La Pravda Américaine : la Censure pratiquée par Youtube et l’étrange cas de Candace Owens


Par  − Le 26 août 2024 − Source Unz Review

Depuis 45 ans, je lis presque chaque matin le New York Times, ainsi que le Wall Street Journal. Jusqu’il y a une dizaine d’années, je lisais également quatre grands journaux californiens, mais leur déclin les ayant réduits à l’ombre de ce qu’ils furent, je les ai abandonnés, une décision qui a été d’autant simplifiée que le Los Angeles Times et le Sacramento Bee ont arrêté d’être distribués localement sur mon lieu de résidence ; et au vu de l’immense déclin de la qualité de la Gray Lady au cours des dernières années, elle pourrait bien subir le même sort un de ces jours. Dans le même temps, au cours des vingt-cinq dernières années, j’ai équilibré ces sources d’informations matinales très ancrées dans le courant dominant en prenant connaissance d’une très vaste gamme de sites internet d’informations et d’opinions extrêmement alternatifs, dont les publications ont toujours produit une vision très différente des mêmes événements.

Je n’avais jamais passé beaucoup de temps à regarder les télévisions câblées et les autres offres télévisées, car je les considérais comme une présentation diluée et affadie de ce que l’on trouvait dans les journaux imprimés, relatant sans doute quelque chose comme 1% des mêmes informations de la sphère dominante, mais souvent déformées de manière plus ou moins fantaisiste. La seule exception avait été l’émission Newshour de PBS, qui fut par le passé d’une très haute qualité, mais je pense l’avoir abandonnée pour sa couverture révoltante de la guerre en Irak, en même temps que j’arrêtai de lire la publication hebdomadaire de The Economist, et ce pour les mêmes raisons.

Cependant, depuis le déclenchement de la guerre entre la Russie et l’Ukraine début 2022, je me suis mis à suivre de près quelques chaînes YouTube, et je leur suis reconnaissant de produire des interviews de nombreuses personnalités très dignes de foi, en mesure d’apporter une mine d’informations et d’analyses cruciales. En particulier, le juge Andrew Napolitano, un ancien chroniqueur de FoxNews, a peu à peu accumulé une très forte collection d’invités réguliers, et je passe en général plusieurs heures par semaine à prendre connaissance de leurs opinions cohérentes sur la guerre en Ukraine, sur le conflit entre Israël et Gaza, et d’autres développements géopolitiques, des éléments qui sont très supérieurs aux absurdités que je lis tranquillement dans mes journaux du matin, sans même parler du ramassis d’immondices qui domine probablement les diverses émissions télévisées.

Suivant l’effet boule de neige, la volonté manifestée par Napolitano de proposer une plateforme d’expression à ces experts dont les opinions sont rejetées par nos organes médiatiques dominants a amené un nombre de plus en plus important de personnes à rallier son écurie d’invités. John Mearsheimer, de l’Université de Chicago, et Jeffrey Sachs, de l’université de Columbia, sont deux de nos érudits universitaires les plus distingués, et jouissent d’une énorme réputation internationale, M. Sachs ayant même été personnellement impliqué au plus haut niveau dans les événements politiques russes et ukrainiens durant plus de trente années. Ray McGovern a pratiqué pendant 27 ans des analyses pour le compte de la CIA, et est monté peu à peu en grade pour prendre la direction du groupe Soviet Analysis ; il a également eu pour rôle de briefer personnellement une demi-douzaine de présidents sur le sujet des renseignements. Chas Freeman, un ancien ambassadeur, a occupé divers postes distingués au cours d’une carrière étalée sur un demi siècle, comprenant au début le poste de traducteur personnel du président Nixon, en 1972, lors de sa rencontre historique avec Mao, le président chinois.

Le colonel Lawrence Wilkerson, qui occupa longtemps le poste de directeur de cabinet du secrétaire d’État Colin Powell, a passé de nombreuses années à œuvrer aux plus hauts niveaux de nos processus de décisions de sécurité national, et le colonel Douglas Macgregor jouit d’une excellente réputation sur le plan militaire, pour avoir occupé des postes importants au sein du département de la défense, cependant qu’Alastair Crooke, un ancien diplomate britannique et ancien officier dirigeant du MI6, a œuvré durant des décennies dans des négociations concernant le Moyen-Orient, une région très importante. Des experts militaires et proches des milieux du renseignements, comme Scott Ritter, Philip Giraldi et Larry Johnson apportent régulièrement leur point de vue, ainsi que des journalistes plus jeunes comme Max Bluementhal, Aaron Maté et Anya Parampil du Grayzone, et leur participation est complétée par celle d’autres invités réguliers.

Dans d’autres circonstances, nombre de ces personnalités seraient actuellement à l’œuvre à des postes proches du haut sommet du gouvernement étasunien et de ses appareils des affaires étrangères et de la sécurité nationale ; comme nombre d’entre elles l’ont fait par le passé ; et à tout le moins, on mettrait en exergue leurs opinions en les invitant régulièrement, par exemple dans nos émissions d’informations télévisées. Mais au lieu de cela, chacun d’entre eux a subi une purge et s’est fait éjecter presque complètement à la fois de nos services gouvernementaux et de nos médias dominants, en raison de leur refus de soutenir un récit promu officiellement mais totalement orwellien des événements les plus importants du monde.

Bien que nos manuels d’histoire n’en fassent guère mention, ce type de purge médiatique menée pour des raisons idéologiques ne sont pas chose nouvelle dans l’histoire des États-Unis, et j’ai découvert cela pour la première fois, il y a vingt ans environs, après les attentats du 11 septembre 2001 et la préparation politique pour la désastreuse guerre en Irak. La mort récente de Phil Donahue, le chroniqueur libéral, m’aura amené à me souvenir de cette histoire, que j’ai décrite dans un article écrit en 2018 :

L’idée de l’existence, dans le passé, d’une purge radicale des dissidents dans les médias me paraissait beaucoup plus facile à accepter, après que j’ai moi-même été témoin de quelque chose de similaire il y a quelques années à peine, visant à éliminer les obstacles à une guerre étrangère américaine.

