Comment les médias d' »information » étasuniens et alliés fabriquent une « Réalité »


Par Eric Zuesse − Le 7 février 2022 − Source Oriental Review

Suivons la trace des « informations » publiées en Occident au sujet du traitement des Ouïghours par la Chine, pour comprendre comment l’Occident fabrique une réalité en papier autour des pays non-alignés sur l’unipolarité étasunienne.

Le 3 février 2022, aux États-Unis, la National Public Radio (NPR) publiait comme gros titre : « Les enfants ouïghours évoquent leurs souffrances physiques et mentales au sein des internats chinois au Xinjiang« , et faisait état de ce que les Ouïghours « ont indiqué avoir été contraints de travailler dans des usines durant leur détention ». Cette phrase « contraints de travailler » fait l’objet d’un lien hypertexte (dans la version originale de leur propre article d’« information ») vers un article payant publié par le Financial Times. Ainsi, le lecteur n’a pas accès à l’article d’« information » du Financial Times utilisé comme source, mais j’ai pour ma part utilisé une version archivée sur l’internet de la version complète de l’article du FT, afin que le lecteur puisse prendre connaissance de ces « informations » parues dans le FT, et noter que cet article affirme que « la Chine a été condamnée sur le plan international » pour ces pratiques. Que le lecteur suive le lien et constate que la source de cette allégation de condamnation s’avère ne PAS être une organisation « internationale », comme l’ONU (comme l’implique le FT, et dans une certaine mesure, NPR également), mais encore un autre article du Financial Times, dont le titre est « Un rapport aux États-Unis exhorte à ce que des punitions soient adoptées contre des dirigeants chinois du fait des abus commis au Xinjiang : la commission du Congrès examine l’utilisation de la Loi Magnitsky pour cibler ceux qui sont derrière les camps de Musulmans« . Cet article du FT affirme que SA source est « le rapport annuel de la commission exécutive du Congrès sur la Chine » ; il s’agit d’un groupe au Congrès composé presque à 100% de néo-conservateurs d’extrême-droite (c’est-à-dire, favorables à l’impérialisme étasunien), et dirigé conjointement par le sénateur républicain Marco Rubio et le représentant républicain Christopher H. Smith, deux partisans enragés de toutes les lois de sanctions et de toutes les résolutions du Congrès visant à punir, voire à carrément envahir tout pays se trouvant parmi les « ennemis du jour des États-Unis », comme l’est actuellement la Chine.

L’article de la NPR contient également de nombreuses autres accusations formulées contre le gouvernement chinois, et évoque que « les dirigeants des États-Unis, du Canada, de la France, des Pays-Bas et d’autres pays ont déclaré que les politiques menées par la Chine au Xinjiang s’apparentent au génocide ». L’ensemble des gouvernements ainsi cités sont des alliés des États-Unis (ce qui signifie de nos jours qu’ils sont également hostiles à la Chine).

Des Ouïghours vivant en Turquie manifestent contre la Chine au mois de mars 2021, pour dénoncer les abus contre les droits de l’homme pratiqués dans la province occidentale chinoise du Xinjiang.

Qui plus est, aucun élément n’est présenté pour justifier l’utilisation du terme « génocide » qualifiant la politique chinoise à l’égard des Ouïghours. Un « journalisme » de cette nature constitue de la littérature haineuse, et devrait être traité comme tel. Les quatre gouvernements (anti-chinois) qui sont évoqués ont avancé ces allégations, mais aucune preuve n’a été apportée par quiconque qu’un tel « génocide » se produit sur place. Faire état de la haine produite par ces quatre gouvernements (contre la Chine) ne constitue du journalisme QUE SI mention est également faite du fait que les accusations ne sont pas sourcées, voire absolument pas documentées.

Aucune preuve n’est apportée sur le statut des Ouïghours interviewés par le « journaliste » de NPR, qui pourraient être — ou non — des djihadistes, qui existent bel et bien sur place, ou appartiennent à la branche Sunnite (ou Salafiste, ou « Wahabiste ») de l’Islam, encourageant le djihadisme, et qui remonte aux origines turques des Ouïghours — et la Turquie sunnite encourage les djihadistes même encore de nos jours. L’une des principales techniques de propagande consiste à éviter de faire la moindre mention de ce contexte très important, qu’il est nécessaire d’avoir à l’esprit pour comprendre clairement les événements qui sont décrits. Les djihadistes, après tout, ne menacent pas QUE la Chine — ils constituent également un danger pour les Étasuniens et d’autres peuples dans de nombreux autres pays.

Il ne s’agit pas d’affirmer que TOUTES les accusations portées contre la Chine dans l’article du NPR sont fausses, mais d’affirmer que l’article lui-même relève clairement de la propagande diffusée par le gouvernement étasunien, pas du tout d’une pratique honnête du journalisme (rapporter ce qui ne remonte qu’à des faits documentés avec une source de confiance, au lien d’opinions partisanes concernant des faits supposés).

En d’autres termes, l’article d’« informations » de la NPR est basé sur des sources étasuniennes, mais fait semblant d’être basé sur des sources extérieures au gouvernement étasunien ; il omet des éléments de contexte essentiels à interpréter les événements supposés qu’il évoque ; et il ne s’apparente guère qu’à un élément de propagande étasunienne, monté pour tromper ses lecteurs et les amener à soutenir des sanctions, ou peut-être même une invasion en fin de compte. Il s’agit de propagande de guerre, pas de véritable journalisme.

De même, ce sont au moins les « États profonds » anglais, étasunien et allemand (compter dans la notion d’« État profond » les milliardaires propriétaires de la presse) qui parvinrent à tromper leurs publics respectifs et à les pousser dans la première guerre mondiale ; et au moins l’« État profond » allemand qui a poussé son public dans la seconde guerre mondiale ; et également les « États profonds » étasunien et anglais ainsi que leurs gouvernements qui ont réussi à tromper leur public en vue d’envahir l’Irak le 20 mars 2003 — tout cela sur la base de mensonges. Cependant, on ne sait pas encore si les États-Unis et le Royaume-Uni finiront ou non en fin de compte par déclencher une troisième guerre mondiale contre la Chine et la Russie. Le monde pourrait survivre à tout ceci. Mais peut-être pas. En tous cas, ces mensonges vont continuer de croître, tout comme la concentration de plus en plus importante des richesses au mains d’un tout petit nombre, et va augmenter également l’insatisfaction et le désespoir des gens dans le monde entier. Le plus d’argent on dépense dans les guerres, le moins d’argent on a à dépenser à des fins pacifiques (chose qui est nettement moins profitable aux milliardaires — et à leurs agents payés — le véritable État profond). Mais les personnages qui sont responsables de tout ceci ne sont pas uniquement les médias d’« information » mensongers et les milliardaires qui les contrôlent, mais également leurs nombreux agents, au sein des gouvernements et dans le secteur privé, qui s’enrichissent de plus en plus par ces mensonges.

Eric Zuesse

Note du Saker francophone

Les exemples de fausses informations et de propagande éhontée systématique sont légions ; il suffit d’avoir un peu de mémoire ou de creuser à peu près n’importe quel sujet…

On peut citer également en exemple le caractère presque systématiquement faux de toute information publiée en Occident au sujet de la Corée du Nord. Le lecteur qui souhaite creuser ce sujet pourra consulter l’excellente série « La Pravda Américaine« .

Traduit par José Martí, relu par Wayan, pour le Saker Francophone

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