La Pologne craint fortement de subir la contagion des « maladies sociales » de l’UE


Par Andrew Korybko – Le 12 septembre 2018 – Source orientalreview.org

andrew-korybkoJaroslaw Kaczynski, « éminence grise » polonaise, a lancé l’alerte : son pays pourrait contracter les « maladies sociales » de l’Union européenne.

L’influent homme politique, au cours d’une prise de parole au sein d’une convention de son parti le week-end dernier, a réaffirmé l’engagement de la Pologne de rester dans l’UE, mais avec l’importante réserve qui suit : « Cela ne signifie pas que nous devrions répéter les erreurs commises à l’ouest, et nous laisser gagner par la contagion des maladies sociales qui dominent là-bas. » Il n’a pas précisé outre mesure ce à quoi il pensait, mais on peut supposer sans grand risque que ce meneur d’idées socio-religieux du mouvement EuroRéaliste faisait référence à la politique du bloc de soi-disant « frontières ouvertes », de son désintérêt quant aux questions d’assimilation et d’intégration de migrants civilisationnellement dissemblables, de la normalisation de relations sexuelles non traditionnelles telle que l’homosexualité et d’autres pratiques, et peut-être également la libéralisation de lois pro-avortement.

La Pologne s’est récemment retrouvée sous le feu des critiques, pour s’être mutée en ce que les opposants du parti au pouvoir appellent un « État clérical », en raison de l’influence prédominante que le catholicisme exerce sur le gouvernement. Pour exotique qu’il apparaisse de voir un État européen contemporain s’appuyer sur des valeurs religieuses dans l’élaboration de ses politiques, c’est en fait une pratique très ordinaire dans le reste du monde. La majorité des pays musulmans, par exemple, fondent leurs lois sur l’islam, y compris des pays laïcs tel la Syrie, comme l’illustre l’article 3 du chapitre premier de sa Constitution de 2012, qui stipule clairement que « la jurisprudence islamique constituera la source principale du droit ». Tous ces éléments convergent vers le rôle croissant du civilisationnel dans les relations internationales, et ce depuis la fin de la guerre froide.

Jaroslaw Kaczynski, le dirigeant du parti Loi et Justice (PiS)

Les autorités au pouvoir en Pologne se sentent investies du devoir de faire de leur pays l’avant-garde des valeurs chrétiennes en Europe, après l’épisode de laïcisation forcée que l’Europe centrale et orientale ont subi au cours de la période communiste, et qui s’est poursuivi jusqu’à ce jour depuis que les États laïcs d’Europe de l’ouest imposent leurs valeurs sur la région, sous couvert d’expansion rapide de l’Union européenne. La majorité de la population polonaise, de tendance traditionaliste, souffre de la perte de sa culture unique, inextricablement liée au catholicisme, causée par la laïcisation agressive de l’UE, et de ce qu’elle considère souvent comme une islamisation clandestine du continent par des migrants musulmans. C’est pour cela que Kaczynski canalise ses sentiments en levant l’alerte sur les « maladies sociales » du bloc.

Le présent article constitue une retranscription partielle de l’émission radiophonique context countdown, diffusée sur Radio Sputnik le 7 septembre 2018.

Andrew Korybko est le commentateur politique américain qui travaille actuellement pour l’agence Sputnik. Il est en troisième cycle de l’Université MGIMO et auteur de la monographie Guerres hybrides : l’approche adaptative indirecte pour un changement de régime (2015). Le livre est disponible en PDF gratuitement et à télécharger ici.

Traduit par Vincent, relu par Cat pour le Saker Francophone

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