Par The Saker – Le 10 avril 2019 – Source thesaker.is via Unz Review
Depuis que M. MAGA est entré à la Maison Blanche, je suis émerveillé par le niveau de stupidité cristalline et, franchement, par l’immoralité de cette administration. Obama était presque aussi incompétent et diabolique, mais Trump a vraiment apporté un changement qualitatif à ce que nous pourrions appeler « le QI moyen de la Maison Blanche ». La meilleure chose que je puisse dire à propos de Trump, c’est que la stupidité peut avoir du bon. Hélas, cela peut aussi être extrêmement dangereux, et c’est ce qui se passe actuellement. Il suffit de consulter ces manchettes récentes :
- Trump signe une déclaration reconnaissant la souveraineté d’Israël sur les hauteurs contestées du Golan
- Moscou estime qu’un sabotage occidental a causé la panne d’électricité au Venezuela
- Les explosions au Venezuela confirmées en tant que sabotage terroriste
- Les États-Unis désignent les gardes de la révolution iraniens comme une organisation terroriste
- Pompeo en Turquie : une action militaire en Syrie aura des conséquences « dévastatrices »
Je dois admettre que ce dernier est mon préféré, vraiment ! Voyez à quel point c’est cool ? Les États-Unis menacent un pays membre de l’OTAN de lui faire la guerre – c’est ce que « conséquences dévastatrices » signifie en langage diplomatique.
Pompeo – certainement l’un des idiots les plus diaboliques et délirants de l’administration Trump – essayait probablement d’imiter le modèle qui inspire cette administration, à savoir Bibi Netanyahu, qui avait même menacé de faire la guerre à la Nouvelle-Zélande – oui bon ! enfin presque, je sais, il ne parlait pas vraiment de « vraie » guerre, mais il utilisait un langage guerrier, ce qui, au mieux, est irresponsable pour un homme politique.
Tout cela serait très amusant si ce n’était le fait évident que les États-Unis sont déjà engagés dans une campagne militaro-terroriste secrète contre le Venezuela, la révolution Guaidó, que le gouvernement Maduro a réussi à contrecarrer – du moins jusqu’à présent – ce qui ne fait que rendre Pompeo encore plus furieux. En outre, le fait que l’armée américaine ne semble pas avoir le courage d’opérer une invasion terrestre ne signifie nullement qu’il ne peut pas déclencher des bombardements et une campagne de missiles, du type kosovar ou libyen, contre le Venezuela.
La guerre secrète contre le Venezuela se transformera-t-elle bientôt en conflit ouvert ?
Ceux qui prétendent maintenant que trois bataillons de défense aérienne russes S-300 – équipés de la version d’exportation du S-300VM, le « Antey-2500 » – ou même des milliers de MANPADS [lanceurs de missiles portatifs] de fabrication russe peuvent arrêter les États-Unis ne comprennent tout simplement pas la guerre en général et les opérations de défense aérienne en particulier. Ce qu’ils font, c’est prendre quelques chiffres concernant, dans ce cas, les capacités théoriques des S-300 vénézuéliens, puis calculer le nombre d’aéronefs/missiles que ces systèmes pourraient abattre en théorie. Ce n’est pas ainsi que fonctionnent les défenses anti-aériennes.