Dans la ferveur patriotique qui a suivi les attentats du 11 septembre, peu de médias nationaux ont osé contester les plans et les propositions de l’administration Bush, la chronique de Paul Krugman dans le Times constituant une exception très rare. L’expression de « sentiments antipatriotiques » au sens large pouvait avoir de graves conséquences sur une carrière. Cela était particulièrement vrai des médias télévisés, qui avaient une portée beaucoup plus grande et qui étaient donc soumis à des pressions plus extrêmes. En 2002 et 2003, il était très rare de trouver un opposant à la guerre en Irak sur les réseaux de télévision ou parmi les tout nouveaux câblo-opérateurs, et même MSNBC, le moins populaire et le plus libéral parmi ces derniers, a rapidement lancé une répression idéologique brutale.

Pendant des décennies, Phil Donahue avait été l’un des pionniers des émissions de talk show télévisés dans la journée, et en 2002, il a obtenu de très bonnes audiences sur MSNBC. Mais au début de 2003, son émission a été annulée. Une note de service divulguée indiquait que son opposition à la guerre imminente en était la cause. Le conservateur Pat Buchanan et le libéral Bill Press, tous deux critiques de la guerre en Irak, animaient un talk show de haut niveau sur le même réseau, leur permettant de débattre avec leurs opposants plus pro-Bush, mais il a également été annulé pour des raisons similaires. Si les animateurs de débats les plus célèbres et les programmes les mieux notés du réseau câblé ont fait l’objet d’une résiliation sommaire, des personnalités de rang inférieur ont certainement tiré les conclusions appropriées concernant les risques de franchissement de certaines lignes idéologiques.

Mon vieil ami Bill Odom, le général trois étoiles qui a dirigé la NSA pour Ronald Reagan et l’un des plus éminents représentants de la sécurité nationale à Washington DC, a également été mis sur une liste noire par les médias pour son opposition à la guerre en Irak. De nombreuses autres personnalités médiatiques ont « disparu » à peu près au même moment et, même après que l’Irak a été universellement reconnu comme un désastre énorme, la plupart d’entre elles n’ont jamais retrouvé leur perchoir.

Une décennie plus tôt, le général Odom m’avait incité à publier un article dans la même veine pour The American Conservative, pour documenter les mensonges massifs et bien connus racontés par nos experts de plateaux dans les émissions passant à la télévision, qui étaient grassement payés pour désinformer volontairement le peuple étasunien.

Nous avons pu découvrir la profondeur de leur crédibilité le 20 avril, lorsque le New York Times a — finalement — publié un exposé, basé sur 8000 pages de courriels et de relevés de notes issus du Pentagone, au sujet des activités et des liens d’affaires de ces experts supposément dépassionnés. CNN les payait jusqu’à 1 000 $ par apparition, mais la plupart d’entre eux recevaient des subsides nettement plus importants du fait de leur position sur des marchés militaires et leurs contrats conclus avec le gouvernement. Par exemple, le général James Marks est apparu de manière régulière sur les émissions d’information de chaînes câblées durant toute l’année 2006, alors même qu’il était impliqué dans des réponses à appels d’offres, au travers de son engagement avec McNeil Technologies, pour un contrat visant à embaucher des traducteurs en Irak, pour la modique somme de 4,6 milliards de dollars.

Si l’on voulait se passer de prendre des pincettes, on pourrait affirmer que le gouvernement contrôlait 99% de ces hommes, et que les chaînes d’information louaient le pourcent restant — pour ensuite leur demander leurs opinions au sujet du gouvernement. Leur avenir financier était entre les mains des dirigeants de l’administration qu’ils avaient pour charge d’évaluer sur les plateaux télévisés.

La Maison-Blanche a joué pleinement de ces relations. Les dirigeants répondant à Bush organisaient régulièrement des communiqués de presse pour apporter des informations de l’intérieur à ces commentateurs et pour façonner leurs commentaires. Le New York Times a dévoilé des documents du Pentagone qui décrivent les généraux beaux parleurs comme des “multiplicateurs de force des messages” ou comme des “suppléants”, sur lesquels on pouvait également compter pour propager le message de l’administration “sous forme d’opinions.” Le Pentagone a même embauché Omnitec Solutions, une société de consultance, pour visionner les apparitions télévisées et noter les performances de ces commentateurs présentés comme neutres au public. Les évaluations étaient ensuite transmises aux personnes désignées par Bush au sein du Pentagone qui contrôlaient les flux financiers des appels d’offre.

On trouve des exemples documentés concernant des généraux à la retraite estimant que la situation en Irak relevait du désastre absolu, mais ne prodiguant que les Bonnes Nouvelles désirées à des millions d’Étasuniens s’en remettant à leur sagesse à la télévision. Après être rentré d’un voyage financé par le gouvernement en Irak, le général Paul E. Vallely, un analyste de FoxNews, a affirmé à Alan Colmes: “Vous ne pouvez pas imaginer les progrès,” allant jusqu’à prédire que l’insurrection allait être réduite “à quelques individus” en quelques mois. Mais il a par la suite affirmé au New York Times : “J’ai vu immédiatement que les choses partaient à vau-l’eau en 2003.”

Nombre de ces anciens officiers militaires étasuniens de haut rang auraient toute légitimité à prétendre faire partie de la Screen Actors Guild [un groupe représentant les acteurs, NdT], et les versements qu’ils ont reçus pour leur jeu théâtral aurait parfois pu les positionner également en haut du panier de l’échelle des revenus de Hollywood. Il existe un mot assez précis pour décrire des officiers de l’armée qui font commerce des intérêts de sécurité nationale de leur pays en échange d’importantes compensations financières, et ce mot n’est pas très agréable à entendre.

Contrairement à leur statut du début des années 2000, YouTube et les autres plateformes de diffusion vidéo sont désormais parvenus à maturité, et permettent potentiellement à des personnalités bannies par les grands médias de diffuser leurs opinions à une audience mondiale. De fait, la présentation réalisée en 2014 par John Mearsheimer au sujet de l’Ukraine, qui relevait de la prescience, a accumulé quelque 29 millions de vues sur YouTube, possiblement davantage que toute conférence académique dans toute l’histoire de l’Internet, et ces chiffres d’audience sont propres à faire pâlir d’envie presque toutes les émissions télévisées dominantes sur des sujets de politique publique.

