Par Moon of Alabama – Le 12 juillet 2019
Aujourd’hui, les premières pièces des systèmes de défense antiaériens russes S-400 sont arrivées en Turquie. Le ministère russe de la Défense a posté une vidéo de l’arrivée sur Facebook. La vidéo du ministère turc de la Défense montrait que le déchargement de six véhicules de soutien appartenait à un ensemble S-400. Un ensemble complet S-400 se compose de deux radars, d’un poste de commandement, de huit véhicules de lancement dotés chacun de quatre missiles, ainsi que de divers chargeurs et autres véhicules d’appui. La Turquie a commandé deux jeux complets pour lesquels elle paiera environ 2,5 milliards de dollars.
Les États-Unis menacent la Turquie de sanctions économiques pour avoir commandé et reçu le système. Ils excluront également la Turquie du programme des avions de combat F-35. La Turquie était l’un des principaux partenaires du programme des F-35. Elle était censé recevoir cent avions, et fabriquer des pièces du système. La Turquie ne recevra pas les avions commandés et les pièces seront dorénavant confiées à une entreprise américaine.
Le système S-400 que la Turquie reçoit est une version d’exportation. Il utilisera dans un premier temps les missiles 48N6E d’une portée de 250 km. Les systèmes utilisés par la Russie sont équipés de missiles 40N6E d’une portée de 400 km. Il faudra plusieurs mois avant que le premier système mis en place en Turquie soit complet et opérationnel. Jusqu’à présent, seulement vingt soldats turcs ont été formés à ce sujet. Quatre-vingt autres soldats arriveront en Russie vers la fin du mois de juillet pour y recevoir leur entraînement.
L’OTAN ne se réjouit pas de l’acquisition de la Turquie :
Un responsable de l'OTAN a déclaré vendredi à CNN : "Il appartient aux alliés de décider du matériel militaire qu'ils achèteront. Nous sommes toutefois préoccupés par les conséquences potentielles de la décision de la Turquie d'acquérir le système S-400". L'officiel a ajouté que "l'interopérabilité de nos forces armées est fondamentale pour l'OTAN dans la conduite de nos opérations et missions".
Le S-400 en Turquie n’est pas censé être interopérable avec l’OTAN. La zone de déploiement initiale la plus probable du nouveau système sera autour d’Ankara afin de protéger le soi-disant Sultan Erdogan des attaques potentielles des États-Unis ou d’Israël.
L’agence de presse turque Anadolu, contrôlée par le gouvernement, a clairement indiqué ce que le système était censé viser. Lorsqu’il a annoncé la nouvelle de son arrivée, il a joint la photo ci-dessous à son tweet :
ANADOLU AGENCY (ENG) @anadoluagency - 12h05 UTC - 12 juil 2019 #Turkey : le déploiement du matériel russe # S400 démarre
La partie supérieure du graphique explique le système S-400. La partie inférieure indique : « Le système peut éliminer »…et montre ensuite les silhouettes et les noms des bombardiers, avions de chasse et de reconnaissance militaires américains, ainsi que des missiles de croisière Tomahawk. Le seul élément manquant est le F-35 «invisible» que le S-400 peut bien entendu détecter et éliminer.
Le deuxième ensemble S-400 sera probablement stationné sur la côte sud de la Turquie, d’où il pourra couvrir Chypre et protéger les intérêts pétroliers turcs dans l’est de la Méditerranée. La Turquie a récemment commencé à forer autour de Chypre. La partie nord de l’île est occupée par la Turquie depuis 1974. Mais ses revendications de droits d’exploration s’étendent même au sud de l’île et les turcs ont récemment commencé à forer sur place.
L’Union européenne, qui ne reconnaît pas l’occupation du nord de Chypre par la Turquie, a indiqué qu’elle sanctionnerait celle-ci pour cette occupation.
Les relations de la Turquie avec les États-Unis, l’OTAN et l’UE risquent d’empirer. La stratégie lente mais constante de la Russie visant à attirer la Turquie à ses côtés progresse très bien. Avec l’annulation de l’achat des F-35, la Turquie devra faire appel à la Russie pour acquérir des avions de combat modernes. Une commande dépendra de la part de fabrication que la Russie est prête à céder à la Turquie.
L’économie turque ne va pas bien. Ses agressions en Syrie et en Libye se sont révélées coûteuses. Le président Erdogan a récemment limogé le chef de la banque centrale turque, qui n’était pas disposé à abaisser le taux d’intérêt. Erdogan estime que des taux d’intérêt élevés entraînent une inflation élevée, tandis que 99% des économistes estiment que des taux d’intérêt plus élevés sont le meilleur moyen de lutter contre l’inflation. De nombreuses entreprises et ménages turcs ont contracté des emprunts libellés en euros ou en dollars américains. Si la banque centrale abaisse le taux d’intérêt, la lire turque coulera et le remboursement des emprunts deviendra plus coûteux. Les nouvelles sanctions américaines et européennes aggraveront ces problèmes.
Erdogan pourrait bientôt avoir un système de défense aérienne capable de protéger la capitale de la Turquie. Mais la décision coûtera cher au pays et à Erdogan dans de nombreux autres domaines. La Russie est le pays qui profite des problèmes de la Turquie. On espère qu’elle utilisera l’effet de levier qu’elle a sur ce pays pour arrêter les invasions turques de la Syrie.
Moon of Alabama
Traduit par jj, relu par Wayan pour le Saker Francophone