Venezuela : échec de l’aide américaine…


…le stratagème manque de soutiens


2015-05-21_11h17_05Par Moon of Alabama – Le 7 février 2019

Un jour à peine après la tentative de coup d’État américain au Venezuela, la feuille de route américaine était déjà assez évidente :

L'opposition au Venezuela utilisera probablement l'accès à l'argent [vénézuelien] «gelé» pour acheter des armes et créer une armée de mercenaires afin de mener une guerre «civile» contre le gouvernement et ses partisans. Comme en Syrie, les forces spéciales américaines ou certains "sous-traitants" de la CIA seront prêts à aider. La ligne d’approvisionnement pour une telle guerre passerait très probablement par la Colombie. Si, comme en Syrie en 2011, une guerre sur le terrain est prévue, elle commencera probablement dans les villes proches de cette frontière.

Les États-Unis utilisent le prétexte de « l’aide humanitaire » de la Colombie au Venezuela pour saper le gouvernement et établir une ligne d’approvisionnement en vue d’opérations ultérieures. C’est une autre tentative pour attirer l’armée du côté des initiateurs du coup d’État :

Si les camions parviennent à passer, l’opposition pourra se présenter comme une réponse aux souffrances chroniques du Venezuela, tandis que Maduro semblera avoir perdu le contrôle des frontières du pays. Cela pourrait accélérer les défections du parti au pouvoir et de l'armée.

Dimitris Pantoulas, politologue à Caracas, a qualifié de pari très risqué le plan de distribution d’aide par l'opposition. ...
«C’est à 99% militaire et à 1% humanitaire», a-t-il déclaré. "L’opposition met à l’épreuve la loyauté de l’armée et augmente le coût de son soutien à Maduro. Est-elle avec Maduro ou non ? Rejetera-t-elle l'aide ? Si la réponse est non, les heures de Maduro sont comptées."

Un article du New York Times publié par un ancien ministre des affaires étrangères de droite du Mexique, Jorge G. Castañeda, détaille le potentiel d’escalade :

Selon M. Guaidó et d'autres sources, 20 millions de dollars en médicaments et en nourriture d'origine américaine seront déchargés cette semaine juste à l'extérieur du territoire vénézuélien à Cúcuta, en Colombie, au Brésil et sur une île des Caraïbes - Aruba ou Curaçao - près de la côte vénézuélienne.
 
Les militaires vénézuéliens et les troupes en exil achemineront ensuite ces fournitures vers le Venezuela, où, si tout se passe bien, les troupes toujours fidèles à M. Maduro ne pourront pas arrêter leur passage ni leur tirer dessus. S'ils le font, les gouvernements brésilien et colombien pourraient être disposés à soutenir les soldats anti-Maduro. La menace d’une fusillade avec leurs voisins pourrait bien être l’incitation nécessaire pour que l’armée vénézuélienne abandonnent Maduro, ce qui rendrait les combats inutiles.

Cette stratégie d’escalade ne fonctionnera probablement pas sans une provocation supplémentaire. Le gouvernement vénézuélien a bloqué le pont frontalier entre Cúcuta en Colombie et San Cristobal au Venezuela. Son armée est prête à mettre fin à toute violation de la frontière du pays.

Les États-Unis ont réagi au blocage de la route par un tweet moralisateur :

Secrétaire Pompeo @SecPompeo - 16h55 utc - 6 février 2019
 
Le peuple vénézuélien a désespérément besoin d'aide humanitaire. Les États-Unis et d’autres pays essaient d’aider, mais l’armée vénézuélienne, sous les ordres de Maduro, bloque l’aide fournie par des camions et des navires. Le régime de Maduro doit permettre à l’aide d’atteindre les pauvres. #EstamosUnidosVE

Le gouvernement américain, qui aide activement à affamer la population du Yémen, s’inquiète pour le Venezuela, où jusqu’à présent personne n’est mort de faim. La pauvre dame ne va pas le croire.

Sur le T-Shirt :  MADURO NOUS LAISSE MOURIR DE FAIM…

L’armée vénézuélienne n’a montré aucun signe d’intérêt pour abandonner sa loyauté. La fausse aide sera rejetée.

Le gouvernement du Venezuela ne rejetterait pas une aide qui viendrait sans ingérence politique. L’année dernière, il a accepté une aide modeste des Nations Unies composée principalement de fournitures médicales, le Venezuela ayant été sous embargo suite aux sanctions imposées par les États-Unis. L’ONU a déclaré qu’environ 12% des Vénézuéliens sont sous-alimentés. Mais de telles affirmations ont été faites pendant des années alors que les rapports du Venezuela (vidéo) ne confirmaient qu’une pénurie de certains produits spécifiques. Il n’y a pas de famine au Venezuela qui nécessiterait une intervention immédiate.

La Croix-Rouge internationale, l’organisation d’aide de l’église catholique Caritas et les Nations-Unies ont rejeté les demandes des États-Unis pour aider à acheminer «l’aide» actuellement prévue, car elle est trop visiblement politisée :

"L'action humanitaire doit être indépendante de tout objectif politique, militaire ou autre", a déclaré mercredi à la presse le porte-parole de l'ONU, Stephane Dujarric, à New York.  ...

"Ce qui importe, c'est que l'aide humanitaire soit dépolitisée et que les besoins de la population déterminent le moment et le mode d'utilisation de celle-ci", a ajouté M. Dujarric.

