L’économie chinoise est elle vraiment en difficulté ?


Voici les leçons de l’histoire que la presse ignore.


Par Eamonn Fingleton – Le 11 janvier 2016 – Source UNZ

«Il n’y a, Dieu merci, aucun espoir de corrompre ou d’embrouiller ce journaliste anglais. Mais en voyant ce que cet homme va faire sans être corrompu, il n’y en aura pas besoin.»

C’est ce qu’a écrit Humbert Wolfe, le brillant homme de lettres anglais du début du XXe siècle. Ce qu’il pense des journalistes américains n’a pas été enregistré mais, quand cela concerne des sujets importants, ils se sont probablement montrés encore plus naïfs que leurs collègues anglais.

La naïveté du journalisme américain n’a jamais été aussi évidente que dans la couverture médiatique actuelle de l’économie chinoise. 

Voici probablement la plus grande réussite d’une économie basée sur l’exportation dans l’histoire de l’humanité, pourtant les journalistes américains ont réussi à se persuader qu’elle était dans une telle situation qu’elle nécessitait une dévaluation. CNBC, par exemple, a annoncé l’autre jour que la plupart des experts pensent que le yuan est surévalué d’au moins 10%. Tout cela en dépit du fait que la monnaie chinoise a déjà chuté de plus de 8% face au dollar au cours des deux précédentes années.

Il est vrai que les exportations chinoises ont manqué de tonus ces derniers temps. En novembre, les exportations ont baissé de 3,7% en yuans et, en dollars, la chute est encore plus forte. Mais ce dont il est rarement fait mention est que les exportations chinoises sont une des données les plus volatiles dans l’économie globale. Des récessions à court terme, jusqu’à 20% ou plus, sont fréquentes et ne sont pas du tout significatives de la santé de l’économie chinoise. Ce qui compte sont les tendances à long terme, par exemple un taux de croissance de la valeur en dollars des exportations de plus de 17% par an sur les quinze dernières années. C’est un chiffre vraiment extraordinaire et sa véracité est attestée par les données d’importation des autres pays.

Il importe de dire que, en dépit de ce que les experts médiatiques soutiennent, le risque de dévaluation ne résiste pas à un examen, même superficiel. Après tout un taux de change est là pour assurer que le commerce se fasse dans un équilibre mutuel, juste et avantageux pour les deux parties. Pourtant, pendant toute une génération, le yuan a été si dévalué qu’il a détruit le peu qui restait de la base industrielle américaine, autrefois dominante.

Le résultat a été qu’en 2014, le déficit de la balance commerciale entre les États-Unis et la Chine a atteint $348 milliards. Cela représente la plus grande partie de l’ensemble du solde commercial américain avec le monde entier, qui se chiffre à $389 milliards. Dans le même temps, la Chine a bénéficié d’un solde commercial positif de $220 milliards.

Même face à de tels chiffres, la presse a souvent donné un ton négatif à ses articles sur l’économie chinoise. En fait, de nombreux journalistes ont été si loin qu’ils ont suggéré, en suivant la frange des sinologues cinglés, que le miracle économique chinois n’était qu’un écran de fumée masquant le fait que la Chine est au bord de l’effondrement économique ou du désastre politique, voire des deux.

Les conséquences politiques sont difficiles à envisager. Les rapports sur les problèmes économiques chinois ne sont pas seulement des vœux pieux de l’Américain moyen, ils fournissent aussi aux politiciens une excuse pour procrastiner sur des mesures urgentes de rétorsion contre les tricheries du commerce chinois.

Les autorités chinoises n’auraient pu être plus gâtées par ces circonstances et il semble clair que, pendant de longues années, elles ont clairement mis en avant des mauvaises nouvelles, dans le cadre d’un programme de propagande. (Le Japon le fait aussi, mais c’est une autre histoire.)

La racine du problème médiatique tient à la pauvreté de choix de ses sources. Au lieu de rechercher activement des sources fiables et indépendantes, les journalistes restent plutôt passivement assis, à l’écoute de ce qui se trouve à portée d’oreille. Trop souvent cela veut dire écouter des sources mises en avant par le lobby chinois.

Il me paraît évident que de nombreux sinologues académiques semblent congénitalement pro Pékin. D’autres sont ambitieux et savent que pour accéder à un bon poste dans la future administration présidentielle, ils doivent éviter de dire des choses pouvant gêner le lobby chinois. C’est un lobby largement financé par de grosses compagnies américaines, réalisant une grande partie de leurs productions en Chine. Un des objectifs le plus évident de ce lobby est de garder un yuan faible malgré tout ce que cela implique pour l’avenir du secteur productif américain. Comme ce lobby contrôle une grande partie du financement des études et des enquêtes sur la Chine, il n’a pas de problèmes pour s’assurer que les sinologues américains comprennent bien le message et soient écoutés à leur tour.

