Grèce : une perle pour les cochons


Par Israël Shamir – Le 7 juillet 2015 – Source unz.com via ICH

Ile de Santorin dans les Cyclades en Grèce


La Grèce est la perle de la Méditerranée, un endroit dont des générations d’étrangers, de Lord Byron à Graves, ou 
Fowles , sont tombés amoureux. De la Philosophie à la Feta, de l’Histoire au yaourt, de la Poésie au miel, ils nous ont fourni l’exemple à suivre. Leurs prêtres ont su préserver leur foi intacte. Leurs combattants ont vaincu Mussolini. Leur Hélène est la quintessence de la beauté féminine. Ils ont aussi un vin musqué qu’ils nomment retsina et écoutent une musique assez lourdingue appelée bouzouki , qui nous incite à tempérer notre héllènophilie.

Aujourd’hui, ils nous ont donné un autre exemple à suivre : comment contrer les banksters avec leur propre jeu. La victoire spectaculaire du gouvernement Syriza en Grèce lors du référendum national n’était pas attendue : les sondages oscillaient entre un résultat non décisif et un soutien net des plans de l’UE, entre 51& et 49 %. Malgré que les Grecs ont puissamment confirmé leur confiance dans leur gouvernement, le principal problème est et reste la résolution et l’esprit de décision de Syriza.

Le parti au pouvoir a pris un risque inutile en lançant le référendum, alors qu’il avait parfaitement gagné les élections sous ses propres slogans juste quelques mois avant… Ceci laisse supposer son indécision, comme s’il avait préféré perdre et repasser la patate chaude à quelqu’un d’autre.

En plus, il n’a rien fait de plus pour gagner le référendum : pas de campagne pour le Non, aucune couverture médiatique ni manifestation pour le Non [pas facile non plus quand tous les médias sont aux mains des banksters! NdT]. Désiraient-ils perdre ou gagner avec la plus faible avance possible? Peut-être. Le peuple grec a rejeté le stratagème et les ont appelés à l’action.

Maintenant c’est le boulot du gouvernement d’organiser un Grexit souple et rapide de l’Eurozone et de retourner à la nouvelle drachme. Un gouvernement réellement efficace doit quitter l’UE et l’Otan, en renversant les tables totalement. Refuser le compromis est juste, mais pas suffisant.

Les Grecs ont raison de refuser de payer les dettes, ces dettes auxquelles ils ont été forcés de souscrire par le vampire géant Golman Sachs selon Matt Taibbi. «La première chose que vous devez savoir de Goldman Sachs est qu’il est partout. La plus puissante banque mondiale d’investissement est un vampire drapé dans un visage humain, ne cessant de tremper sa trompe sanglante dans tout ce qui peut ressembler à de l’argent.» Pour ce que nous en savons, Goldman Sachs, (vous n’avez pas besoin d’être antisémite pour le haïr), a monté la machination, prétendant faussement que la Grèce avait une haute notation de crédit, tout en connaissant son important niveau d’endettement. Quand les dettes ont fait boule de neige, il ont tiré le tapis sous les pieds des Grecs en descendant en flèche la notation de la Grèce et en renflouant les banques aux frais des contribuables européens.

Sur les 320 milliards d’euros que la Grèce a reçus, la population n’a gardé que 20 milliards d’euros environ, le reste de la somme est retourné aux banques. La Grèce ne peut pas payer : après cinq ans de ce régime sec, le pays est en plus mauvais état et la dette est encore plus massive que ce qu’elle était. L’austérité a détruit les vies et les infrastructures. Les banquiers ont planifié de vendre toutes les richesses de la Grèce : ports, trains, terres, etc. Et vous pouvez même envisager de les acheter vous-même si vous en avez les moyens. Les négociations entre l’UE, le FMI, et la Grèce ont été malhonnêtes explique Ashoka Mody  dans une large analyse technique. C’est pour cela que la Grèce a élu le parti d’extrême-gauche Syriza, et le parti d’extrême-droite l’INIL afin de briser le carcan de ce jeu truqué.

La Grèce est un petit pays et il ne peut faire face à l’establishment international, banquier et politique, tout seul. Heureusement, il y a un pays capable et volontaire pour l’aider. C’est sa sœur dans la foi orthodoxe, la Russie. La Grèce, pour la Russie, est comme l’Italie pour les catholiques, comme l’Angleterre pour les USA : la source de sa culture et de sa religion. Les religieux grecs ont apporté leur foi à ce qui allait devenir la Russie. La Grèce et la Russie suivent les mêmes lois byzantines. Arnold Toynbee, l’historien britannique, parle de quelques civilisations européennes qui ont avorté (le Far-West et la Scandinavie), et de deux pleinement développées : l’Europe de l’Ouest basée sur l’Eglise de Rome, et la chrétienté orthodoxe basée sur l’Eglise de Constantinople. La Russie et la Grèce appartiennent à cette dernière.

L’UE est la réincarnation de l’empire romain et carolingien, celui de Charlemagne. Il a ses racines en France et en Allemagne, mais est complètement étranger aux Suédois et aux Grecs, aux Lettons et aux Bulgares.  Il s’est largement étendu en apportant de grandes calamités à son peuple et à ses voisins.

