Par Moon of Alabama – Le 17 janvier 2019
Le principal organe de propagande de l’empire, le New York Times, continue sa campagne anti-chinoise en rejetant l’échec des négociations commerciales avec les États-Unis sur le président chinois.
Comment le changement d’avis de dernière minute de Xi sur l’accord commercial entre les États-Unis et la Chine l’a bloqué :
Il y a trois semaines, le dirigeant chinois, Xi Jinping, semblait confiant de voir la guerre commerciale contre les États-Unis, qui dure depuis un an, bientôt s'apaiser, lui offrant une belle victoire politique. Il a même prononcé un discours dans lequel il a déclaré que la Chine protégerait la propriété intellectuelle, encouragerait l'investissement étranger et achèterait davantage de biens et de services à l'étranger - autant de changements que les États-Unis réclament depuis que ces deux pays essayent de négocier un accord. Mais à peine une semaine après ce discours, les négociateurs chinois ont envoyé aux Américains un projet d'accord substantiellement réécrit, incitant le président Trump à accuser Pékin de revenir sur des conditions qui avaient été agrées.
Comme d’habitude pour la propagande américaine, l’article personnifie la décision prise par la Chine face aux exigences excessives des États-Unis. C’est Xi personnellement qui est à blâmer dit le Times :
Dans le très hiérarchique système politique chinois, où le président Xi a accumulé un pouvoir formidable, .... ... il est clair que M. Xi a mal jugé ... Maintenant, M. Xi risque d'être acculé au pied du mur, ... Pour M. Xi, un tel mouvement pourrait être vu... L'emploi du temps frénétique de M. Xi et son style très centralisé d'élaboration des politiques... Xi a sans doute durci l'atmosphère politique générale...
La propagande américaine pointe toujours du doigt une personne qui s’occuperait toute seule de tout et qui mérite donc toute la haine. C’était Saddam, Saddam, Saddam, Saddam. Puis Kadhafi, Kadhafi, Kadhafi, Kadhafi, Assad, Assad, Assad, Assad, Poutine, Poutine. Maintenant c’est Xi, Xi, Xi, Xi.
En réalité, presque personne n’a autant de pouvoir qu’une telle propagande diabolisante tente de le faire croire. Les pays ont des intérêts qui définissent leurs politiques au moyen de processus souvent incompréhensibles pour l’observateur curieux. Quelle qu’elle soit, la personne en haut de l’échelle ne fait que représenter que les couches du dessous. Il devrait incomber à la presse de démêler et d’expliquer ces processus plutôt que diaboliser le visage qui les représente.
Donc, que s’est-il vraiment passé ?
Les États-Unis ont déclenché une guerre commerciale avec la Chine en imposant soudainement des droits de douane élevés sur les produits chinois. La Chine a riposté en imposant des droits de douane sur les produits américains, mais elle était prête à négocier un accord équitable. Les négociations en vue d’un accord se sont déroulées en anglais aux États-Unis. Les États-Unis en ont fourni un résumé écrit.
Lorsque ce projet est arrivé en Chine et a été traduit en chinois, le parti et les institutions gouvernementales concernées ont été consternés. Les États-Unis exigeaient que la Chine modifie plusieurs de ses lois nationales. Ils exigeaient surtout un changement complet des politiques commerciales de la Chine et, le plus exaspérant, ils n’étaient pas disposés à revenir aux anciens pourcentages de droits de douane, même si la Chine se conformait au projet. Ce n’est pas Xi qui a rejeté cet accord injuste, c’est tout le gouvernement chinois.
Le projet d’accord a été corrigé et renvoyé aux États-Unis. Trump a répondu au refus de la Chine face à cette demande de capitulation en augmentant encore les taxes douanières et en menaçant de les augmenter encore plus. La guerre commerciale s’intensifiera à partir de maintenant et contaminera les autres relations.
