Décryptage du système économique global [1/7] :
Géopolitique du système des banques centrales


Genèse de l’ordre bancaire oligarchique : du système des banques centrales aux institutions financières internationales

Mayer Amschel Bauer, fondateur de la dynastie Rothschild : «Donnez-moi le contrôle de la monnaie d’une nation, et je n’aurai pas à m’occuper de ceux qui font les lois

Par Valérie Bugault – le 21 février 2016

La notion de banque centrale suppose une centralisation des questions monétaires entre les mains de banquiers centraux contrôlés par des banquiers privés. Le règlement des questions monétaires est donc, par construction, dévoué à la satisfaction des intérêts bien compris des propriétaires majoritaires des principales banques privées 1.

L’existence d’une banque centralisée aux mains d’acteurs financiers privés, qui régit la monnaie dite d’État et qui réglemente plus ou moins directement le secteur des banques privées est le cœur nucléaire de la question monétaire. Les banques centrales 2 sont le centre névralgique de l’organisation du système financier actuel.

Ce concept dit de banque centrale s’est volontiers paré des vertus de l’orthodoxie financière pour s’imposer de façon définitive aux yeux du public. Ainsi, s’est répandue l’idée générale selon laquelle le concept de banque centrale indépendante est justifié par la nécessité de lutter contre un excès d’utilisation, par les hommes politiques, de ce qu’il est convenu d’appeler la planche à billets. Deux constats factuels s’opposent de façon rédhibitoire à l’adoption d’une telle justification.

Le premier constat est que le concept même de banque centrale véhicule une illusion d’indépendance développée et entretenue par des acteurs bancaires. Les banques centrales ont en effet toujours été indépendantes des élus politiques, mais elles n’ont jamais été indépendantes des banquiers qui les contrôlent. Dit autrement, le système actuel des banques centrales est, par construction, indépendant de tout contrôle populaire de type politique, mais au contraire sous la totale dépendance du contrôle capitalistique initial. D’un point de vue conceptuel logique, la recherche d’une orthodoxie financière de l’État peut passer par bien d’autres moyens que celui de remettre les clefs du coffre à un groupe homogène de personnes.

La recherche de l’orthodoxie budgétaire serait, par exemple, bien mieux atteinte par l’organisation de contre-pouvoirs assortie d’une indépendance statutaire réelle des contrôleurs. Les gardiens du coffre public, qui manient l’argent du public, devraient ainsi rendre régulièrement des comptes sur l’impact de leur politique sur la masse des individus constituant l’État. Cet organisme de contrôle pourrait être composé de représentants de la société civile, hors banquiers. Cet organisme aurait les pouvoirs juridiques et politiques de sanctionner les gardiens du coffre lorsque les effets des politiques monétaires suivies seraient durablement et/ou diamétralement contraires aux intérêts économiques des individus auxquels elles s’imposent et à la fluidité du commerce bien compris – c’est-à-dire dans le sens où le commerce profite à tous les acteurs, et non aux seuls propriétaires des plus grands cartels.

Le second constat sur lequel il convient de s’attarder est que les hommes politiques, élus du peuple, qu’ils appartiennent au pouvoir exécutif ou au pouvoir législatif, sont, dans leur très grande majorité, ignorants des questions monétaires. Ils n’étaient pas meilleurs connaisseurs de ces questions hier qu’ils ne le sont aujourd’hui. Les décisions monétaires, y compris celle consistant à recourir à la planche à billets leur étaient soufflées par des hommes de l’art issus du milieu bancaire. Il faut d’ailleurs convenir que, d’un point de vue strictement conceptuel, la différence entre l’ancienne planche à billets et l’actuel quantitative easing (QE) est assez ténue. Il est à la vérité très tentant de considérer que le quantitative easing (QE) actuellement en cours est une version sophistiquée, améliorée, de l’ancienne planche à billets ; ces deux techniques permettant in fine d’orienter la masse monétaire en circulation dans un sens ou dans un autre. Ces mouvements de masse monétaire sont aujourd’hui opérés de façon coordonnée dans la plus grande indépendance des intérêts du public bien compris ; ils répondent à l’intérêt financier supérieur, pris à un moment donné, de la petite population des grands banquiers – non pas apatrides, car ils ne sont pas dépourvus de patrie, mais trans-nationaux, car tous les États, via les banques, sont leur patrie.