Rappelez-vous, ce n’est pas la première fois que l’Ouest colonise l’Est chrétien orthodoxe : en 1204, ils [les Croisés, NdT] ont détruit l’Empire byzantin et établi leurs royaumes et leurs duchés, plus tard écrasés par les Turcs. Après que la Grèce a été restaurée en 1821, elle est passée sous tutelle occidentale, et y est restée. En 1945, les Grecs ont réalisé un effort héroïque pour s’allier avec la Russie, mais Churchill a utilisé les troupes allemandes vaincues pour contrer le Mouvement d’indépendance grec et a installé ses agents à Athènes. La Russie soviétique n’a émis aucune objection. Avec les accords de Yalta, la Grèce est revenue à l’Ouest pendant que la Pologne est allée à l’Est. Les Grecs ont dû sauter dans l’UE et l’Otan, et ont toujours été des captifs à la disposition de la rapacité des banquiers.

La Russie est la seule partie du monde qui est restée indépendante et fidèle à sa foi. La Russie est un partenaire naturel pour la Grèce et ses voisins des Balkans. Maintenant la Russie peut-aider la Grèce : en achetant son vin, son fromage et ses olives qui ne se vendent pas bien à l’Ouest, en envoyant les pèlerins vénérer ses églises sous son ciel bleu et, en encourageant ses industries, donner à ses jeunes une possibilité de vivre sans avoir à escorter les touristes allemands. Et les Grecs aiment bien les Russes, la sympathie est mutuelle.

Le Parti Syriza et ses partenaires de l’ANEL sont connus (on pourrait même ajouter notoirement) pour leurs sympathie pro-russes. Pourtant depuis qu’ils ont été élus, ils ont commencé à jouer le jeu de Bruxelles contre Moscou, comme un jeune qui courtise deux parties pour les garder toutes deux dans sa poche. Le spécialiste de la Grèce et homme de loi londonien Alexander Mercouris a souligné  les propositions russes pour aider la Grèce. La Russie a proposé 5 milliards d’euros pour construire le gazoduc en Grèce, et celle-ci pourrait ainsi vendre du gaz à l’Europe. Miller, le PDG de Gazprom, est venu à Athènes avec les documents tout prêts, mais est reparti les mains vides.

Tsipras avait promis de venir à Moscou pour les célébrations du 9 mai, et s’est désisté au dernier moment. Il a accepté d’étendre les sanctions contre la Russie alors qu’il siégeait au Forum de Saint-Pétersbourg. Ceci a miné la confiance des Russes. «Les Russes doivent maintenant devenir méfiants face à quelqu’un qui frappe sans arrêt à la porte de l’église et qui s’enfuit au dernier moment», déclare Mercouris.

Il semblerait que l’histoire ukrainienne soit en train de se répéter. La Russie a offert d’énormes crédits à l’Ukraine en 2013, elle pouvait acheter ses produits industriels, relancer son industrie et son agriculture, mais le président Ianoukovitch ne s’est pas pressé. Il a fini en exil, son pays ruiné. Il faudra au moins 20 ans pour retourner à une situation identique à celle de 2013, estiment les experts de l’UE.

La Grèce ne plongera probablement pas dans la guerre civile, elle l’a connue en 1945, mais les vieilles plaies peuvent se rouvrir. La partie la plus pro-russe de l’insurrection de 1945, l’île de Crête, a massivement voté contre l’UE lors du récent référendum (75%). Le gouvernement Syriza peut tenter de renégocier avec le FMI et l’UE en les bluffant avec l’alternative russe. Même s’il en tire quelques rogatons, son économie ne semble pas pouvoir retourner à la normale.

Le problème n’est pas la Grèce, le problème c’est l’UE. Cet organisme a un triple rôle. D’abord une union des banquiers contre le peuple, ensuite un carcan avec lequel les USA peuvent diriger une Europe colonisée, et enfin un outil pour la désindustrialisation et le dés-éducation du plus développé des continents. Sous le joug de l’UE, des masses de mendiants roumains et de réfugiés africains émigrent vers le Nord. Sous le règne de l’UE, les activités industrielles de la Lettonie ou de la Hongrie, autrefois prospères, sont devenues des cas désespérés, leurs industries de haute technologie ont émigré ailleurs. Sous le règne de l’UE la sécurité sociale a été démantelée, alors que l’éducation sexuelle des enfants et les jeux de genre ont été encouragés au maximum. C’est pour cela que des pays, de la Suède à l’Italie, de l’Angleterre à l’Espagne, appellent à sortir de l’Union.

La Grèce sera bien mieux en dehors de l’UE. Tout le monde le souhaite. Son ministre des Finances Yanis Varoufakis, un négociateur intraitable, le fils d’un combattant de 1945, qui pourrait mener son pays vers la liberté, a été démis honteusement suite au référendum. Alexis Tsipras va tenter de négocier lui-même, et il est un opérateur un peu mou, déclarent les Grecs.

Il n’y a qu’une seule question, en avoir ou pas [des cojones, NdT], c’est tout. Trop de leaders hésitent et attendent au lieu d’agir. Nous citons Ianoukovitch, mais il y a une longue liste de noms, en commençant par Allende, un homme de paix assassiné dans un coup d’État. Les leaders qui ont fait face aux pieuvres de l’Empire du Chaos, de Nasser à Poutine, ont été déclarés nouveaux Hitler, mais ils se sont mieux débrouillés. Les USA osent tout : conquérir le Panama et la Grenade, attaquer l’Afghanistan et l’Irak ; et cette audace est le secret de leur succès.

Cependant il est trop tôt pour désespérer. Le référendum a été une victoire, et une victoire qui devrait motiver même les leaders mous et hésitants.

Ce serait une honte d’abandonner la perle grecque à ces cochons de banquiers.

Israel Shamir, aussi connu sous les noms de Jöran Jermas and Adam Ermash, est citoyen suédois, il est écrivain russe et journaliste. Il commente le conflit Arabo-Israëlien et la culture juive. adam@israelshamir.net

Traduit par Gabriel, relu par jj et Diane pour le Saker Francophone

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