Pour des raisons similaires, l’émission YouTube de Napolitano a désormais attiré bien plus de 400 000 abonnés, et il n’est pas rare que ses interviews personnelles atteignent et dépassent les 100 000 vues, un chiffre d’audience tout à fait comparable à ceux de nombreuses émissions du monde déclinant de la télévision.

Malheureusement, on s’expose en établissant un média sur une plateforme technologique détenue par un tiers à d’importants risques potentiels, et ces risques se sont manifestés début août 2024 lorsque l’émission de Napolitano, Judging Freedom, a fait l’objet d’un “strike” de la part de YouTube, qui l’a contraint à suspendre toutes ses émissions en direct durant une semaine, un développement qui m’a choqué et fortement préoccupé.

DÉCLARATION — Mon premier Strike pour cause de liberté d’expression ! —
Le 13 juin 2024, j’ai publié une interview au cours de laquelle j’échangeais avec le journaliste Pepe Escobar, et qui nous a vu nous engager dans une discussion profonde et critique la géopolitique mondiale. Notre conversation a été franche, a traité de sujets complexes et souvent controversés… pic.twitter.com/iV6pIQvWou

— Judge Napolitano (@Judgenap) 17 août 2024

Au cours des dernières années, YouTube a régulièrement banni et purgé tout chaîne discutant de sujets particulièrement “sensibles” ou controversés, et trois “strikes” en l’espace de trois mois provoquent la suppression totale d’une chaîne et de ses centaines voire milliers de vidéos, un résultat potentiellement dévastateur. Nombreuses sont les chaînes YouTube a avoir subi un tel destin : elles sont tellement nombreuses qu’une page Wikipédia maintient une grande liste d’exemples parmi les plus connus.

Il me semble qu’avant la victoire inattendue de Donald Trump au cours des élections présidentielles de 2006, YouTube et la plupart des autres plateformes sur Internet s’étaient targuées de leur soutien traditionnel envers la liberté d’expression et de leur politique très permissive en matière de contenus. Elles ne bannissaient des vidéos ou des chaînes que si celles-ci violaient ostensiblement des règles claires concernant la pornographie, la violence graphique, ou les violations de copyrights, et la liste publiée sur cette page Wikipédia semble confirmer mon impression.

Mais vers la fin de l’année 2016, la controverse du Pizzagate a soudainement surgi sur Internet, et divers diffuseurs favorables à Trump se sont emparés de courriels fuités du Parti démocrate pour suggérer que certains Démocrates de premier plan étaient impliqués dans un réseau pédophile. Cela a provoqué une répression étrange et très suspecte par les médias sur tous ces diffuseurs, et plusieurs chaînes YouTube ont soudainement été purgées. Un précédent totalement nouveau de censure idéologique venait d’être institué, et bien que ces chaînes purgées fussent trop petites pour se retrouver sur la page Wikipédia, j’ai ensuite décrit cette très étrange situation dans un article paru en 2019, après que l’affaire Jeffrey Epstein, très similaire, a fini par percer dans les médias.

Peu de temps après cela, divers récits aux apparences tout aussi ridicules sont apparus dans les médias dominants, affirmant qu’une longue liste de sites et chaînes internet anti-establishment — de gauche, de droite, libertaires, ou racialistes — étaient en réalité des agents délibérés de la propagande russe, des accusations en coïncidence avec le ridicule bobard du Russiagate qui a diabolisé l’administration Trump durant les quelques années qui ont suivi.

À l’époque, ces accusations de propagande russe apparaissaient comme tellement tirées par les cheveux — imaginez l’ultra-libertarien Ron Paul faisant tourner un site internet de “Fake News” pro-russe ! — que je ne les ai pas prises au sérieux, et que je me suis contenté de les tourner en ridicule dans un petit éditorial. Mais elles ont apporté une légitimité minimale aux plateformes pour que celles-ci rompent leur engagement de longue date sur la liberté d’expression et se mettent à supprimer ou à bannir les sites ou les chaînes en désaccord avec les pouvoirs politiques régnant sur les États-Unis. Ce processus s’est bientôt mis en branle, lentement au départ, mais ensuite avec une sévérité durant les années qui ont suivi.

Une fois établi un tel précédent de pure censure idéologique, il a naturellement tendance à s’étendre suivant les pressions politiques, et je pense que c’est à peu près à cette période que les médias ont rapporté que l’Anti Deffamation League [ADL] est entrée dans le jeu pour aider à faire la police de l’expression sur YouTube et diverses autres plateformes de réseaux sociaux, comme je l’ai discuté dans un article de 2018.

À la mi 2018, le dynamisme de cette censure politique sur l’Internet avait connu une telle croissance que YouTube prit la décision spectaculaire de bannir la chaîne extrêmement populaire d’Alex Jones, un activiste des conspirations de premier plan, ferme soutien du président Trump et de ses politiques, et on a vu Facebook, Spotify et Apple opter pour des actions simultanées et semblables, au départ sur une base temporaire, mais rapidement à titre permanent. Des accusations assez amorphes de “discours de haine” ou de “harcèlement” ont rapidement été mises en avant de manière régulière comme excuse pour éliminer des chaînes audacieuses ou controversées, surtout celles animées par des créateurs de droite impliqués dans des “théories du complot” ou des croyances racialistes, avec une accélération de ces purges en 2019.

Ces justifications furent parfois étirées dans des proportions offensantes. Par exemple, à la possible exception d’Arnold Toynbee, David Irving se classe sans doute comme l’historien britannique ayant produit la plus belle carrière internationale du dernier siècle écoulé, et ses livres brillants et fondateurs se sont vendus par millions. Je pense que c’est à peu près à cette époque que toutes ses conférences captivantes sur les faits véritables de la seconde guerre mondiale ont été purgées de YouTube, ainsi que les vidéos produites par les personnes qui remettaient en cause le récit officiel de l’Holocauste.