En réalité, la justification selon laquelle l’indépendance des banques centrales est liée à la nécessité du contrôle d’hommes politiques trop enclins à faire marcher la planche à billets, est le prétexte cachant une prise du pouvoir politique par les acteurs économiques dominants – les propriétaires des plus grandes banques. Avec l’avènement des banques centrales, l’État en tant qu’entité politique perd le contrôle de sa monnaie, qui est l’une de ses prérogatives régaliennes, au profit des intérêts particuliers du groupe économique dominant. Cette amputation porte atteinte à l’intégrité de la nature politique de la notion d’État. Rappelons à cet égard la prophétie auto-réalisatrice de Mayer Amschel Bauer, fondateur de la dynastie Rothschild, qui dès le XVIIIe siècle affirmait : «Donnez-moi le contrôle de la monnaie d’une nation, et je n’aurai pas à m’occuper de ceux qui font les lois

Cet article propose de revenir sur la genèse de l’ordre oligarchique bancaire actuellement en vigueur en précisant les différentes étapes de l’avènement du système des banques centrales.

I) La création de banques centrales unitaires

La très puissante Banque d’Amsterdam, créée en 1609, est la première institution financière des temps modernes car elle a inauguré le concept de monnaie de banque comme instrument de paiement. La banque d’Amsterdam n’émettait pas, à strictement parler, de billets, mais ses récépissés circulaient dans le commerce comme une monnaie fictive. Par le contrôle qu’elle avait de la monnaie papier-fiduciaire, la banque d’Amsterdam fut l’instigatrice de ce qui deviendra la banque centrale.

Toutefois, la véritable naissance de ce qui deviendra le système des banques centrales remonte, dans une forme archaïque, unicellulaire, à la création de la Banque d’Angleterre (27 juillet 1694) suivie, un siècle plus tard, de celle de la Banque de France par Napoléon (18 janvier 1800).

Suite à ces créations, de type expérimental, les grands argentiers européens – principaux détenteurs de capitaux – ont, dès la fin du XIXe siècle et au début du XXe, entrepris de développer à une échelle bien supérieure le système dit de banque centrale en créant la Federal Reserve américaine.

II) La création d’un système de banque centrale : le système Fed

Une fois acquis – sur le territoire européen – le concept de banque centrale aux mains d’acteurs bancaires privés, la longue marche pour la prise du pouvoir monétaire et financier a conduit en 1913 à l’apparition du système Fed sur le territoire américain 3. Ce système, de type fédéral, est composé de douze banques centrales régionales qui sont dirigées par la plus importante d’entre elles, la banque centrale de New York 4.

Il s’agit d’une organisation bancaire privée, de type hiérarchique et pyramidale, qui contrôle et gère en toute liberté les flux monétaires et financiers à l’intérieur du système politique étatique, mais en toute indépendance vis-à-vis de ce dernier. Notons que les initiateurs de la Fed auront dû pratiquer, après sa création technique en 1910, trois longues années d’intense lobbying politique pour imposer la Fed – titan financier – au pouvoir politique américain, lequel fit à cette occasion la démonstration de sa faiblesse.

Prétendument nationale, la Federal Reserve américaine n’a de national que le nom, elle a en réalité été créée par quelques banquiers privés européens, soutenus par quelques nouveaux capitalistes américains à l’ambition bien affirmée 5. Quant à son fédéralisme, il existe mais de façon autonome par rapport au fédéralisme politique auquel il se superpose. La création politique de la Fed en 1913 a inauguré aux USA l’avènement d’une ère nouvelle dans laquelle l’État fédéral a perdu sa justification politique pour désormais essentiellement se vouer à la défense des intérêts du groupe économique dominant.

Après la Federal Reserve et toujours au XXe siècle, la création de la Banque des règlements internationaux en 1930 correspond à une nouvelle avancée substantielle de ce qui deviendra l’ordre mondial bancaire oligarchique.

III) La création de la BRI

L’année 1930 a vu, à l’occasion du plan Young, la création du joyau de la couronne du système bancaire international : la Banque des règlements internationaux (BRI en français, BIS en anglais).