[Aparté : Je ne donnerai pas d’explication détaillée sur ce sujet ici. Mon ami Andrei Martyanov peut faire cela beaucoup mieux que moi, mais je dirai simplement que pour être vraiment efficace, tout système de défense aérienne doit être 1) à plusieurs niveaux et 2) intégré. En outre, les pseudo-analyses mentionnées ci-dessus négligent toujours l'importance de tous les autres facteurs, à part le nombre et les caractéristiques des missiles eux-mêmes. Mais en réalité, la guerre électronique, l’intégration en réseau, le traitement du signal, les systèmes de gestion de combat, etc. jouent un rôle absolument crucial dans la défense aérienne. Même des mesures trompeuses (telles que des « chars d'assaut » gonflables ou des « avions » en bois) peuvent jouer un rôle central dans les résultats (comme ce fut le cas au Kosovo et en Irak). Il en va de même pour les opérations aériennes offensives, bien entendu. Par conséquent, aucune évaluation d'une éventuelle attaque aérienne américaine sur le Venezuela ne peut être réalisée sans une analyse des capacités, de l'entraînement, des procédures, etc., des États-Unis. La vérité est que ce que les experts militaires appellent « dénombrement des haricots » [comparaison quantitative des matériels], est un processus auquel ne participent que de faux experts. D'un point de vue militaire c'est totalement futile et inutile]
La triste vérité est qu’en l’absence d’un système de défense aérienne intégré à plusieurs niveaux comme celui de la Russie, les opérations de défense aérienne se transforment généralement en un simple jeu de chiffres : nombre X de missiles défensifs par rapport à Y assaillants. Gardez à l’esprit qu’une EW [guerre électronique] efficace – en particulier SEAD – réduira considérablement l’efficacité des défenses anti-aériennes. La même chose s’applique quel que soit le nombre de Su-30 ou même de Su-35 que la Russie pourrait livrer au Venezuela.
Maintenant, regardez une carte et voyez par vous-même : le Venezuela est littéralement dans la cour des États-Unis – du moins en termes militaires – et les États-Unis peuvent apporter d’énormes quantités de tout ce qu’ils veulent : missiles, bombes, avions SEAD, etc.) pour le combat. Non seulement cela, mais les Vénézuéliens ne disposent pas de véritables options de contre-attaque, ce qui signifie que l’oncle Shmuel [Oncle Sam] peut lancer autant de missiles qu’il le souhaite pendant des semaines et des mois sans jamais avoir à s’inquiéter d’une contre-attaque.
Ce ne sont que des facteurs politiques qui protègent le Venezuela contre une attaque manifeste des États-Unis, et non des facteurs militaires. Ces derniers ne sont bien sûr pas sans importance et je les ai discutés ici. Sur le plan militaire, le Venezuela est une cible facile qui pourrait peut-être dissuader une opération au sol, mais ne peut rien faire contre les capacités de frappe des États-Unis, du moins pas contre un effort américain déterminé. Face à une attaque simulée, à l’instar de ce que les Israéliens et les États-Unis ont fait en Syrie, les Vénézuéliens pourraient probablement réduire de manière significative le nombre de bombes et de missiles américains atteignant leurs objectifs. Mais c’est tout ce qu’ils peuvent raisonnablement espérer.
Qu’en est-il de la Syrie ?
Certes, les Anglo-sionistes ont perdu la première phase de cette guerre, mais ils ne sont pas disposés à digérer ce fait. Alors maintenant, ils ont redéfini leur ancien objectif de « nouveau Moyen-Orient d’où l’animal Assad doit être délogé » en un nouveau « nous ne permettrons jamais que la paix soit déclarée en Syrie ». Pas vraiment une stratégie, mais c’est assez bon pour les Israéliens, et c’est tout ce qui compte vraiment pour Trump ou ses maîtres. Je ne veux pas couvrir la Syrie en détail pour le moment, mais le simple fait que Pompeo profère des menaces contre la Turquie en dit long. La réaction turque était assez prévisible : le vice-président turc, Fuat Oktay, a déclaré : « Les États-Unis doivent choisir. Veulent-ils rester l’allié de la Turquie ou risquer notre amitié en joignant leurs forces à celles des terroristes pour saper la défense de leur allié de l’OTAN contre leurs ennemis ? ».
Vous voyez comme ils s’aiment ?!
Oui, ce ne sont que des mots, et la Turquie reste sous l’occupation de l’OTAN et du CENTCOM – que les Iraniens ont, assez logiquement, déclaré organisation terroriste ! Néanmoins, entre le S-400 et le F-35, le problème kurde, le soutien continu de la CIA à Fethullah Gülen [adversaire politique d’Erdogan exilé aux US, supposé être à l’origine du récent coup d’État contre ce dernier, NdT] ou le fait que l’UE – sous contrôle américain – n’a jamais accepté l’adhésion de la Turquie, tout cela crée un contexte potentiellement explosif, que même une petite étincelle pourrait enflammer.
