Par Tyler Durden – Le 26 décembre 2016 – Source Zero Hedge
Vendredi, pendant que la population américaine planifiait les festivités sans porter attention aux nouvelles venant de l’administration, Obama a tranquillement signé la Loi d’Autorisation pour la Défense Nationale (NDAA 2017) qui va débloquer 611 milliards de dollars pour le budget 2017 de l’armée.
Obama a déclaré que :
« Aujourd’hui, j’ai signé la loi S. 2943, la Loi d’Autorisation pour la Défense nationale, pour l’année fiscale 2017. Cette loi alimente les budgets pour l’exercice 2017, principalement pour le ministère de la Défense et pour les programmes de sécurité nationale du ministère de l’Énergie, fournit des avantages vitaux pour les militaires et leurs familles, et inclut les moyens pour faciliter les opérations en cours dans le monde entier. Elle est dans la continuité des nombreux budgets nous permettant de maintenir notre élan dans la lutte contre la menace posée par État islamique et de rassurer nos alliés européens. De nombreuses nouvelles autorisations vont donner au ministère de la Défense et de l’Énergie plus de souplesse dans la lutte contre les cyberattaques et contrer l’utilisation par nos adversaires de véhicules aériens sans pilote. »
Une grande partie de la déclaration d’Obama accuse le parti Républicain d’avoir empêché la fermeture de Guantánamo et avertit que « à moins que le Congrès ne change de position, il sera durement jugé par l’histoire ». Obama a également déclaré que le Congrès n’a pas su profiter de ce nouveau projet de loi pour réduire le gaspillage (comme peut-être pour les massifs dépassements de coûts du F-35 ?) ou pour moderniser le système de santé de l’armée, ce qui augmentera les pressions budgétaires auxquelles devront faire face les militaires dans les années à venir.
Mais alors que le passage de la NDAA – et le financement de l’armée américaine – n’était pas une surprise, la plus grande nouvelle est ce qui a été enterré profondément dans les articles de cette Loi d’Autorisation pour la Défense.
Rappelez-vous que, comme nous vous l’avions signalé début juin, un projet de loi pour mettre en place un ministère de la vérité des États-Unis avait été discrètement introduit au Congrès. Comme avec toute législation visant à esquiver les projecteurs publics, la loi de 2016 contre la propagande étrangère et la désinformation, introduite par les membres du Congrès Adam Kinzinger et Ted Lieu, le HR 5181, cherche une « approche impliquant tout le gouvernement, sans les restrictions bureaucratiques » pour contrer « la désinformation et la manipulation étrangères », qui, selon eux, menacent la « sécurité et la stabilité » du monde.
Aussi nommée Loi sur la Guerre de contre-information de 2016 (S. 2692), quand elle fut proposée en mars par le sénateur Rob Portman, elle constitue un retour spectaculaire des batailles de propagande entre gouvernements, au temps de la Guerre froide. « Ces pays consacrent d’énormes sommes d’argent dans le renforcement de leurs capacités de diffusion médiatique et numérique, dans des campagnes ciblées, dans le financement de mouvements politiques étrangers et d’autres efforts visant à influencer les publics et les populations ciblées », a expliqué Portman, ajoutant que pendant que les États-Unis investissent peu d’argent dans sa radio nommée Voice of America [218 millions de dollars pour 2016, NdT], le Kremlin fournit un financement énorme à son organisation médiatique, Russia Today [300 millions de dollars pour 2016, NdT].
« Aussi surprenant que cela puisse paraître, il n’y a actuellement aucun organisme ou service gouvernemental américain chargé du développement, de l’intégration et de la synchronisation à l’échelle nationale des stratégies pan-gouvernementales visant à contrer la propagande et la désinformation étrangères », a déclaré M. Portman.
Bien avant que le mème des « fausses nouvelles » ne devienne un sujet quotidien de discussions approfondies sur des portails déconsidérés tels que CNN et Washington Post, le HR 5181 chargeait le Secrétaire d’État de coordonner le Secrétaire de la Défense, le Directeur du Renseignement national et les Gouverneurs de la Commission de radiodiffusion à « établir un centre d’analyse et de réponse médiatique » qui identifierait les sources de désinformation, analyserait les données et – de façon vraiment anachronique – « développerait et diffuserait » des « récits factuels » pour contrer cette effrontée propagande.
Bref, bien avant que les « fausses nouvelles » ne deviennent un sujet médiatique majeur, le gouvernement américain planifiait déjà une répression, légalement permise, contre tout ce qu’il appellerait finalement des « fausses nouvelles ».
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Avance rapide jusqu’au 8 décembre de cette année, lorsque la « loi contre la désinformation et la propagande » est adoptée au Sénat, après avoir été tranquillement insérée dans la Loi d’Autorisation pour la Défense nationale 2017 (NDAA 2017).
Et maintenant, après la signature vendredi soir de cette NDAA, la loi pour contrer la désinformation et la propagande est désormais applicable.
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Voici la déclaration complète publiée par le sénateur Rob Portman, si généreusement rétribué, sur l’adoption de ce projet de loi qui grignote encore les libertés de la presse aux États-Unis, et qui prépare le terrain pour de futurs chasses aux sorcières et fermetures de sites Web, où tout média ou site internet considéré comme source de « désinformation et de propagande » pourra être fermé par le gouvernement.
