Taïwan étale son irresponsabilité devant le monde entier en faisant passer la politique avant la justice


Par Andrew Korybko − Le 23 octobre 2019 − Source cgtn.com

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Chan Tong-kai, résident de Hong Kong et principal suspect du meurtre de sa petite amie il y a plus d’un an et demi, lors de vacances à Taïwan, a pu sortir de prison le 23 octobre après une détention pour blanchiment d’argent ; le jour même où la loi d’extradition de sa ville de résidence doit être formellement suspendue. Cette affaire controversée a exposé un trou dans le système légal de la Région administrative spéciale, qui empêche la ville de l’extrader vers Taïwan pour qu’il y soit jugé pour le crime qu’il est accusé d’avoir commis, et dont il est dit qu’il l’a avoué lors de sa garde à vue.

Chan Tong-kai, un habitant de Hong Kong, accusé d’avoir assassiné sa petite amie à Taïwan l’an dernier, s’incline devant les médias à Hong Kong, en Chine, le 23 octobre 2019 /VCG Photo

La ville avait adopté une loi, début 2019, pour rectifier le problème et garantir que les suspects tels que Chan Tong-kai puissent être envoyés à Taïwan pour y être jugés, à la demande des juridictions où on les suspecte d’avoir enfreint la loi. Mais des radicaux politiques ont relayé une image fausse de la loi d’extradition, afin de provoquer de grandes manifestations anti-gouvernementales, qui ont été de plus en plus violentes au cours de l’été.

Rétrospectivement, cette initiative légale, lancée avec de bonnes intentions, a été exploitée comme déclencheur pour mettre en mouvement un projet de déstabilisation défini à l’avance.

Des violences ont continué malgré l’annonce du dirigeant de la ville que la loi serait suspendue, mais on s’émeut de nouveau fortement, du fait qu’il est à prévoir que la justice ne sera pas rendue, Chan Tong-kai ayant été libéré le même jour.

Carrie Lam, dirigeante de la région administrative spéciale de Hong Kong, s’exprime lors d’une conférence, HKSAR, Chine, le 20 août 2019 /VCG Photo

Hong Kong, en tant qu’entité de la République de Chine responsable et respectueuse de la loi, ne peut pas violer ses propres lois pour extrader ce personnage à Taïwan, si la loi n’est pas adoptée pour autoriser le gouvernement à ce faire, si bien qu’il sera techniquement un homme libre dès l’instant où il aura mis le pied hors de prison.

C’est alors que le suspect a créé la surprise, en souscrivant aux invitations d’un homme d’Église anglican, qui l’exhortait à se rendre aux policiers. Mais les prétendues « autorités » taïwanaises ont refusé sa courageuse démarche, exigeant ce qui est décrit par les médias comme des « discussions formelles dans un cadre légal », ou pour l’exprimer différemment, une extradition légale de sa personne par Hong Kong, malgré le fait que la loi en question, qui aurait permis cette décision de bon sens, n’entrera pas en œuvre, résultat des désordres agités politiquement qui ont éclaté à Hong Kong tout l’été.

Taïwan n’est pas sans savoir que Hong Kong ne peut pas réaliser légalement cette extradition, et sa demande peut être interprétée comme une priorisation de la politique sur la justice, aux fins de créer un scandale, rendant impossible à Chan Tong-kai de répondre à la justice pour le crime qu’il a reconnu avoir commis.

Aucune entité faisant preuve d’une quelconque responsabilité politique n’aurait rejeté le désir d’un suspect de se rendre auprès des tribunaux après avoir fui le territoire où le crime suspecté a été commis ; et pourtant, c’est exactement ce que fait Taïwan, montrant au monde entier l’artificialité de sa situation politique, et illustrant le fait qu’elle ne mérite aucune reconnaissance internationale.

Sauf à ce que Taïwan soit prise d’un élan de justice de dernière minute et que le bon sens finisse par l’emporter, la libération de Chan Tong-kai provoquera sans aucun doute de très fortes émotions de la part du peuple de cette île, d’Hong Kong, de la Chine, et même du monde entier. Quelle farce en effet qu’un assassin ayant avoué puisse échapper à la justice du simple fait que le territoire sur lequel il a commis son crime refuse d’accepter sa reddition volontaire pour des raisons politiques! On n’aurait certes pas imaginé d’avance qu’un tel scénario pût se produire, mais les faits donnent raison à la majorité de pays du monde qui refusent de reconnaître Taïwan.

La poignée d’États qui persistent à reconnaître Taïwan devraient avoir honte de soutenir tacitement cette posture profondément anti-éthique des soi-disant « autorités » taïwanaises, et sont donc complices des violations flagrantes des normes en matière de justice criminelle internationalement reconnue.

Le choix de Taïwan de faire passer la politique avant la justice est fortement répréhensible, et totalement intéressé. Mais ce même choix pourrait provoquer un retour de flamme, si les membres responsables de la communauté internationale le condamnent avec fermeté, et si les résidents de Taïwan manifestent pacifiquement en masse pour exprimer leur opposition à cette décision, et attirent l’attention du monde sur leur réprobation en la matière.

Andrew Korybko est un analyste politique américain, établi à Moscou, spécialisé dans les relations entre la stratégie étasunienne en Afrique et en Eurasie, les nouvelles Routes de la soie chinoises, et la Guerre hybride.

Traduit par José Martí, relu par Camille pour le Saker Francophone

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