Le patron du Mossad remercie la Russie de sa contribution aux perspectives de paix israélo-arabes


Par Andrew Korybko − Le 2 juillet 2019 − Source eurasiafuture.com

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Le patron du Mossad a dissipé tous les doutes qui pouvaient subsister dans la communauté des médias alternatifs quant à l’existence du « Russraël de Poutinyahou », en remerciant les « canaux de communication avec le Kremlin » d’avoir contribué à ce qu’il appelle une « fenêtre unique d’opportunité » pour conclure un accord de paix « israëlo-arabe  » pour la première fois dans l’histoire du Moyen-Orient.

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La Russie et « Israël«  constituent des alliés, à un point tel que l’on peut même aujourd’hui parler d’une entité politique singulière sous le néologisme de « Russraël de Poutinyahou« . Le lien qui précède est rempli de preuves soutenant cette affirmation, mais le pistolet fumant, s’il en fallait encore un, est apparu lundi au cours de la conférence Herzliya, un forum de sécurité annuel tenu par l’auto-proclamé « État juif ». Yossi Cohen, patron du Mossad, a affirmé l’importance que présente la Russie en tant qu’alliée pour « Israël » en remerciant les « canaux de communication avec le Kremlin » d’avoir contribué à ce qu’il décrit comme une « fenêtre unique d’opportunité » pour conclure un accord de paix « israélo-arabe« pour la première fois dans l’histoire du Moyen-Orient ». Reuters le cite :

Le Mossad distingue aujourd’hui une opportunité rare, peut-être la première de toute l’histoire du Moyen-Orient, de parvenir à une compréhension régionale qui amènerait à un accord de paix exhaustif. Des intérêts partagés, la lutte contre des rivaux tels que l’Iran et le terrorisme djihadiste, les relations privilégiées avec la Maison Blanche et les canaux de communication avec le Kremlin : tout s’aligne pour créer ce qui pourrait constituer une fenêtre d’opportunité unique.

Le média rapporte également que le chef-espion « a déclaré que son agence avait formé un groupe de travail en vue de repérer les opportunités d’établissement de la paix dans une région où seuls deux États arabes, l’Égypte et la Jordanie, ont des relations complètes avec Israël », suggérant ainsi une collaboration proche entre le Mossad et ses homologues moscovites ; la grande puissance eurasiatique constitue l’acteur extra-régional le plus influent du Moyen-Orient depuis son intervention anti-terroriste de 2015 en Syrie. La grande stratégie russe du XXIème siècle est sur le point de devenir la force d’« équilibrage » suprême en Afro-Eurasie — c’est en vue de ce dessein qu’elle a entamé cette coopération qui change la donne, avec des partenaires non-traditionnels comme « Israël », avec qui la Russie partage l’objectif d’assurer le retrait de l’Iran hors de Syrie. Alors que Tel Aviv vise cet objectif par crainte de Téhéran, Moscou le considère comme la clé pour parvenir à une « nouvelle détente«  avec Washington.

Pour comprendre comment ces « canaux de communication avec le Kremlin » se rapportent à la « fenêtre unique d’opportunité » pour conclure un accord de paix « israélo »-arabe  » pour la première fois dans l’histoire du Moyen-Orient », il faut garder à l’esprit que le président Poutine constitue un ardent défenseur de l’auto-proclamé « État juif », comme l’illustrent ses très nombreuses déclarations de soutien à cet égard depuis les presque deux décennies qu’il a passées à l’exercice du pouvoir, et que l’on peut trouver facilement sur le site internet du Kremlin. En outre, le dirigeant du Conseil de Sécurité National de Russie a réaffirmé que « la Russie accorde une attention spéciale aux garanties de sécurité d’Israël » au cours du tout premier Sommet des Conseillers en Sécurité Nationale [National Security Advisor Summit, NdT], tenu la semaine dernière à Jérusalem. Avec « Israël » estimant qu’un accord de paix avec les pays arabes constitue un pré-requis non-négociable à la sécurisation de sa propre existence, il est donc naturel que l’allié russe soutienne cette démarche de toutes les manières possibles.

Si l’on se souvient du rôle d’« équilibrage » prévu par Moscou pour elle-même dans la région, et son désir de reprendre le flambeau pour remplacer la direction déclinante de Washington sur la zone, il est très probable que les diplomates russes travaillent frénétiquement dans les coulisses en vue d’encourager autant d’États arabes que possible à faire une sortie publique et normaliser leurs relations pas-si-secrètes avec « Israël ». Idéalement, ils aimeraient autant que ces démarches soient réalisées sans cibler l’Iran, afin que les liens entre Moscou et Téhéran ne se compliquent pas plus qu’ils ne le sont déjà. Les « canaux de communication avec le Kremlin » du Mossad sont donc extrêmement importants pour faciliter le succès des projets « israéliens », au point que l’on pourrait les qualifier d’indispensables : le patron de cette agence de renseignement les a cités dans la même phrase que d’autres facteurs pouvant sembler plus importants, tels que « les relations privilégiées avec la Maison Blanche ».

Andrew Korybko est un analyste politique américain, établi à Moscou, spécialisé dans les relations entre la stratégie étasunienne en Afrique et en Eurasie, les nouvelles Routes de la soie chinoises, et la Guerre hybride.

Traduit par Vincent, relu par San pour le Saker Francophone

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