Quant aux autres sources, les analystes financiers ou économistes spécialisés sur la Chine, celles-ci sont souvent encore moins fiables que les sinologues universitaires. Elles sont clairement contraintes par le besoin de plaire à leurs clients les plus riches, parmi lesquels certaines filiales du système financier chinois qui ont pris la meilleure place (la Chine est devenue un immense exportateur de capitaux, ce qui est, bien sûr, une bonne nouvelle pour ces firmes de Wall Street qui cherchent les faveurs de Pékin).

Évidemment, quelques unes des sources souvent citées croient vraiment en ce qu’elles racontent. Il existe en particulier une minorité d’observateurs de la Chine, d’opinion d’extrême-droite, qui adorent prêcher l’idéologie américaine du laisser-faire à un Pékin qu’ils croient complètement ignorant. C’est la version Tea Party des sinologues. Ses membres semblent manquer de capacité d’écoute, qualité pourtant essentielle pour comprendre un pays comme la Chine. (Où il faut écouter les non-dits, quelque chose que les gens du Tea Party doivent considérer comme un oxymore). Bien sûr et précisément parce qu’ils se trompent si souvent, de tels sinologues sont considérés par Pékin comme des idiots utiles qui font des merveilles pour laisser les Américains confus et désunis.

Même si l’on n’est jamais sûr si un observateur de la Chine est dans la poche de Pékin ou non, la plupart le sont sans doute. Ils pourraient être horrifiés d’être considérés ainsi, pourtant leur objectif est assez évident, vue la manière dont ils s’auto-censurent. Au lieu de dénoncer les barrières commerciales chinoises, les vols de propriété intellectuelle et la sous-évaluation du yuan, ils préfèrent, d’une manière révélatrice, éviter les discussions franches sur ce sujet.

Observons de plus près quelques problèmes caractéristiques des sinologues. Une recherche, même superficielle, sur internet nous donne un grand nombre d’observateurs de la Chine qui ont vainement prédit l’éclipse, si ce n’est la chute, de l’Empire du Milieu ces dernières années. Bientôt nous allons nous pencher sur Gordon Chang, le roi du groupe des la Chine s’écroule, mais avant, observons quelques autres prétendants au trône.

Une des sources souvent citées est le professeur Michael Pettis, professeur et analyste basé à Pékin. Même si la teneur des commentaires de Pettis varie, il s’est souvent montré très résilient.

Voici, par exemple comment il décrivait l’économie chinoise de 2007 à Associated Press : «Pour l’instant, tout va bien. Tout est pour le mieux… Il est fort probable que nous ayons toutes les conditions pour une crise sérieuse au moment d’un choc frontal. Il existe beaucoup plus de dettes là-bas que ce que nous pouvons imaginer.»

Tout politicien américain qui se serait persuadé de cela n’aurait pu anticiper la suite des évènements. Les exportations de la Chine ont été multipliées par trois, en dollars, au cours des sept années suivantes.

Parmi les sinologues réputés, peu sont aussi directs que Arthur Waldron, professeur à l’université de Pennsylvanie et membre du Council on Foreign Relations. En 2002, il prétendait déjà que l’économie chinoise n’était qu’un trompe l’œil. Dans un article du Washington Post, il a soutenu une théorie excentrique où, en fait de croissance de 6% comme officiellement statué, l’économie chinoise était en train de décroître depuis les années précédentes. Il en concluait que la politique industrielle chinoise était «la recette non pas de la croissance mais de la chute économique».

Une autre sinologue ayant joué un rôle démesuré pour perturber l’opinion américaine est Susan Shirk.  En tant que professeure sur les relations avec la Chine et le Pacifique à l’Université de Californie de San Diego, Shirk reste ce qu’elle a longtemps été : une notable amie de la Chine. Une première indication de son style a été visible en 1994 quand elle a publié Comment la Chine a ouvert ses portes : Le succès politique de la réforme sur l’investissement et le commerce du Parti communiste chinois. Elle a continué comme vice-assistante au secrétariat d’État de l’administration Clinton pour prendre la tête des négociations qui ont abouti à honorer la Chine du titre de nation la plus favorisée pour le commerce.

