Par Françoise Petitdemange – le 16 juillet 2016 – Son blog personnel
Comment lui ont-ils répondu ? En envoyant, de mars à octobre 2011, des bombes sur son pays, sur le peuple libyen et en le faisant assassiner.
Alors que la déstabilisation de la Côte d’Ivoire, de la Tunisie, de l’Égypte, de la Libye et de la Syrie était orchestrée par les chefs d’États français, britannique, états-unien, avec l’appui du Qatar et de l’Arabie saoudite, sous l’œil d’Israël, et avec l’utilisation des cellules dormantes d’al-Qaïda composées de mercenaires, Mouammar Kadhafi acceptait d’accorder un entretien sous sa tente, dans l’enceinte de la caserne Bab al-Azizia, à Laurent Valdiguié. Ses réponses aux questions posées, le 5 mars 2011, sont particulièrement parlantes après les attentats qui ont eu lieu à Paris le 13 novembre 2015, et hier, 14 juillet 2016, à Nice. À propos de ce qui se passait dans le Maghreb, notamment dans son pays, Mouammar Kadhafi donnait cette explication :
« Tout le monde a entendu parler d’al-Qaïda au Maghreb islamique. Or, il y avait des cellules dormantes en Libye. Quand il y a eu la confusion en Tunisie et en Égypte, ils ont voulu profiter de la situation et al-Qaïda a donné instruction à ses cellules dormantes de faire surface. C’est ce qui s’est passé. Les membres de ces cellules se sont réveillés sur ordre et ont attaqué des casernes militaires et des commissariats de police pour prendre les armes. C’est ce qui a eu lieu à Benghazi et à al-Baïda, où il y a eu des échanges de coups de feu.» (Muammar Gaddhafi à Laurent Valdiguié, Journal du Dimanche, 5 mars 2011.)
Les policiers et les soldats libyens, devaient-ils laisser leurs commissariats et leurs casernes être attaqués par des membres d’al-Qaïda particulièrement agressifs ? Des attaques à main armée font nécessairement des morts. Mais Mouammar Kadhafi rétablissait l’enchaînement des faits :
«Il y a eu des morts de part et d’autre. Les gens ont trouvé la mort devant le commissariat de police ou la caserne militaire. Ils ont pris les armes et se sont ensuite répandus dans les rues. Ils ont terrorisé la population de Benghazi. Aujourd’hui, les gens ne peuvent plus sortir et ont peur.» (Idem.)
Qu’ont fait les hommes et les femmes politiques en France, en Grande-Bretagne, aux États-Unis, en Allemagne et ailleurs dans les pays occidentaux ? Ils-elles se sont voilé la face. Pourquoi ? Parce que leurs amis du Qatar et d’Arabie saoudite finançaient et financent al-Qaïda qui, depuis, a éclaté en plusieurs branches. Voilà ce que le président de la république française de l’époque, Nicolas Sarkozy, ce que le Premier ministre britannique, David Cameron, et ce que le président des États-Unis, Barack Obama, ont défendu en faisant la guerre contre la Libye ! L’attaque des commissariats et des casernes, et de leurs dépôts d’armes. L’attaque des policiers et des militaires. Ici, il faut se rappeler le comportement des prétendus rebelles libyens qui tiraient en l’air aux cris de Allah Akhbar sous l’œil des caméras françaises et qui ont tué de manière accidentelle certains de leurs camarades avec leurs armes. Dorénavant, de source sûre, certains regrettent la démocratie directe !
Un de ces meneurs d’al-Qaïda, un ancien de Guantánamo, a appelé sa ville «l’émirat d’al-Qaïda», un autre «l’émirat islamique». Ils ont mis en place une radio, la radio du Djihad. Nous, jusqu’à présent, nous n’avons pas pris la décision d’attaquer. (Idem.)
Voilà qui montre à quel point Mouammar Kadhafi était un dictateur… C’était au peuple libyen de prendre la décision : il a décidé de ne pas utiliser les armes de suite pour ne pas envenimer la situation. Tout cela a-t-il été planifié ? Mouammar Kadhafi en est sûr :
«Oui, très planifié. Malheureusement, cela a été présenté à l’étranger d’une façon très différente de ce qui se passe réellement. Il a été dit qu’il s’agissait de tirs sur des manifestants paisibles… mais les gens d’al-Qaïda n’organisent pas de manifestations ! Il n’y a pas eu de manifestations en Libye ! Et personne n’a tiré sur des manifestants.» (Idem.)
