Comment l’Occident est tombé dans le Piège de l’Or [3/3]


Russie-Chine : une alliance en or


Par Dmitry Kalinichenko – Le 7 juillet 2015 – Source : FortRuss

Première partie

Deuxième partie

1. Les cours du pétrole ont baissé de moitié

La Russie a vu fondre ses revenus tirés de l’exportation de pétrole et de gaz. Résultat, le budget russe, d’excédentaire, est devenu déficitaire. L’Occident, mené par les États-Unis, a donc privé la Russie de la possibilité de continuer à augmenter ses réserves d’or, comme c’était le cas grâce aux exportations d’hydrocarbures à bon prix. L’afflux de devises étrangères en Russie a été stoppé. Et le rouble a chuté, entraînant le doublement des prix des importations russes de biens manufacturés. Ce plat de sanctions aux mille ingrédients a été minutieusement concocté par les chefs de Washington, pour la Russie, coupable d’avoir osé défier la domination du dollar. La Russie a refusé de continuer à emprunter aux États-Unis, en rachetant des Bons du Trésor, ce qui a été considéré à Washington comme un acte de guerre.

Washington sait mieux que quiconque que le fait de remplacer systématiquement les actifs libellés en dollars américains par de l’or, dans la structure des réserves russes, va miner le monopole de facto que les Américains exercent sur la finance mondiale.

2. Seule une poignée d’observateurs avertis l’a noté, la baisse des cours du pétrole et celle du rouble ont masqué le fait que le ratio des prix pétroliers et de l’or, exprimés en dollars, a baissé de plus de 50%.

Si au début de 2014, 13 barils de pétrole correspondaient, en dollars, à une once d’or, aujourd’hui il faut 29 barils de pétrole pour une once d’or. Autrement dit, avant, la Russie devait exporter 13 barils de pétrole pour pouvoir acheter une once d’or. Aujourd’hui, il lui faut exporter 29 barils de pétrole pour se procurer la même quantité d’or. Ce que l’on voit clairement sur ce schéma :

En savoir plusLu dans Forbes : une crise est inévitable

Comme vous le savez, les prix du gaz baissent en même temps que les prix du pétrole, puisque le cours du gaz est basé sur celui du pétrole.

En divisant les cours du pétrole par deux, Washington bloque les capacités de la Russie d’acheter de l’or en échange de ses ressources énergétiques, bradées grâce aux efforts des Occidentaux. Bien sûr, cette tentative de l’Ouest n’a pas atteint son but. La chute des cours du pétrole et la dépréciation du rouble n’ont pas ralenti les achats d’or sur le marché intérieur par la Banque de Russie. En plus, la Chine a aussitôt profité de l’occasion pour reprendre la première place mondiale des achats d’or à l’Inde.

3. Réalisant soudain qu’on décrit Poutine comme le grand maître des échecs qui met l’Occident mat, la Maison Blanche a tenu à réfuter cette information publiquement.

Lors d’un entretien donné à CNN, le Président Barack Obama a déclaré : «Je ne pense pas que Poutine soit un maître qui puisse me battre.» Pour appuyer ses dires, Obama a souligné la chute du rouble et les problèmes causés à l’économie russe par les sanctions occidentales.

En savoir plusVu sur le site russe de BFM (traduction automatique)

Avec cette affirmation, Obama a reconnu publiquement que tout ce qui affecte l’économie mondiale et celle de la Russie, loin d’être un hasard, est l’œuvre des manipulations décidées par les hommes du pouvoir financier de Washington. Dans la langue utilisée par nous autres humbles mortels, cette déclaration d’Obama signifie qu’il va faire rentrer le dissident Poutine dans le droit chemin, et que la Russie va à nouveau frapper à la porte de l’Église washingtonienne des Témoins du Dollar. La mesure ultime que devrait prendre Poutine quand il se repentira sera de vendre son or, selon les docteurs de la loi de l’Église washingtonienne des Témoins du Dollar. De nombreux organes de presse influents en Occident ont déjà signalé que la Russie avait commencé à le vendre. Une fausse information, dans la plus pure tradition démocratique des médias de masse occidentaux.