Ces purges sur YouTube faisaient partie d’une vague idéologique bien plus large, qui s’en prenait également aux livres que l’ADL n’aimait particulièrement pas. Au mois de mars 2019, j’ai noté l’incroyable ironie voulant qu’Amazon choisît le Black History Month pour bannir subitement plusieurs ouvrages brillants d’historiographie noire universitaire :

Quelques mois plus tard, YouTube a purgé la chaîne Red Ice de Henrik Palmgren, un Suédois de droite, dont j’avais découvert les travaux quelques années auparavant. Palmgren était un superbe interviewer, discret mais curieux, et prêt à laisser ses invités bien informés s’exprimer dans les plus grands détails sur des sujets jamais couverts par les médias dominants. Il avait déjà amassé une vaste collection d’interviews audio d’une durée d’une ou deux heures sur toute une gamme de sujets controversés ou conspirationnistes, et j’ai fini par en écouter un grand nombre, qui m’ont parfois permis d’aborder pour la première fois des sujets historiques qui sont devenus ensuite, à l’issue d’investigations longues et soigneuses, les sujets de mes articles sur la Pravda Américaine.

Comme le relate la liste de censure publiée sur Wikipédia, les purges se sont poursuivies durant l’année 2020, et ont rapidement balayé un grand nombre de chaînes soutenant des opinions conspirationnistes sur l’épidémie mondiale de Covid ou remettant vertement en cause les manifestations massives du mouvement Black Lives Matter qui ont fait éruption après la mort de George Floyd en garde à vue. L’une des principales victimes de purges a été Stefan Molyneux, un diffuseur de vidéos libertariennes, dont la chaîne avait accumulé plus de 900 000 abonnés, mais qui n’en a pas moins subitement disparu.

Ce régime en croissance rapide de censure politique a inspiré beaucoup d’humour noir durant cette période. De nombreuses personnes ont commencé à blaguer sur l’idée que ces plateformes Internet allaient sans doute rapidement bannir le président des États-Unis, et à ma stupéfaction absolue, c’est exactement ce qui s’est produit le 13 janvier 2021, lorsque la chaîne du président Donald Trump a été purgée et qu’il a dans le même temps disparu de la plupart des autres plateformes de réseaux sociaux. Bannir le président étasunien en exercice démontrait clairement qu’absolument personne n’était protégé de cette censure hautement sélective, et de fait, les chaînes des sénateurs Rand Paul et Ron Johnson, de Rupert Murdock (Sky News Australia) et de Jair Bolsonaro, président du Brésil, ont rapidement été également suspendues, probablement pour avoir diffusé des opinions contraires aux mesures anti-Covid.

Les créateurs de contenus peuvent investir des années de vie à produire des vidéos en grand nombre et à accumuler peu à peu une liste impressionnante de dizaines, de centaines, ou de milliers d’abonnés. Voir tous ces efforts cumulés détruits en un instant, pour des raisons inexpliquées par les autorité responsables, peut avoir un impact dévastateur sur ces personnes, et si certaines s’emploient ensuite à reconstruire ce qu’elles avaient perdu sur une autre plateforme, d’autres ne le font pas. YouTube a été rachetée par Google en 2006, devenant une division de ce géant de l’Internet, et Susan Wojcicki, l’une des premières employées historiques de YouTube, a occupé le poste de PDG de la société durant des années, au cours desquelles ce régime de censure n’aura fait que croître. Par conséquent, il n’est guère surprenant que son récent décès d’un cancer, à l’âge de 56 ans, ait été accueilli avec un soulagement amer par de nombreuses personnalités reléguées à la marge et outragées par ces décisions.

Au cours des dernières années, j’ai tiré profit de ce climat sévère de censure sur YouTube, reconnaissant qu’il existait de nombreux sujets importants que l’on ne pouvait plus discuter de crainte de disparaître sur-le-champ de cette plateforme. Promouvoir des opinions in-orthodoxes ou “conspirationnistes” au sujet des attentats du 11 septembre 2001 ou au sujet de l’assassinat de JFK, ou encore sur d’autres sujets majeurs de la seconde guerre mondiale apparaissait comme extrêmement risqué, tout comme des controverses plus récentes comme les origines du Covid et les mesures de contrôle , ainsi que les accusations de vol des élections étasuniennes de 2020. Des règles claires concernant ce qui pouvait ou ne pouvait pas être dit n’ont jamais été publiées, mais les personnes qui apparemment dépassaient la ligne disparaissaient régulièrement ainsi que l’ensemble de leurs contenus, surtout si leur chaîne était populaire ou connaissait une croissance rapide, et c’est exactement cet élément d’incertitude qui a contraint la plupart des diffuseurs à s’auto-exercer une énorme censure, de crainte des terribles conséquences s’ils avaient la malchance de voir l’ensemble de leur chaîne éliminée.

En théorie, le système établi par YouTube, basé sur plusieurs “strikes”, apporte des avertissements à une chaîne pour lui indiquer qu’elle est trop proche du bord, mais cette politique a parfois été ignorée. Par exemple, Kevin Barrett avait soigneusement limité ses vidéos sur sa chaîne TruthJihad à ses seuls “interviews télévisées internationales, pour la plupart avec Press TV, basée à Téhéran, et Ofogh TV”, et il n’a jamais reçu le moindre “strike” sur ces discussions tenues avec des professeurs et des commentateurs les plus notables. Mais YouTube a subitement décidé d’éliminer totalement l’ensemble de sa chaîne au mois d’avril, pour des raisons de “discours de haine”, apparemment parce qu’il avait de manière répétée dénoncé Israël pour perpétrer ce qu’il considère — en accord avec les estimés juristes de la Cour Internationale de Justice — comme un “génocide” à Gaza.

En fin d’année 2023, un jeune diffuseur de droite du nom de Patrick Casey m’a interviewé deux ou trois fois pour la chaîne d’informations qu’il avait fondée, et j’avais trouvé que nos conversations sur Affirmative Action et sur le conflit entre Israël et Gaza s’étaient bien passées. Mais peu de temps après, sa jeune chaîne, qui n’avait jamais connu le moindre “strike”, a été subitement éliminée en dépit du fait qu’elle ne proposait qu’une bonne dizaine de vidéos. Un diffuseur irlandais du nom de Keith Woods m’avait invité à peu près à la même période, et il m’a ensuite dit que plusieurs courts extraits de mon interview avaient suscité de très bonnes diffusions sur Twitter, allant jusqu’à un million d’impressions ou plus. Mais lorsqu’il m’a de nouveau invité, il a subitement subi un “strike”, ce qui l’a fait réagir avec prudence : il a reculé.

