Découverte tardive: Les médias admettent que les frappes de drones ne servent à rien


Moon of Alabama

Moon of Alabama

Le 17 juin 2015 – Source: Moon of Alabama

Il y a deux jours, quand la nouvelle de l’assassinat présumé de Mokhtar Belmokhtar au Yémen est sortie, j’ai écrit :

Mis à part le manque de fiabilité évidente de ces rapports, on peut se demander ce que le meurtre de tel ou tel terroriste est censé apporter. Il y en aura toujours un autre puis un autre et un autre, et la violence ne fera qu’empirer…

Et ensuite, des frappes de drones américains ont tué l’ancien membre de la garde d’al-Qaïda, Nasser al-Wuhayshi, au Yémen, et soudain les médias de masse se sont aussi mis à douter du bien-fondé de cette stratégie.

Christian Science MonitorLes forces de l’air américaines nous débarrassent d’une série de dirigeants d’Al-Qaïda. Une tactique efficace ?

On assiste à une prise de conscience admirablement synchronisée du problème. Les États-Unis réussissent peut-être à tuer tel ou tel dirigeant d’un gang terroriste donné, mais l’ensemble du phénomène ne cesse de croître et d’embellir. C’est le sous-titre du Telegraph qui résume le mieux la situation :

«L’Amérique s’est attaquée à un ennemi fort de 5 000 hommes. Elle en a tué 10 000. Il n’en reste plus que 20 000»

Sauf que al-Qaïda à ses débuts ne comptait que quelques centaines d’hommes cantonnés à l’Afghanistan et au Pakistan. Une quinzaine d’années plus tard, après que la guerre des États-Unis contre le terrorisme a fait des centaines de milliers de morts chez des civils sans aucun lien avec al-Qaïda, et des milliers de morts chez les djihadistes, al-Qaïda et ses rejetons sévissent dans plus d’une douzaine de pays et ont fait des dizaines de milliers d’adeptes. Comme je l’ai écrit :

Le recours systématique des Étasuniens aux moyens militaires montre que, pour eux, la résolution politique des conflits n’est pas une option.

Pourtant, aucun des articles mentionnés ci-dessous ne propose la moindre solution au problème.

Alors voilà mes suggestions :

  • Arrêter les frappes de drones et apparentés, puisqu’il est évident qu’elles fabriquent toujours plus de terroristes.
  • Arrêter d’utiliser des extrémistes, par exemple les djihadistes et les néo-nazis, comme outil politique pour lutter contre tel ou tel dirigeant gênant.
  • Restreindre les ressources dont ces groupes ont besoin pour grandir. Cela nécessitera de faire pression sur les dictateurs saoudiens et qataris, allant même peut-être jusqu’à menacer l’existence de leurs régimes, pour qu’ils cessent de financer la diffusion de leur version radicale de l’islam et qu’ils interdisent le financement privé de ces groupes par des ressortissants de leurs pays.

Il est peu probable pour l’instant que de telles mesures soient prises. Mais il a fallu des années pour que les médias s’aperçoivent que les frappes de drones ne servaient à rien. Dans quelques années, les premiers pas vers la solution du problème leur apparaîtront peut-être dans toute leur évidence.

Hélas, d’ici là, la guerre contre le terrorisme aura fait beaucoup d’autres victimes.

Traduction : Dominique Muselet

   Envoyer l'article en PDF