères, qui est fortement influencé par les États-Unis, vient de publier un nouveau document sur la Syrie destiné aux gouvernements de l’UE : Premier test de Trump – Politique européenne et siège d’Alep.

Le sous-titre se lit comme suit :

Il n’y a plus de réel espoir de déposer Assad. L’Europe doit plutôt travailler à un horrible accord qui permettrait au peuple syrien d’échapper au pire.

Un meilleur titre aurait été : Comment l’UE s’est carrément plantée en suivant servilement les États-Unis dans leur délire et en s’opposant à Assad et à la Russie.

L’UE est si désunie et manque tellement de vision, qu’elle n’arrive même pas gérer le chantage de l’aspirant sultan de la Turquie. Si l’UE bloquait tous les crédits et cessait de soutenir l’économie turque, la faillite frapperait le gouvernement d’Erdogan en quelques mois. Poutine a montré comment il fallait gérer ce type. Comment se fait-il que personne à Bruxelles (ou à Berlin) ne soit capable de retenir la leçon ?

Traduction : Marie Staels

 

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