La Russie, dont les satellites n’ont montré aucune trace de manifestations et de répression de manifestants, a confirmé ces dires : les médias occidentaux ont honteusement trompé le monde…
«Ici, les seules manifestations sont celles qui soutiennent la Jamahiriya.» (Idem.)
Mais ces manifestations pacifiques en soutien à la Jamahiriya arabe libyenne populaire socialiste (ou État des masses ou gouvernement du peuple par le peuple pour le peuple) et à Mouammar Kadhafi ont été soigneusement passées sous silence en France.
Mouammar Kadhafi qui, depuis les années 1990, avait appris à connaître les membres d’al-Qaïda, ne pouvait qu’exprimer son désarroi devant ces États occidentaux qui s’accommodaient fort bien de l’action des terroristes lorsque ceux-ci pouvaient être utilisés comme des pions stratégiques :
«[J]e m’étonne vraiment que l’on ne comprenne pas qu’il s’agit ici d’un combat contre le terrorisme. Nous sommes tous dans le même combat contre le terrorisme. Nos services de renseignements coopèrent. Nous vous avons beaucoup aidé ces dernières années ! Alors, pourquoi, lorsque nous sommes dans un combat contre le terrorisme ici, en Libye, on ne vient pas nous aider en retour !» (Idem.)
Suite à un différend, dû aux manœuvres de la CIA et qui avait duré plusieurs années, le président Jacques Chirac avait décidé de rétablir des relations plus cordiales et, il faut bien le dire, des relations d’affaires avec la Libye. Nicolas Sarkozy s’est empressé de détruire ce que son prédécesseur avait reconstruit ; François Hollande, qui ne veut pas être en reste, rêve d’achever de détruire la Syrie − attaquée militairement, comme la Libye, le 20 mars 2011 − de bombarder le peuple syrien, et d’assassiner Bachar el-Assad : c’est ce qui s’appelle imposer la démocratie ou, plutôt, la dictature bourgeoise capitaliste, impérialiste, colonialiste aux peuples en leur faisant entrer des bombes dans la tête, au Guide révolutionnaire Mouammar Kadhafi, en le lynchant et en l’assassinant, et au président Saddam Hussein en l’exécutant après un procès bâclé.
Tout allait bien en Libye ?
«Le régime ici, en Libye, va bien. Il est stable. Je veux bien me faire comprendre : si on menace, si on déstabilise, on ira à la confusion, à Ben Laden, à des groupuscules armés. Voilà ce qui va arriver. Vous aurez l’immigration, des milliers de gens qui iront envahir l’Europe depuis la Libye. Et il n’y aura plus personne pour les arrêter.» (Idem.)
La création des États-Unis d’Afrique qui était en cours de réalisation devait permettre le développement politique et économique du continent africain et stopper l’émigration des Africains vers l’Europe. Mais les Européens et États-Uniens, ne pouvant se déprendre de cette fureur de coloniser pour conforter l’exploitation de l’être humain par l’être humain dans leurs pays respectifs autant que dans d’autres pays occidentaux, ont préféré le chaos libyen et, d’une façon générale, le chaos africain, plutôt que la liberté des peuples africains à disposer d’eux-mêmes et de leur destin.
Cinq ans après la guerre contre la Libye, la prédiction de Mouammar Kadhafi se révèle particulièrement pertinente :
«Ben Laden viendra s’installer en Afrique du Nord et laissera le mollah Omar en Afghanistan et au Pakistan. Vous aurez Ben Laden à vos portes.» (Idem.)
Les chefs d’États occidentaux ont cru trouver la solution avec la mort de Ben Laden. Mais al-Qaïda continue son périple avec la création de l’État islamique…
Près de cinq ans après l’assassinat (le 20 octobre 2011) de Mouammar Kadhafi, cela sonne comme le glas pour l’Occident…
«[C]e que je veux vous faire comprendre, c’est que la situation est grave pour l’Occident tout entier et toute la Méditerranée… Comment les dirigeants européens ne voient-ils pas cela ? Le risque que le terrorisme s’étende à l’échelle planétaire est évident.» (Idem.)
Françoise Petitdemange.