Par Andrew Korybko − Le 30 avril 2020 − Source cgtn.com
La Chine et la Russie s’accordent quant au danger potentiel causé sur l’ensemble de la région par les laboratoires biologiques étasuniens implantés sur le territoire de l’ex-URSS.
Geng Shuang, le porte-parole du ministère chinois des affaires étrangères, s’est porté en soutien de la déclaration qu’avait faite son homologue russe, qui indique que ces laboratoires pourraient développer des agents pathogènes dangereux, et ajoute que « Les États-Unis ont créé de nombreux laboratoires sur le territoire de l’ex-Union soviétique, qui provoquent de sérieuses préoccupations dans la sphère publique des pays voisins concernés. » Il est impératif que les États-Unis se montrent totalement transparents quant aux tests menés dans ces laboratoires, au vu des enjeux que cela implique pour le monde entier.
Il est tout à fait étrange que les États-Unis établissent de telles installations loin de leurs propres frontières, au lieu d’inviter les experts de ces pays à venir mener leurs recherches dans des laboratoires implantés sur leur propre territoire.
Cela fait longtemps que la Russie soupçonne que les activités étasuniennes qui y sont menées visent à tenir ces États sous influence étasunienne. Mais la Russie se préoccupe grandement quant à la possibilité d’un accident du à l’imprudence, qui pourrait se produire dans l’un ou l’autre de ces laboratoires : ceux-ci sont relativement mal sécurisés. Les conséquences pourraient en être une épidémie mortelle se répandant sur l’ensemble de la région.
Il relève de la responsabilité de tout gouvernement de se préparer au scénario du pire, d’où les préoccupations partagées par la Chine et la Russie.
Ce problème se fait à présent plus criant que jamais ; la crise de la Covid-19 vient de rappeler au monde à quelle vitesse une pandémie peut se propager partout, en dépit des meilleurs efforts pour l’arrêter.
Les capacités de la Chine à contenir de telles contagions se sont avérées bien au-dessus de celles des anciens États soviétiques dans lesquels les États-Unis sont allés installer leurs laboratoires biologiques. La Russie se préoccupe du fait qu’un accident dans ces installations pourrait se révéler désastreux pour l’ensemble de la région, mais également pour l’ensemble du monde.
Ce sujet est d’autant plus préoccupant que ces laboratoires sont considérés comme beaucoup moins sécurisés que ceux de la Chine, de la Russie, ou les laboratoires étasuniens implantés sur leur propre sol.
Il ne s’agit pas d’affirmer que les États-Unis pourraient délibérément propager des agents pathogènes mortels depuis ces installations, dans une forme de guerre biologique secrète face à ce qu’ils considèrent comme leurs rivaux chinois et russe, mais simplement d’indiquer que les effets d’un accident qui pourrait se produire, s’ils poursuivent les expériences signalées dans ces laboratoires peu sécurisés, en seraient fondamentalement les mêmes.
Il se pourrait d’ailleurs tout aussi bien que les États-Unis ne conduisent aucune expérience dangereuse dans ces laboratoires, et que les craintes à ce sujet se révèlent infondées [pas tant que ça : « Qui a bu, boira … », NdT] ; mais l’opacité quant à leurs activités en ces lieux est suspecte en soi, et justifie les préoccupations graves qu’expriment la Chine, la Russie, ainsi que d’autres pays.
Il faut donc que les États-Unis s’ouvrent et expliquent [sans mentir ? NdT] ce qu’ils font dans les laboratoires biologiques qu’ils ont établis dans les pays d’ex-Union soviétique, afin de rassurer la région et le reste du monde quant au fait qu’il n’y a rien à craindre.
Cela serait bien plus responsable que d’affirmer platement qu’il n’y a aucune raison de s’inquiéter quant à leurs activités, et d’en appeler à la Chine pour qu’elle ouvre son laboratoire biologique de classe mondiale à Wuhan ; ce dernier se trouve désormais au cœur des récits de guerre de l’information des États-Unis, qui allèguent que cette installation serait la source de la pandémie Covid-19.
L’administration Trump a concocté cette théorie du complot pour détourner l’attention de ses échecs à défendre le pays de ce virus, malgré le fait qu’elle avait disposé de beaucoup de temps pour s’y préparer convenablement. Les États-Unis comptent également entacher la réputation mondiale de la Chine en accusant son gouvernement pour l’existence du coronavirus, une tentative d’ouvrir une brèche entre la Chine et ses partenaires de plus en plus nombreux dans le monde entier.
Chacun de ces deux objectifs est voué à l’échec, les Démocrates enquêtant dès à présent quant à la réponse de l’administration Trump à cette pandémie, et la Chine restant très bien vue de ses partenaires ; elle a d’ailleurs prodigué une aide médicale à nombre d’entre eux au cours des dernières semaines.
S’il y a bien une chose crédible dont le monde ferait bien de se préoccuper en matière médicale, ce sont ces obscurs laboratoires étasuniens, établis dans des États de l’ex-Union soviétique, au lieu du laboratoire de classe mondiale géré par la Chine à Wuhan.
Les États-Unis doivent s’ouvrir sur leurs activités dans ces laboratoires, afin de répondre une bonne fois pour toutes aux préoccupations de tous. Il est malheureusement peu probable qu’ils le fassent, ils vont sans doute préférer alléguer que ces laboratoires n’existent pas, ou qu’il n’y a aucune raison de s’inquiéter. Tant que cette ligne politique obstinément obscure se poursuivra, le monde continuera de s’inquiéter de savoir si la prochaine pandémie mondiale pourrait constituer le résultat d’une expérience imprudente menée dans ces laboratoires mal sécurisés.
Andrew Korybko est un analyste politique américain, établi à Moscou, spécialisé dans les relations entre la stratégie étasunienne en Afrique et en Eurasie, les nouvelles Routes de la soie chinoises, et la Guerre hybride.
Note du Saker Francophone On aimerait bien au passage savoir ce que les États-Unis penseraient, et quelles seraient leurs réactions si par exemple la Chine, la Russie, la Corée du Nord ou l'Iran établissaient des laboratoires biologiques secrets au Canada, au Mexique, à Cuba, ou au Panama.
Traduit par José Martí, relu par jj pour le Saker Francophone
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