Résumé de l’interview du premier ministre pakistanais sur Sputnik


Par Andrew Korybko − Le 13 juin 2019 − Source eurasiafuture.com

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M. Khan, le premier ministre pakistanais, a couvert un vaste panel de sujets au cours de son interview exclusive avec Sputnik, mais les principaux points abordés sont les changements importants connus par son pays depuis l’ancienne Guerre froide, qu’avec l’Inde il ne désire rien d’autre qu’une paix aussi rapide que possible dépendant de la résolution démocratique du conflit au Cachemire, et qu’il est extrêmement désireux d’intensifier les relations en tous domaines avec la Russie, y compris au travers d’une coopération militaire et de projets de connectivités trans-régionaux.

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C’est un nouveau jalon qui a été atteint dans le partenariat stratégique russo-pakistanais, avec l’interview exclusive du premier ministre Khan sur Sputnik avant le sommet de l’OSC (Organisation de Shanghai pour la coopération) à Bishkek. Le dirigeant d’Asie du Sud a couvert un vaste panel de sujets avec son interlocuteur, mais les points principaux concernaient l’ordre mondial multipolaire en émergence, la résolution démocratique du conflit du Cachemire, et l’expansion tous azimuts des relations entre ce pays, pivot mondial, et la Russie. La suite du présent article est un bref résumé de cette interview, divisé en trois catégories selon les sujets abordés, auxquels nous ajoutons une brève analyse de chacune des idées principales avancées par le premier ministre :

Le système Monde

    • Naya Pakistan n’est plus le vieux Pakistan :

À deux reprises, le premier ministre Khan a rappelé à son public que la confiance passée du Pakistan envers les USA n’était plus, et que son pays œuvrait à présent activement à diversifier ses partenariats dans le monde entier, et cela signifie également une ouverture et un accès simplifié pour les étrangers souhaitant visiter le Pakistan sans visa, ou par un simple visa reçu à l’aéroport.

    • Le Pakistan veut devenir un artisan de paix au niveau mondial :

À l’issue de trois conflits avec l’Inde, et avec la crise terroriste prolongée qui a suivi le dernier d’entre eux, le Pakistan ne connaît que trop bien les horreurs de la guerre : il s’oppose à rejoindre toute coalition militaire, et préfère œuvrer un rôle d’artisan de paix au niveau mondial, afin de rassembler les gens et de prévenir d’autres souffrances.

    • Le premier ministre Khan s’auto-proclame idéaliste sur les sujets de la paix et des projets anti-pauvreté :

À la toute fin de l’interview, le premier ministre Khan reconnaît être un idéaliste dès lors qu’il s’agit de croire en une paix mondiale et dans la lutte contre la pauvreté, sujets sur lesquels des indices permettent de penser qu’il les estime corrélés entre eux. Auparavant, il a déclaré à son interlocuteur que le Pakistan préférerait sceller la paix avec l’Inde, afin que chacun des deux pays puisse investir pour sortir son peuple de la pauvreté et améliorer sa qualité de vie.

L’Inde

    • L’hystérie électorale anti-Pakistan en Inde a rendu la paix impossible jusqu’après le scrutin :

Aucune chance réaliste n’existait que l’homologue indien de M. Khan puisse accepter ses nombreuses ouvertures pacifiques avant l’élection, au vu de la virulente hystérie anti-pakistanaise que lui et son parti récupéraient électoralement, mais l’opportunité sans précédent se présente à présent à Modi : il peut user de toute la force de son mandat pour entrer en dialogue avec son voisin au lieu de brandir le sabre face à lui.

    • Le conflit au Cachemire ne peut être résolu qu’en tenant le référendum mandaté par l’ONU quant à l’avenir de cette région :

Le premier ministre Khan a souligné que l’usage de la force par l’Inde contre les Cachemiriens et son refus de mettre en œuvre le référendum mandaté par l’ONU quant à leur avenir avaient contribué à la radicalisation de certaines populations opprimées, et fait monter les risques de voir tourner la région en source d’instabilité pour le continent. Pour ces raisons, New Delhi doit immédiatement laisser à ces peuples captifs le droit à l’auto-détermination qui leur a été promis.

    • La Russie pourrait contribuer à une médiation entre le Pakistan et l’Inde :

Le dirigeant pakistanais n’a pas répondu directement à la question demandant si la Russie pourrait devenir l’intermédiaire qu’il recherche avec l’Inde, mais il a déclaré que son pays « recherche toute sorte de médiation », et il est donc très possible que Moscou puisse jouer ce rôle, et ce d’autant plus que la capitale russe a publiquement exprimé sa volonté de le faire lors des récentes tensions, dans le cadre de son « retour en Asie du Sud », malgré le fait que l’Inde ait malhonnêtement rejeté d’emblée cette idée.

La Russie

    • Le premier ministre Khan désire rencontrer le président Poutine, et aimerait effectuer une visite officielle en Russie prochainement :

Le premier ministre a exprimé son désir de discuter informellement avec le président Poutine lors du sommet de l’OSC, et espère prochainement que les relations bilatérales entrent dans une période d’apogée historique. Les deux pays cherchent en effet en même temps à diversifier leurs liens d’avec leurs anciennes dépendances occidentales. Cette volonté des deux parties est très visible dans les efforts de coopérations qu’elles mènent actuellement en soutien au processus de paix en Afghanistan.

    • Les liens militaires continuent d’exister au centre du partenariat stratégique russo-pakistanais :

L’approche centrée sur la sécurité qui inspira au départ le rapprochement russo-pakistanais continue de constituer le facteur qui tire vers le haut leur partenariat stratégique naissant, avec M. Khan faisant les éloges du potentiel d’une coopération militaire étendue entre les deux grandes puissances, mais tout en espérant que la situation régionale s’améliorera, afin que son pays puisse convertir ses investissements militaires en projets de développement pour alléger la pauvreté.

    • Le chemin de fer RuPak constitue la meilleure opportunité possible d’améliorer les relations économiques russo-pakistanaises :

Le Pakistan est prêt à étendre son partenariat stratégique avec la Russie vers les sphères économiques, en créant un lien direct avec la grande puissance russe au travers du projet de chemin de fer RuPak via l’Afghanistan, l’Ouzbékistan, et le Kazakhstan, ce qui éclaire la vision à long terme derrière la coopération anti-terroriste et la coordination diplomatique avec l’Afghanistan, à présent que la vision du N-CPEC+ (Couloir Économique Chine-Pakistan étendu) est plus viable que jamais.

Andrew Korybko est un analyste politique américain, établi à Moscou, spécialisé dans les relations entre la stratégie étasunienne en Afrique et en Eurasie, les nouvelles Routes de la soie chinoises, et la Guerre hybride.

Traduit par Vincent pour le Saker Francophone

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