Trump a autorisé la CIA à mener une cyber-guerre contre l’Iran et d’autres pays


Par Moon of Alabama − Le 15 juillet 2020

Récemment, il y a eu un certain nombre d’incidents en Iran où des incendies ou des explosions inexpliqués ont détruit certaines infrastructures :

Depuis juin, des incendies ou des explosions ont éclaté dans six usines et autres installations, dont deux de nature militaire: l'usine de production de missiles Parchin et le site nucléaire de Natanz.

Il y a eu l’explosion d’un réservoir de gaz près d’une installation d’assemblage de missiles à Khojir, des problèmes dans une station de transformation près de Téhéran et d’autres incidents. Le plus remarquable a été une explosion et un incendie dans l’installation d’assemblage de centrifugeuses du complexe nucléaire iranien de Natanz.

Alors que l’incident de Natanz sent certainement le sabotage actif, les autres incidents, comme une récente explosion de bouteilles de gaz dans un hôpital, ressemblent davantage à de bons vieux accidents.

Quelqu’un amplifie un certain nombre d’accidents, plutôt normaux, qui se produisent dans n’importe quel grand pays industrialisé dans le but de semer la peur et l’incertitude en Iran.

Aujourd’hui, un incendie s’est déclaré sur un chantier naval à Bushehr. Certains tweeteurs ont immédiatement émis l’hypothèse qu’il faisait partie de la chaîne des incidents et l’a lié au réacteur nucléaire iranien près de cette ville.

Une telle spéculation est absurde. Des incendies sur les chantiers navals éclatent tout le temps. Demandez simplement à l’US Navy où en est l’USS Bonhomme Richard qui brûle depuis trois jours après qu’un incendie s’est déclaré lors de l’entretien du chantier. Cet incendie a transformé un navire d’un milliard de dollars en 40 000 tonnes de matière première pour haut fourneau. L’incendie d’aujourd’hui dans le port iranien a légèrement endommagé sept bâtiments désarmés (vidéo), de petits navires de fret civils construits en bois et utilisés pour le trafic côtier dans le golfe Persique.

Israël a indirectement revendiqué la responsabilité de l’incident de Natanz :

[Un] responsable du renseignement du Moyen-Orient ayant connaissance de l'épisode a déclaré qu'Israël était responsable de l'attaque du complexe nucléaire de Natanz, à l'aide d'une bombe puissante. Un membre du Corps des gardiens de la révolution islamique qui a été informé de la question a également déclaré qu'un explosif avait été utilisé.

J’ai des doutes sur ces revendications israéliennes opportunistes. Il est plus probable que la CIA ait mis sa patte dans ces affaires.

Il y a un programme assez intense de la CIA contre l’Iran. Trump a non seulement nommé l’agressif Michael D’Andrea, le “prince des ténèbres”, à la tête du centre de la mission de la CIA en Iran, mais il a donné à celle-ci de nouveaux pouvoirs étendus pour mener des cyberattaques contre le pays :

La Central Intelligence Agency a mené une série d'opérations cybernétiques secrètes contre l'Iran et d'autres cibles depuis qu'elle a remporté une victoire dissimulée en 2018 lorsque le président Trump a signé ce qui équivaut à une autorisation générale pour de telles activités, selon d'anciens responsables américains ayant une connaissance directe de la question.

L'autorisation secrète, connue sous le nom de dispositif présidentielle, donne à l'agence d'espionnage plus de liberté dans les types d'opérations qu'elle mène et le choix des cibles, annulant ainsi de nombreuses restrictions qui avaient été mises en place sous les administrations précédentes. Cette autorisation permet à la CIA de réaliser plus facilement ses propres opérations cybernétiques secrètes, plutôt que d'exiger que l'agence obtienne l'approbation de la Maison Blanche. ...
Cette décision, «très agressive, a donné à l'agence une autorité spécifique pour vraiment mener la lutte offensivement contre une poignée de pays adverses», a déclaré un ancien responsable du gouvernement américain. Ces pays incluent la Russie, la Chine, l'Iran et la Corée du Nord - qui sont mentionnés directement dans le document - mais le résultat peut également s'appliquer ailleurs, selon un autre ancien responsable. "La Maison Blanche voulait un moyen pour riposter", a expliqué le second ancien responsable. "Et c'était la façon de le faire."

Ce fut une autre mesure stupide prise par l’administration actuelle. Laisser la CIA mener une guerre sans surveillance contre l’infrastructure de base d’autres pays reviendra probablement la hanter :

Ce dispositif a permis à la CIA d'endommager plus facilement les infrastructures critiques des adversaires, telles que les usines pétrochimiques, et de s'engager dans le type d'opérations de piratage que les hackers russes et WikiLeaks ont popularisées, dans lesquelles des masses de documents, ou de données volées, sont stockées, puis divulguées à des journalistes ou affichées sur Internet. Il a également autorisé l'agence à mener des opérations perturbatrices, qui étaient auparavant largement interdites, contre des organisations comme les banques et autres institutions financières.

Un autre changement clé de ce dispositif est qu'il a réduit les exigences en matière de preuve, qui limitaient la capacité de la CIA à mener des cyber-opérations secrètes contre des entités telles que les médias, les organismes de bienfaisance, les institutions religieuses ou les entreprises censées travailler pour le compte des services de renseignement étrangers des adversaires, ainsi que des personnes affiliées à ces organisations, selon d'anciens responsables. ...
La CIA n'a pas perdu de temps pour exercer ses nouvelles libertés acquises sous Trump. Depuis que l'autorisation a été signée il y a deux ans, l'agence a effectué au moins une dizaine d'opérations qui figuraient sur sa liste de souhaits, selon cet ancien responsable. «Cela a été une combinaison d'opérations destructrices - incendies et explosions - et aussi la diffusion publique de données : des fuites ou des actions qui ressemblent à des fuites.»

Une telle latitude, dans la définition des objectifs autorisés, entraînera inévitablement des opérations qui devraient être hors des limites du terrain de jeu.

Le grand danger ici est que toutes les parties peuvent jouer à de tels jeux. Les États-Unis n’ont pas le monopole, ni même un grand avantage, dans la conduite de cyber-guerres. Ils sont en fait plus vulnérables que les autres. Edward Snowden a fourni la preuve que la NSA n’est pas en mesure de protéger ses propres secrets. Wikileaks a publié, dans sa livraison Vault 7, la collection d’outils secrets de cyberattaque de la CIA. Si même la NSA et la CIA ne peuvent pas protéger leurs systèmes, on ne peut qu’imaginer à quel point la situation en matière de sécurité est mauvaise dans les institutions privées comme les banques américaines, les médias, les organisations caritatives, les institutions religieuses ou les entreprises.

Si la CIA cible de telles institutions dans d’autres pays, les contre-attaques similaires deviennent légitimes.

Les opérations de la CIA comme l’explosion de Natanz ne font qu’augmenter l’instabilité. L’Iran dispose d’autres installations où il peut assembler ses centrifugeuses. L’attaque n’entravera pas sa progression dans les technologies d’enrichissement. Mais l’explosion a levé le soupçon, en Iran, que les inspecteurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique, qui visitent ces installations, sont des espions dirigés par les États-Unis. En conséquence, l’Iran pourrait limiter son accès à ses sites nucléaires. Cela diminuerait à nouveau la connaissance de ce que l’Iran fait ou ne fait pas dans ses installations nucléaires.

Cela ne devrait être dans l’intérêt de personne.

Moon of Alabama

Traduit par jj, relu par Hervé pour le Saker Francophone

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