Un président tenu en otage


Ils l’ont encerclé


Par Justin Raimondo – le 12 février 2018 – Source Antiwar

Pendant que le vice-président Mike Pence se ridiculisait, lui et le pays qu’il est censé représenter aux Jeux olympiques, en refusant de se lever pour honorer les athlètes d’une nation autre que les États-Unis, au pays, le Washington Post nous parlait d’un président Trump qui semble n’avoir rien en commun avec Pence ni même avec le personnel de la Maison Blanche. L’article s’intitule « Le général préféré de Trump : Mattis peut-il contrôler un président impulsif tout en gardant sa confiance ? » et met en scène un président enclin à défier le Parti de la guerre et se battant contre une garde prétorienne déterminée à l’empêcher d’appliquer son programme électoral basé sur « America First » et un retrait des guerres étrangères.

 « Même si Trump a laissé aux militaires une certaine marge de manœuvre sur le champ de bataille, il a également soulevé quelques questions sur la sagesse des guerres menées par les États-Unis. L’année dernière, après qu’une délégation de dirigeants irakiens lui a  rendu visite dans le bureau ovale, Trump s’en est moqué en la traitant de ‘groupe de voleurs les plus expérimentés qu’il ait jamais rencontré’, selon un ancien fonctionnaire américain. »

La tirade est exacte mais, bien sûr, on l’a fait fuiter pour embarrasser Trump et le mettre en désaccord avec ces mêmes voleurs. Mattis a probablement été horrifié par ce truisme, puisque le général est un voleur encore plus grand, après avoir manipulé avec succès le Congrès pour s’approprier 15,5 % de plus que ce que Trump avait demandé pour les militaires. L’article du Post détaille ensuite les nombreuses hérésies du président :

 « Il a à plusieurs reprises fait pression sur Mattis et McMaster, en termes fermes, pour leur demander pourquoi des troupes américaines étaient basée en Somalie. ‘Ne peut-on pas se retirer, a-t-il demandé’, nous ont informé des responsables américains. »

« L’été dernier, Trump évaluait des plans visant à envoyer davantage de soldats en Afghanistan et examinait la demande des militaires de prendre des mesures plus agressives pour cibler les résurgences d’État islamique en Afrique du Nord. Au cours d’une réunion avec ses principaux adjoints à la sécurité nationale, le président s’est senti frustré. ‘Vous voulez que j’envoie des troupes partout’, a dit Trump, selon les responsables de la salle de crise. ‘Mais pour quelle raison ?’ ».

Un grand silence choqué a dû s’abattre sur la pièce et sembler durer pour toujours. Puis Mattis a réitéré les mêmes conneries :

« ‘Monsieur, nous le faisons pour empêcher qu’une bombe n’explose à Times Square’, a répondu Mattis. »

Trump n’est pas tombé dans le panneau : « La réponse a irrité Trump, qui a insisté pour faire comprendre à Mattis que le même argument pourrait être utilisé pour presque n’importe quel pays de la planète. » Et le Président n’était pas seul dans son scepticisme : « Le procureur général Jeff Sessions a fait écho aux préoccupations de Trump en demandant si il était même possible de gagner dans un pays comme l’Afghanistan ou la Somalie. »

Et voici la partie effrayante qui conclut l’article :

« C’est Mattis qui a fait valoir l’argument qui, pour le moment du moins, aura poussé Trump en faveur du statu quo – comme cela a été le cas pour les deux précédents présidents.

‘Malheureusement, monsieur, vous n’avez pas le choix’ a rétorqué Mattis à Trump, selon des fonctionnaires. ‘Vous serez un président de guerre.’ ».

Vraiment ? Mais pourquoi cela? À quelle guerre Mattis fait-il spécifiquement référence ? À celle en Afghanistan ? Nous nous sommes déjà bien retirés d’Irak. La Syrie, la derniere-née de notre folie interventionniste ? On ne nous le dit pas vraiment, mais à mon avis ce n’est pas une guerre étrangère à laquelle Mattis a fait allusion, mais – peut-être inconsciemment – à une guerre domestique, c’est-à-dire celle que mène son propre gouvernement contre le président des États-Unis.

Tous les jours on en parle dans les médias : le canular du Russia-gate est toujours poussé en avant, malgré les preuves croissantes montrant la manipulation. Robert Mueller est toujours à la recherche d’un prétexte pour faire tomber Trump. Les médias, qui sont depuis longtemps associés à la bureaucratie de sécurité nationale, travaillent ouvertement en tandem avec les services de renseignements pour éliminer Trump – et si vous voulez savoir pourquoi, relisez simplement le reportage sur la réticence de Trump à suivre le programme meurtrier du Parti de la guerre.

Une fois qu’ils l’auront démoli, qui va remplacer Trump ? Ce sera Mike Pence bien sûr, la même personne qui fait tout ce qui est en son pouvoir pour détruire la possibilité de paix dans la péninsule coréenne ; à l’encontre de l’espoir exprimé par Trump que « nous puissions conclure un accord » avec la Corée du Nord.

Le Parti de la guerre ne peut tolérer un président qui remet en question les prémisses les plus élémentaires de l’empire américain : « Vous, les gars, voulez que j’envoie des troupes partout ! ». Bien sûr que oui. Pourtant Trump a été élu pour remplir un mandat très différent : pour commencer, faire passer l’Amérique d’abord. Il s’est opposé aux techniques de changement de régime. Et maintenant, les changeurs de régime veulent exercer leurs techniques de changement de régime contre lui.

Il suffit de lire le reportage de James Risen dans The Intercept : « la cabale FBI/CIA/NSA a payé 100 000 dollars à un agent russe, un acompte sur un total d’un million, pour obtenir du matériel compromettant sur Trump ». Ce genre de chose n’est-il pas censé ne se produire que dans des endroits comme le Tadjikistan ? Oh, tout cela a été fait sous le prétexte de récupérer nos outils de guerre cybernétique volés, mais vraiment, quelle est leur valeur si les Russes les ont déjà ? Bien sûr, nous pourrions découvrir ce qui a été volé – nous ne le savons toujours pas – mais le long processus décrit par Risen consiste en réalité à se débarrasser de Trump. C’est tout ce qui les intéresse en ce moment, et rien ne les arrêtera – y compris, je crois, l’assassinat – pour y arriver.

Il y a trop d’argent basé sur la perpétuation et l’expansion de notre empire mondial pour laisser Trump ruiner leur arnaque. Trop de carrières sont basées dessus, trop de prestige est en jeu, trop d’« alliés » dépendent des largesses que leur offre cet empire. Ils sont en train de coincer Trump, malgré son instinct non interventionniste. Ils sont en train de compiler des « dossiers » et de mobiliser toutes leurs forces pour l’assaut final contre le Bureau ovale. C’est grave, Trump est pris en otage : ils ont limité ses options politiques dans toutes les sphères importantes du domaine de la sécurité nationale/politique étrangère ; le « marécage » dont parle Trump est un miasme international, et les créatures de ces marécages, de diverses nationalités, sortent de la boue leurs griffes visant directement la gorge présidentielle.

Le Parti de la guerre est prêt à aller jusqu’au bout. La question est : est-ce le cas de Donald Trump ? Nous verrons bien.

Justin Raimondo

Traduit par Wayan, relu par Cat pour le Saker Francophone.

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