Une caricature de diplomatie occidentale, le caca nerveux


L’Ouest, dédaignant la parade chinoise pour le 70e anniversaire de la victoire contre le Japon, met le masque de la stupidité sur le visage de la diplomatie.

Un moyen sûr pour rapprocher encore plus la Chine de la Russie.


 

Pepe Escobar

Pepe Escobar

Par Pepe Escobar – Le 1er septembre 2015 – Source Russia Insider

L’importance pour la Chine de ce défilé de jeudi pour célébrer le 70e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale dans l’Asie-Pacifique ne sera jamais assez surestimée.

La capitulation japonaise a été officiellement signée sur le USS Missouri dans la baie de Tokyo le 2 septembre 1945.

Les USA sont vraiment à côté de leurs pompes en décourageant les autres pays d’y aller

Pourtant, en Chine, la date clé était vraiment le 9 septembre à Nanjing à 9h. Comme cet article du China Daily le souligne, le choix pour les 9-9-9 de Pékin a été extrêmement symbolique, car les mots neuf et durable, en mandarin, résonnent phonétiquement de la même façon.

La Chine était à l’époque dirigée par le nationaliste Chiang Kai-shek, complètement défait quatre ans plus tard par les communistes. L’impulsion initiale de la direction chinoise a été axée sur la résistance à l’agression par la générosité et  la réconciliation.

Dès le début, ce fut une montagne extrêmement raide à gravir. Voici un portrait détaillé 1 de la façon dont le traumatisme de la guerre s’est attardé à Hong Kong.

Le défilé qui se déroulait sur la place Tiananmen célébrait officiellement la Guerre de Résistance du peuple chinois à l’agression japonaise. C’est une affaire très sérieuse – et sensible – pour 1,4 milliard de Chinois et la diaspora dans le monde.

Et une fois encore, l’Occident – affichant sa marque traditionnelle d’insensibilité culturelle et historique – l’a saboté. Pékin scrute attentivement les ramifications diplomatiques de la présence ou de l’absence des invités. Symboliquement, les absences sont éloquentes.

Le président Vladimir Poutine sera à Pékin, ainsi que les dirigeants des quatre Stans d’Asie centrale qui font partie de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS). Le Président sud-coréen Park Geun-hye, le président sud-africain Jacob Zuma et le président Mamnoon Hussain du Pakistan seront également présents.

Le Premier ministre Shinzo Abe du Japon n’y sera pas (il a été officiellement invité, et a refusé). Les États-Unis, l’Allemagne et le Canada enverront seulement des fonctionnaires d’ambassade. La France et l’Italie devraient envoyer au moins leurs ministres des Affaires étrangères. Le seul chef d’État ou de gouvernement de l’UE-ravagée-par-toutes-sortes-de-fléaux sera le président tchèque, Milos Zeman.

Quelle que soit la magouille, le fait est que le Département d’État américain, proverbialement connu pour avoir recours à des tactiques de pression par la rue, n’a pas réussi à empêcher le Président sud-coréen, Park Geun-hye, de venir.

Conclusion : ni les États-Unis, ni l’UE – l’Occident ex-hégémonique – ni le Japon, n’ont envoyé de dirigeant politique de haut niveau.

Et cela souligne encore un autre signe emblématique de la force du partenariat stratégique Russie-Chine, venant juste après que les marines russe et chinoise ont terminé une manœuvre militaire conjointe de neuf jours – leur cinquième depuis 2005 – le Golfe de Pierre le Grand, les eaux au large du Cap Clerk et de la mer du Japon.

Significativement, Aleksandr Fedotenkov, commandant adjoint de la marine russe et aussi le commandant des manœuvres, dit que les deux marines visent à maintenir les mers du monde «sûres et stables». Il est facile d’imaginer les vagues de paranoïa engloutissant les planificateurs de l’US Navy quand ils ont enregistré le message.

