Qu’est-ce que l’Union européenne ?


Par Dr. Vladislav B. Sotirović − Le 16 octobre 2022 − Source OneWorld Press

Quelles sont les réalités sous-jacentes à l’Union européenne ?

L’Union européenne (l’UE) se définit officiellement comme un mélange politique entre institutions supranationales et intergouvernementales. Fondée sur l’idée d’une gouvernance (quasiment) partagée, elle s’appuie formellement sur un équilibre institutionnel délicat, affirmant une égalité entre ses membres les plus divers et les puissances qui la dirigeant, alors que de véritables tensions se développent entre les États selon leur niveau de population et de développement. Ces tensions sont présentes par nature dans toute construction fédérale, et constituent un problème central, depuis la fondation de la Communauté européenne du Charbon et de l’Acier (CECA)1 en 1951 par les « six membres originels » (Benelux, Allemagne de l’Ouest, France et Italie).

Les faits et la propagande officiels de l’UE à son propre sujet sont bien connus, et chacun sait qu’il s’agit d’un concept admirable et merveilleux ; voir ainsi tous ces peuples différents (27 États membres à ce jour) vivant dans une mosaïque de nations, qui ont décidé de vivre ensemble avec pour objectif principal d’établir une grande communauté unie, tout en essayant de vivre en paix, dans le confort, et de jouir de systèmes médicaux et éducatifs développés. Voilà ce que ne cessent de nous exposer la presse et la télévision, sans jamais faire mention publiquement de la moindre erreur ou de la moindre décision discutable prise par l’UE.

Qui plus est, voici une chose intéressante : considérons des opinions divergentes. Je ne veux pas écrire au sujet d’une « réalité », car la réalité constitue un champ subjectif que l’on peut remettre en case, mais j’aimerais attirer l’attention sur une approche critique des études menées sur l’intégration de l’UE et de l’Europe avec le parapluie économico-politique de l’UE.

Tous les théoriciens de l’unification européenne sous le parapluie des communautés (ouest-)européennes (devenues aujourd’hui l’UE) de l’après guerre vont souligner quatre points fondamentaux au sujet de l’importance de ce processus :

  • Cette Union va mettre fin aux guerres millénaires entre les puissances européennes majeures
  • Une Europe unifiée va ancrer le système des puissances mondiales dans une structure polycentrique, grâce à sa puissance économique et technologique, et grâce à son influence culturelle et politique (sans doute en combinaison avec la montée des États du Pacifique).
  • Cette Union va empêcher l’existence d’une superpuissance hégémonique, malgré la proéminence militaire et technologique continue des États-Unis d’Amérique.
  • L’unification européenne est une source significative d’innovation institutionnelle, qui peut produire des réponses aux crises de l’État-nation.2

De fait, l’unification européenne après la seconde guerre mondiale s’est réalisée sur la base de la convergence de visions alternatives, d’intérêts en conflits entre États-nations, et entre des acteurs économiques et sociaux différents. La notion-même d’Europe, fondée sur une identité (quasiment) commune, reste cependant très discutable. Néanmoins, historiquement, l’identité européenne s’est construite de manière raciale contre « les autres », les « barbares » de toutes sortes et de diverses origines (Arabes, Musulmans, Turcs, et aujourd’hui Russes), et le processus d’unification actuel n’est pas différent en cela. L’unification s’est produite à partir de projets politiques défensifs autour d’intérêts perçus comme partagés (par exemple, la « menace » russe après la première Guerre Froide, et surtout après la crise de Crimée de 2014 suivie par l’intervention humanitaire russe en Ukraine de l’Est en 2022) entre les États-nations participants. Par conséquent, le processus d’unification visait à défendre les pays participants contre des « menaces » perçues, et en toutes ces instances, malgré cela, l’objectif principal était surtout politique, mais les moyens pour l’atteindre étaient surtout des mesures économiques. Autre fait avéré, dès le début de l’unification européenne à l’issue de la seconde guerre mondiale, c’est l’OTAN qui a apporté le parapluie militaire nécessaire.