Il est également clair que les États-Unis et Israël continueront de mener des frappes aériennes, des assassinats, de soutenir les groupes terroristes takfiris, etc., en Syrie dans un avenir prévisible. Le fumeux fameux retrait de Trump en Syrie se terminera comme toutes ses promesses : jeté aux oubliettes. Quant aux Israéliens, il est absolument vital – pour des raisons psychologiques et idéologiques – de continuer à subvertir non seulement la Syrie, mais tout le Moyen-Orient. En outre, nous ne devrions jamais oublier l’objectif ultime d’Israël : utiliser les États-Unis pour détruire tout pays qui ose résister à l’agression israélienne. En plus de cette liste, il y a bien sûr l’Iran.
Autrement dit, plus simplement : il n’y aura pas de paix au Moyen-Orient tant que la Palestine sera occupée par une bande de voyous racistes dont le mépris du droit international, ou même des normes fondamentales en matière de comportement civilisé, est aussi total que leur dépendance absolue aux mensonges et à la violence pour subjuguer la région et, finalement, notre planète entière. Bien sûr, la Russie et la Chine feront ce qu’elles peuvent, de même que l’Iran, mais cela ne suffira probablement pas pour instaurer une paix durable – les dernières déclarations israéliennes sur l’annexion d’une partie encore plus grande de la Palestine sont un indicateur de risques supplémentaires.
La vérité est que si l’Empire n’a pas le pouvoir de briser la volonté du peuple syrien, il dispose de suffisamment de force pour empêcher la paix de s’installer en Syrie.
Ou l’Iran ?
Qui sait ? Il est possible de prédire les actions d’un acteur rationnel. « Rationnel » implique un minimum d’intelligence et de bon sens. Le problème est que nous ne pouvons pas être sûrs de l’intelligence des gens qui sont actuellement en poste au Pentagone alors que nous pouvons être absolument sûrs que les Israéliens sont complètement fous et délirants – comme le sont toujours les racistes. Jusqu’à présent, les Israéliens n’ont pas réussi à convaincre les États-Unis d’attaquer l’Iran. Il était clair qu’il y avait des gens intelligents et sains au Pentagone – dans la tradition de l’amiral Fallon – mais à quel point pouvons-nous être sûrs qu’ils n’ont pas tous été purgés – ou corrompus – par le régime néocon ?
[Aparté : Quand je parle de la stupidité des dirigeants américains, je ne dis pas cela comme une insulte. Je veux dire que, dans une approche de diagnostic : ces gens ne sont tout simplement pas très intelligents. Découvrez l'excellent article de Dmitry Orlov intitulé « La nef des fous prend-elle l'eau ? » pour une très bonne discussion sur le rôle de plus en plus important que joue la stupidité dans les actions de l'Empire. Et Orlov n'est pas le seul à penser cela. À l'heure actuelle, la plupart des Russes sont convaincus que la prise de décision aux États-Unis repose principalement sur la stupidité et l'incompétence flagrante. Si ce n'était le risque très réel de la guerre, les Russes passeraient leur temps à se moquer de l’errance des dirigeants de la « nation indispensable »…].
Quand je vois le fait que, du moins jusqu’à présent, les États-Unis n’ont pas osé risquer une agression militaire contre le Venezuela, je ne peux imaginer que quiconque au Pentagone ou au CENTCOM ait l’estomac pour une guerre contre l’Iran. Mais, encore une fois, je présuppose l’intelligence et la santé mentale, ce qui ne s’applique ni à M. MAGA ni aux Israéliens.
La RPDC ? L’Ukraine ? La Libye ? Le pays X ?
Dans l’analyse stratégique, il ne faut jamais dire jamais, mais je soutiens que les chances d’une attaque militaire américaine à grande échelle contre la RPDC, en Ukraine, en Libye ou contre le pays X – remplacez X par le pays de votre choix – sont minces. Franchement, ce train a déjà quitté la gare. Bien sûr, le « pays X » est suffisamment vague pour rester une possibilité, du moins en théorie – peut-être qu’une nouvelle petite « Grenade » pourrait être identifiée pour ça. Pour reprendre les mots immortels de Michael Leedens « Jetez-le contre le mur, juste pour montrer au monde que nous parlons d’affaires sérieuses » – après tout, c’est ce que ce grand héros américain – Reagan – a fait [l’invasion de la Grenade] après que les États-Unis aient fui le Liban [en 1983]. Mais à moins que l’administration Trump n’atteigne un nouveau niveau d’incompétence, d’arrogance et de folie, je ne vois pas où l’oncle Shmuel pourrait décider de « restaurer la démocratie ».
