Hillary et le FBI :
La révolte de l’État profond


andrew-korybkoPar Andrew Korybko – Le 31 octobre 2016 – Source Katehon

Le scandale qui a secoué l’Amérique

Tous les Américains sont choqués que le directeur du FBI James Comey ait révélé au Congrès, la semaine dernière, que son bureau a rouvert son enquête sur le scandale des messageries de Hillary Clinton.

Les démocrates et leurs semblables sont furieux de ce qu’ils disent être une «ingérence politique» si proche du jour des élections, alors que les républicains ne peuvent pas croire que le même homme, qui a refusé de porter plainte contre l’ancienne secrétaire d’État l’été dernier, fasse enfin la bonne chose après s’être honteusement vendu à l’establishment. Les revendications des démocrates sur «l’ingérence politique» sont totalement infondées, puisque le peuple américain a le droit de savoir si le comportement illégal de l’un des principaux candidats à la présidence est encore examiné par les autorités à la lumière de nouvelles informations. En fait, Comey n’aurait pas fait un tel geste dramatique, si son équipe n’avait pas découvert une véritable bombe au cours de son enquête sur les perversions sexuelles du mari – séparé – de Huma Abedin et les soupçons de possession de pornographie pédophile.

À tout le moins, Huma est coupable de parjure, pour avoir menti sous serment en disant qu’elle a renoncé à tous les ordinateurs liés au travail sur lesquels l’un des messages potentiellement classés de Hillary pourrait avoir été manipulé. Cette découverte soulève des questions évidentes au sujet de l’intégrité de la femme dont Hillary ferait probablement son chef de cabinet si elle gagnait l’élection, et cela montre de façon inquiétante à des millions d’Américains que Clinton n’a pas la capacité de juger sainement. Cela ajoute encore à toutes les preuves existantes qu’elle est corrompue et pourrait, proverbialement, être la goutte qui fait déborder le vase et convaincre les électeurs hésitants qu’elle n’est certainement pas digne de leur vote. La corruption des Clinton est légendaire et a déjà été longuement explorée par Peter Schweizer, et beaucoup d’autres affiliés, sur le site conservateur d’actualités Breitbart, donc il n’est pas nécessaire que le présent article en discute en profondeur, bien qu’il faille le garder à l’esprit tout le temps.

L’État profond

Au lieu de cela [la corruption des Clinton], cet article vise à analyser ce qui a motivé Comey à faire ce qu’il a fait, et à appliquer, de manière appropriée, le cadre d’interprétation de l’État profond, proposé par l’auteur, en extrapolant à partir de la situation de rébellion au FBI et de l’importance que cela revêt pour l‘establishment. Pour commencer, l’État profond n’est pas une sorte de concept conspirateur comme les critiques réactionnaires pourraient l’alléguer, c’est seulement une autre façon de parler des bureaucraties permanentes dans un pays donné – armée, renseignement et diplomatie. L’auteur a largement discuté, au milieu de l’été, de la relation des deux candidats à la présidence avec ces piliers de l‘establishment, dans son article intitulé National Leadership Styles And The ‘Deep State’: Trump And Hillary, dans lequel a été exposé que Hillary a un soutien favorable de haut niveau au sein du Département d’État et du FBI – en raison de son ancien mandat en tant que secrétaire d’État et de la relation étroite d’Obama avec le procureur général Loretta Lynch, respectivement – tandis que Trump a des sympathisants pragmatiques à la CIA et au Pentagone – tels que Michael Flynn, ancien chef de la DIA, maintenant son conseiller – qui comprennent bien la dangerosité du désastre total que serait la politique étrangère d’Hillary Clinton pour le reste du monde.

Cette observation doit être ajustée, afin de rendre compte de la réouverture par Comey du dossier sur Hillary et de la notification au Congrès que l’enquête est une fois de plus en cours. Comme il a été écrit plus tôt, il n’aurait pas fait cela s’il y avait eu une manière concevable de l’éviter, ce qui renforce l’idée que toutes les preuves qui ont été récupérées méritent ce geste sans précédent. Des rapports ont fait circuler dans la presse que le moral au FBI est à un plus bas de tous les temps parmi les employés, qui ressentent profondément que leur directeur a pour longtemps endommagé la réputation du Bureau et miné la confiance du grand public dans cette branche de l’État profond. De nombreux agents ont même posé des lettres de démission pour protester de leur conviction d’une corruption incurable au sein de l’institution. Le New York Post a même publié un article au début d’octobre proclamant que «les agents du FBI sont prêts à se révolter contre l’enquête sur Clinton». Aucun de ces facteurs, par lui-même, n’aurait été suffisant pour que M.Comey change d’avis et fasse preuve de clarté sur ce qui semble incontestablement avoir été sa propre ingérence politique dans l’élection en refusant de charger Hillary [en juillet], mais ils ont certainement contribué à la tension dans l’environnement intra-organisationnel, lorsque les agents ont trouvé les courriels de Clinton sur l’ordinateur de Huma et celui de son époux – séparé – Anthony Weiner.

