Par Finian Cunningham – Le 20 décembre 2016 – Source Strategic Culture
Le meurtre brutal de l’ambassadeur russe Andrey Karlov à Ankara a provoqué des ondes de choc dans le monde entier. Des condamnations ont été émises par Washington et les États européens au sujet de l’acte terroriste d’un homme armé qui a tiré sur Karlov dans le dos tandis qu’il s’exprimait dans une galerie de photos de la capitale turque.
La Maison Blanche a condamné ce qu’elle a qualifié d ‘« attaque odieuse », tandis que la responsable de la politique étrangère de l’Union européenne, Federica Morgherini, a prononcé des vœux de solidarité avec la Russie après le meurtre.
Un gros titre annonçait : « L’UE, et les États-Unis choqués par l’assassinat de l’ambassadeur de Russie en Turquie ».
Étant donné les mois de dénigrement incessant et injustifié de la Russie par les États-Unis et l’UE sur le conflit syrien, l’expression « larmes de crocodile » vient immédiatement à l’esprit en entendant leurs condamnations de l’assassinat de l’ambassadeur russe.
Le même jour, lundi, dans les heures qui ont suivi cette atrocité, une deuxième attaque apparemment terroriste a eu lieu dans la capitale allemande, à Berlin, lorsqu’un demandeur d’asile pakistanais [information démentie, NdT] a précipité un camion dans un marché de Noël bondé tuant au moins 12 personnes et blessant près de 50 autres. Pris ensemble, ces deux événements ont intensifié les mesures de sécurité en Europe. Encore une fois une ironie cruelle, compte tenu de la culpabilité des États européens dans l’ensemencement des germes de la violence.
Karlov (62 ans) a été diplomate de carrière pendant quatre décennies, prenant son poste en Turquie en 2013. Il a travaillé habilement dans les coulisses pour faciliter le récent dialogue politique entre la Russie, l’Iran et la Turquie visant à trouver un arrangement d’évacuation pour les civils et les militants hors du champ de bataille de la ville syrienne d’Alep.
Le président russe Vladimir Poutine et son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan, ont déclaré que l’assassinat de Karlov était une « provocation » afin de faire dérailler les difficiles négociations en cours pour trouver un règlement politique dans le conflit syrien. Ces pourparlers se sont déroulés le lendemain du meurtre lorsque les ministres des Affaires étrangères des deux pays, plus l’Iran, se sont rencontrés à Moscou mardi, comme prévu.
Les États-Unis et leurs alliés européens ont été laissés à l’écart des négociations entre la Russie, l’Iran et la Turquie. Même si les États occidentaux ont participé à la guerre de près de six ans en Syrie en finançant et armant diverses factions anti-gouvernementales militantes.
Poutine, dans une allocution télévisée au Kremlin, a déclaré que l’ enquête sur le meurtre de l’ambassadeur Karlov devait découvrir « qui était derrière la main du tireur ». Celui-ci, qui a été rapidement tué par les forces spéciales turques lors de l’assaut de la galerie de photos, s’appelle Mevlut Mert Altintas, 22 ans, membre hors-service de l’unité anti-émeute d’Ankara. Des images vidéo, prises par des membres du public assistant à l’événement fatal, ont montré le tueur déclarant son soutien au peuple d’Alep et criant « Allahu Akbar » (« Dieu est grand ») … « C’est la vengeance pour Alep », alors que Karlov agonisait sur le sol.
Les autorités turques ont plus tard affirmé que le tireur était affilié au mouvement guléniste, que l’on a déjà blâmé pour avoir fomenté le coup d’État raté, en juillet, contre Erdogan. Cette affirmation pourrait être une diversion du gouvernement turc pour dissimuler ce qui serait autrement une affiliation embarrassante entre son personnel policier et les terroristes islamistes en Syrie.
Certains parlementaires russes sont allés jusqu’à prétendre que le meurtre de Karlov a peut-être été orchestré par l’alliance militaire de l’OTAN menée par les États-Unis. La libération d’Alep la semaine dernière, avec l’aide des alliés militaires russes, iraniens et du Hezbollah libanais, est considérée comme une défaite stratégique pour les puissances de l’OTAN qui ont mené une guerre secrète pour le changement de régime en Syrie.
Au cours du week-end, des rapports ont également révélé que plusieurs éléments des forces spéciales de l’OTAN ont été capturés par les troupes syriennes à Alep. La présence dissimulée du personnel de l’OTAN à Alep, probablement pour la formation et la direction des terroristes djihadistes, serait une preuve formelle de la conspiration criminelle occidentale poursuivant la guerre en Syrie.
