Par Ron Unz − Le 13 février 2023 − Source Unz Review
Notre paysage politique est complètement saturé par une marée massive de propagande officielle. Il n’est donc guère surprenant que l’on trouve souvent les quelques points visibles de dissidence parmi les personnalités qui représentèrent jadis les plus hauts sommets du journalisme et de l’érudition universitaire.
Seymour Hersh fait partie de cette catégorie. Avec un prix Pulitzer et cinq prix George Polk, Hersh figure définitivement parmi les reporters les plus réputés du demi-siècle passé, connu pour avoir révélé le Massacre de My Lai, la prison d’Abou Ghraib, et d’autres emblèmes du journalisme d’investigation.
Il y a quelques jours, il a lâché une bombe, possiblement aussi explosive que toute autre chose de sa carrière, en rapportant le récit de la manière suivant laquelle le gouvernement étasunien a détruit les gazoducs énergétiques de Nord Stream, des lignes de vie essentielles pour l’économie européenne. Non seulement les attaques ont constitué un acte de guerre contre l’Allemagne, l’un des alliés les plus proches des États-Unis au sein de l’OTAN, mais les explosions ont sans doute produit la plus grande destruction en temps de paix d’infrastructures civiles de toute l’histoire du monde, la valeur des oléoducs, de 30 milliards de dollars, dépassant de très loin les pertes matérielles provoquées par les attaques du 11 septembre 2001.
Comment les États-Unis ont détruit le gazoduc de Nord Stream.
Le New York Times l’a qualifié de “mystère”, mais les États-Unis ont pratiqué une opération clandestine en mer qui a été tenue secrète — jusqu’à présent.
Seymour Hersh • Substack • 8 février 2023 • 5200 Mots
Lorsque l’attaque s’est produite au mois de septembre 2022, une multitude d’observateurs, moi y compris, ont noté que les hauts-dirigeants de l’administration Biden avait menacé de manière répétée d’éliminer les gazoducs, puis avaient pavoisé après qu’une suite d’explosions sous-marines ont accompli cette tâche.
La Pravda Américaine : Gazoducs et Calamités
Ron Unz • The Unz Review • 3 octobre 2022 • 3900 Mots
De fait, le professeur Jeffrey Sachs de l’Université de Columbia a rapporté que des journalistes éminents travaillant pour des médias dominants lui avaient affirmé en privé que tout le monde pensait que les États-Unis avaient été responsables [de l’attentat, NdT] mais que ni eux, ni leurs éditeurs n’étaient prêts à faire clairement mention d’un tel scénario. Et lorsque Sachs l’a fait sur Bloomberg TV, son interview a été coupée et il a rapidement été mis hors circuit.
Le professeur Jeffrey Sachs [de Columbia] provoque le chaos sur Bloomberg en disant que les États-Unis ont sans doute été impliqués dans les attentats de Nordstream, selon des experts en données & autres… “même des reporters me le disent… bien entendu en privé” et que nous sommes sur une voie dangereuse menant vers un conflit nucléaire. pic.twitter.com/U6FsC2tdp6
— Detty (@0ddette) 3 octobre 2022
Jeffrey Sachs as Righteous Rogue Elephant
Ron Unz • The Unz Review • 10 octobre 2022 • 3500 Mots
Mais alors que de nombreuses hypothèses informées avaient circulé, Hersh a désormais livré un récit détaillé de ce qui a transpiré exactement, comprenant l’allégation selon laquelle l’administration Biden avait utilisé des légalismes discutables pour éviter d’informer nos comités de renseignements du Congrès de l’opération, comme la loi l’exige. Si Hersh ne se trompe pas, nos hauts-dirigeants du gouvernement peuvent se trouver légalement en grave péril.
Pourtant, l’un de nos plus grands journalistes a été contraint de diffuser ce récit énorme, comprenant des implications internationales, non pas dans les gros titres d’un journal ou magazine de premier plan, mais sur sa propre plateforme Substack. Après cinq décennies, la trajectoire de la carrière de Hersh s’est reproduite, et il est revenu à ses racines de journaliste farouchement indépendant, lauréat du prix Pulitzer pour avoir couvert la guerre du Vietnam.
