Le 11 mai 2015 – Source Moon of Alabama
L’article de Hersh sur le meurtre d’Oussama ben Laden est vilipendé par les habituels journalistes-aux-ordres des médias dominants. Ils ont cru et rapporté la version que la Maison Blanche et la CIA leur avait donnée. Reconnaître que Hersh a largement raison les embarrasserait trop.
Mais ils auraient pu être plus prudents. Ce que dit Hersh n’est pas nouveau. C’est à peu près la même chose que ce que R.J. Hillhouse a dit en 2011. Ce qu’elle dit a été également largement confirmé par l’ancien brigadier pakistanais FB Ali sur le site de Pat Lang.
Hillhouse est furieuse, et à juste titre, que Hersh ne mentionne pas son article :
Le 7 août 2011, j’ai écrit, entre autres:
- La version des États-Unis sur la façon dont ils ont trouvé Ben Laden est une fiction.
- Osama Ben Laden a été livré aux États-Unis par un informateur, un officier de l’ISI de grade intermédiaire – qui voulait la récompense de 25 millions de dollars promise par le programme Récompenses pour la justice.
- Le service de renseignement pakistanais – ISI – protégeait Ben Laden.
- L’argent saoudien finançait le maintien en captivité de Ben Laden par ISI.
- Les États-Unis ont menacé le Pakistan d’interrompre leur aide financière s’il ne coopérait pas à une opération américaine contre Ben Laden.
- Les généraux pakistanais, Kiyani et Pacha, ont été impliqués dans l’opération américaine qui a tué OBL.
- Le Pakistan a retiré ses troupes de la zone d’Abottabad pour faciliter le raid américain.
- L’administration Obama a trahi les responsables pakistanais qui avaient coopéré.
- L’administration Obama a eu du mal à expliquer le crash de l’hélicoptère quand sa version initiale d’une frappe de drone a avorté.
Tout cela fait sens, et je ne crois pas que Hersh se contente de simplement la plagier pour en arriver là, car tout est maintenant confirmé par ses sources.
Le grand récit héroïque des SEAL [Forces spéciales de la marine US], l’affirmation de la CIA que «la torture avait permis de retrouver Ben Laden» et toutes les autres sottises qui ont été racontées sur cet événement étaient de la propagande.
Mais on peut se demander pourquoi l’histoire sort maintenant. Il est certain qu’elle donne une mauvaise image de la Maison Blanche. Elle donne aussi une mauvaise image des généraux pakistanais, mais seulement aux regards des Saoudiens. Mais elle donne surtout une mauvaise image des Saoudiens – des gens qui ont financé Ben Laden et payé les Pakistanais pour le garder prisonnier. Qui peut-y avoir intérêt ?
Comme par hasard, un article du NYT consacré aujourd’hui [le 11 mai 2015, NdT] au nouveau roi saoudien nous donne quelques indices :
En augmentant le rôle régional du royaume, le roi Salman risque d’aggraver le conflit avec l’Iran, ce qui provoquerait davantage d’instabilité. Et son soutien aux islamistes pourrait finir par donner beaucoup de pouvoir aux extrémistes, tout comme le soutien des Saoudiens aux djihadistes afghans, il y a quelques décennies, a contribué à créer Al-Qaïda.
[…]
Le roi Salman a la réputation de travailler avec les islamistes. Il y a quelques dizaines d’années, il a joué un rôle de pointe dans la recherche et le financement des djihadistes qui allaient en Afghanistan, en Bosnie et ailleurs.
Salman vient de snober Obama en déclinant son invitation à Camp David. Il ne tient pas compte du conseil des États-Unis d’arrêter les bombardements au Yémen. Quelqu’un essaie-t-il de faire pression sur lui ?
Il est toujours intéressant de voir de tels faits – l’article de Hersh, le récit du NYT sur le financement d’al-Qaida par Salman et la résistance de ce dernier aux ordres de la Maison Blanche – se produire tous au même moment. Est-ce seulement une coïncidence ou cela a-t-il été voulu ?
Traduction : Dominique Muselet pour le Saker Francophone