Il reste à voir si le flic qui a tué l’ambassadeur Karlov agissait sous la direction des services de renseignement de l’OTAN.
Cependant, même s’il agissait seul, on peut encore dire que les gouvernements occidentaux et leurs médias ont une lourde responsabilité pour avoir « dirigé son bras ».
Parmi les condamnations [contre l’intervention russe à Alep] prononcées par le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-Moon − les États-Unis, le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne − figuraient aussi celles exprimées par le secrétaire d’État américain John Kerry et Samantha Power, l’ambassadrice américaine aux Nations Unies. Quelques jours avant le meurtre de l’ambassadeur russe Andrei Karlov, les États occidentaux et les hauts fonctionnaires des Nations Unies menaient une intense campagne médiatique alléguant que la Russie commettait des crimes de guerre lors de l’offensive syrienne pour reprendre Alep.
John Kerry a dénoncé ce qu’il appelle un « massacre » à Alep. Samantha Power était presque hystérique au Conseil de sécurité de l’ONU réprimandant la Russie pour son « incapacité à avoir honte » et proférant d’imprudentes réclamations non fondées selon lesquelles des femmes et des enfants seraient exécutés à Alep.
Un long mois de condamnations, allant crescendo, par les gouvernements et les médias occidentaux, a atteint un point culminant la semaine dernière quand Alep a finalement été reprise par l’armée syrienne et ses alliés. Citant des sources douteuses, liées à des groupes terroristes occupant l’est d’Alep durant le siège, l’Occident a diabolisé la Russie comme oppresseur de civils, commettant des crimes contre l’humanité.
Des diplomates américains, britanniques et français ont formulé de grossières analogies historiques en comparant les actions de la Russie et de son allié syrien aux déprédations de l’Allemagne nazie et du fasciste espagnol Franco.
Rappelez-vous aussi que lorsque les bureaux consulaires russes en Syrie ont été visés par les roquettes des rebelles, les États occidentaux ont refusé de condamner ces violations flagrantes. Rappelez-vous aussi comment le ministre britannique des Affaires étrangères, Boris Johnson, a appelé aux manifestations publiques devant l’ambassade de Russie à Londres.
Rappelez-vous enfin que deux infirmières russes ont été assassinées dans une attaque de roquettes terroristes contre un hôpital mobile de campagne à Alep, les États occidentaux ont gardé le silence plutôt que de condamner l’acte. Dans d’innombrables occasions, de manière plus ou moins subtile, les gouvernements et leurs médias aux ordres ont attaqué les Russes comme des vilains méritant tous les reproches.
Les condamnations ont atteint des sommets inadmissibles la semaine dernière, lorsque Washington, ses alliés occidentaux, et l’ONU – avec l’aide des médias qui ont tout amplifié sans se poser de question – ont vilipendé la Russie pour avoir abattu des civils dans l’est d’Alep. L’ambassadrice américaine Samantha Power a spécifiquement cité des informations, non vérifiées, au sujet d’enfants tués dans un sous-sol par les forces russes et syriennes.
Pendant ce temps, l’hystérie occidentale était démentie par l’évacuation calme de dizaines de milliers de civils à Alep. Il n’y avait aucune preuve de massacres ou de crimes contre l’humanité. De nombreux civils ont plutôt exprimé leur soulagement et leur gratitude d’avoir été libérés par les forces syriennes et russes du règne de terreur qui leur a été imposé durant quatre ans par des terroristes soutenus par l’Occident.
Pratiquement tout ce que les sources officielles occidentales ont dit au sujet d’Alep, et de la guerre syrienne en général, apparaît comme un grossier mensonge.
Le législateur russe Alexei Pouchkov, du comité des Affaires étrangères de la Douma [le parlement russe], avait raison lorsqu’il a dit, à la suite de la mort d’Andrei Karlov, que l’Occident était responsable parce que son hystérie et ses délires sur les événements d’Alep ont favorisé un climat de haine déchaînée envers la Russie.
Quand l’assassin turc a pointé son pistolet vers Karlov, il a déclaré qu’il agissait en mémoire des « civils tués à Alep ». Mais qui lui a inculqué l’idée que la Russie était une cible légitime de représailles ?
En répondant honnêtement à ces questions, comment ne pas conclure que les gouvernements occidentaux, les diplomates et les médias ont dirigé l’arme à feu qui a tué l’ambassadeur Andrei Karlov.
Finian Cunningham
Traduit et édité par jj, relu par Cat pour le Saker Francophone
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