La révolte d’en bas

À ce stade, il est nécessaire de faire une distinction entre les agents de base du FBI, et d’autres organisations de l‘État profond, et les élites institutionnelles qui gouvernent cette classe. Il est impossible de savoir, sans un soupçon de doute, à quel point chaque employé de l’État profond est dévoué au soutien de l’establishment, mais on peut supposer que, comme dans n’importe quelle hiérarchie, le bas de la pyramide ne soutient pas toujours ceux qui sont au pinacle de celle-ci. Dans ce cas, les agents réguliers du FBI semblent vraiment se révolter contre la direction de Comey, aussi fortement qu’ils le peuvent légalement dans leurs limites professionnelles, sachant bien qu’il est presque impossible – et certifié suicidaire – de tenter un coup stéréotypé contre lui. Mais ces agents de la base sont bien conscients de leur importance, et comprennent quel coup serait porté au rôle d’appointé présidentiel qu’est le chef du FBI, s’ils continuent à laisser fuir leurs frustrations vers la presse, en faisant tout leur possible pour lui faire sentir qu’il est un proscrit désavoué. La simple réalité est que la réputation du FBI est déjà ruinée aux yeux du public américain, qui voit maintenant le renseignement intérieur et l’organisme d’application de la loi, comme une extension paramilitaire du Parti démocrate. La seule lueur d’espoir qui reste à ces employés, pour essayer de corriger cette perception par le public, est de montrer au pays qu’ils sont opposés à leur directeur en se transformant tous en pirates partisans involontaires.

Les employés du FBI se joignent au Bureau par devoir de protéger leur patrie contre les menaces intérieures et pour faire leur part dans le nettoyage du crime rampant dans la nation, et non pas pour se comporter comme l’appareil corrompu d’un parti politique ou d’un autre. La trahison de Comey cet été, en refusant d’accuser Hillary Clinton en dépit de la preuve écrasante qu’elle – et il s’avérera plus tard, aussi le président Obama lui-même – avait enfreint la loi, a heurté l’organisation si durement parce qu’elle a violé tous les principes non partisans auxquels la plupart des employés croient vraiment, et pour la protection desquels il ont rejoint le Bureau. Alors quand les agents découvrent fortuitement de nouvelles preuves liées à l’affaire lorsqu’ils enquêtaient sur le scandale de pédophilie de Weiner, il n’y avait aucune chance qu’ils s’assoient dessus sans rien dire. On ne peut que spéculer sur le genre de conversations et d’intrigues qui se sont déroulées au siège du FBI au cours des semaines qui ont suivi la publication des courriels d’Hillary sur l’ordinateur de Huma et Weiner, mais il est très probable qu’un thriller du style Game of Thrones s’est développé, dans lequel les employés de base ont affronté leurs dirigeants vendus à l’establishment et ont exigé que l’affaire de Clinton soit rouverte, et que l’annonce en soit rendue publique, afin que tous leurs compatriotes américains soient informés à son sujet, sinon ils laisseraient fuiter à la presse eux-mêmes.

Le chemin sans retour

Comey a déjà vendu le FBI en refusant de charger Clinton en premier lieu, de sorte qu’il est difficile de défendre l’idée qu’il a soudainement fait une volte-face afin de sauver la réputation institutionnelle du Bureau, mais cela ne peut pas être complètement écarté non plus. Il est plutôt beaucoup plus logique que Comey s’intéresse d’abord, et avant tout, à son bien-être personnel, qu’il ne croit pas aveuglément aux sondages des médias de masse, contrôlés par les démocrates, disant que Hillary est très en avance sur Trump dans les sondages et assurée de le battre à plate couture et que, au contraire, il se couvre pour ce qui risque de lui arriver si une future administration Trump décidait, après l’inauguration, d’enquêter sur son cas pour sa politique inappropriée. En effet, l’auteur a prédit que Trump entreprendrait une action en justice contre les fondations Clinton et Soros s’il était élu président, il est donc naturel qu’il élargisse ce processus, pour y inclure leurs collaborateurs de l‘État profond, s’il était sérieux au sujet du nettoyage/purge du pouvoir. La seule façon dont Comey pouvait tenter de se sortir d’une telle situation était de faire le geste, sans précédent, qu’il a fait en annonçant que le FBI avait rouvert son enquête sur l’un des deux candidats présidentiels du pays, un peu plus d’une semaine avant les élections. Comey doit vraiment croire qu’il y a une possibilité sérieuse que Trump gagne et mène à bien sa promesse de «drainer le marécage» de la corruption à Washington, sinon il n’aurait pas jeté le processus politique dans le chaos comme il vient de le faire.

En se rendant au Congrès et en contradiction avec la volonté du ministère de la Justice et du président Obama, Comey signale au peuple américain, aussi fort qu’il le peut, que quelque chose va très, très mal, et il met également en branle un processus d’enquête publique irréversible, qui pourrait lui survivre dans le cas où il serait victime d’un suicide mystérieux, tout comme les dizaines d’individus qui ont osé se mettre en travers de la route des Clinton. Comey a probablement fait tout cela à partir de la motivation intéressée de s’occuper de ses intérêts personnels et professionnels. Mais indépendamment de ce qui l’a motivé pour agir, le résultat est que cela a aidé à réparer certains des dommages antérieurs qu’il avait causés au moral du FBI et à sa réputation dans le peuple. Les agents ordinaires de cette institution profonde, peu importe la façon dont ils ont été offensés par la lâcheté de Comey cet été, sont maintenant vraiment motivés à passer au crible les centaines de milliers d’e-mails, extraits et saisis des ordinateurs de Huma et Weiner, pour trouver les preuves, dont ils savent qu’elles sont là, pour renverser l’injustice dont est responsable le directeur.

Quant aux citoyens ordinaires, avec tout le bon sens qui leur reste dans le crâne, ils devraient maintenant se rendre compte que la révolte de l‘État profond qui a eu lieu parmi des agents du FBI est assez sérieuse pour avoir forcé le directeur à engager dramatiquement l’action corrective moins de deux semaines avant l’élection.

Andrew Korybko

Traduit et édité par jj, relu par Cat pour le Saker Francophone

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