Les États-Unis disent qu’Israël a bombardé l’Irak


2015-05-21_11h17_05Par Moon of Alabama − Le 23 août 2019

Le 30 juillet, nous avons écrit : Non, Israël n’a pas attaqué des cibles iraniennes en Irak. Nous avons PEUT-ÊTRE eu tort :

Les journaux israéliens répètent un reportage selon lequel des avions israéliens auraient touché des cibles iraniennes en Irak.

Haaretz : Par un acte majeur, Israël frappe deux fois des cibles iraniennes en Irak 'en utilisant le F-35'
 
Ynetnews : Rapport: Les avions de guerre israéliens ont attaqué des cibles iraniennes en Irak
 
Jerusalem Post : Rapport: Israël a lancé deux attaques sur des cibles iraniennes en Irak en juillet
 
Selon ce dernier:

"L’IAF a utilisé ses chasseurs furtifs F-35i pour frapper deux bases irakiennes utilisées par les forces et les mandataires iraniens pour stocker des missiles balistiques, a rapporté mardi le quotidien saoudien londonien Asharq Al-Awsat."

 
Asharq Al-Awsat appartient à Faisal bin Salman, membre du clan au pouvoir en Arabie. Comme d’autres journaux arabes, il est souvent utilisé pour blanchir la désinformation et la propagande israéliennes, qui se répètent ensuite dans la presse israélienne.

A cette époque, il y aurait eu deux incidents présumés en Irak. Un dépôt de munitions avait explosé le 19 juillet. Une enquête officielle a imputé l’incident à du matériel défectueux. Un deuxième incident a seulement été annoncé, mais ne s’est pas produit.

Depuis lors, il y a eu plusieurs incidents liés aux munitions sur les bases des Forces de mobilisation populaires irakiennes (PMF ou Hashed) :

Maya Gebeily @GebeilyM - 19h24 UTC · 21 août 2019
 
#IRAQ: Au moins quatre incidents survenus au cours du dernier mois dans les bases de Hashed:
 
19 juillet - Amerli ; Les opérations conjointes irakiennes disent que c'était un drone, a déclaré Hashed ; le Pentagone a nié toute implication
28 juillet - Diyala
12 août - Saqr; Le Premier Ministre ordonne une enquête sur des explosions massives
20 août - près d'al-Balad

Après le dernier incident, les dirigeants du PMF ont publié des déclarations contradictoires :

Le chef des forces paramilitaires irakiennes, soutenues par l’Iran, a démenti jeudi la déclaration de son adjoint la veille, dans laquelle il accusait les drones israéliens, et tenait les États-Unis pour responsables d’une série d’attaques contre des bases gérées par les milices.

Faleh al-Fayyadh a déclaré que la déclaration de son adjoint, Abou Mahdi al-Muhandis, ne représentait pas le point de vue des milices principalement chiites connues sous le nom de Forces de mobilisation populaire - ni celui du gouvernement irakien. Al-Fayyadh a affirmé que les attaques sur les bases au cours des dernières semaines "étaient le résultat d'actes organisés par une partie étrangère", mais s'est abstenue de nommer cette partie.

Les responsables américains ont nié que les États-Unis aient joué un rôle dans les explosions. ...

Une enquête du gouvernement, dont copie a été obtenue par Associated Press mercredi, a révélé que l'explosion près de Bagdad avait été provoquée par une frappe de drone.

Al-Muhandis, le chef adjoint du PMF qui gère la boutique, a menacé les forces américaines en Irak de représailles.

Il est probable que sa déclaration a amené des responsables américains à dire au New York Times que les frappes aériennes israéliennes présumées avaient bien eu lieu :

Israël a effectué une frappe aérienne sur un dépôt d'armes en Irak qui, selon des responsables, serait utilisé par l'Iran pour acheminer des armes en Syrie, attaque qui pourrait déstabiliser l'Irak et l'impliquer davantage dans le conflit entre les États-Unis et l'Iran. ...
 
Un haut responsable des services de renseignements du Moyen-Orient a déclaré qu’Israël avait bombardé une base au nord de Bagdad le 19 juillet.
 
Deux hauts responsables américains ont toutefois déclaré qu'Israël avait mené plusieurs frappes ces derniers jours contre des entrepôts de munitions de groupes soutenus par l'Iran en Irak. ...
 
L'attaque israélienne du 19 juillet a touché une base qui, selon un agent responsable du renseignement au Moyen-Orient, avait été utilisée par les Gardes de la révolution iraniens pour transférer des armes en Syrie. La frappe israélienne, lancée depuis l’Irak, a annoncé un responsable, a détruit une cargaison de missiles guidés d’une portée de 125 kilomètres.

L’ “agent responsable du renseignement au Moyen-Orient”, dont il est question ici, est de toute évidence une source israélienne qui peut, ou non, dire la vérité. Israël ne peut lancer des frappes depuis l’Irak que s’il dispose de ressources sur une base américaine ou dans une zone contrôlée par les Kurdes. Al-Muhandis a affirmé que les frappes avaient été lancées à partir de bases américaines :

La déclaration des Forces de mobilisation populaires (FMP), regroupant des groupes paramilitaires majoritairement chiites et musulmans en Irak, soutenus pour la plupart par l'Iran, indique que les États-Unis ont autorisé quatre drones israéliens à pénétrer dans la région, accompagnant des forces US, et exécutant des missions sur le territoire irakien.

"Nous annonçons que les forces américaines sont les premiers et seuls responsables de ce qui s'est passé, et nous les tiendrons pour responsables de tout ce qui se passera à partir d'aujourd'hui", indique le communiqué, signé par le chef adjoint du PMF, Jamal Jaafar Ibrahimi, connu par son nom de guerre, Abu Mahdi al-Mohandes.

La déclaration du PMF intervient un jour après que plusieurs explosions ont frappé une position occupée par un groupe du PMF situé à proximité de la base aérienne de Balad, à environ 80 kilomètres au nord de Bagdad.

Le 16 août, le Premier ministre Abdul-Mahdi a interdit le trafic aérien américain indépendant en Irak :

Les États-Unis ont accepté de se conformer à la demande d'Abdul-Mahdi, ont déclaré des responsables vendredi, en tant qu'"invités à l'intérieur des frontières souveraines de l'Irak".

Quatre jours plus tard, une autre frappe s’est produite.

L’affirmation israélienne selon laquelle l’Iran utilise les bases irakiennes pour transporter des armes en Syrie et au Liban, est douteuse. Depuis des années, l’Iran transporte des armes et des munitions directement en Syrie, ou par bateau. Il n’a pas besoin de les stocker sur plusieurs bases en Irak.

L’ensemble de l’opération, et sa révélation maintenant, semble conçue pour améliorer les chances de réélection du Premier ministre israélien Netanyahou.

Mais il est probable que les incidents auront de graves conséquences pour l’armée américaine en Irak. Le gouvernement irakien subira d’intenses pressions pour expulser les États-Unis du pays. En Irak, on parlait déjà d’acquérir des armes de défense aérienne russe. L’Iran peut aussi vouloir proposer des systèmes appropriés. L’Iran et les Hashed tenteront probablement de se venger des attaques.

Quelque chose dans toute cette histoire paraît louche. Pourquoi la Maison Blanche laisserait-elle faire un tel imbroglio ? Je ne vois rien que les États-Unis pourraient y gagner.

Moon of Alabama

Traduit par jj, relu par Wayan pour le Saker Francophone

   Envoyer l'article en PDF