Son siège est situé à Bâle, en Suisse. Cette institution particulière bénéficie de tous les privilèges d’immunités possibles et détient la capacité diplomatique, ce qui en fait un État dans l’État. Aujourd’hui, la BRI/BIS agit comme la banque centrale des banques centrales, elle fédère les différents banquiers centraux – occidentaux et des pays affiliés – au moyen de réunions régulières et organise et supervise les politiques monétaires qui seront mises en œuvre par les différentes banques centrales.

La BRI est la pierre angulaire de la domination bancaire

Cette institution financière, très peu connue du public, est au cœur du miracle économique nazi de l’entre-deux guerres puisqu’elle a permis une bonne partie du financement de la reconstruction ainsi que de la remilitarisation allemande (alors sous domination nazie). Historiquement, les banquiers anglo-saxons ont été invités aux festivités par le grand argentier allemand Hjalmar Schacht 6 à l’occasion du plan Dawes, bientôt remplacé par le plan Young qui a institué la BRI.

Très concrètement, ce sont, notamment, les prêts octroyés par la BRI qui ont permis à Hitler (qui en a remboursé les intérêts jusque fin 1944) de mettre en œuvre ses préparatifs de guerre tout en faisant peser l’effort de financement – qui assurait dans le même temps l’enrichissement des créanciers – dans un premier temps sur le citoyen allemand et dans un second temps sur les habitants des pays conquis.

La BRI a eu pour objectif premier, comme cela a été parfaitement décrit par l’historienne Annie Lacroix-Riz, de liquider les réparations de guerre dues à la France par l’Allemagne au moyen d’un tour de passe-passe. La ploutocratie française, à la manœuvre lors de la négociation du traité de Versailles, a accepté, dès le début des années 1920, de se plier aux vues anglo-saxonnes et de renoncer à ses réparations de guerre au profit des intérêts qu’elle tirerait avec d’autres acteurs financiers oligarques – en particulier anglo-saxons – des prêts que la BRI accorderait à l’Allemagne. Il faut comprendre que les citoyens allemands ont été les premiers grands perdants – tant sur les plans politique qu’économique – de ces petits arrangements entre les élites oligarchiques aux commandes des différents pays.

Aujourd’hui, loin d’avoir disparu – et bien que sa disparition eût été un temps réclamée – la BRI remplit le rôle de banque centrale des banques centrales. Elle réalise une coordination informelle mais réelle des politiques monétaires des pays occidentaux – et affiliés – actuellement sous domination oligarchique. Cette coordination donne un poids considérable au système bancaire occidental, lui permettant dès lors de peser de façon géopolitique sur tous les États du monde, y compris et surtout sur ceux qui ne sont pas affiliés à l’ordre oligarchique occidental.

En résumé, la BRI est la pierre angulaire du dispositif actuel de domination monétaire à l’anglo-saxonne : à savoir l’enrichissement des oligarchies par les intérêts financiers et non plus directement, comme ce fut le cas auparavant sur le continent européen, par la mise sous tutelle directe des biens et matières premières.

La BRI, État dans l’État, œuvre au rabaissement du concept d’État

La BRI/BIS bénéficie de tous les privilèges d’immunités possibles et détient la capacité diplomatique.

D’un point de vue juridique, donner à une institution bancaire tous les privilèges et immunités possibles signifie que cette institution est structurellement élevée au même rang qu’un État.

La fonction essentielle d’un État est d’être un organisme politique qui s’occupe de réguler la vie en société sur un territoire donné. Un organisme bancaire dont le rôle, purement économique, se limite à imposer les intérêts particuliers de ses principaux propriétaires ne répond à aucun intérêt public entendu au sens politique et organisationnel du terme, il ne répond qu’à l’intérêt de groupe – collectivement homogène – de ses principaux propriétaires. La mise sur un pied d’égalité, au moyen d’un statut international, d’un État et d’un organisme financier réalise en conséquence l’abaissement structurel du rôle de l’État, dont la dimension politique est purement et simplement niée.

Avec la BRI, c’est la première fois dans l’histoire du monde qu’une institution financière internationale acquiert un statut politique similaire à celui d’un État. Cette expérience, réussie, a eu une suite : l’avènement du système monétaire européen (SME). Ce dernier s’inscrit dans le cadre de la construction monétaire européenne passant, en premier lieu, par la création du système européen de banques centrales (SEBC).