Glenn Greenwald, qui est en soi un formidable journaliste d’investigation, s’est également fait éjecter des médias dominants, mais son nouveau téléjournal System Update s’est élevé au rang de projet d’importance sur la plateforme Rumble, attirant souvent jusque 100 000 vues, ou plus. Chose appropriée, il a consacré un programme récent à discuter les implications profondes de l’exil de Hersh hors du journalisme dominant, et aux attaques ignorantes lancées contre lui par des journalistes sans expérience dont l’ensemble de la carrière a été consacrée à régurgiter la propagande officielle du gouvernement.
[Ici l’auteur propose une vidéo, que le gouvernement du pays des lumières préfère cacher. Vous pouvez la voir en utilisant un VPN NdT] : https://rumble.com/embed/v26fqis/
La situation de Hersh est choquante mais guère unique. Au fil de l’année écoulée, les médias dominants, et une grande partie des médias alternatifs ont adopté des positions très proches sur la guerre entre la Russie et l’Ukraine, avec la gamme des opinions qui se trouve sans doute plus étroite et plus uniforme que cela a jamais été le cas, même après les attentats du 11 septembre, deux décennies plus tôt. Seules les voix les plus déterminées et les plus courageuses ont été en mesure de s’élever contre la force de ce ouragan idéologique.
Considérons le fait que depuis presque douze mois, la phrase “invasion non provoquée de la Russie” a été répétée dans presque tous les articles produits par les médias et les organes de presse, alors que cette description est absolument contraire aux faits. Comme je l’ai écrit peu de temps après le début de la guerre :
Bien que FoxNews soit devenue l’un des organes de presse les plus rageusement hostiles à la Russie, une interview récente avec l’un de leurs invités réguliers a produit une perspective très différente. Le colonel Douglas Macgregor fut un des principaux conseillers du Pentagone et il a expliqué énergiquement que les États-Unis avaient passé presque quinze années à ignorer les avertissements répétés de Poutine selon lesquels il n’allait pas tolérer l’adhésion à l’OTAN de l’Ukraine, ni le déploiement de missiles stratégiques à sa frontière. Notre gouvernement n’a tenu aucun compte de ses lignes rouges formulées explicitement, si bien que Poutine a fini par être contraint à agir, ce qui a débouché sur la calamité actuelle.
Macgregor avait été finaliste pour prendre la suite de John Bolton comme Conseiller en Sécurité Nationale, invité sur Foxnews quelque 60 fois, mais il a immédiatement disparu des médias diffusés sur les ondes.
Le professeur John Mearsheimer de l’université de Chicago, l’un de nos politologues les plus distingués, a passé de nombreuses années à établir ces points précis et à accuser les États-Unis et l’OTAN de la crise qui mijotait en Ukraine, mais ses avertissements sont restés totalement ignorés de nos dirigeants politiques et de nos médias. Sa conférence, d’une durée d’une heure, expliquant ces réalités déplaisantes, était restée sur Youtube sans faire de bruit durant six années, attirant relativement peu d’attention, puis, soudainement, sa popularité a explosé au cours des dernières semaines au fur et à mesure que le conflit s’est produit, et a désormais atteint une audience mondiale de plus de 17 millions. D’autres conférences Youtube parmi les siennes, dont certaines sont tout à fait récentes, ont été vues par des millions d’autres spectateurs.
La longue explication de Mearsheimer sur les origines de la guerre en Ukraine a accumulé à cette date 28 millions de vues, plausiblement plus que toute autre conférence académique dans l’histoire de l’Internet. Mais presque tous les organes médiatiques et tous les journalistes dominants couvrant le sujet ont totalement ignoré tous les faits importants qu’il présente.