Historiquement, le débat européen sur les visions concurrentes du processus d’intégration après la seconde guerre mondiale était en trois volets :

  • Les technocrates qui ont produit l’ébauche d’Europe unifiée (surtout le Français Jean Monnet) rêvaient d’un État fédéral, impliquant en pratique l’accumulation d’une influence et d’une puissance considérables entre les mains de la bureaucratie européenne centralisée à Bruxelles, Strasbourg et Luxembourg.
  • Le président Charles de Gaulle (1958-1969) avait insisté au sujet des transferts de souveraineté intergouvernementaux, et mettant ainsi les grandes décisions européennes entre les mains du Conseil des chefs des États membres. De Gaulle avait essayé d’affirmer l’indépendance de l’Europe vis-à-vis des États-Unis. C’est la raison pour laquelle la France avait par deux fois opposé son veto, en 1963 et en 1967, à la candidature de ralliement des Britanniques à la CEE, au vu des liens étroits entre le Royaume-Uni et les États-Unis, qui risquaient de compromettre toute initiative autonome européenne.
  • De fait, le Royaume-Uni représentait la troisième vision d’intégration européenne, centrée sur le développement d’une zone de libre échange sans véritablement céder de souveraineté politique. Lorsque la Grande-Bretagne a rallié la CE (en compagnie de l’Irlande et du Danemark) en 1973, après le départ de de Gaulle, cette vision économique de l’intégration européenne (en réalité, l’EFTA) est devenue dominante durant une décennie environ.

Néanmoins, le plan originel de Jean Monnet était depuis le tout début de créer un État européen fédéral supranational — les États-Unis d’Europe, dans lequel se mêleraient la majorité des nations européennes, y compris une Grande-Bretagne extrêmement euro-sceptique à l’époque, et qui a fini par quitter l’UE le 1er janvier 2022 (avec le Brexit). Ce nouveau super-État, communément appelé Europe Unie disposerait d’un Parlement, d’une Cour de Justice, d’une seule monnaie (l’Euro), d’un seul gouvernement (aujourd’hui désigné sous le nom de Conseil Européen avec pour « Politbureau » la Commission européenne), d’une seule citoyenneté, et d’un seul drapeau comme attribut extérieur de son indépendance.

Tel a été le plan suivi depuis le départ. Cependant, ceux qui le soutenaient savaient fort bien que l’écrasante majorité des habitants de l’Europe n’accepteraient jamais sincèrement l’Unification européenne sous une telle forme. Ils n’allaient jamais céder leurs libertés ou leur identité nationale pour se transformer en simple province du super-État européen, dans un projet conçu au départ contre l’Union soviétique et ses États satellites d’Europe de l’Est durant la première guerre froide. Alors qu’ont fait les politiciens européistes pour servir leur projet géopolitique ? Tout simplement, ils ont conspiré pour dissimuler cette vérité aux peuples 3

La question centrale est donc devenue : Quelles sont les vérités sous-jacentes à l’Union européenne ?

La nécessité d’unifier l’Europe a naturellement émergé des dévastations découlant des deux guerres mondiales catastrophiques. On trouve des preuves claires et nettes, à la fois au sein des traités européens successifs, et dans les proclamations des concepteurs de l’Europe, que l’Union européenne visait dès le départ à abuser de la confiance, qui allait finir par contraindre les nations d’Europe à constituer une union économique, sociale, politique et religieuse, que cela leur plût ou non. La véritable nature de l’objectif final — un super-État fédéral d’« États-Unis d’Europe » — fut volontairement dissimulée et maquillée. On décida de l’instiller par petites doses, pour amener ceux qui ne l’auraient jamais acceptée à l’ingurgiter, jusqu’à ce que l’ensemble du processus soit trop avancé pour qu’on puisse revenir en arrière ou le changer de manière significative.

Dr. Vladislav B. Sotirović

Traduit par José Martí, relu par Wayan, pour le Saker Francophone

Notes

  1. NdSF, il est symboliquement intéressant que depuis cette fondation, l’organisation ait rejeté aussi bien le charbon que l’acier
  2. Featherstone K., Radaelli C. M., The Politics of Europeanisation, N.Y.: Oxford University Press, 2003; Cini M.,European Union Politics, N.Y.: Oxford University Press, 2004.
  3. NdSF Tout simplement au travers de la technique bien connue du « salami ». Puisqu’aucun peuple n’accepterait la totalité du projet, on allait lui faire ingurgiter tranche par tranche.
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