ISIS passe en Syrie où Erdogan a toujours Alep en ligne de mire


Moon of Alabama

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Le 18 octobre 2016 – Source Moon of Alabama

L’armée irakienne a lancé une grande opération pour libérer Mossoul des djihadistes d’État islamique. Mais les forces, au total environ 40 000 soldats, sont encore à plusieurs dizaines de kilomètres de la ville. Ils vont devoir reprendre plusieurs villes et villages et surmonter de nombreux obstacles, comme des engins explosifs improvisés, avant d’arriver près du centre de la ville et commencer le combat de rue. Éliminer les dernières cellules d’ISIS à Mossoul pourrait prendre de nombreux mois.

Environ un million de civils vivent à Mossoul. Beaucoup, beaucoup plus que dans Alep-Est. Beaucoup d’entre eux ont accueilli avec sympathie les nouveaux suzerains quand ISIS a pris la ville d’assaut, il y a deux ans. Les artilleries française, américaine, kurde, irakienne et turque les matraquent maintenant. Les bombardements frappent même les plus petites positions de combat. Quand la ville sera conquise, elle sera probablement en ruines. L’attaque imminente de Mossoul pourrait être la raison pour laquelle John Kerry s’est fendu d’un rugissement hypocrite à propos d’Alep-Est, en Syrie, qui est attaqué par les forces syriennes et russes.

L’attaque de Mossoul se déroule sur trois axes. Au nord, les Peshmergas kurdes, conseillés par les forces spéciales américaines, mènent le combat. Les forces irakiennes attaquent de l’est et du sud. La route vers l’ouest, en direction de la Syrie, est ouverte. Les États-Unis ont l’intention de laisser les combattants d’ISIS, plusieurs milliers d’hommes, fuir vers Deir Ezzor et Raqqa en Syrie. On a besoin d’eux là-bas, pour continuer à détruire l’État syrien.

Nous avons fait remarquer ici que ce mouvement va créer la «principauté salafiste» que les États-Unis et leurs alliés essaient d’installer dans l’est de la Syrie depuis 2012. L’«erreur» du bombardement américain sur les positions de l’armée syrienne à Deir Ezzor venait appuyer ce plan. D’autres commentateurs arrivent enfin à la même conclusion.

Les Turcs parlent ouvertement de ce plan d’évasion d’ISIS à Mossoul. L’agence de presse turque Anadolu a publié ce plan d’opérations «sensibles». Le point 4 dit :

On laissera un couloir d’évacuation en Syrie pour que Daesh puisse quitter Mossoul

Deux points du plan turc ne se réaliseront pas.

  • Le gouvernement irakien a ordonné qu’aucune troupe turque ne prenne part à l’opération Mossoul et il les considérera comme ennemies si elles le faisaient.
  • Les Gardes de Ninive sunnites, formés par la Turquie, payés par les Saoudiens et dirigés par l’ancien gouverneur d’Anbar Atheel al-Nujaifi, seront également exclus.

Ce sont les forces par procuration des Saoudiens al-Nujaifi qui ont pratiquement remis Anbar à ISIS, en ordonnant à leurs troupes de fuir quand ISIS a attaqué. Ce groupe et ses sponsors saoudiens et turcs veulent créer un mini-État sunnite indépendant dans l’ouest de l’Irak, tout comme les Kurdes ont créé leur propre entité au nord de l’Irak.

Les États-Unis espèrent que l’afflux de combattants d’ISIS en Syrie emprisonnera les Russes et les Iraniens dans un «bourbier». Obama est finalement parvenu à détruire l’État syrien comme il le voulait. Pour l’essentiel, il semble avoir renoncé à ses autres plans. L’armée américaine reconnaît maintenant que lutter contre la défense aérienne russe en Syrie serait un véritable défi:

«Ce n’est pas comme si nous avions le F-35», a dit un officiel à propos de la prochaine génération d’avions de chasse étasuniens. «Nous ne sommes pas sûrs que l’un de nos avions actuels puisse vaincre le S-300.»

