Par Moon of Alabama – Le 20 octobre 2018
On a demandé au roi d’Arabie saoudite de maintenir son fils, Mohammad bin Salman, en position de prince héritier. Il est largement admis que le prince MbS a ordonné le meurtre de Jamal Khashoggi dans le consulat d’Arabie saoudite à Istanbul. Les Saoudiens admettent aujourd’hui que Khashoggi a été assassiné. Deux lèche-bottes du prince héritier sont offerts comme pions sacrificiels.
Dix-sept jours après avoir affirmé que Khashoggi avait quitté le consulat en vie, les Saoudiens ont reconnu qu’il avait été tué là-bas. Mais ils continuent de mentir sur ce qui s’est réellement passé :
Dans un communiqué publié samedi matin à Riyadh, la capitale saoudienne, les Saoudiens ont affirmé qu’un certain nombre de suspects anonymes s’étaient rendus au consulat pour rencontrer Khashoggi, « car il y avait des indications sur son retour éventuel » en Arabie saoudite.
«Les discussions qui ont eu lieu. . . ne se sont pas déroulées comme prévu et se sont mal terminées», a poursuivi le communiqué, aboutissant à un « combat et une querelle » et enfin une « bagarre » qui a conduit à la mort de Khashoggi. Les suspects anonymes ont alors tenté de « dissimuler et de couvrir ce qui s’était passé », a déclaré le gouvernement saoudien, sans donner plus de précisions.
Traduction : « Khashoggi a commencé une bagarre avec les quinze gars que nous avons envoyés pour lui demander gentiment de rentrer à la maison. Malheureusement, il est tombé sur la tronçonneuse et s’est coupé la tête. »
Le prince héritier lui-même ne savait évidemment rien à ce sujet, affirment des sources saoudiennes :
“Il n’avaient pas spécifiquement l’ordre de le tuer ou même de le kidnapper », a déclaré la source, parlant sous condition d’anonymat et ajoutant qu’il y avait un ordre permanent de ramener dans le pays les gens qui critiquent le royaume.
«MbS n’était pas au courant de cette opération et n’a certainement pas ordonné l’enlèvement ou le meurtre de quiconque. Il aura certainement été informé de l’instruction générale de demander aux gens de revenir au pays», a déclaré la source, en utilisant les initiales (MbS) du prince héritier Mohammed bin Salman.
La source a indiqué que ce qui était arrivé corps de Khashoggi n’était pas clair après sa remise à un coopérateur local, mais qu’il n’y en avait aucune trace au consulat.
Bon… Personne n’a dit que le corps se trouvait au consulat. Il est soupçonné de se trouver chez le consul, qui est un bâtiment différent et que la police turque n’a pas été autorisée à perquisitionner. Où est-il enterré ?
Deux conseillers du prince héritier saoudien ont été désignés comme lampistes. Ils seront généreusement récompensés. L’un est son conseiller aux médias, Saud al Qahtani, le Steve Bannon à la cour du prince héritier :
SaadAbedine @SaadAbedine – 21h30 utc – 19 octobre 2018
Saud Al Qahtani, conseiller très influent auprès de #MBS au sein de la Cour royale, réagit à son expulsion après le meurtre de @ JKhashoggi par deux tweets qui ressemblent à un discours d’acceptation d’un Oscar … « J’adresse mes sincères remerciements et ma gratitude au #Prince héritier du Royaume Saoudiens »
L’autre type qui se trouve dans une nouvelle villa est le chef adjoint des services de renseignement, le général major Ahmad al-Assiri. Un article paru vendredi dans le New York Times l’avait déjà désigné comme un lampiste probable.
Il y a aussi des victimes collatérales :
Le gouvernement saoudien a annoncé qu’il avait arrêté 18 personnes non identifiées et limogé deux hauts responsables soupçonnés d’être impliqués dans l’opération.
…
Le gouvernement saoudien a déclaré qu’il faudrait encore un mois pour mener à bien une enquête complète, qui sera supervisée par Mohammed en personne.