Les sénateurs américains Rob Portman (R-OH) et Chris Murphy (D-CT) ont annoncé aujourd’hui que leur loi contre la désinformation et la propagande, législation conçue pour aider les alliés américains à contrer la propagande en provenance de Russie, de Chine et d’autres pays, a été votée dans le cadre du rapport sur l’Autorisation pour la Défense nationale de l’exercice 2017 (LDA). Ce projet de loi bipartisan, qui a été présenté par les sénateurs Portman et Murphy en mars, améliorera la capacité des États-Unis à contrer la propagande et la désinformation étrangères de nos ennemis en créant un centre interinstitutionnel, hébergé au Département d’État, pour coordonner et synchroniser les efforts de contre-propagande lancé par le gouvernement états-unien. Pour appuyer ces efforts, le projet de loi crée également un programme de subvention pour des ONG, des groupes de réflexion, la société civile et d’autres experts en dehors du gouvernement qui sont engagés dans des activités liées à la contre-propagande. Cela permettra de mieux tirer parti de l’expertise existante et de permettre à nos alliés à l’étranger de se défendre contre la manipulation étrangère. Cela aidera également à promouvoir une presse libre et dynamique et la société civile à l’étranger, ce qui est essentiel pour assurer que nos alliés aient accès à des informations véridiques et puisse vacciner les gens contre les campagnes de propagande étrangère.
« Nos ennemis utilisent la propagande et la désinformation contre nous et nos alliés, et jusqu’à présent, le gouvernement américain n’a pas réagi, a déclaré Portman. Mais aujourd’hui, les États-Unis ont franchi une étape critique pour affronter les opérations de propagande et de désinformation étrangères, vastes et déstabilisatrices, menées contre nous par nos ennemis d’outre-mer. Avec ce projet de loi du jour, nous signalons finalement que cela suffit. Les États-Unis ne resteront plus à l’écart. Nous allons affronter cette menace avec détermination. Je suis convaincu qu’avec l’aide de ce projet de loi bipartisan, la désinformation et la propagande utilisées contre nous, nos alliés et nos intérêts, échoueront. »
« L’utilisation de la propagande pour miner la démocratie a atteint un nouveau sommet. Mais maintenant, nous sommes enfin en mesure d’affronter cette menace et d’exposer la vérité. En créant un journalisme indépendant et objectif dans des pays comme l’Europe de l’Est, nous pouvons commencer à nous battre en exposant ces faux récits et en permettant aux communautés locales de se protéger, a déclaré Murphy. Je suis fier que notre projet de loi ait été promulgué et je me réjouis à l’idée de travailler avec le sénateur Portman pour faire en sorte que ces outils et ces nouvelles ressources soient utilisés efficacement pour faire ressortir la vérité. »
NOTE: La loi bipartisane sur la désinformation et la propagande est organisée autour de deux priorités principales pour aider à atteindre l’objectif de la lutte contre la menace en constante évolution de la désinformation étrangère faite par nos ennemis:
La première priorité est d’élaborer une stratégie pan-gouvernementale pour contrer la propagande et la désinformation étrangères que nos ennemis lancent contre nous. Ce projet de loi augmentera l’autorité, les ressources et le mandat du Centre d’engagement mondial pour s’engager contre des acteurs étatiques comme la Russie et la Chine ainsi que des acteurs non étatiques. Le Centre sera dirigé par le Département d’État, mais avec la participation active du ministère de la Défense, de l’USAID, des Gouverneurs du Conseil de la radiodiffusion, de la communauté du renseignement et d’autres organismes compétents. Le Centre élaborera, intégrera et synchronisera des initiatives pan-gouvernementales pour exposer et contrer les opérations de désinformation étrangères de nos ennemis et faire progresser de façon proactive les récits fondés sur des faits qui appuient les alliés et les intérêts des États-Unis.
Deuxièmement, la loi vise à tirer parti de l’expertise non gouvernementale pour créer des options stratégiques plus adaptables et plus réactives. La législation établit un financement destiné à former des journalistes locaux et à fournir des subventions et des contrats à des ONG, des organisations de la société civile, des groupes de réflexion, des entreprises du secteur privé, des organisations de médias et d’autres experts en dehors du gouvernement américain. Ce fonds viendra compléter et appuyer le rôle du Centre en intégrant les capacités et l’expertise disponibles en dehors du gouvernement des États-Unis dans le processus stratégique. Il permettra également à un réseau décentralisé d’experts du secteur privé d’intégrer leur expertise dans le processus de définition de cette stratégie.
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Et ainsi, avec des journaux comme le Washington Post ayant déjà incité le grand public à assimiler la « propagande russe » aux « fausses nouvelles » (même après avoir admis le fait que leur propre rapport était essentiellement « faux »), alors que les médias américains ont endoctriné le public à penser que toute information n’étant pas conforme au récit officiel du gouvernement ou osant critiquer l’establishment est forcément une « fausse nouvelle » et relève donc de la « propagande russe », le terrain est maintenant prêt pour que le gouvernement américain puisse légalement réprimer tous les médias que le gouvernement considérera comme étant de la « propagande étrangère ».
Et voilà, le ministère américain de la Vérité est officiellement né.
Tyler Durden
Traduit par Wayan, relu par Cat pour le Saker Francophone.