Netanyahu désigne les Palestiniens sous le nom de tribu d’Amalek, dont Dieu a ordonné l’annihilation. Il appelle à un génocide. Ses soldats exécutent des femmes et des enfants dans les écoles.
Ce n’est pas de la guerre, c’est le mal. pic.twitter.com/CWhtrkv8Rk

— Ray (@raymo_g) 22 décembre 2023

Malgré tout ceci, je ne me serais jamais attendu à ce que la chaîne de Napolitano subît de tels risques, étant donné que ses invités réguliers comprenaient des personnalités de haute volée, présentant des réputations absolument respectables, et que les sujets qu’il couvrait de manière très sobre étaient des sujets absolument couverts par les médias dominants, comme la guerre entre la Russie et l’Ukraine ou le conflit entre Israël et Gaza. Mais il y a une semaine ou deux, avant qu’il fût subitement suspendu de YouTube, une équipe de trente agents du FBI a pratiqué un raid au domicile de l’un de ses invités réguliers, l’ancien inspecteur en chef des armements pour l’ONU Scott Ritter, et la coïncidence des agendas entre ces deux événements a provoqué des soupçons sombres, selon lesquels les élections en approche pourraient susciter un degré encore accru de censure médiatique et de suppressions.

Les “strikes” subies par une chaîne YouTube constituent souvent un signe de son élimination prochaine, mais heureusement, ce n’a pas été le cas pour Judging Freedom, et j’ai été soulagé de constater qu’elle a repris les diffusions une fois expirée sa peine d’une durée d’une semaine. J’ai également été heureux de voir que Napolitano avait très prudemment monté une chaîne de secours sur la plateforme vidéo Rumble, au cas où des problèmes de ce type se produiraient à l’avenir.

Mettre en œuvre une censure efficace sur YouTube constitue de toute évidence une tâche bien plus difficile si des plateformes alternatives et comparables existent pour héberger le même type de contenus, et il semble désormais exister une pression considérable pour fermer les plateformes alternatives les plus populaires.

Au cours des dernières années récentes, les puissants algorithmes de la plateforme chinoise TikTok ont produit une augmentation exponentielle de sa popularité au sein des jeunes générations, et elle est devenue la source principale d’informations sur l’horrible massacre en cours à Gaza. Il s’en est suivi la fuite d’une appel téléphonique d’un dirigeant de l’ADL, qui a révélé que la puissante organisation pro-israélienne estimait avoir un problème majeur avec TikTok, et peu de temps après, le Congrès a subitement adopté une loi mettant en branle un bannissement probable de TikTok. Depuis son rachat de Twitter, Elon Musk a significativement rapproché cette plateforme de ses racines originelles sur la liberté d’expression, et il y a quelques jours, le gouvernement britannique a semblé le menacer d’arrestation pour son relatif manque de censure. Bien qu’elle ne fasse pas l’objet d’une utilisation très répandue en Occident, l’application Telegram est très populaire en Russie, et reste en grande partie non censurée, et son fondateur et PDG milliardaire, né en Russie, vient de faire l’objet d’une arrestation en France, apparemment pour avoir autorisé trop de liberté d’expression à ses 900 millions d’utilisateurs. Si ces trois grandes plateformes se voyaient toutes réalignées, alors supprimer ou intimider celles qui restent ne sera sans doute pas difficile.

Ce schéma de censure de longue date par YouTube était désormais très clair dans mon esprit, et bien que j’aie eu la surprise de constater récemment qu’il s’étendait aux commentateurs distingués rassemblés par Andrew Napolitano, peut-être qu’avec le recul je n’aurais pas dû être aussi surpris. Mais j’ai récemment découvert ce qui ressemblait à une exception très frappante dans ce grand schéma, ce qui soulève des questions intéressantes.

Ce n’est qu’il y a quelques semaines que je me suis intéressé de plus près à Candace Owens, une “influenceuse” noire de droite sur Twitter et sur d’autres plateformes de réseaux sociaux, qui s’est fait un soutien fervent de Donald Trump et de ses diverses causes et décisions ; jusqu’alors je n’avais qu’une très vague idée à son sujet.

Je ne consacre pas de temps à ce type de tribune, et je n’avais jamais lu aucun de ses articles — peut-être en raison du fait qu’elle n’en a jamais écrit aucun — si bien que j’ai supposé qu’elle ne faisait que fulminer sur divers sujets de droite, à l’instar des centaines de ses concurrents moins visibles qu’elle. Le long article Wikipédia, riche de 13000 mots à son sujet était naturellement des plus hostiles, mais les faits de base présentés par cette source sont généralement relativement fiables, bien qu’ils soient déséquilibrés et biaisés, et la lecture de cette page Wikipédia a confirmé mes impressions.

Elle semble avoir passé les quelques dernières années comme personnalité emblématique de The Daily Wire, une opération médiatique de droite gérée par un activiste du nom de Ben Shapiro. Lourdement financée par divers riches donateurs pro-Israël, son objectif était d’évidence d’encourager la jeune génération de conservateurs à devenir tout aussi favorables à Israël que leurs aînés. Je ne pense pas avoir jamais lu un écrit produit par Shapiro ou par l’un ou l’autre de ses contributeurs, si bien que j’avais tendance à tous les regrouper en esprit. Une longue liste d’éléments de langage populistes de droite dénonçant les Musulmans, les immigrés mexicains, les manifestants Black Lives Matter, les vaccinations contre le Covid, et Bill Gates, se ressemblant tous peu ou prou.

Mais à son très grand crédit, Owens semble avoir réagi profondément au terrible massacre en cours de la population civile impuissante de Gaza, et en tant que chrétienne fortement engagée, elle a tweeté la phrase biblique “Bénis soient les faiseurs de paix” au mois de novembre dernier, tout en déclarant également que nul ne peut “servir Dieu et l’argent.” Cela a largement été considéré comme un appel implicite à un cessez-le-feu à Gaza, ainsi qu’une explication des raisons pour lesquelles si rares étaient les autres personnalités conservatrices ou médiatiques à adopter la même position. Vu par quelque 16,4 millions de personnes, son tweet a déclenché un orage de réactions outragées de la part des activistes pro-Israël, et c’est sans doute à cette occasion que je lui ai porté attention.

