… Les leçons que Donald Trump devrait tirer de William Shakespeare
Par Martin Sieff – Le 7 avril 2019 – Source Strategic Culture
Maintenant que le président Donald Trump a enfin été exonéré du grotesque mensonge de collusion avec la Russie lors de l’élection de 2016, le dirigeant américain devrait faire attention : l’État profond le poursuivra encore, malgré l’échec de son coup d’État sournois.
Trump doit reconnaître qu’il est une version moderne du roi Henri IV de Shakespeare, un monarque qui ne pouvait jamais se permettre le repos.
Les forces opposées à la vision décente et judicieuse de Trump, lors de la campagne 2016, visant à désamorcer les tensions avec la Russie ont œuvré avec acharnement, sans relâche et depuis longtemps pour discréditer le 45ème président des États-Unis, avant même qu’il ne puisse faire quoi que ce soit. L’idée qu’ils vont maintenant s’asseoir, comme de bons perdants, parce que toute leur pyramide de mensonges sur la collusion avec la Russie a été exposée, est ridicule.
Les deux années d’hystérie étaient loin d’être vaines. Elles n’ont pas réussi à écarter Trump de ses fonctions ou à le discréditer auprès de sa puissante base politique interne. Mais elles l’ont certainement empêché de travailler de manière ouverte et constructive avec le président russe Vladimir Poutine pour mettre fin aux bains de sang en cours, en Syrie et au Yémen, dont Trump a hérité, et pour réduire les tensions nucléaires globales.
Au lieu de cela, les États-Unis continuent de se plonger de plus en plus profondément dans le soutien imprudent et inconditionnel à des régimes dangereux, instables, et irresponsables en Géorgie et en Ukraine. Pour Otto von Bismarck et George Kennan, cela aurait été incompréhensible. Ils l’auraient considéré comme fou. Tout comme Franklin D. Roosevelt, calomnié par l’ignorant parti politique Know Nothings, pendant trois quarts de siècle, parce qu’il reconnaissait que détruire le nazisme et préserver la paix du monde avec l’Union soviétique étaient plus importants que de garantir les frontières et la politique intérieure de la Pologne, de l’Estonie, de la Lettonie et de la Lituanie.
Malgré une accession inattendue au pouvoir, le président Trump était tout à fait sérieux dans son engagement à « assécher le marais » de Washington : c’est la véritable raison pour laquelle le vieil establishment américain le haïssait tellement. Les mensonges hystériques sur une « collusion » totalement fictive et absurde l’ont néanmoins mis sur la défensive pendant deux ans, soit un demi-mandat présidentiel complet.
Cela a forcé Trump à se focaliser obsessionnellement sur une politique défensive. Il a réussi à faire passer bon nombre de réformes, de déréglementations et autres réformes économiques, qu’il souhaitait et a commencé à renégocier des accords commerciaux multinationaux avec le reste du monde. Mais il n’a jamais eu la chance de prendre l’offensive contre l’un ou l’ensemble de ses ennemis politiques nationaux. Maintenant, il va certainement essayer.
En réaction, ils seront encore plus désespérés, extrêmes et hystériques maintenant qu’ils ont été forcés eux-mêmes à la défensive, ce qui n’était pas le cas précédemment.
Trump doit faire attention. Il a défié le système de sécurité américain ce que aucun président n’avait osé faire depuis John F. Kennedy. Et derrière ses prises de position publiques, Trump n’a jamais été un imbécile. Une grande partie de ses prises de position pour la droite militariste sur des questions allant de la Russie à la Chine pourrait bien être considérée comme une reconnaissance du fait qu’il doit céder aux nombreuses pressions exercées par l’État profond pour empêcher le nombre et la puissance de ses ennemis de l’isoler et de devenir écrasants. Après tout, Richard Nixon n’a été contraint de quitter ses fonctions que lorsqu’il s’est aliéné la plupart des membres de la gauche libérale et de la droite extrémiste.
Trump a raison de célébrer l’effondrement du Russiagate contre lui. Et il devrait certainement être invité à renoncer urgemment à John Bolton, en particulier à titre de conseiller pour la sécurité nationale. La paix dans le monde dépend toujours fondamentalement de la volonté de Washington et de Moscou d’éviter tout conflit direct et de gérer leurs relations de manière constructive et prudente.
Mais la chose la plus dangereuse que Trump puisse maintenant faire est de baisser la garde. Ses nombreux ennemis sont toujours là, bouillonnant de haine et de frustration, désireux de l’assaillir avec de nouveaux mensonges toujours plus toxiques et fantastiques.
Trump peut profiter d’une brève accalmie pendant que sa coalition d’ennemis lèche ses blessures et ses humiliations dans l’ombre. Et cela peut leur prendre un certain temps – probablement des semaines plutôt que des mois – pour présenter leur prochain ensemble de nouveaux mensonges. Ou la prochaine série d’agressions peut être plus directe.
Le plus grand danger reste dans les affaires étrangères où Trump s’est laissé dépouiller de collègues fidèles comme le lieutenant général Michael Flynn. Le secrétaire à la Défense, James Mattis, et le chef d’état-major de la Maison-Blanche, John Kelly, sont maintenant tous deux partis et sont jusqu’ici irremplaçables. Les deux hommes étaient des généraux du corps des Marines, étroitement liés à l’establishment. Mais ils étaient également des personnalités stables, prudentes et des hommes d’honneur. Le dos de Trump est beaucoup plus exposé, sans eux pour le garder.
William Shakespeare aurait parfaitement compris le dilemme de Trump.
Nous avons oublié que les tragédies historiques de Shakespeare étaient également des thrillers politiques, tous truffés d’intrigues et de complots ahurissants. À chaque fois qu’une intrigue échouait, les méchants – et même les héros – se contentaient d’en concocter une nouvelle.
C’était la politique du pouvoir dans les cours royales de la Renaissance, telle que la comprenait Shakespeare. Il aurait été un conseiller idéal pour la sécurité nationale à Washington au XXIème siècle.
Martin Sieff
Traduit par jj pour le Skaer Francphone