Sa réputation d’expert sur la Chine vient de son livre édité en 2007 et intitulé La Chine : une grande puissance fragile : Comment la politique intérieure chinoise peut enrayer son développement pacifique. Le livre postule un supposé gros risque de révolution populaire pouvant renverser le régime en place. Les conséquences seraient, selon elle, catastrophiques non seulement pour la Chine mais aussi pour l’Occident. En conséquence elle demande à l’Occident d’accorder un respect exagéré aux dirigeants chinois et aussi de tout mettre en œuvre pour qu’ils restent en place. Et donc cela voulait dire de se retenir de se plaindre des politiques commerciales chinoises.

Quasiment tous les arguments de son livre pourraient être réfutés mais cela demanderait une place que je n’ai pas ici. La première chose à remarquer est sa prétention à dire que l’analyse est basée sur des conversations avec de nombreux hauts dirigeants chinois. Il pourrait bien en être ainsi, mais elle ne s’est évidemment pas posé la question de ce qu’il en était pour eux. Après tout, ils sont passé maîtres dans l’art de rester secrets face à leur propre peuple, alors pourquoi iraient ils ouvrir leurs cœurs à une simple Blanche ?

Pour l’instant, contentons nous de remarquer que depuis des millénaires, les dirigeants chinois se sont montrés experts pour tuer dans l’œuf tout signe de début de révolution. Le dirigeant suprême Deng Xiaoping a perpétué la tradition en brisant brutalement les manifestations de le Place Tienanmen en 1989. De plus, les dirigeants actuels sont encore plus en sécurité que leurs prédécesseurs, car ils peuvent utiliser les moyens modernes de surveillance électronique pouvant signaler encore plus rapidement que dans le passé les signes de troubles sociaux.

Regardons maintenant David Shambaugh, un universitaire de sciences politiques à l’université George Washington. Connu pour ses assertions disant que l’Armée de libération populaire est un tigre de papier, il est devenu ouvertement pessimiste au sujet du système politique chinois, ces dernières années. Un article de 2014, publié dans le journal National Interest, était titré : L’illusion de la puissance chinoise

Puis, en 2015, il réussit à persuader le rédacteur en chef du Wall Street Journal de publier un commentaire intitulé La fin de l’économie chinoise.

Il y écrit : «Le Parti communiste chinois arrive en fin de partie, je le pense, et elle arrive plus vite que ne le pensent certains.» Se référant aux règles du PCC, il ajoute : « Sa chute risque d’être longue, violente et désordonnée. Je ne rejette pas l’éventualité de voir Mr Xi renversé dans une lutte pour le pouvoir ou par un coup d’État.»

Son analyse était faite en termes si mélodramatiques que cela lui a attiré des critiques considérables et pas moins qu’une réfutation point par point de la part de Stephen Harner de Forbes.com (qui, à la différence de Shambaugh, peut revendiquer d’avoir passé sa carrière en Chine).

Le point central de l’analyse de Shambaugh est le présupposé que la lutte anti-corruption de Xi Jinping a dangereusement froissé les susceptibilités de puissances rivales internes.

Comme exemple de la faiblesse de Xi Jinping, Shambaugh raconte qu’au cours d’une visite à la librairie d’un campus universitaire chinois, il a remarqué qu’une pile de pamphlets sur Xi Jinping semblait ne pas être enlevée de là. Cette remarque est largement aussi ridicule que celle d’un visiteur chinois illettré jugeant des chances d’élection d’Hillary Clinton à la hauteur des piles de pamphlets à l’Université de Columbia.

Shambaugh a aussi remarqué  qu’un nombre croissant d’étudiants chinois vont étudier à l’étranger. Ceci, selon lui, à cause d’une peur morbide d’instabilité politique locale. Mais il ne se donne pas la peine de chercher des explications moins sensationnelles. Car, selon les derniers chiffres, les Coréens sont proportionnellement sept fois plus enclins que les Chinois à aller étudier aux États-Unis, et les Taïwanais quatre fois plus enclins. Doit on en déduire que les dangers de troubles politiques sont plus élevés en Corée du Sud ou à Taïwan qu’en Chine ? Le fait est que les étudiants est-asiatiques partent étudier à l’étranger pour diverses raisons plus pragmatiques, notamment la possibilité d’améliorer leur anglais. Cette tendance a aussi été fortement poussée non seulement par la richesse croissante de la population, mais aussi pour les mêmes raisons de facilités de transport et de communication qui ont favorisé la globalisation.

