Par Moon of Alabama – Le 7 septembre 2021
L’hostilité des États-Unis envers l’axe de la résistance en Iran, en Irak, en Syrie et au Liban conduit à des objectifs contradictoires. Si les États-Unis veulent isoler la “résistance”, ils veulent aussi conserver leur rôle dominant au Liban. Ces objectifs sont désormais en conflit. Les États-Unis se trouvent donc dans une situation où ils devront lever les sanctions contre la Syrie pour pouvoir concurrencer politiquement le Hezbollah au Liban.
Les États-Unis avaient assiégé économiquement le Liban pour le contraindre à obéir :
Après l'échec d'Israël à perturber ou à vaincre le Hezbollah lors de la guerre de 2006, la victoire de l'Axe de la Résistance dans le conflit syrien et la portée militaire et stratégique croissante du Hezbollah, les États-Unis ont mis en place une politique visant à affamer le Liban et à déstabiliser l'économie du pays. Mais le sac à malices de Washington était vide, à part cette dernière arme de sanctions/siège. ... Israël veut que les États-Unis fassent l'impossible : faire pression sur le Liban pour qu'il désarme le Hezbollah et reprenne les négociations sur la frontière contestée de la mer Méditerranée pour l'extraction du gaz. ... Entre-temps, les Libanais ont perdu confiance dans un système bancaire qui a confisqué leurs économies il y a près de deux ans, et dans une banque centrale soutenue par les États-Unis qui a contribué à l'effondrement de la monnaie locale. Le gouvernement libanais en faillite a, à son tour, supprimé la plupart des subventions sur l'essence nécessaire au fonctionnement des hôpitaux, de l'électricité, des transports et des boulangeries.
Le pays n’a plus de réserves monétaires pour importer du pétrole ou de l’essence et pour produire de l’électricité. Les coupures de courant durent désormais 22 heures par jour. Il n’y a plus de gouvernement fonctionnel pouvant résoudre ces problèmes.
Le Liban est donc plongé dans une récession extrêmement profonde au cours de laquelle le taux de pauvreté est passé de 40 % à plus de 80 %. De plus, aucun politicien ou chef de faction libanais n’osera attaquer le Hezbollah, car il est trop puissant pour être battu. De même, personne, à l’exception peut-être d’Israël ou des États-Unis, ne souhaite que le Liban retourne à l’époque de la guerre civile.
Le Hezbollah a aidé ses membres à traverser la crise en leur fournissant de la nourriture subventionnée. Mais il ne peut pas soutenir tout le Liban. Ce qu’il peut faire par contre, avec ses amis en Syrie et en Iran, c’est briser le siège que les États-Unis imposent au pays.
L’Iran avait proposé de fournir du pétrole au Liban en échange de lires libanaises (sans valeur). Mais le gouvernement libanais n’a pas accepté cette offre car les États-Unis l’ont menacé de sanctions supplémentaires.
Le Hezbollah s’est engouffré dans la brèche. Trois pétroliers ont quitté l’Iran et sont en route pour la Syrie. Leur chargement sera raffiné dans une raffinerie syrienne. De là, le diesel et l’essence seront acheminés au Liban où le Hezbollah organisera la distribution.
Après que cela a été connu et que les pétroliers sont partis – protégés par la menace du Hezbollah d’attaquer quiconque les toucherait – les États-Unis ont dû contrer l’offre. Ils ne pourraient plus soutenir la prétention d’être un ami du Liban s’ils étaient perçus comme ne faisant rien pour aider le pays alors que le Hezbollah et l’Iran lui apportent un soutien réel.
Les États-Unis ont donc proposé un plan plutôt étrange. L’Égypte augmentera ses approvisionnements en gaz naturel pour la Jordanie où il sera utilisé pour produire de l’électricité qui sera ensuite exportée vers le Liban. On ne sait pas encore par qui, ni comment, sera payé tout cela.
De plus, comme le Liban et la Jordanie n’ont pas de frontière commune, l’électricité devra être acheminée à travers la Syrie !
Le plan américain visant à apporter un soutien marginal au Liban nécessite donc une rupture des sanctions américaines contre la Syrie et son isolement diplomatique :
La Jordanie accueillera mercredi une réunion des ministres de l'énergie égyptien, syrien et libanais pour discuter du transport du gaz égyptien vers le Liban pour la production d'électricité, a déclaré le radiodiffuseur d'État Mamlaka. Les États-Unis sont en pourparlers avec l'Égypte et la Jordanie au sujet d'un plan visant à atténuer le manque d'électricité au Liban, qui prévoit l'utilisation du gaz égyptien pour produire de l'électricité en Jordanie, laquelle serait transmise via la Syrie. Une délégation libanaise de haut niveau s'est rendue à Damas samedi pour ouvrir la voie au plan soutenu par les États-Unis visant à atténuer les pénuries d'électricité au Liban. Les sanctions américaines à l'encontre de Damas compliquent tout effort visant à aider le Liban via la Syrie, mais les diplomates affirment que Washington étudie les moyens de surmonter ces obstacles de toute urgence.
Les États-Unis devront maintenant lever les sanctions contre la Syrie pour gagner une guerre de relations publiques contre l’axe de résistance libanais. Certains paiements devront également être effectués à la Syrie pour reconstruire les lignes électriques nécessaires qui ont été détruites pendant la guerre.
En poussant à l’imposition de sanctions et de blocus à quiconque n’est pas d’accord avec la vision “occidentale” du monde, les États-Unis font échouer leurs propres objectifs politiques. Le risque que tout le Liban bascule du côté de la résistance les oblige maintenant à rompre leur propre politique de sanctions.
C’est une défaite diplomatique et une perte d’image que peu de gens au Moyen-Orient sont prêts à oublier de sitôt.
Moon of Alabama
Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone
Ping : Retour de bâton de la politique étatsunienne de sanctions contre la Syrie | Groupe Gaulliste Sceaux
Ping : Retour de bâton de la politique étatsunienne de sanctions contre la Syrie – Les moutons enragés