4. En dépit des sanctions occidentales et de cette baisse du cours du pétrole par rapport à celui de l’or, la Russie a continué à augmenter ses réserves d’or jusqu’à la fin de 2014.

En décembre 2014, la Banque de Russie a ajouté 19 tonnes d’or à ses réserves. Et 2014 fut une année record pour les achats d’or, si on prend les 25 dernières années. Autant dire, un record dans toute l’histoire de la Fédération de Russie. Durant l’année 2014, la Banque de Russie a acheté 171 tonnes d’or. En 2014, les achats d’or par la Russie ont représenté un tiers des achats des banques centrales du monde, c’est le Financial Times qui le dit, citant une étude de Thomson Reuters GFMS.

En savoir plusVu sur un site financier russe (traduction automatique)

5. Fin 2014, encore une révélation désagréable pour l’Église washingtonienne des Témoins du Dollar : la Russie est devenue le deuxième producteur mondial d’or, seulement dépassée par la Chine – aïe! un membre des BRICS et de l’Organisation de sécurité de Shangaï.

Une vérité qui donne des sueurs froides aux Américains, parce que l’axe Russie-Chine pourrait bien créer sa propre monnaie de référence sur des fondations solides – l’or, devise internationale – devise qui serait utilisée par les BRICS comme une devise de paiement universelle et un véritable étalon de mesure.

6. Et il y a les députés russes!

Les grands-prêtres du dollar hégémonique n’en peuvent plus : depuis le début de 2015 les députés de la Douma de la Fédération de Russie ont à plusieurs reprises et lors de débats très animés discuté de l’introduction de l’or comme nouvelle devise de paiement international. Nouvelle devise, ou plutôt devise temporairement oubliée, sous la forme du Rouble d’Or de Russie.

Tout ces préparatifs forment une véritable menace contre le dollar, en tant qu’instrument du monopole financier global américain. Cette évolution oblige Washington à adopter des mesures urgentes et extraordinaires contre la Russie rebelle de Poutine.

7. Washington a toujours voulu éliminer par la guerre tous ceux qui ont tenté d’arrêter d’utiliser le dollar américain comme moyen de paiement et, plus grave (que Dieu leur pardonne !), comme mesure-étalon.

Les vraies raisons de l’agression militaire occidentale, cornaquée par les États-Unis, contre l’Irak et la Libye sont à chercher dans le souhait de leurs leaders d’abandonner le dollar. Toutes les autres raisons : manque de démocratie en dépit des richesses générées par les hydrocarbures, manque d’empressement à suivre les sacro-saintes valeurs de l’Occident, etc. sont uniquement des prétextes de propagande nécessaires pour cacher les vraies raisons de la guerre et justifier l’agression militaire.

La vraie raison pour la guerre contre l’Irak et la Libye fut le souhait légitime de leurs leaders d’abandonner le dollar pour l’or. Les événements d’Ukraine sont la manifestation de la guerre américaine non déclarée contre la Russie, par Ukrainiens interposés. Ou, comme on le dit maintenant, les événements d’Ukraine sont une guerre de vassaux contre la Russie. Et tout le monde l’a bien compris. Que ce soit aux États-Unis, en Russie ou en Europe.

Nous sommes donc devant la panoplie complète des mesures punitives traditionnelles contre un pays qui a osé défier la domination financière américaine sur le monde. Si nous laissons de côté les habituels propos moralisateurs sur les valeurs démocratiques, toutes ces mesures font partie de l’opération obliger la Russie à vendre son or. Mais l’appui chinois à la Russie annule tous les efforts de Washington à ce sujet. Donc, Washington a besoin d’améliorer ses relations de toute urgence avec la Chine, et c’est devenu la priorité n°1 pour l’Amérique. Mais même si la Russie est obligée de vendre son or, elle le vendra à la Chine, ou il restera au sein de l’Alliance de l’Or sino-russe. Obama a invité plusieurs fois, et de manière pressante, Xi Jinping à se rendre en visite officielle à Washington : ce sont des tentatives pour briser l’alliance sino-russe. Si Washington réussit, l’Occident doublera ses chances transformer la Russie en colonie minière et d’étrangler la Chine via ses approvisionnements énergétiques.