Il y a une «zone d’exclusion aérienne» sur l’ouest de la Syrie et ce sont les Russes qui la contrôlent. Tous les bavardages des États-Unis et des Turcs au sujet d’une telle zone sont nuls et non avenus. L’administration Obama a pour l’instant également renoncé à d’autres plans. La récente réunion du Conseil de sécurité nationale a remis d’autres décisions à plus tard:

L’examen d’autres alternatives, comme l’envoi d’armes aux forces kurdes alliées des États-Unis en Syrie et l’augmentation de la quantité et de la qualité des armes fournies aux combattants de l’opposition à Alep et ailleurs, a été reporté, ont indiqué des officiels. Une action militaire des État-Unis pour arrêter les bombardements syriens et russes de civils était encore plus loin sur la liste des possibilités.

Aujourd’hui, la seule «chance» qu’ont les État-Unis de réaliser leurs plans est de faciliter une nouvelle arrivée massive de combattants d’ISIS en Syrie. Avec en plus les activités de leurs alliés coordonnées par la CIA. Le ministre des Affaires étrangères saoudien a annoncé que son pays allait augmenter ses livraisons d’armes à ses mandataires d’al-Qaïda en Syrie. Les «rebelles» reçoivent toujours des missiles TOW anti-chars et d’autres armes lourdes.

Des forces turques par procuration, des Syriens, des «Turkmènes» de Tchétchénie et d’ailleurs, ont repris Dabiq à ISIS. Le village est supposé devenir le point focal d’une future bataille apocalyptique des chrétiens contre les musulmans. Beaucoup de commentateurs «occidentaux» ont souligné que c’était la raison pour laquelle ISIS se battrait. Mais, selon leur tradition, cette bataille ne se produira qu’après la venue du Mahdi (Sauveur), qui n’a pas encore été annoncée. La valeur idéologique actuelle de Dabiq est donc faible et, comme à Jerablus, ISIS a bien coopéré, puis est parti avant que les forces turques par procuration n’arrivent.

Les Russes avaient permis à la Turquie d’occuper en Syrie une zone d’environ 15 kilomètres seulement au sud de la frontière turque. L’artillerie lourde devait rester du côté turc. Au départ, le but de l’invasion turque était d’empêcher la création d’un corridor kurde allant des régions kurdes de l’est en Syrie, à Afrin à l’ouest. Un tel corridor aurait limité l’accès d’ISIS à la Turquie.

Le corridor kurde n’a pas été créé et ISIS peut accéder sans problème aux zones contrôlées par les Turcs et à la Turquie elle-même. L’armée turque considère avoir atteint ses objectifs :

Prendre le contrôle de Dabiq a éliminé la menace que faisaient peser les roquettes des djihadistes sur la Turquie, ont indiqué les forces armées turques dans une déclaration écrite.

L’armée turque veut arrêter l’opération. Mais Erdogan et ses forces par procuration veulent aller plus loin au sud et à l’ouest, pour attaquer le siège de l’armée syrienne sur Alep-Est:

Le porte-parole du président Tayyip Erdogan, Ibrahim Kalin, a déclaré que la libération de Dabiq, dimanche, était une «victoire stratégique et symbolique» contre État islamique.

Il a déclaré à Reuters qu’il était important stratégiquement, que les forces soutenues par la Turquie poursuivent leur avance vers le bastion d’État islamique d’al-Bab.

Pour aller à al-Bab, l’artillerie turque, avec ses unités de conscrits, devrait se déplacer plus au sud de la frontière turco-syrienne. Toute attaque sur elles par les forces syriennes ou russes deviendrait ainsi légale. La guérilla kurde serait une menace constante. Ceci explique le nouveau différend entre les forces politiques et militaires turcs. Il sera intéressant de voir comment ce désaccord se développe.

Pour jeudi, le commandement russe a annoncé un cessez-le-feu temporaire unilatéral dans Alep-Est, pour laisser les djihadistes partir. Les forces spéciales britanniques et d’autres forces spéciales, dont on dit qu’elles ont embarqué avec al-Qaïda, seront heureuses de pouvoir quitter la ville.

En Irak, des milices chiites se dirigent vers Tal Afar pour couper la route d’ISIS vers l’ouest. La Russie a promis de prendre des mesures politiques et militaires si elle détectait un mouvement d’ISIS. Dans l’est de la Syrie, les forces aériennes russes et syriennes, le Hezbollah et d’autres milices chiites d’Irak sont en train de préparer des surprises aux forces d’ISIS qui vont arriver en masse de Mossoul. Que feront-elles, quand les États-Unis offriront un appui aérien au mouvement d’ISIS vers la Syrie ?

Traduction : Marie Staels

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