La malédiction des tabloïds…


qui ont donné à la Grande-Bretagne deux guerres mondiales, Boris Johnson et le Brexit


Par Martin Sieff − Le 26 octobre 2019 − Source Strategic Culture

s258Le Royaume-Uni est sur le point de sombrer dans le chaos terminal du Brexit, la sortie britannique de l’Union européenne à 28 pays.

Avec son hypocrisie habituelle, son impudeur et ses mensonges éhontés, le Premier ministre britannique Boris Johnson a décidé de faire le Brexit à peu près aux mêmes conditions que celles acceptées par son prédécesseur Theresa May, qui avait été écorchée pour cela par le troupeau indigné des Gadarene Swine 1 Brexiteers.

Contrairement à l’ éternellement infortunée May, Johnson a au moins le don douteux du roi Midas, mais à l’envers. Il transforme tout l’or qu’il a en scories sans valeur – avec l’enchantement supplémentaire que ses millions de dupes sont convaincues qu’il a transformé les scories en or !

En tant que maire de Londres puis étoile montante du Parti conservateur, l’alliée digne de confiance de Johnson dans ses cafouillages éthyliques au cours de la dernière décennie, a été la presse tabloïd prétendument sympathique mais particulièrement vile de la Grande-Bretagne.

Ils l’ont implacablement vendu au public britannique comme une incarnation attrayante et attachante du patriotisme, plutôt que comme le bouc émissaire avide de pouvoir, exceptionnellement irresponsable, paresseux, erratique et vite paniqué, qu’il est vraiment.

Il ne faut pas être surpris : la presse tabloïd britannique a un long palmarès détaillé, horrible, dégoûtant et dégradant.

Au Royaume-Uni, les tabloïds populaires de l’empire médiatique de Rupert Murdoch ont piraté la messagerie vocale d’une jeune fille de 13 ans après son assassinat. Ils ont fait la même chose dans le cas de soldats britanniques tués au combat dans l’exercice de leurs fonctions en Afghanistan.

La dure vérité, qui n’a jamais été admise dans la culture des médias britanniques, est que la soif hypocrite et salace des Britanniques pour les ordures des tabloïds – bien pire que tout ce qui se passe aux États-Unis, en Russie ou dans tout autre pays industrialisé majeur – a causé à ce peuple un tort incalculable, au moins trois fois au cours du siècle dernier.

La première occasion remonte à la période de la Première Guerre mondiale, de 1914 à 1918. La presse britannique populaire était alors dominée par deux journaux qui, bien que n’étant pas graphiquement des tabloïds à l’époque, se conformaient certainement à la philosophie la plus basique du tabloïd.

Il s’agissait du Daily Express, propriété de Max Aitken, devenu Lord Beaverbrook, et du Daily Mail, appartenant à Alfred Harmsworth, devenu Lord Northcliffe.

Pendant la Première Guerre mondiale, ces deux journaux ont soutenu les gouvernements britanniques de Herbert Henry Asquith et de David Lloyd George en suscitant une frénésie patriotique contre l’Allemagne. Ils ont publié et approuvé des récits hystériques d’horribles atrocités de guerre prétendument commises par les forces allemandes occupant la Belgique – des récits totalement fictifs. Le grand patriote irlandais Roger Casement qui a exposé les mensonges sur les atrocités commises en Belgique a été capturé par les Britanniques et pendu honteusement sous une fausse accusation de trahison.

Une génération plus tard, pendant la Seconde Guerre mondiale, des récits factuels et sobres sur le comportement nazi génocidaire dans l’Holocauste contre le peuple juif et envers les communautés polonaises, ukrainiennes et russes, ont été largement rejetés en Occident en raison du prétendu précédent de récits inventés par le peuple juif et publiés par le Daily Mail de Northcliffe et ses émulateurs pendant la Première Guerre mondiale.

Pire encore, la presse populaire britannique, dirigée par Northcliffe, décrivait les généraux britanniques sous les ordres du maréchal sir Douglas Haig comme des génies militaires, alors qu’ils étaient en réalité des bouchers de la dernière espèce, impitoyables, incompétents et stupides.

Plus d’un million de soldats britanniques sont morts au cours d’une série de batailles sur le front occidental, qui ont abouti aux batailles de la Somme en 1916 et de Passchendaele en 1917 – des tentatives qui n’ont gagné que quelques ridicules centaines de mètres de territoire.

À la fin de la Première Guerre mondiale, lors de l’armistice du 11 novembre 1918, un tiers de tous les Britanniques adultes âgés de 18 à 45 ans avaient été tués ou gravement blessés, et souffraient de maladies chroniques ayant causé leur mort prématurée 30 à 40 ans en avance sur leur espérance de vie.

Northcliffe n’a jamais été tenu responsable de ses mensonges monstrueux. Il est mort fou en 1920, probablement d’une syphilis avancée.

Le deuxième grand préjudice que les téméraires seigneurs de la presse ont infligé au peuple britannique est venu dans les années 1930 lorsque Lord Rothermere, éditeur du Daily Mail –  frère et successeur de Northcliffe – et, encore une fois, Lord Beaverbrook et son Daily Express, admirèrent Adolf Hitler comme un champion – dans leur esprit – contre le communisme et l’Union soviétique.

Ces seigneurs de la presse des années 1930 ont rassuré le public britannique sur le fait que Hitler n’était pas une menace pour eux et supprimaient systématiquement les reportages intrépides de leurs correspondants en Allemagne, qui auraient révélé la véritable nature de la dictature de Hitler.

Ces dernières années, les journaux tabloïds ont adopté une approche opposée [à celle adoptée pour l’Allemagne nazie] au sujet de la Russie – la décrivant comme un pays pauvre, terrorisant, misérable et tyrannique – alors que toute personne qui a voyagé dans ce pays au cours des 20 dernières années sait que c’est un mensonge ridicule et honteux.

Personne ne devrait être surpris du soutien cynique des journaux britanniques à Johnson, un aventurier téméraire qui a trahi et œuvré systématiquement à la ruine des deux précédents Premiers ministres qu’il a servis, David Cameron et Mme May,

Les grands seigneurs de la presse britannique ont couché avec les dirigeants politiques du pays pendant plus d’un siècle, avec des résultats généralement catastrophiques.

Le peuple britannique a payé un prix terrible, au cours des deux guerres mondiales et des politiques économiques bâclées, à cause de son appétit sans fin pour les commérages purulents et les détails inutiles de crimes effroyables.

S’ils se lancent maintenant sans réfléchir dans l’isolement, l’effondrement de l’économie et la désintégration sociale avec Boris Johnson, ils n’auront à s’en prendre qu’à eux-mêmes – et à leurs tabloïds tant aimés.

Martin Sieff

Traduit par jj, relu par Camille pour le Saker Francophone

  1.  Matthieu 830- Il y avait loin d’eux un grand troupeau de pourceaux qui paissaient. 31- Les démons priaient Jésus, disant: Si tu nous chasses, envoie-nous dans ce troupeau de pourceaux. 32- Il leur dit: Allez! Ils sortirent, et entrèrent dans les pourceaux. Et voici, tout le troupeau se précipita des pentes escarpées dans la mer, et ils périrent dans les eaux.…
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