L’argument important soulevé par Shambaugh était que de nombreuses familles chinoises très riches ont acheté des maisons à l’étranger. Mais, comme l’a souligné Stephen Harner, ce n’est pas vraiment une nouvelle. Des générations de Chinois l’ont fait. La seule différence de nos jours est qu’ils ont beaucoup plus d’argent à dépenser. Bien sûr, cela attire l’attention et on en parle même dans la presse.

Le plus réputé des membres du club de l’écroulement chinois est sûrement Gordon Chang, un avocat sino-américain. Depuis qu’il a publié La Chine va s’écrouler en 2001, il n’a pas eu un mot positif sur l’avenir du pays. Même si, entre 2001 et 2014, la Chine a augmenté ses exportations de 267 à 2331 milliards de dollars, huit fois plus, grâce à un incroyable taux moyen de croissance des exportations de 18,1%. Cela sous-entend une augmentation de la productivité que peu, voire aucune autre nation, n’a égalé.

Contacté récemment, Chang continue à prophétiser la décadence chinoise. Mais si la Chine a réussi à échapper à l’Armageddon économique prédit dans son livre plus de 14 ans auparavant, qu’en est il aujourd’hui ? Chang prétend que maintenant la Chine fait face à la terrible concurrence de l’Inde. Tout comme la Chine en développement a détruit l’économie américaine, l’Inde en développement va, paraît-il, menacer de la même façon l’économie chinoise.

Pour un non-économiste, surtout ceux qui ne connaissent pas l’Asie, l’argument peut sembler tenir la route. En réalité, l’argument de Chang est basé sur l’une des erreurs classiques en économie, l’idée que le succès est un jeu à somme nulle. C’est-à-dire que pour que quelques nations gagnent d’autres doivent perdre. C’est une idée malthusienne qui ne prend pas en compte le fait que dans des conditions modernes normales, la croissance économique est un univers en expansion. Pensez, par exemple, à la croissance scandinave. Bien que la Norvège, la Suède et le Danemark soient passé en haut du classement mondial, cela n’a posé aucun problème en retour pour un pays comme l’Allemagne.

Ce que Chang semble sous-entendre est qu’il sera donné carte blanche pour utiliser les mêmes méthodes agressives contre la base industrielle chinoise que celles utilisées par la Chine contre la base industrielle américaine. Par contre, il omet de noter que Washington n’a pas réagi contre cela, permettant à la Chine de s’en sortir malgré l’équivalent économique d’un meurtre. Entre autres, la Chine a extorqué des technologies de production modernes aux États-Unis. On a déclaré aux entreprises américaines que pour vendre leurs produits en Chine, elles devraient les fabriquer sur place avec leurs meilleures technologies. On peut dire que de tels diktats ont ignoré les obligations de la Chine envers les accords commerciaux. Il y peu de chance que l’Inde soit autorisée par la Chine à utiliser de telles méthodes d’extorsion.

En fait, le seul point commun entre l’Inde et la Chine est leur adresse asiatique. Au niveau des fondamentaux économiques et politiques, c’est le jour et la nuit. Par exemple, au niveau commercial, l’Inde reste une puissance négligeable, en dépit d’années de verbiage économique occidental. Selon les derniers chiffres, les exportations indiennes étaient neuf fois plus faibles que les chinoises et l’écart semble continuer à se creuser. (Depuis 2006, les exportations indiennes ont à peine doublé alors que celles de la Chine ont plus que quadruplé).

Point crucial, le taux d’épargne indien est à peine plus de la moitié de celui de la Chine. Pire, les autorités indiennes semblent manquer de l’autorité nécessaire pour l’augmenter. (Dans Les mâchoires du dragon, un livre que j’ai publié en 2008, j’ai montré comment la Chine a mis en place des moyens de contrôle autoritaires pour contenir la consommation intérieure, augmentant ainsi mécaniquement le taux d’épargne.)

Une autre grande différence est la balance commerciale chinoise qui a accumulé d’énormes surplus pendant des décennies alors que l’indienne reste obstinément dans le rouge.

Un autre argument de Chang est que la fuite des capitaux risque de détruire l’économie chinoise. Même si, là encore, il peut impressionner un non-économiste, il faut aussi voir au delà des apparences, car la Chine est nécessairement un grand exportateur de capitaux, conséquence de sa balance commerciale excédentaire. (Arithmétiquement, chaque dollar de plus dans la balance commerciale représente un dollar de capital qui sera, d’une manière ou d’une autre, réexporté.)

