Sémantique des partis


Par Dmitry Orlov – Le 30 mai 2019 – Source Club Orlov

OrlovAprès avoir passé un bon moment à m’émerveiller des résultats des récentes élections du Parlement européen, je suis parvenu à une conclusion quant à l’orientation de tout cela. Dans le passé, le mot anglais « party » avait deux significations distinctes :

  1. Un rassemblement social d’invités, généralement autour d’un repas, d’une boisson et d’un divertissement ;
  2. Un groupe politique officiellement constitué, opérant généralement sur une base nationale, qui se présente aux élections et tente de former un gouvernement ou d’y prendre part.

Par le passé, les partis politiques étaient fondés sur une idéologie qui leur permettait de formuler des programmes et des plans d’action. Toutes ces choses étaient discutées au cours de débats au sein des partis et de polémiques entre partis dans la presse. Il s’agissait d’institutions durables, souvent à la limite de l’austère, qui ont persisté pendant des décennies. Les fêtes sociales, d’autre part, étaient des occasions joyeuses où les gens se réunissaient pour essayer de s’impressionner mutuellement par leur esprit, leur style, leur sens de la mode et leurs connaissances, où les discussions politiques animées étaient fortement découragées, et qui ne duraient que très rarement plus de deux semaines et se terminaient souvent le soir même lorsque les invités se séparaient en deux ou trois groupes avant de prendre congé.

Ce que ces récentes élections européennes m’ont montré, c’est que ces deux sens se confondent. La moitié des partis politiques qui ont participé à ces élections n’existaient pas il y a cinq ans. Bon nombre d’entre eux ont changé de direction en fonction de celle vers laquelle le vent souffle : La Ligue du Nord en Italie a commencé comme parti séparatiste mais veut maintenant jouer un rôle dans le populisme paneuropéen. Bon nombre d’entre eux ont des orientations idéologiques si confuses qu’elles peuvent paraître schizophréniques : le parti hongrois Fidesz est anti-communiste mais pro-socialiste, contre la centralisation européenne mais pour une Europe unie, contre l’égalité de traitement mais pour la discipline financière allemande et, bien sûr, pour plus d’argent pour Bruxelles et pour une OTAN plus forte. Il semble y avoir une seule chose qui les unit tous, c’est l’opposition à la pensée rationnelle.

De nombreux commentateurs ont souligné que les eurosceptiques ont remporté une victoire majeure alors que les partis libéraux et centristes traditionnels ont perdu beaucoup de sièges. C’est vrai, mais les vrais gagnants ont été toutes sortes de partis verts, qui ont remporté 69 sièges, soit plus que n’importe lequel des trois principaux blocs eurosceptiques. Cela peut sembler une bonne chose pour ceux qui aiment l’idée de sauver l’environnement, mais seulement jusqu’à ce que vous regardiez les détails.

Les partis libéraux et centristes traditionnels ont perdu surtout parce qu’ils sont perdus depuis le début, coincés dans un pays fantasque de poneys volants et de licornes aux pets arc-en-ciel. Ils continent de penser que la conception originale d’une Europe unie est encore exactement ce qu’il faut, à l’exception peut-être de quelques ajustements. Leur population a supplié pour avoir un positionnement différent et cette très grande divergence d’opinion s’est reflétée dans les sondages. C’est parce que la population voit peu de poneys volants ou de licornes, mais est forcée de faire face à la criminalité des migrants, à la baisse du niveau de vie, à la hausse des prix et au dysfonctionnement du gouvernement. Les partis eurosceptiques s’opposent à toutes ces absurdités arc-en-ciel et ces licornes, mais ne sont unis que par leur opposition.

Et puis il y a les Verts. Le mouvement vert a tendance à rassembler les monstres et les inadaptés à peu près aussi efficacement qu’une boule de poils ramasse les peluches. Il est principalement basé sur l’émotivité, à l’exclusion des préoccupations les plus réalistes. Néanmoins, il offre une alternative réaliste car il permet de proposer des actions concrètes. Certaines sont positives, mais la plupart sont négatives.

Les Verts sont en faveur des panneaux solaires et des éoliennes. Ceux-ci sont, bien sûr, géniaux. Les panneaux solaires sont fantastiques parce qu’ils fournissent de l’éclairage lorsque le soleil brille. Les éoliennes sont merveilleuses parce que bien qu’elles ne fournissent pas assez de jus pour faire fonctionner les climatiseurs, elles peuvent alimenter les ventilateurs, mais seulement par temps venteux.

