Le piratage COVID commis par Trump


un acte révolutionnaire de nationalisme économique face à la mondialisation


Par Andrew Korybko − Le 10 avril 2020 − Source oneworld.press

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La redirection pratiquée par les États-Unis d’objets médicaux, tels des masques et d’autres fournitures anti-COVID de première importance, détournés de leurs destinataires originels et récupérés au profit des citoyens étasuniens n’est pas un acte de « piraterie » moderne comme on le présente souvent, mais un acte révolutionnaire de nationalisme économique, en défiance de la mondialisation. Ces actes révèlent la vraie nature néo-réaliste des relations internationales, et démontrent que le pouvoir géopolitique constitue le facteur ultime déterminant qui sera vainqueur une fois que le mensonge du système néolibéral soi-disant « fonctionnant selon des règles » aura été exposé au grand jour.

Nationalisme économique vs mondialisation

Trump est critiqué sans pitié par à peu près l’ensemble de la presse mondiale, après avoir doublé la mise sur sa politique « America first », exigeant que les compagnies étasuniennes établies à l’étranger accordent la priorité aux objets de santé, tels masques et autres équipements fondamentaux permettant la lutte contre le COVID, à destination des citoyens étasuniens plutôt qu’à leurs clients originels ailleurs dans le monde. Cela peut dans certains cas aller jusque saisir ces équipements dans des pays étrangers, pour s’assurer qu’ils parviennent au peuple étasunien quoi qu’il arrive. En parallèle avec cela, le président a également interdit aux sociétés médicales établies aux États-Unis de vendre certains de leurs produits à l’étranger, à des clients tels que le Canada, créant l’impression pour de nombreux observateurs dans les médias que les États-Unis « font des stocks » des équipements pouvant sauver des vies, aux dépens du reste de la population mondiale. Mais cette interprétation est extrêmement trompeuse, car elle rate le fait central : les politiques menées en ce moment par Trump constituent en réalité un acte révolutionnaire de nationalisme économique, en défiance de la mondialisation, et elles révèlent la vraie nature néo-réaliste des relations internationales, et prouvent que le pouvoir géopolitique constitue le facteur ultime déterminant qui l’emportera une fois que les mensonges du système néo-libéral « fondé sur des règles » auront été exposés au grand jour.

La morale, l’éthique, et les principes ne pèsent rien dans un monde néo-réaliste piloté selon les intérêts de chacun

Analyser posément la situation, sans faire preuve d’attachement émotionnel ni de jugement de valeur (c’est chose qui est très difficile pour la plupart des gens, en particulier les gens qui s’exposent à la communauté des médias alternatifs), il n’y a absolument aucun mal sur le principe à voir un dirigeant national faire tout ce qu’il peut pour assurer que son peuple ait accès aux équipements d’urgence. Après tout, qu’il s’agisse de Trump ou du président Poutine, ces personnes ont pour tâche de faire passer leur propre peuple en premier en cas de problème ; ces dirigeants n’ont pas été choisis pour diriger la « communauté internationale » mais pour œuvrer aux intérêts de leurs États souverains respectifs. Mais le problème est que de nombreux dirigeants, et leurs prédécesseurs avant eux, ont passivement contribué, ou supporté tout de go l’envoi à l’étranger d’industries stratégiques vers d’autres pays afin de tirer bénéfice des économies immédiates livrées par la mondialisation. Avec le recul, on constate que cela s’est avéré constituer une erreur et une vision de court-terme, présentant des implications à long terme possiblement mortelles, comme on ne le voit que trop bien actuellement. Dès lors que des pays ne produisent pas de quoi répondre à leurs besoins essentiels, ils dépendent évidemment des autres pour se les procurer, et cela crée une opportunité pour une tierce partie, comme ici les États-Unis, d’interférer dans les livraisons.

La libération des esprits des foules de l’endoctrinement néo-libéral

Au vu de la situation, ce sont les forces les plus puissantes du jeu — qu’il s’agisse du client ou de la société commerciale, l’État qui héberge cette dernière pour produire ses marchandises, ou la tierce partie qui décide d’intervenir — qui sortiront victorieuses ; tel est actuellement le cas des États-Unis. Il est devenu « politiquement incorrect » d’affirmer ouvertement cette observation, la plus grande partie du monde se retrouvant dans l’illusion manipulatoire que les Relations internationales seraient influencées de plus en plus par le modèle néo-libéral, et par des « intérêts partagés », soutenus par des « règles convenues », théoriquement supérieures à la force brute. La réaction indignée de la plupart des gens à l’étranger après les dernières actions étasuniennes, étiquetées comme un soi-disant « acte de piratage de masques », démontre le niveau de réussite que l’endoctrinement à atteint à faire croire aux gens que le monde fonctionne de manière totalement différente de la réalité. Il s’agit d’une tromperie délibérée d’individus bien intentionnés, menée par une structure de pouvoir mondialisée, dont l’intérêt est de duper les masses pour continuer de manipuler les esprits, et s’assurer de maintenir un contrôle indéfini sur leurs vies.