Au cours de sa longue et distinguée carrière au sein de la CIA, l’ancien analyste Ray McGovern s’est occupé de la branche de la politique soviétique, et a également tenu lieu, en tant que conseiller présidentiel, si bien qu’au vu des circonstances, lui-même ou quelqu’un lui ressemblant devrait se retrouver actuellement conseiller du président Joe Biden. Au lieu de cela, il y a quelques jours, il a rallié Mearsheimer pour présenter son opinion dans une discussion vidéo hébergée par le Committee for the Republic. Les deux experts de premier plan ont convenu que Poutine avait été poussé et delà de toute limite raisonnable, ce qui avait provoqué l’invasion.
American Pravda: Putin as Hitler?
Ron Unz • The Unz Review • 7 mars 2022 • 7900 Mots
McGovern et quelques autres experts en sécurité nationale ont été interviewés sur RT au sujet du récit produit par Hersh. L’un d’entre eux a fait mention d’une source allemande qu’il connaissait, ayant supposément confirmé de nombreux détails.
[Ici l’auteur propose une vidéo, que le gouvernement du pays des lumières préfère cacher. Vous pouvez la voir en utilisant un VPN. NdT] : https://rumble.com/embed/v26d3eq/
Il y a plusieurs jours, j’ai débattu des circonstances entourant la guerre de la Russie en Ukraine avec quelques commentateurs issus de l’establishment, sur mon propre site internet. J’ai souligné que ma compréhension des origines du conflit et de ses circonstances actuelles provenaient de personnalités telles que Mearsheimer, Sachs, Macgregor et McGovern, des personnages qui construisirent leur réputation durant des décennies, mais sont désormais exclus des médias dominants en raisons de leurs opinions dissidentes.
J’ai indiqué que les universitaires très hauts placés, ou les autres experts de haut niveau, ont trop de respect pour eux-mêmes pour souscrire à un récit dominant abrutissant à 99% qu’ils estiment être absolument faux, et qu’ils disposent d’une confiance considérable en leur propre analyse contraire. J’écoute donc leur opinion avec attention, et si celle-ci a du sens à mes yeux, je pense qu’ils peuvent avoir raison. Dans le même temps, 99% des opinions que je vois de l’autre côté peuvent facilement s’expliquer par la mentalité de meute des médias et par des pressions carriéristes. L’ensemble des voix de ce type sont bien conscientes qu’elles ne seront promues qu’en soutenant de fait la ligne officielle du parti, mais vont perdre leur travail si elles ne souscrivent pas à cette ligne.
J’avais remarqué exactement le même schéma avant la désastreuse guerre en Irak, il y a une vingtaine d’années.
Au sein de la ferveur patriotique qui a suivi les attaques du 11 septembre 2001, peu de personnalité au sein des médias nationaux ont osé remettre en cause les projets et les propositions de l’Administration Bush, l’éditorial de Paul Krugman dans le Times en constituant une rare exception ; exprimer des “sentiments non-patriotiques”, définis de manière très large, pouvait impacter gravement une carrière. Cela était particulièrement le cas pour les médias électroniques, disposant d’une portée très large, et donc soumis à des pressions plus extrêmes. Au cours des années 2002 et 2003, il était très rare de trouver sur les réseaux télévisuels ou sur les réseaux câblés le moindre opposant à la guerre en Irak, et même MSNBC, la chaîne la plus populaire et la plus libérale sur le réseau câblé adopta bientôt de sévères mesures de répression idéologiques.
Durant des décennies, Phil Donahue avait travaillé à l’avant-garde du talk show quotidien à la télévision, et en 2002, il fit remonter les audiences de MSNBC, mais début 2003, son émission fut annulée, et un mémo fuita, indiquant que la raison en était son opposition à la guerre imminente. Le conservateur Pat Buchanan et le libéral Bill Press, deux critiques de la guerre en Irak, animaient un débat télévisé sur le même réseau, ce qui leur permettait de croiser le fer avec leurs opposants les plus favorables à Bush, mais cette émission fut également annulée, pour les mêmes raisons. Si les invités les plus célèbres du réseau câblé et les programmes les plus suivis ont pu subir une fin aussi sommaire, les personnalités moins en vue en tirèrent certainement les conclusions appropriées sur les risques que l’on prenait à traverser certaines lignes idéologiques.