IV) La centralisation européenne des banques centrales : le SEBC et le SME

L’expérience américaine de la Fed s’étant avérée un grand succès – et selon le principe de bonne politique qui impose de pérenniser une méthode qui a fait ses preuves –, les grands argentiers occidentaux ont décidé de dupliquer ce modèle pour l’imposer au niveau européen.

C’est ainsi que le système dit des banques centrales a eu de récents rebondissements dans l’ordre juridique international par le biais de l’Union européenne, avec la création du fameux système européen de banques centrales, chapeauté par la BCE (Banque centrale européenne), suivi et complété par le mécanisme européen de stabilité.

La création politique d’une Europe unifiée – grâce au pays dominant 7 que sont les USA – par le mariage de la carpe et du lapin, a vu apparaître, à côté d’institutions politiques dévouées aux intérêts privés des multinationales 8, l’avènement d’un système banques centrales indépendant du pouvoir politique calqué sur le modèle de la Réserve fédérale américaine.

Toutefois le change avait été donné aux populations en conservant une pseudo organisation démocratique 9. Cette organisation démocratique purement formelle, de type parlementaire, était néanmoins susceptible de gêner ou retarder la mise en place des intérêts du groupe économique dominant. C’est pourquoi, à titre de garantie, ce groupe a estimé préférable de maintenir un contrôle direct sur le fonctionnement de l’organigramme juridique en organisant le système des banques centrales sur le modèle de la Réserve fédérale américaine.

Ce SEBC, voulu structurellement indépendant des gouvernements politiques des États 10, obéit néanmoins au contrôle capitalistique bancaire. Officieusement, le SEBC est dominé par la Buba, banque centrale allemande, elle-même représentant, dans une large mesure, les mêmes intérêts que ceux de la Fed. Dans le système SEBC, la Buba sert d’intermédiaire aux volontés oligarchiques en matière financière au même titre que le gouvernement allemand sert, en Union européenne, de courroie de transmission pour les directives oligarchiques lorsque celles-ci nécessitent la mise en œuvre d’un processus législatif.

Le rôle fondamental joué par l’Allemagne dans le processus oligarchique s’explique par le poids de l’histoire et les imbrications capitalistiques germano-anglo-saxonnes du début du XXe siècle. Ce rôle fondamental de l’Allemagne s’explique également – depuis et après la Seconde Guerre mondiale – tant par la récupération des élites militaires nazies par le système financiaro-politique américain (CIA, NASA etc) 11, que par la domination militaire du territoire allemand par les armées américaines.

Pour avoir une vue européenne d’ensemble – et exhaustive – du tableau de la domination bancaire par la monnaie, il faut rappeler que les statuts de la BRI ont servi de modèle à la création du Mécanisme européen de stabilité (MES) apparu en 2012. Le MES, en tant que nouvelle institution financière, est l’héritier direct de la BRI dans son rôle de négation de l’aspect politique et organisationnel du rôle de l’État.

La suprématie oligarchique en matière monétaire a été consolidée au niveau mondial par les accords de Bretton Woods qui ont accordé à l’oligarchie de type américano-anglaise la suprématie définitive sur les oligarchies classiques de type occidental 12.

V) Les institutions financières issues des accords de Bretton Woods

A l’occasion des accords de Bretton Woods, la ploutocratie occidentale a imposé au monde entier, par l’intermédiaire du gouvernement des États-Unis vainqueur financier de deux guerres mondiales, les institutions financières internationales majeures dites régulatrices que sont le FMI et la Banque mondiale. Ce faisant, Bretton Woods a mis au point l’ordre monétaro-financier à l’anglo-saxonne sous le joug duquel nous vivons actuellement.

Le FMI

Le FMI, grand ennemi des peuples, pratique un peu à la façon de la BRI. Il octroie, moyennant intérêts, des prêts à des États en grandes difficultés financières – difficultés souvent pilotées par des établissements financiers spéculatifs du type hedge funds 13.

La nouveauté par rapport à la BRI est que ces prêts sont octroyés moyennant une double contrepartie : d’une part un taux d’intérêt et d’autre part l’exigence de cessions d’actifs étatiques ou publics à des multinationales afin de permettre le désendettement. Derrière les grandes et belles prétendues volontés ouvertement affichées, la structure même du FMI laisse entrevoir que ses objectifs réels sont à l’opposé de ceux qui sont proclamés : il s’agit tout simplement d’organiser, au moyen d’un pas de danse rhétorique consistant à imposer un endettement tout en exigeant d’en sortir, l’appauvrissement à la fois des États et des populations.