Rejeter l’aide pour des raisons politiques n’est pas inhabituel. Lorsque l’ouragan Katrina, en 2005, a provoqué d’énormes dégâts le long de la côte américaine du Golfe, un certain nombre de pays ont proposé une aide humanitaire et technique. Le président américain Bush a accepté l’aide de certains pays, mais pas d’autres :

Une offre d'aide du président vénézuélien, Hugo Chávez, comprenant deux unités hospitalières mobiles, 120 experts en sauvetage et en premiers secours et 50 tonnes de vivres, a été rejetée, selon le leader des droits de l'homme, Jesse Jackson.
Celui-ci a déclaré que l'offre du dirigeant vénézuélien, qu'il avait récemment rencontré, comprenait aussi 10 stations d'épuration d'eau, 18 centrales de production d'énergie et 20 tonnes d'eau en bouteille.

L’intention des États-Unis d’établir une ligne d’approvisionnement en «aide humanitaire» au Venezuela a un objectif secondaire. Cette aide est une couverture idéale pour le ravitaillement en armes. Dans les années 1980, les transports aériens d’«aide humanitaire» pour le Nicaragua étaient remplis d’armes. Les commandes pour ces vols ont été données par Elliot Abrams, qui est maintenant l’envoyé spécial de Trump au Venezuela.

Alors que les camions en provenance de Colombie sont bloqués à la frontière, une autre «aide humanitaire» en provenance des États-Unis est arrivée dans le pays.

Des responsables vénézuéliens ont accusé les États-Unis d’avoir envoyé une cargaison clandestine de fusils et de puissantes munitions sur un vol cargo commercial au départ de Miami à destination des adversaires du président Nicolás Maduro.
 
Des membres de la Garde nationale vénézuélienne [GNB] et du Service national intégré de l'administration des douanes et des impôts [SENIAT] ont fait cette découverte choquante à peine deux jours après l'arrivée de l'avion à l'aéroport international Arturo Michelena de Valence.

Les inspecteurs ont trouvé 19 fusils, 118 chargeurs et 90 émetteurs radios sans fil alors qu'ils enquêtaient sur le chargement qui serait arrivé dimanche après-midi. Le coup de filet de lundi a également saisi quatre supports de fusil, trois lunettes de visée et six iPhones.

Les images montrent un équipement suffisant pour une escouade d’infanterie. Quinze fusils d’assaut AR-15 (5.56), une arme automatique (7.62) avec chargeur  et un fusil pour tireur d’élite Colt 7.62 ainsi que des accessoires. Ce qui manque, ce sont les munitions.

Si une de ces livraisons d’armes a été capturée, plusieurs sont susceptibles d’être passées entre les mailles. Mais cela ne suffit pas pour se battre contre le gouvernement. Les États-Unis devront établir une ligne d’approvisionnement continue pour les munitions lourdes et volumineuses. C’est là que les convois «d’aide humanitaire» entrent en scène.

À moins qu’une grande partie de l’armée vénézuélienne ne change de camp, toute tentative de renversement forcé du gouvernement vénézuélien est vouée à l’échec. Les États-Unis pourraient utiliser toute leur puissance militaire pour détruire l’armée vénézuélienne. Mais le Sénat américain se querelle déjà au sujet de l’utilisation potentielle des forces américaines au Venezuela. Les démocrates rejettent cela fermement.

Une résolution du Sénat visant à soutenir le chef de l'opposition vénézuélienne Juan Guaido, qui devait obtenir un soutien unanime, a été torpillée par un désaccord sur le recours à la force militaire, selon des collaborateurs et des sénateurs travaillant sur le sujet. ...
"Je pense qu'il est important que le Sénat s'exprime sur la démocratie au Venezuela, en soutenant le président par intérim Guaido et en apportant son aide humanitaire. Mais je pense aussi qu'il devrait être très clair, en fait, que le soutien ne concerne aucun type d'intervention militaire", [Sen. Bob Menendez, D-N.J.] A déclaré à NBC News.

Il est peu probable que Trump ordonne une intervention militaire sans soutien bipartite.

L’insertion clandestine d’une force de «guérilla» mercenaire au Venezuela est sûrement possible. Des lignes d’approvisionnement mineures peuvent être établies par des moyens secrets. Mais, comme le montre la guerre contre la Syrie, de tels plans ne peuvent être couronnés de succès que si le peuple soutient la force anti-gouvernementale.

Sous le gouvernement actuel, la plupart des habitants du Venezuela sont encore mieux lotis que sous les gouvernements antérieurs à Chavez. Cette vidéo et ce post sur tweeter expliquent l’histoire économique du Venezuela et les énormes progrès réalisés sous Chavez et Maduro. Les gens n’oublieront pas cela, même lorsque la situation économique deviendra plus difficile. Ils savent qui tire les ficelles derrière le Mec providentiel Guaido, qui revendique désormais la présidence. Ils savent bien qu’il est peu probable que ces gens riches améliorent leur fardeau.

Les politiciens américains commettent les mêmes erreurs vis-à-vis du Venezuela que lors des guerres de changement de régime en Irak et en Syrie. Ils croient que tous les gens sont aussi corrompus et nihilistes qu’eux. Ils croient que les autres ne se battront pas pour leurs propres croyances et leur propre style de vie. Ils se seront à nouveau trompés.

Moon of Alabama

Traduit par jj, relu par wayan pour le Saker Francophone

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