Bien sûr, les autorités chinoises ont souvent parlé de façon à faire croire qu’elles étaient inquiètes au sujet de la fuite de capitaux. Mais il semble que de tels discours soient surtout destinés à détourner l’attention des interventions de la Banque populaire chinoise [la banque centrale, NdT] pour garder un yuan sous-évalué.

Ce qui est sûr, c’est que si les autorités chinoises peuvent contrôler internet et la presse, elles peuvent d’autant plus contrôler les capitaux (rien qu’en tenant fermement en main une poignée de banques importantes dont la plupart sont, en plus, des banques publiques). Ce qui est avéré est qu’historiquement d’autres pays bien plus libéraux, comme la Grande Bretagne au milieu du XXe siècle, n’ont eu que peu de difficultés à appliquer un contrôle des changes efficace. Pourtant les possibilités d’investissement pour les Britanniques étaient bien plus grandes que celles de la Chine maintenant. En outre, les performances économiques de la Grande-Bretagne étaient constamment anémiques alors que le taux de croissance de la Chine aux alentours de 6% reste un des plus élevés au monde. Dans le cas, peu probable, où la fuite de capitaux chinois commence à devenir un réel problème, les autorités ont une gamme de solutions disponibles, dont un système de surveillance électronique bien plus intrusif que les systèmes occidentaux, sans parler de celui de l’Angleterre des années 1960.

Il est vraiment temps que la presse américaine se souvienne des ses engagement traditionnels d’information équilibrée et retrouve son bon sens. Heureusement, les membres de la presse ne sont pas tous incapables de tirer les leçons de l’expérience.

Je laisserai le dernier mot à Gideon Rachman du Financial Times. Il va droit au cœur du problème dans un article bien équilibré datant de 2012, en écrivant :

Il est évident que la Chine fera face à des défis politiques et économiques énormes dans l’avenir. Pourtant, il est très peu probable que ces instabilités fassent dérailler le train chinois. Quels que soient les vœux pieux de certains à l’Ouest, nous n’allons pas nous réveiller un jour et soudainement nous apercevoir que le miracle chinois était en fait un mirage.

Mon propre scepticisme à propos de la Chine est tempéré par le fait que des analystes occidentaux ont prédit la fin du boum chinois quasiment depuis qu’il a démarré. Au milieu des années 1990, en tant que rédacteur en chef de The Economist, je lisais sans arrêt des articles sur la fragilité inhérente à la Chine, que ce soit des prédictions catastrophiques sur la fragilité du système bancaire ou des rapports sur un combat des chefs enragé à le tête du Parti communiste chinois. En 2003, j’ai acheté le fameux livre de Gordon Chang, La Chine va s’écrouler, qui prédisait que le miracle chinois n’avait plus que cinq ans à vivre, au maximum. Donc maintenant, quand je lis que les banques chinoises sont au bord du gouffre, que la campagne est au bord de la révolution, que les villes sont au bord du désastre écologique et que la classe moyenne est au bord de la révolte, je suis tenté de bâiller et de tourner la page. J’ai déjà lu tout cela autrefois.

Eamonn Fingleton

Article Original paru sur UNZ

Eamonn Fingleton a écrit sur l’économie et les finances d’Asie orientale, en étant basé à Tokyo pendant 27 ans. Il a rencontré le dirigeant chinois Deng Xiaoping en 1986 et a prévu le crash financier et immobilier dans un article d’Euromoney, en septembre 1987. Il est l’auteur d’un livre intitulé Insupportable : comment les dogmes économiques détruisent la prospérité américaine. Il peut être joint ici : efingleton@gmail.com

Note du Saker francophone

Voici un extrait de l’œuvre de Sun Tzu, lu en Chine mais aussi par beaucoup de militaires occidentaux : De la ruse

Pour Sun Tzu, tout l’art de la guerre est basé sur la duperie. L’utilisation de la ruse consiste, dans l’action, à toujours se comporter à l’inverse du sens commun, pour créer la surprise. Il faut paraître faible quand on est fort, fort quand on est faible, loin quand on est proche, proche quand on est loin. Éviter la force de l’adversaire et attaquer ses faiblesses. Maintenir ses forces en mouvement pour dissimuler ses intentions. Calmer le jeu au moment où l’on s’apprête à frapper, se montrer ferme lorsqu’on veut éviter l’affrontement. Éviter de se répéter pour se rendre imprévisible. Toutes ces conduites paradoxales sont l’essence même de la ruse qui permet à l’intelligence de l’emporter sur la force.

Traduit par Wayan, relu par nadine pour le Saker Francophone.

   Envoyer l'article en PDF