Le nationalisme économique est la fois justifié, et victorieux

Il ne reste plus aucun doute quant au fait que la mondialisation présente une menace latente, mais néanmoins extrêmement grave en matière de sécurité nationale, durant les périodes de crise, dès lors qu’un État n’est plus en mesure de se procurer les produits stratégiques qu’il a volontairement décidé de laisser produire à l’étranger. La prise de conscience de ce fait indiscutable justifie la lutte économique nationaliste de Trump menée au cours des quelques dernières années en vue d’encourager les sociétés de son pays (parfois sous la menace de barrière douanières très conséquentes) de prioriser la production d’autant de biens que possible sur le territoire étasunien. Au vu de ces circonstances, ce n’est pas la faute de Trump, mais bel et bien celle des dirigeants ayant volontairement laissé échapper leurs capacités de production vers d’autres pays, pour en tirer des bénéfices immédiats, si les États-Unis s’activent à « pirater » des équipements médicaux anti-COVID ; on ne peut pas reprocher au dirigeant étasunien de mettre son propre peuple en premier (coûte que coûte, et pour le « meilleur » et pour le « pire », selon le point de vue de chacun), alors qu’il s’agit tout simplement de sa toute première responsabilité, vu le mandat qui est le sien (et qui reste celui de ses homologues respectifs également). Ceux qui s’indignent de ce qui se produit subissent encore les affres d’une dissonance cognitive, après que Trump leur a asséné une leçon bien méritée de réalité néo-réaliste.

Trump ferait quelque chose de mal si les médias globalistes l’encensaient

Il est irréaliste d’imaginer un dirigeant, disposant des capacités de se procurer des équipements médicaux supplémentaires pour son peuple, en pleine montée d’une crise qui ne fait que s’empirer, excluant cette option du simple souci de la soi-disant « solidarité internationale », surtout quand la plus grande partie du monde méprise déjà son pays tel qu’il est (fût-ce pour de « bonnes » ou de « mauvaises » raisons). Toute « louange » qu’il recevrait, surtout s’il s’agissait des États-Unis comme dans le cas présentement discuté, serait absolument insincère et destinée à simplement jouer de son ego, pour qu’il continue à abandonner encore plus de capacités stratégiques de son propre pays, aux dépens de son propre peuple. De fait, on peut affirmer que la raison pour laquelle Trump ramasse autant de critiques du fait de sa politique « America First » est que la plupart des autres pays n’ont simplement pas les moyens de l’imiter, quand bien même le souhaiteraient-ils, ce qui fait que leur réaction est avant tout motivée par la jalousie : ils savent qu’ils ne feraient jamais eux-mêmes ce qu’ils prétendent attendre de lui, c’est-à-dire laisser passer une opportunité d’aider son peuple, sauf à se trouver eux-mêmes complètement endoctrinés par l’idéologie néo-libérale/mondialiste.

Vers une révolution nationaliste économique à l’échelle mondiale?

L’élite mondiale ne peut rien faire d’autre que se plaindre en forçant la voix devant les actions de Trump, dans l’espoir que ses actions révolutionnaires de nationalisme économique contre la mondialisation n’éveillent pas l’esprit des masses de la torpeur néo-libérale provoquée par leur propagande, face à la réalité néo-réaliste des relations internationales. Mais les peuples pourraient avoir déjà compris que le monde fonctionne selon des principes bien différents que ceux auxquels on les a endoctrinés à croire : il y a là de quoi entretenir la création de mouvements populistes venant de la base, dans le monde entier, provoquant une agitation afin que leurs propres gouvernements prennent des mesures de nationalisme économique similaires à celles de Trump. Ce scénario est le pire que puisse imaginer l’élite mondiale en ce moment, car elle a passé les quatre dernières années à faire tout ce qu’elle pouvait pour jeter l’opprobre sans relâche sur cette perspective néo-réaliste, la qualifiant de « raciste », de « fasciste », et de « xénophobe », en raison de la menace existentielle qu’elle pose à leur structure de pouvoir internationale. La situation serait d’autant plus dangereuse pour ces élites si une révolution nationaliste économique à l’échelle mondiale surgissait, comme conséquence totalement inattendue de l’ordre mondiale du COVID qu’ils veulent mettre en œuvre une fois passée la guerre mondiale contre le coronavirus.

Andrew Korybko est un analyste politique américain, établi à Moscou, spécialisé dans les relations entre la stratégie étasunienne en Afrique et en Eurasie, les nouvelles Routes de la soie chinoises, et la Guerre hybride.

Traduit par José Martí, relu par Kira pour le Saker Francophone

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