Mon vieil ami Bill Odom, le général trois étoiles qui dirigea la NSA sous Ronald Reagan et qui disposa des accès parmi les plus élevés aux données de sécurité de Washington DC, a également été mis sur liste noire par les médias pour son opposition à la guerre en Irak. De nombreuses autres voix de premier-plan des médias furent “effacées” à la même période, et même après que la guerre en Irak fut reconnue comme un désastre colossal, la plupart d’entre elles ne retrouvèrent jamais leur place.
Pravda américaine : notre grande purge des années 1940
Ron Unz – The Unz Review – 11 juin 2018 – 5500 Mots
Quelques mois avant l’éclatement de la guerre en Ukraine, j’ai produit une longue liste de cas similaires au cours des quelques décennies passées, des exemples de géants universitaires et journalistiques qui avaient à raison remis en cause le récit officiel sur des sujets importants, et ont subi en conséquence de graves représailles, se retrouvant parfois purgés de la vie publique.
- John T. Flynn, Harry Elmer Barnes, A.J.P. Taylor, et David Irving au sujet de la seconde guerre mondiale.
- Sydney Schanberg au sujet de John McCain et des prisonniers de guerre au Vietnam
- William Odom au sujet de la guerre en Irak
- Julian Assange à cause de WikiLeaks
- Stephen Cohen sur le Russiagate
- Nicholas Wade sur les origines du Covid
Pour l’instant, les faits ne sont pas encore établis au sujet du récit journalistique produit par Seymour Hersh, et peut-être que son récit s’avérera erroné. Mais vu le schéma passé d’exemples semblables sur lesquels j’ai soigneusement enquêté, je pense qu’il existe d’excellentes probabilités pour que son récit s’avère en grande partie exact.
La Pravda Américaine – Des géants réduits au silence par des pygmées
Ron Unz – The Unz Review – 22 novembre 2021 – 12200 Mots
Dès le départ, des preuves circonstancielles écrasantes sont apparues selon lesquelles le gouvernement étasunien avait joué un rôle central dans la destruction des gazoducs Nord Stream, une action d’une inconscience colossale. Pourtant, bien que nos plus grands journalistes aient désormais livré les détails supposés exacts de ce qui s’est véritablement produit, l’ensemble de nos médias dominants ont accueilli ce récit par un mur de silence absolu.
Au vu de cette réalité, je ne suis guère surpris qu’au cours des trois dernières années, ma propre analyse sur les origines du Covid ait reçu exactement le même silence. Une fois de plus, on trouve des preuves circonstancielles écrasantes montrant que l’épidémie de Covid a été le retour de flamme d’une guerre biologique bâclée lancée contre la Chine (et contre l’Iran), une action d’une imprudence absolument colossale, et qui a désormais provoqué la mort de plus d’un million d’Étasuniens.
Peut-être qu’à un certain stade, l’ensemble des détails sera disponible, mais d’ici là, je recommande la lecture de la suite d’article que j’ai publiés depuis le mois d’avril 2020, ainsi que plusieurs interviews en podcast qui résument assez bien tous ces éléments.
Covid/Biowarfare Series
Ron Unz • The Unz Review • April 2020-December 2021 • 60,000 Words
Kevin Barrett, FFWN • February 16, 2022 • 15m
https://rumble.com/embed/vsi3d0/
Geopolitics & Empire • February 1, 2022 • 75m
https://rumble.com/embed/vv2eh7/
Red Ice TV • February 3, 2022 • 130m
https://rumble.com/embed/vrdj6e/?t=75
Traduit par José Martí, relu par Wayan, pour le Saker Francophone
Ping : Bourse en chute contrôlée et risque de guerre mondiale/mentale ; l’affolement permet au système cruel et retors d’accélérer son reset. Une vidéo suisse (voir au bout de quatre secondes : bar à nanas bobos vantant la « kiffanc