Conclusion : le Venezuela est-il toujours en ligne de mire ou est-il déjà attaqué ?
Lorsque vous traitez avec une administration dysfonctionnelle en phase terminale comme l’administration Trump – il suffit de regarder le nombre de personnes renvoyées ou qui ont démissionné ! Voyez ici le dernier cas – nous devons supposer qu’elle est capable du pire, du plus illogique et même d’actions catastrophiques auto-destructrices. Une attaque manifeste contre le Venezuela tomberait sans aucun doute dans cette catégorie. Nous devons par conséquent mettre de côté toutes les nombreuses déclarations faites par divers responsables américains – qu’il s’agisse de menaces ou d’apaisement – et regarder ce que les États-Unis font déjà. Lorsque nous faisons cela, nous voyons que les États-Unis sont déjà engagés dans une guerre contre le Venezuela, même si cette guerre est principalement secrète. En outre, cette guerre secrète a échoué, du moins jusqu’à présent. Cependant, et ce qui est encore plus inquiétant, les États-Unis ont payé très peu, voire aucun prix politique pour leur agression totalement illégale contre le Venezuela. La vraie question n’est donc pas de savoir si les États-Unis vont décider de lancer une agression militaire ouverte à grande échelle contre le Venezuela, mais s’il existe des facteurs qui les empêcheraient de franchir le seuil du déni ?
Je peux penser à au moins un de ces facteurs : le choc inévitable contre toute intervention militaire « yankee » dans l’opinion publique latino-américaine et les conséquences ultérieures et potentiellement graves pour les marionnettes américaines – à la Bolsonaro par exemple – et divers régimes compradores – en Colombie par exemple – sur le continent sud américain. En dehors de cela, mon plus grand espoir est que la débâcle en Irak, en Afghanistan et ailleurs suffira à persuader les responsables américains qu’un autre désastre militaire ne produirait aucun avantage pour leurs intérêts.
L’horloge tourne et le gang néocons à la Maison Blanche doit prendre une décision dans un sens ou l’autre – blâmer quelqu’un d’autre : le peuple vénézuélien ; les Russes ; les Chinois ; le Hezbollah ; l’Iran, les martiens, etc., et partir ou tenter une intervention militaire en espérant que les choses iront mieux que d’habitude.
Qu’est pensez-vous ? L’administration Trump va-t-elle entrer en guerre et, si oui, où ?
The Saker
PS : mise à jour rapide sur l’Ukraine : ni Porochenko, ni Zelenski n’ont quelque chose qui ressemblerait à un programme politique réel – même si Zelenski vient de publier un plan en dix points, ce qui est tout simplement ridicule, il est inutile d’en discuter maintenant. Étant donné que ces deux personnes seront des marionnettes américaines, le problème n’est pas grave : le cours de l’Ukraine ne changera pas à la suite de ces élections. La campagne de Porochenko est faible, il essaie de satisfaire la population de langue russe – il va même parfois jusqu’à parler en russe, ce qui est techniquement illégal pour lui ! Mais c’est bien trop tard : tout le monde le déteste, lui et le régime qu’il représente. Zelenski, en revanche, a une campagne très dynamique et efficace – principalement des vidéos – dans laquelle il dit des choses que Porochenko ne pourrait jamais dire. La plupart des observateurs, y compris moi-même, pensent que, lors du second tour de scrutin, Zelenskii aura gain de cause. Le temps presse pour Porochenko, il a intérêt à trouver quelque chose de dramatique, sinon il doit se carapater. Quant à Yulia Vladimirovna [Tymochenko], elle est clairement en discussion avec les gens de Zelenski pour voir s’ils peuvent former une coalition politique au sein du parlement, la Rada. Je pense que ces négociations resteront secrètes jusqu’au deuxième tour, où une « coalition de factions favorables aux partisans de Zelenski » sera créée à la Rada.
The Saker
Traduit par jj, relu par Cat pour le Saker Francophone