En fin d’article du NYT, où la propagande s’affaiblit et le journalisme s’infiltre, nous pouvons apprendre cela :
Plusieurs sources ont déclaré que ces changements avaient été discutés avec d'autres dirigeants du Parti communiste, qui ont parlé des craintes que l'accord proposé ne donne l’impression que M. Xi et le parti cèdent aux pressions. ... M. Xi a peut-être finalement conclu que les changements de lois exigés par les États-Unis constitueraient un affront à l'honneur national. Certains ont dit que M. Xi aurait pu se sentir obligé d'agir après que les clauses eurent suscité des critiques de la part des chefs de parti qui n'en avaient pas été informés plus tôt. ... L'administration a cherché à faire modifier les lois sur la cybersécurité, ce que les autorités chinoises chargées de la sécurité nationale ont considéré comme une ingérence. Ces changements nécessiteraient l'autorisation du pouvoir législatif nationale chinois. « Ces conditions que les Américains ont soulevées pour l’accord sont, du moins d’un point de vue politique, extrêmement difficiles à accepter », déclare Cui Liru, ancien président de la China Institutes of Contemporary International Relations, un important groupe de recherche étatique. « Ils demandent presque à la Chine de changer de système politique. » ... « Il est très difficile de penser que la Chine va céder à et accepter ces pressions », a déclaré Wang Yong, directeur du Center for International Political Economy de l'Université de Pékin. « L'opinion publique compte beaucoup. »
Ce n’est donc pas Xi, Xi, Xi, Xi. La Chine n’est pas un « système politique hiérarchique » et Xi n’a pas « accumulé une puissance formidable ». Le président chinois Xi n’est pas un roi absolu. Ce n’est pas lui qui peut prendre des décisions d’une telle portée. Il y a le parti, l’armée et le gouvernement. Il y a les intérêts de l’industrie dont il faut tenir compte. Il y a enfin l’opinion publique nationale dont le système doit tenir compte.
La Chine ne veut pas d’une guerre commerciale avec les États-Unis. Mais, contrairement à ce que pensent Trump et le NYT, c’est probablement la Chine qui perdra moins dans l’affaire que les États-Unis.
Comme l’ambassadeur Chas Freeman l’expose en détail, la politique (anti-)chinoise de Trump n’a aucune stratégie. Si ce n’est celle du chaos qui aura des répercussions dans bien d’autres domaines :
La guerre commerciale du président Trump contre la Chine s'est rapidement étendue à tous les autres domaines des relations sino-américaines. Washington tente maintenant de démanteler l'interdépendance de la Chine avec l'économie américaine, de réduire son rôle dans la gouvernance mondiale, de contrer ses investissements étrangers, de paralyser ses entreprises, de bloquer ses progrès technologiques, de punir ses nombreuses déviations de l'idéologie libérale, de contester ses frontières, de cartographier ses défenses et de conserver sa capacité à pénétrer ces défenses quand elle le veut. Le message d'hostilité à l'égard de la Chine que ces efforts envoient est cohérent et apparemment total. La plupart des Chinois pensent que c’est le reflet d’une vision ou d’une stratégie américaine cohérente. Ce n'est pas le cas. Il n'y a plus à Washington de processus politique ordonné pour coordonner, modérer ou contrôler la formulation ou la mise en œuvre des politiques. C’est plutôt qu’un président populiste a effectivement déclaré ouverte la chasse ouverte à la Chine.
À l’heure actuelle, toutes les branches de la politique américaine s’en prennent à la Chine, dans tous les domaines où cela est possible. Cette hostilité deviendra bientôt irréversible. La Chine réagira et de manière asymétrique. Elle recommence déjà à acheter du pétrole iranien. L’ambassadeur Freeman ne voit pas comment les États-Unis pourraient gagner ce match.