Bénis soient les faiseurs de paix ; car ils seront appelés fils de Dieu. Bénis soient ceux qui sont persécutés pour la justice ; car le Royaume des Cieux est à eux. Bénis soyez-vous, lorsque des hommes vous injurient et vous persécutent, et lancent contre vous toutes sortes de maux…

— Candace Owens (@RealCandaceO) 14 novembre 2023

Apparemment, dans le même temps, elle a commencé à tweeter “Le Christ est roi.” Bien que cette affirmation n’apparaisse guère controversée de la part d’une chrétienne dévouée, la phrase a fortement irrité Shapiro et d’autres Juifs pro-Israël, qui l’ont bientôt dénoncée comme antisémite, et ont bientôt provoqué sa révocation. Je ne suis que très peu au fait de la plupart des personnalités médiatiques impliquées dans cette âpre controverse, mais lorsque j’ai recherché ce sujet sur Google, cet article de New Republic a fait surface, qui semble résumer raisonnablement ce qui s’est produit.

Notre site, très peu modéré, a tendance à attirer de nombreux commentateurs très critiques des Juifs et d’Israël, si bien qu’il n’a guère été surprenant de la voir devenir une grande héroïne pour certains de ces commentateurs, qui se sont mis à faire ses éloges et à la mettre en avant dans les commentaires de certains de mes articles, ce qui a attiré mon attention. L’examen superficiel que j’ai mené sur son historique — elle a fait des études de journalisme au sein d’une université de second rang avant d’abandonner — ne m’a guère impressionné, ce qui a débouché sur quelques échanges agacés. Mais j’ai ensuite découvert que certaines personnes plus sérieuses admiraient également ses courageuses prises de positions publiques, et j’ai fini par décider de m’y intéresser de plus près.

Elle produit le plus souvent de nouvelles vidéos tous les jours ou tous les deux jours, le plus souvent des interviews ou des monologues sur divers sujets controversés. Après la mise sur la paille d’Alex Jones et de son empire médiatique par d’énormes procès, je me suis laissé dire qu’elle était désormais devenue l’une des promotrices des complots les plus populaires sur Internet. L’audience de sa chaîne YouTube semble certes avoir connu une croissance très rapide, et elle a désormais plus de 2,3 millions d’abonnés en plus de 5,5 millions de followers sur Twitter, si bien qu’il est courant que chacune des vidéos qu’elle publie fasse l’objet d’un demi à un million de vues.

Voilà des audiences qui apparaissent comme très importantes, six fois plus développées que celles de Napolitano et de tous ses invités distingués. Je pense que l’une des plus grandes chaînes YouTube libérales de gauche est Democracy Now!, animée par Amy Goodman, dont la présence remonte à plus d’une dizaine d’années, mais Owens, partie de rien, a désormais accumulé un nombre d’abonnés plus important.

Après avoir jeté un coup d’œil sur les titres de ses vidéos les plus récentes, j’ai été moins surpris de sa popularité. Un grand nombre de ces vidéos la voyaient mener des interviews parfois conflictuelles avec d’autres influenceurs et célébrités, comme notablement la star de rap Kanye West, Alex Jones, Andrew Tate, et Russell Brand. Dans le même temps, nombre des monologues semblent s’intéresser au satanisme, à Hitler, aux conspirations sur le 11 septembre 2001, à des agendas démoniaques, au phénomène transgenre, à Israël, et à l’antisémitisme. Ce type de sujets “clinquants” ont naturellement pour tendance d’attirer un vaste auditoire, mais peut-être d’une qualité intellectuelle de second ordre, et je pense que la principale raison pour laquelle les autres YouTubers ne mettent pas ces sujets en avant est que ceux qui le font se voient souvent purgés. Sa popularité m’apparaissait donc moins surprenante que sa survie sur ce qui était peu à peu devenu une plateforme très censurée.

J’ai visionné une bonne dizaine de ses vidéos pour me faire une idée du contenu qu’elle publie, et pourquoi pas pour obtenir des indices vis-à-vis de ce mystère. Deux des vidéos les plus populaires ont été les premiers épisodes qui expliquent les raisons de son licenciement, et la deuxième de ces vidéos enchaîne sur un méli-mélo confus d’affirmations sur le programme MKUltra de la CIA, le satanisme, l’eugénisme, Kanye West, la réalité des démons, et Charles Manson qui aurait été “un Fed.” Sans penser que YouTube allait forcément purger quelqu’un produisant ce type d’affirmations, je doute malgré tout que celles-ci améliorent sa crédibilité.

Comme je ne sais rien, ni ne veux rien savoir au sujet des rappeurs célèbres, je me suis concentré sur l’un des sujets sur lesquels j’ai de bonnes connaissances. La plupart de ses vidéos s’étendent sur une demi-heure ou plus, et le sujet principal s’étale sur 10 à 15 minutes, et le reste est constitué de remplissage, avec des scandales sur des célébrités, des informations récentes et choquantes, et des publicités. J’ai regardé les épisodes 9 et 12 qui discutaient des attentats du 11 septembre 2001, et les vidéos ici incluses démarrent sur ces segments :

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Elle m’a surpris en faisant état d’informations factuelles et importantes. Par exemple, le premier épisode explique, détails considérables à l’appui — soutenus par des vidéos en provenance de médias d’informations — comment cinq agents israéliens du Mossad ont été pris sur le vif à célébrer la réussite des attentats contre le World Trade Center et ont été emprisonnés puis interrogés par le FBI durant un mois ou deux. En dépit du fait qu’ils ont sans doute échoué face au détecteur de mensonges, des pressions politiques massives ont été exercées pour régler cette affaire, et ils ont fini par être libérés et expulsés en Israël, toutes accusations abandonnées.

L’épisode suivant relate le récit tout aussi étrange de la découverte du passeport supposément intact de l’un des pirates de l’air sur le sol, aux abords des tours en feu du World Trade Center, ainsi que les récits médiatiques des chaînes d’informations selon lesquels des milliers d’Israéliens vivant aux abords des tours auraient été alertés par des messages instantanés les prévenant de l’imminence des attentats, une heure ou deux avant leur survenue, s’assurant qu’aucun d’entre eux n’aurait été tué par l’énorme désastre.