Ce vice de construction est tout à fait délibéré, il s’agit tout simplement de la mise en œuvre légale et internationale d’une pure prédation du système politique par les tenants du système économique au moyen de l’affaiblissement structurel de l’assise économique et financière des États. Une fois de plus, on assiste à un dévoiement de la nature politique des États, lesquels sont rabaissés, par une institution internationale, au rang de simples organisations de type privé, faisant fi des intérêts collectifs qui sous-tendent la notion même d’État.

La Banque mondiale

La Banque mondiale est, comme son nom l’indique, la première pierre au futur édifice du gouvernement mondial. La Banque mondiale est au cœur du système de protection des investissements des entreprises multinationales que nous retrouverons à l’occasion de l’étude sur le libre-échange. Cet organisme, qui prétend officiellement éradiquer la pauvreté dans le monde, est officieusement, mais aussi structurellement, notamment par sa prise de position en faveur des investissements, responsable de l’aggraver.

Début 2015, un consortium de journalistes a révélé que la Banque mondiale finançait des projets non seulement inefficaces mais encore en totale contradiction avec ses missions officielles, forçant des millions de personnes à quitter leurs terres ou leurs logements.

La Banque mondiale, dominée par la finance anglo-saxonne, a notamment été dirigée par un proche de la famille Bush, Paul Wolfowitz ; ce dernier, baigné à la fois dans le trotskisme et le néo-conservatisme de l’école de Chicago, fut également très impliqué dans les affaires du Pentagone. Paul Wolfowitz a dû démissionner de ses fonctions suite à un scandale sur fond de népotisme. Début 2015, un nouveau scandale surgit alors que la Banque mondiale prétend retourner à l’équilibre financier en diminuant ses coûts et augmentant ses ressources par le renchérissement du coût de ses prêts et par l’augmentation de ses placements sur les marchés. Outre que le renchérissement du coût de ses prêts est en totale opposition avec l’objectif officiel d’éradication de la pauvreté affiché par la Banque mondiale, une recherche d’économie ne s’accorde en effet logiquement pas avec la distribution de primes et de bonus à certains de ses hauts dirigeants.

Les organisations financières internationales issues des accords de Bretton Woods apparaissent en réalité comme des paravents chargés de légitimer l’affaiblissement des ressources financières des États.

Avec la création de ces institutions, nous assistons à l’avènement mondial du fait économique en lieu et place du fait politique. Mais tandis que la conception politique du monde, par essence variée en fonction des histoires propres à chaque nation, avait pour mission de régir tous les intérêts en présence sur un territoire donné, la conception strictement économique et financière du monde ne remplit que la satisfaction des intérêts bien compris d’un tout petit groupe d’individus qui domine la vie économique ; la notion de territoire n’étant dès lors plus pertinente.

La domination financière des États s’accompagne en outre d’une homogénéisation préoccupante des intérêts des différents gouvernants du monde ; elle ouvre la voie à l’organisation d’un gouvernement mondial de type oligarchique, le fameux Nouvel Ordre Mondial.

Conclusion

Le contrôle des flux financiers du monde par un groupe économiquement dominant nécessite un contrôle des monnaies. Ce contrôle est réalisé au moyen de l’organisation d’un système sophistiqué de banques centrale. Le contrôle des monnaies est un instrument privilégié, pour les grands détenteurs de capitaux occidentaux, afin d’agir politiquement sur l’économie de tous les pays du monde.

La finance internationale dominée par les propriétaires des grandes banques privées fonctionne, via l’organisation des banques centrales, en système fermé, dans le sens des intérêts d’un très petit nombre d’individus qui ont accaparé les fonctions monétaires et, par voie de conséquence, économiques et politiques des États-nations voués à disparaître. Cette domination mondiale par la finance a été parachevée par l’avènement des institutions financières internationales telles que la BRI/BIS ainsi que par les institutions financières issues des accords de Bretton Woods.