Mohammed constatera que Mohammed n’a rien à voir avec le problème. Est-ce qu’il s’attend vraiment à s’en tirer avec ça ? Tout dépend du président turc Erdogan. Le professeur Abukhalil soupçonne qu’un accord a été conclu :
asad abukhalil a ajouté l’aperçu @asadabukhalil 4:21 utc – 20 Oct 2018
Soudainement, comme par hasard, les médias du régime saoudien ont un ton remarquablement positif envers la Turquie. Un accord a été conclu.
Ce n’est pas sûr cependant et ce serait inhabituel pour Erdogan. Il aime marchander et faire durer n’importe quel accord le plus longtemps possible. Nous saurons à coup sûr dans quelques jours. Si l’offre proposée était insuffisante, les fuites du côté turc recommenceront. Qu’est-ce que les Saoudiens et les Américains sont disposés à lui donner ?
C’est la position américaine qui a amené les Saoudiens à changer d’histoire. Jeudi, le ton de Trump à propos de l’affaire avait changé. Auparavant, il avait publiquement douté que quelque chose s’était passé. Après sa rencontre avec le secrétaire d’État Pompeo, qui venait de rentrer de Turquie et d’Arabie saoudite, Trump a déclaré croire que Khashoggi était bel et bien mort. Les Turcs ont dû passer la cassette audio du meurtre à Pompeo ou à un membre de son entourage. The Post rapporte :
Des responsables de la CIA ont écouté un enregistrement audio qui, selon des responsables turcs, prouverait que le journaliste avait été tué et démembré par une équipe d’agents saoudiens dans le consulat, selon des personnes proches du dossier. Si cet enregistrement était vérifié, il serait difficile pour la Maison Blanche d’accepter la version saoudienne selon laquelle le décès de Khashoggi était en réalité un accident.
L’État profond aux États-Unis et au Washington Post, où Khashoggi a écrit ses chroniques, ne sera pas satisfait du camouflage désormais proposé. Ils veulent voir MbS (et son ami Jared Kushner) partir. Le lobby sioniste et le président Trump voudront que les deux restent. Mais le public et le Congrès pourraient ne pas lâcher l’affaire :
Le sénateur républicain Lindsey Graham, un allié influent de Trump, a déclaré qu’il doutait de la nouvelle explication des autorités saoudiennes. « Dire que je suis sceptique quant au nouveau récit saoudien à propos de M. Khashoggi est un euphémisme », a-t-il tweeté.
Bob Menendez, membre du Parti démocrate, à la tête de la commission des relations extérieures du Sénat a appelé à des sanctions, affirmant que « nous devons maintenir la pression internationale » sur le royaume.
Les Saoudiens doivent encore élaborer un meilleur narratif. L’actuel n’est pas suffisant. La question la plus importante à laquelle on aurait dû répondre à ce jour est la suivante : où est le corps démembré ?
Compliquant le discours officiel, Ali Shihabi, responsable du groupe de réflexion pro-saoudien Arabia Foundation, qui serait proche du gouvernement, a tweeté « Khashoggi est mort d’un étouffement lors d’une altercation physique, pas d’une bagarre. », citant une source majeur.
Mais des médias turcs pro-gouvernementaux ont affirmé à plusieurs reprises que Khashoggi avait été torturé et décapité par un groupe saoudien à l’intérieur de la mission diplomatique, bien que la Turquie n’a pas encore divulgué les détails de son enquête.
« Chaque récit successif présenté par les Saoudiens pour expliquer ce qui est arrivé à Khashoggi met leur crédulité à rude épreuve », a déclaré à l’AFP Kristian Ulrichsen, chercheur au Baker Institute de la Rice University, aux États-Unis, ajoutant « spécialement parce que les Saoudiens sont toujours incapables ou réticents à produire l’un des éléments de preuve – un corps – qui pourrait fournir une réponse définitive dans un sens ou dans l’autre. »
Il est peu probable que le développement d’aujourd’hui marque la fin de cette saga.
MbS est bien avarié. Il ne sera plus jamais considéré comme le « réformateur ». Les hommes politiques et les entreprises occidentales tenteront d’éviter toute association avec lui. Mohammad bin Salman a peut-être bien modernisé le drapeau saoudien. Mais le diabolisme des dirigeants saoudiens est toujours en pleine lumière.
Moon of Alabama
Traduit par jj, relu par Wayan pour le Saker Francophone