Ces éléments sont sans doute bien connus de quiconque a consacré un peu de temps aux détails du 11 septembre, mais comme ils n’apparaissent jamais dans les récits médiatiques, je suis convaincu qu’ils étaient totalement nouveaux aux yeux de son auditoire jeune et orienté vers les célébrités. Et quoi qu’elle n’ait couvert qu’environ 2% des aspects étranges du récit du 11 septembre, c’est toujours 2% de plus que ce que la plupart des Étasuniens ont jamais reçu, surtout dans des vidéos YouTube accessibles qui ont été visionnés nettement plus d’un million de fois. Je pense que la plupart des jeunes Étasuniens ne lisent que rarement quoi que ce soit qui dépasse la longueur d’un Tweet, mais pour ceux qui désirent davantage d’informations, on en trouve facilement sur l’Internet, y compris dans quelques uns de mes propres articles :

Deux autres de ses épisodes, les numéros 7 et 17, traitent de la seconde guerre mondiale et de Hitler, et ici encore elle relate des éléments très utiles et importants, pas le type d’information que l’on trouve habituellement de nos jours sur YouTube.

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Le traitement horrible infligé aux civils allemands au lendemain de la guerre est couvert, ainsi que les affirmations selon lesquelles la plupart des crimes attribués aux Nazis n’étaient guère différents des crimes commis par les Alliés, aussi bien durant qu’après la guerre. Ici encore, tous ces faits sont très largement connus de quiconque s’est penché sur le sujet et a lu les ouvrages méticuleusement documentés écrits par le Dr. Alfred de Zayas, le dirigeant des Droits de l’Homme pour l’ONU, mais il est rare qu’on trouve ces éléments de nos jours sur YouTube, et encore moins dans des vidéos qui font un million de vues. Elle fait même mention du notoire partenariat entre Nazis et Sionistes dans les années 1930, un autre sujet très sensible et très soigneusement exclu de tout débat.

Owens a tiré des parties de ses éléments d’un excellent documentaire d’une durée d’une heure, paru en 2015 sur la BBC, sous le titre 1945: The Savage Peace, que je n’avais jusqu’alors pas vu, et que je recommande vivement :

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Une fois de plus, ses vidéos ne font qu’effleurer la surface du sujet, mais peut-être qu’une partie de son auditoire pourrait faire montre d’assez de curiosité pour mener des recherches supplémentaires en lisant divers livres ou articles. Peut-être que le titre de sa première vidéo — “Tout ce que vous avez appris sur la seconde guerre mondiale relève du mensonge” — remarquablement semblable à mon long article écrit en 2023 — lu quelque deux cent mille fois au cours de l’année passée — sur précisément le même sujet, est une coïncidence, et peut-être pas.

Ses discussions sur les absurdités du climat politique que nous connaissons aujourd’hui, et sur la manière dont les accusations ridicules d’antisémitisme sont lancées pour étouffer le débat sont également très sensées et bienvenues. J’ai été très heureux qu’elle ait interviewé Briahna Joy Gray, récemment viré par le Rising podcast of the Hill pour n’avoir pas suffisamment respecté les propagandistes pro-Israël, et cette vidéo qu’Owens a judicieusement titrée Encore quelqu’un viré pour avoir critiqué Israël ?! a été vue à plus d’un demi-million de reprises.

Ensuite, il y a une semaine, elle a tweeté une note expliquant que la célèbre ADL avait au départ été fondée avec pour mission explicite de préserver un criminel juif de sa punition après avoir violé et assassiné une jeune fille âgée de 13 ans, et ce Tweet a lui-même été vu plus d’un demi-million de fois.

Lisez ce qui suit. L’ADL ne “lutte pas contre l’intolérance”, elle défend un réseau de criminels au sein desquels on trouve des violeurs d’enfants. #MaryPhagan https://t.co/TNRyNt9Pn7

— Candace Owens (@RealCandaceO) 17 août 2024

Depuis 2018, mes propres articles ont ravivé et analysé ce récit important avec moult détails, et peu après la parution du premier d’entre eux, l’ouvrage extrêmement bien documenté sur lequel je m’étais appuyé comme base première de ma propre analyse a subitement été purgé par Amazon.

Aussi, nonobstant les scandales sur les célébrités et les autres futilités qui remplissent ces vidéos, elles apparaissent dans l’ensemble comme des éléments très positifs à avoir à grande circulation, même si je me suis quelque peu gratté la tête pour comprendre comment l’ADL l’a laissée survivre aussi longtemps sur YouTube. Malheureusement, il est fort possible que la réponse à cette question provienne de nombreuses autres de ses vidéos, que j’ai vu sous un jour nettement plus négatif.

Il y a quelques années, j’ai publié un article sur quelques-unes des techniques utilisées par l’establishment pour discréditer ses principaux critiques, surtout ceux présentant une orientation “conspirationniste”. Comme je l’ai expliqué :

Beaucoup d’individus, peut-être la plupart, sont assez réticents à adopter une théorie qui n’est pas approuvée par leurs figures d’autorité personnelles, qu’il s’agisse des rédacteurs du New York Times ou des experts de FoxNews. Seule une petite minorité de la population est prête à franchir de telles frontières idéologiques et à risquer l’épithète cinglante de “théoricien du complot”.

Les individus transgressifs qui adhèrent à certaines croyances hétérodoxes sont aussi généralement prêts à en accepter beaucoup d’autres, et sont souvent très enthousiastes à l’idée de le faire, faisant parfois preuve d’un manque troublant de réflexion logique et de jugement analytique prudent qui peut entacher toute leur communauté. Ils sont donc prêts à mordre avec empressement l’appât empoisonné de théories frauduleuses mais attrayantes, qu’elles soient avancées par des défenseurs bien intentionnés, des charlatans intéressés ou des agents secrets de l’establishment engagés dans une “infiltration cognitive”.

Ainsi, la manière la plus simple pour discréditer les “théoriciens du complot” est parfois de tirer pleinement parti de leurs tendances psychologiques et de leur manque de jugement, en les poussant à accepter et à professer des choses absolument ridicules. Il est possible que le mouvement très populaire QAnon, qui est survenu il y a quelques années, ait été manipulé suivant ces lignes.

