Par Li Xing – Le 5 janvier 2017 – Source Global Times
Le Corridor économique Chine-Pakistan (CPEC), projet phare de l’initiative chinoise « One Belt One Road » (OBOR) [Une Ceinture, Une Route, NdT], a attiré beaucoup d’investissements. Outre le fait que le Pakistan a approuvé une demande russe d’utilisation du port de Gwadar, situé dans la province du Baloutchistan, pour ses exportations, les médias ont annoncé que la Russie envisageait de fusionner l’Union économique eurasienne (UAE) avec le CPEC.
Bien que l’ambassade de Russie à Islamabad ait ensuite nié ces informations médiatiques, les préoccupations et les spéculations ont persisté parmi certains observateurs. Pourtant, je ne vois rien de terrible au fait que Moscou rejoigne le CPEC. Au contraire, ce sera l’occasion pour la Chine, la Russie et le Pakistan d’améliorer leur coopération.
Tout d’abord, l’OBOR chinois fait essentiellement appel à des principes de développement conjoint, par consultations, pour pouvoir répondre aux intérêts de tous et bâtir une communauté d’intérêts, de destin et de responsabilités partagés.
En plus, la Russie, en tant que partenaire stratégique de la Chine et membre des BRICS et de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS), a fait avancer le projet commun « Ceinture et Union » sino-russe (un regroupement entre l’OBOR et l’EAEU). La participation de la Russie au CPEC, y compris l’utilisation du port de Gwadar, pourrait donner un coup de fouet à la coopération sino-russe et constituer un exemple de fonctionnement de l’OBOR qui renforcerait la future coopération multinationale.
Deuxièmement, la Russie et le Pakistan entretiennent tous les deux des liens amicaux avec la Chine. Le Pakistan, membre observateur à l’OCS, a officiellement soumis sa demande d’adhésion à l’organisation. L’OCS a lancé son processus de décision sur l’admission du Pakistan et de l’Inde.
En ce qui concerne les relations Russie-Pakistan et le rôle de la Russie dans le CPEC, la Chine est considérée comme partie prenante dans les affaires et jouit d’une certaine influence. Mais elle n’interviendra pas dans les relations russo-pakistanaises.
En outre, le Pakistan suit la théorie de l’équilibre des pouvoirs et mène une diplomatie ouverte dans le but de maximiser ses intérêts nationaux, ce qu’on ne peut lui reprocher.
Le port de Gwadar est également utilisé par des pays comme l’Iran et le Turkménistan pour le commerce. Ce qui provoque de fortes critiques intérieures mais aussi de la part de certains pays occidentaux contre Islamabad.
Compte tenu de la mondialisation et de l’intégration régionale, il n’est pas possible, réaliste ou nécessaire qu’un pays ait un monopole sur les affaires économiques d’un autre pays.
Troisièmement, l’Inde s’est opposée au CPEC en raison de la tension à long terme entre New Delhi et Islamabad et de ses conflits historiques frontaliers avec la Chine. Traditionnellement, la Russie a développé de très bonnes relations avec l’Inde, la Chine et le Pakistan.
La présence de la Russie dans le CPEC aiderait à empêcher la communauté internationale, y compris l’Inde, d’accorder une attention excessive à la Chine et d’éliminer les inquiétudes inutiles sur la soi-disant menace chinoise. La coopération entre les pays BRICS comme la Chine, la Russie et l’Inde est la clé du succès du développement d’OBOR.
L’implication de la Russie dans le CPEC est faite pour servir ses propres intérêts économiques et géopolitiques, ce qui peut compliquer les affaires régionales. Mais si toutes les parties adhèrent aux règles du marché, les intérêts de la Chine ne seraient pas lésés, étant donné que la Chine a l’avantage du premier venu, ainsi que des avantages financiers et géographiques.
Comme on l’a dit plus haut, la participation de la Russie n’est pas une mauvaise chose et il n’est pas nécessaire d’exagérer ni sa concurrence ni sa négativité.
Au contraire, si la Russie rejoint le projet, ce sera un acteur qui partagera le risque économique, en particulier le risque sécuritaire, et aura les mêmes objectifs ou des objectifs similaires. C’est une bonne chose.
Li Xing est directeur du Eurasian Studies Center et professeur à l’École gouvernementale de l’Université de Pékin.
Traduit par Wayan, relu par Catherine pour le Saker Francophone
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