La stupidité de l’enjeu diplomatique

Les soi-disant élites politiques de l’Occident s’essaient, sans trop d’efforts, à exercer un monopole sur la stupidité diplomatique. D’où la comparaison, à travers les médias industriels américains, entre la parade de Tiananmen et le récent défilé sur la Place Rouge qui a célébré la victoire de l’Union soviétique sur l’Allemagne nazie. Pas une seule mention des plus de vingt millions de morts en Union soviétique, ni des morts chinois presque aussi nombreux, pendant une guerre dont chaque Chinois sait très bien qu’elle a commencé en septembre 1931, lorsque les Japonais ont envahi la Mandchourie.

La City de Londres, via le journal The Economist en chute-libre-qui-n’en-finit-pas, a écrit un éditorial soulignant que la parade va déstabiliser les voisins de la Chine alors que celle-ci «joue sur le thème de la victimisation historique et la nécessité d’en corriger les effets».

Blâmer la Chine pour victimisation historique est pathétique. Surtout parce que l’objectif essentiel de la parade, comme illustré par ces articles de Xinhua, concerne les gens ; le souvenir des millions de Chinois vétérans de la Seconde Guerre mondiale, «dont beaucoup ont déjà péri sans due reconnaissance», et le rôle qu’ils ont joué dans la lutte contre le fascisme au cours de la décennie 1930-1940.

L’Occident fait cela pratiquement chaque année – comme si l’Occident seul avait combattu et vaincu le fascisme, mais quand la Russie ou la Chine le font, ils jouent les victimes. Oh s’il vous plaît, retournez au pensionnat.

Qu Rui, chef de l’Armée populaire de libération (APL) et organisateur de la parade, insiste sur le respect par la Chine «du choix des pays sur l’opportunité de venir ou non».

Voilà la diplomatie intelligente en action. En Chine, la realpolitik a une très longue mémoire.

Oui, voilà un tournant majeur pour la Chine qui se réveille, après le siècle d’humiliation si bien analysé par les puissances étrangères.

Et les médiocres marionnettes qui dirigent désormais ces puissances étrangères semblent se plier à un peu plus d’humiliation.

La Russie, par ailleurs – de la part du gouvernement d’une multitude d’organisations sociales – n’a pas oublié tous les sacrifices de la Chine dans la lutte contre le fascisme. La plupart des analyses russes se concentrent sur la nécessité d’un front Russie-Chine unifié contre une falsification flagrante – concoctée par l’Ouest – de ce qui s’est réellement passé au cours de la Seconde Guerre mondiale.

Attendez-vous donc aux tombereaux d’ordures des suspects habituels des médias industriels occidentaux, insistant sur le fait que cette parade est un spectacle d’horreur, essentiellement anti-japonais, conçu pour attiser la propagande nationaliste et pas intéressé du tout par la réconciliation.

Les chiens occidentaux du ressentiment aboient et les parades militaires chinoises passent. Au spectacle à Beijing il y aura de nouveaux missiles balistiques intercontinentaux qui peuvent atteindre des vitesses hypersoniques à plus de mach 10, ainsi que des missiles à moyenne portée jusqu’à 5 000 miles (8 000 km), sans parler d’une foule d’autres gadgets militaires tels que le super-drone qui vient d’être dévoilé.

Et maintenant c’est le retour aux affaires, alors que les planificateurs chinois voient les augures géopolitiques pour ce qu’ils sont : le marigot de l’Otan plus le vassal nippon contre l’attelage Russie/Chine.

Pepe Escobar est l’auteur de Globalistan: How the Globalized World is Dissolving into Liquid War (Nimble Books, 2007), Red Zone Blues: a snapshot of Baghdad during the surge (Nimble Books, 2007), Obama does Globalistan (Nimble Books, 2009) et le petit dernier, Empire of Chaos (Nimble Books).

Article original publié par Russia Today

Traduit par jj, relu par Diane pour le Saker Francophone

  1. «Après la capitulation du Japon, les troupes britanniques ont mis quinze jours pour atteindre Hong-Kong. Des témoins oculaires racontent une quinzaine passée successivement de la joie à une profonde inquiétude dans la ville et sur le territoire chinois», écrit Stuart Heaver
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