La domination politique actuelle par les acteurs financiers est irrémédiablement liée à la disparition des États-nations. Le type de domination occidentale classique – celle de l’Ancien Régime – fondé sur la propriété foncière, représentait une conception politique et juridique continentale du monde qui tournait autour du concept d’État-nation. Cette conception a, depuis la Révolution française et avec une nette accélération au XXe siècle, définitivement cédé la place à une domination financière fondée sur une conception du monde de type anglo-saxon entièrement tournée vers le fait économique. Nous assistons aujourd’hui aux dernières scènes d’une vaste entreprise de dépréciation de la notion politique d’État au bénéfice de l’intérêt privé d’un petit nombre de personnes qui se sont rendues maîtresses du système monétaire mondial. En Occident, le fait politique a cédé la place au fait économique.

Ce n’est pas un hasard si la méthode de domination ultra-marine fondée sur l’argent et la finance l’a finalement emporté sur la méthode traditionnelle de domination continentale fondée sur l’accaparement de la propriété foncière. Cette évolution est largement due au fait qu’une appropriation ouverte et directe des biens est moins efficace – car soulève bien plus d’hostilité et de résistance – qu’une appropriation sournoise liée à l’anonymat des propriétaires de cartels d’entreprises. L’anonymat permis par le modèle d’entreprise capitalistique joue un rôle essentiel dans l’entreprise de domination mondiale actuelle par les élites financières.

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Notes

  1. Sur les bénéficiaires de la politique suivie par les banques centrales, voir par exemple l’article suivant : http://www.eric-verhaeghe.fr/leurope-est-elle-sous-la-tutelle-de-ses-banques
  2. Cf. à ce propos Martin Armstrong
  3. Cf. La guerre des monnaies de Hongbing Song, éditions Le Retour aux sources
  4. Sur l’organisation américaine du système banque centrale, voir https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9serve_f%C3%A9d%C3%A9rale_des_%C3%89tats-Unis
  5. Cf. Eustace Mullins Les secrets de la Réserve fédérale aux éditions Le Retour aux Sources (paru en français en octobre 2010) ; voir également Antony C. Sutton Le complot de la Réserve fédérale, aux éditions Nouvelle Terre (paru en France en 2009)
  6. Voir également la thèse de Frédéric Clavert, Hjalmar Schacht, financier et diplomate (1930-1950), HAL archives ouvertes.fr ; en particulier p. 49 et 50
  7. A ce propos, lire Annie Lacroix-Riz, L’intégration européenne de la France ; la tutelle de l’Allemagne et des États-Unis, éditions Le Temps des Cerises
  8. Sur l’intérêt structurellement dominant des multinationales en UE, voir par exemple : https://www.youtube.com/watch?v=0LJdUtJ__IM
  9. Sur les limites institutionnelles de la démocratie européenne, voir par exemple : https://www.youtube.com/watch?v=H8qpT9DASUY
  10. Cf. articles 127 et s. du TFUE, voir en particulier l’article 130 : «Dans l’exercice des pouvoirs et dans l’accomplissement des missions et des devoirs qui leur ont été conférés par les traités et les statuts du SEBC et de la BCE, ni la Banque centrale européenne, ni une banque centrale nationale, ni un membre quelconque de leurs organes de décision ne peuvent solliciter ni accepter des instructions des institutions, organes ou organismes de l’Union, des gouvernements des États membres ou de tout autre organisme. Les institutions, organes ou organismes de l’Union ainsi que les gouvernements des États membres s’engagent à respecter ce principe et à ne pas chercher à influencer les membres des organes de décision de la Banque centrale européenne ou des banques centrales nationales dans l’accomplissement de leurs missions
  11. Cf. l’opération Paperclip : http://www.voltairenet.org/article14657.html ; également http://rr0.org/org/us/dod/Paperclip.html ; les réseaux d’exfiltration nazis passaient par le Vatican : https://fr.wikipedia.org/wiki/Réseaux_d’exfiltration_nazis
  12. Voir sur ce sujet Annie Lacroix-Riz : https://vimeo.com/18006526 ; également : Cf. Annie Lacroix-Riz, L’intégration européenne de la France ; la tutelle de l’Allemagne et des États-Unis, aux éditions Le Temps des Cerises
  13. Sur le rôle des hedge funds dans le déclenchement de la crise grecque, cf. Myret Zaki : https://www.youtube.com/watch?v=TLjq25_ayWM
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