Ces graves faiblesses semblent très évidentes dans le cas d’Owens, à en voir ses diverses vidéos sur les démons et le super-naturel. Il est indéniable que l’un des premiers ingénieurs en aéronautique était activement impliqué dans l’occultisme, mais je ne pense pas que cela établisse que l’ensemble de notre programme spatial de la NASA soit fondé sur le satanisme. De même, que des scientifiques aient parfois pu se tromper n’implique pas nécessairement que nous devions rejeter toute la science comme “une fausse religion” et ainsi nous ouvrir à la possibilité que la Terre soit plate. Apparemment, YouTube est inondé depuis des années par de nombreuses vidéos fluides et bien produites visant à prouver que “la Terre est plate,” et il est largement soupçonné que ces vidéos ont été publiées pour amener des activistes-complotistes naïfs à se rendre ridicules et pour discréditer l’ensemble de leur communauté.

Mais je pense que le plus gros problème auquel est confrontée Owens, qui va probablement gravement endommager sa crédibilité sur tous les autres sujets qu’elle promeut, réside dans ses affirmations répétées que Brigitte Macron — la “première dame de France” — serait en fait un homme.

Lorsque j’ai pour la première fois entendu les échos de cette affirmation sur Internet, j’ai naturellement supposé que ce n’était qu’une blague. Mais au lieu de cela, ce sujet apparaît comme extrêmement sérieux, et dans de nombreuses vidéos publiées au cours des derniers mois, Owens a œuvré à en faire sa signature, empilant des millions de vues sur les vidéos consacrées à ce sujet, et devenant apparemment la principale promotrice au monde de cette idée. Dans l’un de ses tweets, qui a été visionné 7,6 millions de fois, elle déclare “Je parierais l’ensemble de ma réputation professionnelle sur le fait que Brigitte Macron est en réalité un homme” :

Cet épisode est en pleine explosion, et je veux simplement dire — Après avoir examiné ce sujet, je miserais l’ensemble de ma réputation professionnelle sur le fait que Brigitte Macron est en réalité un homme. Tout journaliste ou publication s’employant à écarter cette possibilité est immédiatement identifiable comme…

— Candace Owens (@RealCandaceO) 12 mars 2024

Après des déclarations aussi fortes au sujet d’un sujet étrange et de moi totalement inconnu, j’ai visionné plusieurs vidéos publiées par Owens sur ce sujet, en me demandant quels faits choquants elle avait déterrés pour preuve de cette hypothèse extraordinaire. Mais je n’ai quasiment rien trouvé. Le principal élément qu’elle souligne est l’affirmation qu’il n’existe absolument aucun historique de l’existence de Brigitte Macron durant les trente années de sa vie ayant précédé sa supposée opération de changement de sexe. Owens affirme avoir pour la première fois été exposée à cette théorie au travers du Daily Mail, le tabloïd britannique à scandales, mais lorsque j’ai pratiqué des recherches Google sur cette publication, j’ai trouvé divers articles faisant mention du fait que la naissance de Mme Macron avait été rapportée dans un journal local français, ainsi que son premier mariage à l’âge de 22 ans. Mme Macron a trois enfants adultes et l’un d’entre eux est cité dans le journal, et exprime son indignation absolue vis-à-vis des lunatiques affirmant que leur mère serait en fait un homme.

Je soupçonne que cette absurdité peut trouver ses origines dans une influence idéologique étasunienne. Au fil des années, des extrémistes de droite ultra marginaux des États-Unis ont parfois affirmé que Michelle Obama — mère de deux enfants — était en réalité un homme, et peut-être que leurs homologues français, mus par un professionnel clairvoyant, ont conclu que si les Étasuniens avaient découvert que Mme Obama était un homme, il pouvait fort bien en aller de même pour Mme Macron.

Il est possible qu’Owens se classe désormais comme la “théoricienne du complot” la plus en vue active sur YouTube, et ses vidéos sur le 11 septembre, la seconde guerre mondiale et d’autres sujets très controversés ont attiré davantage de spectateurs que quiconque. Mais au vu de la proximité qu’elle a adoptée envers la théorie sur Brigitte Macron et plusieurs autres théories tout aussi absurdes, l’ADL et ses alliés ont pu décider qu’elle constituait le faire-valoir public idéal pour discréditer les opinions de leurs opposants, et ont donc déployé leur influence pour s’assurer qu’elle reste en vue sur YouTube.

La chronique quotidienne de Phil Donahue a été diffusée entre 1967 et 1996, et bien que je ne l’aie jamais regardée, on m’a récemment affirmé que sa qualité intellectuelle était en fait assez bonne, Donahue apportant à la connaissance du public des invités controversés présentant des points de vue issus de l’ensemble du spectre idéologique. Mais peut-être en partie pour cette raison, il se peut qu’il ait suscité chez certaines personnes puissantes un certain inconfort, et il a fini par se faire remplacer par des émissions concurrentes par des animateurs comme Geraldo Rivera, Maury Povich, Sally Jessy Raphael et Montel Williams, qui se sont plutôt concentrés sur des sujets clinquants et bizarres.

Malheureusement, il se peut que YouTube suive à présent une ligne semblable, retirant soigneusement toutes les longues conférences brillantes du célèbre historien David Irving, tout en s’assurant que les vidéos déclarant que la “première dame” française est en fait un homme restent disponibles.

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Les cercles dissidents font fréquemment usage de la phrase “opposition contrôlée”, en reflet de la stratégie supposée mise en œuvre par Lénine, consistant à créer un faux mouvement d’opposition qu’il pourrait lui-même contrôler et manipuler. Pour avoir visionné diverses vidéos de Candace Owens, elle m’apparaît comme absolument sincère, et je doute fort qu’elle représente en aucune manière une sorte d’“opposition contrôlée”. Mais je pense qu’un autre terme applicable pourrait être celui d’“opposition encouragée,” l’establishment puissant utilisant son contrôle sur les médias et les autres plateformes majeures pour décider exactement quelles personnalités deviendront ses opposants les plus visibles et réputés. Et peut-être la survie et la réussite de Candace Owens sur YouTube pourraient-elles refléter ce type de décision.

Ron Unz

Traduit par José Martí, relu par Wayan, pour le Saker Francophone

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