La Chine s’est préparée depuis longtemps à ce conflit. Considérez la récente décision de Trump contre le fabricant chinois Huawei :
La Maison-Blanche a publié, mercredi, un décret visant apparemment à interdire d’utiliser des produits Huawei dans les réseaux de télécommunications et l'infrastructure de l'information aux États-Unis. Elle a ensuite annoncé des sanctions plus fortes et immédiatement appliqués pour soumettre la société chinoise à des contrôles stricts à l'exportation. Le décret est entrée en vigueur jeudi et exige l'approbation du gouvernement américain pour tous les achats de puces électroniques, de logiciels et d'autres composants américains fait par Huawei et 68 entreprises affiliées dans le monde. Huawei affirme que cela représente 11 milliards de dollars de marchandises, selon les chiffres de l'an dernier.
Huawei utilise actuellement des puces de fabrication américaine dans bon nombre de ses smartphones et produits réseau. Mais la compagnie s’attendait depuis longtemps à ce que les États-Unis prennent de telles mesures et s’y préparait avec diligence :
HiSilicon, une filiale de Huawei spécialisée dans la fabrication de puces, a déclaré vendredi qu'elle utilisera des puces qu'elle a développées indépendamment depuis des années pour faire face à l'interdiction mise en place par les États-Unis. He Tingbo, le président de HiSilicon, a déclaré dans une lettre interne adressée au personnel que Huawei se préparait à un scénario de survie dans des conditions extrêmes alors que toutes les puces et technologies venant des États-Unis deviennent inaccessibles. ... "Aujourd'hui, un choix historique doit être fait. Notre plan de secours sera mis en service officiellement," selon la lettre.
Bientôt, les fabricants américains de puces auront perdu toutes leurs ventes auprès du deuxième plus grand fabricant de téléphones intelligents du monde. Cette perte ne sera pas seulement temporaire, elle deviendra permanente. En même temps, les droits de douane de Trump sur les produits en provenance de Chine continueront de nuire à l’économie américaine. Les électeurs le craignent déjà :
Par une marge de 11 points, les électeurs pensent que l'augmentation des droits de douane sur les importations chinoises fera plus de mal à l'économie qu'elle ne l'aidera.
L’intuition des électeurs sera bientôt confirmée, Walmart et d’autres annonçant qu’ils devront augmenter leurs prix. Les économistes s’attendent également à ce que les consommateurs américains ressentent une grande douleur :
"Le coût pour une famille américaine de trois personnes serait d'environ 2 200 $ si l'ensemble des droits de douane de 25 % de Trump sur 500 milliards de dollars d'importations de marchandises de la Chine était mis en œuvre. "Dans le cas des derniers 15 % de plus sur 200 milliards de dollars, de 10 % à 25 %, qui entreront en vigueur d'ici la fin mai... le coût direct est de 30 milliards de dollars et le coût indirect probable, en raison de la hausse des prix à la production américaine, sera de 30 milliards de dollars supplémentaires. Ensemble, c'est 60 milliards de dollars... environ 550 $ par famille." La Chine ne subira "pas plus de 5%" de l’effet des taxes douanières.
Peu d’autres pays se joindront à la campagne anti-chinoise de Trump. Cela isolera encore plus les États-Unis. Quel exploit pour un homme qui veut Rendre Sa Grandeur à l’Amérique.
Certains aspects du comportement commercial de la Chine peuvent et doivent être critiqués. Mais dans l’ensemble, la Chine s’en tient aux règles du jeu, alors que les États-Unis les enfreignent maintenant. Ce n’est pas la Chine qui a installé les usines américaines chez elle. Les dirigeants américains l’ont fait parce que le système économique américain est fondé sur la cupidité et non sur le bien-être de ses citoyens.
Il existe de bien meilleures façons d’amener la Chine à changer son comportement commercial qu’en l’intimidant et en augmentant sans cesse les taxes douanières et les sanctions. L’essai de l’ambassadeur Freeman, que je vous recommande, en fournit quelques-unes.
Moon of Alabama
Traduit par Wayan, relu par jj pour le Saker Francophone
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