Les Verts sont également contre toutes sortes de choses. Les centrales nucléaires doivent être fermées parce que le nucléaire fait peur. Peu importe que l’industrie nucléaire soit responsable d’un nombre relativement faible de décès par kilowattheure par rapport à l’industrie des combustibles fossiles ou de l’énergie renouvelable ; l’appréciation de tels faits impliquerait de penser avec sa tête, mais ce serait contre les règles, qui dictent où vos sentiments vous mènent. C’est une nécessité pour un mouvement qui a des figures de proue comme la scientifique de renommée mondiale Greta Thunberg, la plus grande autorité mondiale en matière de changements climatiques catastrophiques. Selon elle, n’importe qui peut apporter une contribution positive, par exemple en ne se présentant pas à l’école le vendredi.

Plus inquiétant encore, les Verts ont tendance à penser à toute la Terre, et pas seulement à la petite péninsule qui jaillit de l’Eurasie entre la mer Baltique et la mer Méditerranée, qui est la limite de leur compétence légitime. Ils ont aussi tendance à penser à l’humanité dans son ensemble – et pas seulement à la petite tribu qu’ils sont sensés représenter. Il est donc très facile de les manipuler pour en faire les idiots utiles des mondialistes. Jusqu’à présent, ils se sont opposés à la technologie des OGM, mais voyons combien de temps cela va durer. Et ils sont en faveur d’une migration illimitée – en faveur de la construction d’un califat européen, c’est dire. Une fois ce projet terminé, les Verts pourront se retirer ensemble dans un endroit frais comme la Sibérie, peut-être, si les Russes les y autorisent.

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Voici une carte électorale de l’Europe. Pouvez-vous voir comment cet endroit peut être gouverné sur la base des préférences du fol assemblage de ces partis ? Pouvez-vous voir quelque chose de particulièrement uni à ce sujet, d’un point de vue politique ? Certainement pas moi. Et cela m’amène à penser qu’il ne s’agit pas de partis politiques. Ce sont des fêtes sociales qui ne finissent jamais. Une fois qu’un cycle électoral est terminé, il est temps de faire la fête pour se préparer au prochain. Si une fête n’est pas assez joyeuse, pourquoi ne pas en organiser une autre ?

Pour voir où va l’Europe, nous devrions regarder l’Ukraine. Après tout, le slogan ukrainien est « l’Ukraine est l’Europe » et, conformément à ce slogan, ils essaient d’être plus européens que les Européens eux-mêmes. Lors de leur dernière élection présidentielle, ils se sont surpassés, ayant élu un comédien qui joue le rôle du président à la télévision. Si vous pensez qu’une fois en place, il a cessé d’être comédien et a commencé à agir en tant que président de la deuxième plus grande nation européenne (après la Russie), vous auriez tort : il continue à jouer au président à la télévision en tant que comédien. (En fait, quelque chose a changé : ses scénaristes suivent maintenant les ordres, bien que l’on ne sache pas qui les donne). C’est donc la vague du futur : l’Ukraine est maintenant « gouvernée » (ha-ha !) par un comédien nommé Zelensky.

Sa victoire ouvre la voie aux autres. En particulier, la chanteuse ukrainienne Olga Polyakova explore actuellement ses options en politique. Pensez à elle comme une Angela Merkel beaucoup plus jeune, beaucoup plus jolie ; dans cinq ans, ce sera peut-être à son tour de « gouverner » (ha-ha !) l’Ukraine. Évidemment, elle veut organiser une fête, parce que tout le monde aime faire la fête ! Un nom possible pour son parti est POPA, abréviation de Polyakova Party, qui signifie aussi « cul » en russe. En effet, son cul n’est pas mal. Si les Américains peuvent passer une bonne partie d’une décennie enchantés par le cul de Kim Kardashian, pourquoi pas celui d’Olga ?

Alors, qui dirige l’Ukraine ? (Indice : ce n’est pas Zelensky). Et qui dirige l’Europe ? (Indice : ce n’est pas le Parlement européen). Peut-être qu’un jour vous le découvrirez. En attendant, continuez à faire la fête jusqu’à ce que vous tombiez, parce que c’est ça la démocratie. Pour lancer votre fête/parti (politique), voici Olga.

Les cinq stades de l'effondrementDmitry Orlov

Le livre de Dmitry Orlov est l’un des ouvrages fondateur de cette nouvelle « discipline » que l’on nomme aujourd’hui : « collapsologie » c’est à-dire l’étude de l’effondrement des sociétés ou des civilisations.

 

Traduit par Hervé, relu par Catherine pour le Saker Francophone

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