La première chose que la Russie ferait, une fois assujettie à l’Ouest, serait d’arrêter tout approvisionnement énergétique et en matières premières à la Chine, sur commande de Washington. Coloniser la Russie est le premier pas pour coloniser la Chine. Xi Jinping, si on observe ses discours et ses actes, comprend cela mieux que quiconque. Les espoirs de la Maison Blanche de persuader le leader chinois d’abandonner l’alliance avec la Russie ne valent pas plus que ceux de le voir acquiescer à la colonisation de la Chine.

Cette fois, pas de solution militaire habituelle américaine. La Russie n’est pas l’Irak, ni la Libye ni même le Vietnam.

Un acte de guerre direct contre un pays comme la Russie pourrait signifier la fin des États-Unis. Aussi Washington essaie-t-il de faire des Européens de la chair à canon, les poussant fermement à la guerre contre la Russie. La dernière fois, les États-Unis avaient réussi leur coup, via leur protégé Hitler, littéralement installé au pouvoir par les représentants de Wall Street.

En savoir plus : Document à télécharger : Wall Street et l’ascension d’Hitler 

La Seconde Guerre mondiale a permis aux États-Unis de sortir de la Grande Dépression, mais aussi de devenir la nation la plus riche du monde, vendant des équipements militaires aux deux camps.

En savoir plus : Pourquoi l’Amérique a besoin d’une guerre

A la fin de la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis avaient augmenté leurs réserves d’or de 60%, ce qui a permis au dollar de devenir la monnaie mondiale de référence, en 1944.

Aujourd’hui les États-Unis ont épuisé toutes les richesses qu’ils avaient gagnées lors de ce conflit. L’Amérique est à nouveau en dépression et a besoin d’une grande guerre à ses confins – en Europe.

En savoir plus Lu dans un site spécialisé sur le marché de l’or

L’Europe résiste encore et refuse de lancer une guerre contre la Russie, au nom des intérêts américains. Vous comprenez que lorsque nous disons Europe, nous ne parlons pas des Européens. Nous parlons d’un petit groupe de personnes qui détiennent le pouvoir en Europe.

Ce qui veut dire que la possibilité d’une nouvelle guerre dépend de la résistance individuelle et de la volonté politique d’une très petit nombre de responsables, que l’on peut compter sur les doigts de la main. Des millions de gens, en Europe et en Russie, peuvent seulement espérer que ces personnalités sont sans peur, immortelles, incorruptibles et ne se jettent pas sur les femmes de ménage entre deux âges, dans les hôtels américains. Le souhait de voir la Russie réduite à l’état de colonie minière est l’intérêt commun des États-Unis et de l’Europe. Mais le souhait des États-Unis de voir l’Europe se lancer dans une guerre contre la Russie pour réaliser ce but divise les deux compères : ce n’est certes pas l’intérêt de l’Europe de risquer d’être complètement détruite !

En Occident, comme avant le début de l’opération pour forcer la Russie à vendre son or, personne ne comprend ce que Poutine fait maintenant ni ce qu’il fera demain. Pour un non-grand maître touché par les sanctions, Poutine semble bien sûr de lui et sourit un peu trop souvent.

En savoir plusLu sur le site Panteres : Rira bien qui rira le dernier

Il sourit, comme s’il pouvait détruire l’Otan et tout le système financier occidental n’importe quand. Ce dont Paul Craig Roberts ne doute pas, alertant l’Administration américaine : «Les ruines, c’est notre futur».

Beaucoup se demandent : «Peut-être Poutine bluffe-t-il seulement et fait-il contre mauvaise fortune bon cœur?» Peut-être. Mais rappelez-vous le nombre de fois où l’on a cru que Poutine bluffait. Et combien dure, à chaque fois, a été la désillusion. Donc, si ce n’est pas du bluff, quel sera le prochain coup du grand maître Poutine et de son homologue Xi Jinping ?

Traduit du russe par Kristina Rus

Traduit de l’anglais par Ludovic, relu par jj et Diane pour le Saker Francophone

Fin (provisoire ?) de la série.

   Envoyer l'article en PDF