L’histoire se répète… Washington et Londres ont envie d’une nouvelle guerre froide


Un éditorial de Strategic Culture – Le 7 mai 2021

Les États-Unis et leur « partenaire junior », la Grande-Bretagne, ont exprimé cette semaine leur désir de lancer une nouvelle guerre froide contre la Russie et la Chine – quoique subrepticement, et habillés d’un langage vertueux.

Le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, s’est entretenu avec son homologue britannique, Dominic Raab, avant le sommet des ministres des affaires étrangères du G7 qui s’est tenu à Londres cette semaine. Les deux diplomates ont appelé les pays du G7 et leurs partenaires à se serrer les coudes pour faire face à la Chine et à la Russie. À cette fin, des délégués de l’Australie, de l’Inde, de la Corée du Sud et de l’Afrique du Sud ont été invités à participer au sommet.

Nous devrions prendre un moment pour noter combien un tel appel est provocateur et gratuit, voire carrément criminel. La sécurité mondiale est en train de devenir le jouet de la politique occidentale.

Le mois prochain, le président américain Joe Biden doit assister aux sommets des dirigeants du G7 et de l’alliance militaire de l’OTAN dirigée par les États-Unis, respectivement à Londres et à Bruxelles, au cours desquels on peut s’attendre à ce qu’il continue à faire passer le message messianique de la confrontation.

Malheureusement, les Américains et les Britanniques tentent de créer un monde divisé, dans lequel ils sont censés « défendre l’ordre fondé sur des règles » et la « démocratie ». C’est un thème que Washington met en avant depuis que le président Biden a pris ses fonctions il y a près de quatre mois. On nous dit que le monde est confronté à une compétition historique entre « les démocraties et les autocraties » dans laquelle les nations occidentales sont les « bons » présumés en opposition aux « méchants » désignés, comme la Chine et la Russie.

C’est absurde et insensé. Ce n’est rien d’autre qu’une manipulation grossière des perceptions et l’imposition de limites conceptuelles ridicules à une vision intelligente du monde et à la conduite de relations internationales raisonnables. Le résultat est de polariser les nations dans des camps artificiels d’allégeance qui profitent finalement à Washington, aidé et encouragé par son toujours fidèle acolyte britannique. Il s’agit d’une tentative de créer une nouvelle guerre froide entre « nous et eux ».

Il existe un précédent à la mascarade actuelle. En mars 1946, moins d’un an après la victoire historique contre l’Allemagne nazie, remportée en grande partie par l’Union soviétique – comme l’attestent les événements commémoratifs organisés en Russie ce week-end -, les puissances occidentales ont délibérément pris des mesures pour s’aliéner leur ancien allié pendant la Seconde Guerre mondiale.

Le leader britannique de la guerre, Winston Churchill, a prononcé son célèbre discours sur le « rideau de fer », aux États-Unis devant le président Harry Truman et les membres du Congrès. Ce discours a marqué le début de la guerre froide contre l’Union soviétique. S’ensuivirent cinq décennies de course aux armements nucléaires et de risque de destruction mutuelle assurée. Dans quel but ? Pour que les États-Unis, aidés par la Grande-Bretagne et les alliés de l’OTAN, puissent construire un monde placé sous l’hégémonie de Washington.

Trente ans après la fin supposée de la guerre froide en 1991, suite à la dissolution de l’Union soviétique, nous assistons à la même ferveur en Occident pour recréer des divisions hostiles et de l’animosité envers Moscou et Pékin. Cependant, les États-Unis et leur acolyte britannique ne peuvent pas admettre publiquement qu’ils poursuivent cet objectif, sinon ils seraient traités d’États agressifs et belliqueux. Ils doivent donc habiller leur objectif d’une rhétorique sur la « démocratie » menacée par l’« autocratie ». Pour faire valoir leurs arguments, il est nécessaire de diaboliser la Russie et la Chine. Les grands médias occidentaux ne sont que trop disposés à propager des récits dévalorisant ces pays, même si ces descriptions désobligeantes ne résistent pas à l’examen. Des récits sur des allégations d’agression russe contre l’Ukraine ou d’une soi-disant persécution par la Chine de sa population ouïgour.

Il y a de nombreuses raisons pour lesquelles l’agenda occidental est répréhensible. Avant tout, il est mensonger et empreint d’hypocrisie. Un ordre fondé sur des règles et la démocratie ? Défendus par les États-Unis et la Grande-Bretagne, les deux plus grands États voyous qui ont mené des guerres criminelles tuant des millions de personnes ? Arrêtez le délire !

De plus, une telle mentalité de division accroît de manière irresponsable les tensions internationales et alimente le militarisme. Il n’est pas rare d’entendre des chefs militaires américains et britanniques envisager la possibilité d’une guerre chaude contre la Russie ou la Chine. Cette insanité répréhensible découle du choix géopolitique de Washington et de Londres d’entretenir des relations antagonistes avec Moscou et Pékin.

Il ne faut pas oublier que la Russie et la Chine ont à maintes reprises exhorté les puissances occidentales à abandonner cette mentalité de guerre froide et à entamer un dialogue coopératif. En d’autres termes, la belligérance est à sens unique, venant de Washington et de son bulldog britannique.

Le véritable défi pour le monde n’est pas du tout « la démocratie contre l’autocratie ». Il s’agit de la domination unipolaire sur le monde recherchée par Washington par rapport à la vision d’un monde multipolaire fondé sur la coopération et le mutualisme que Moscou et Pékin ne cessent de défendre.

Le fait que Washington ne puisse supporter l’émergence d’un monde multipolaire témoigne de la nature néfaste du capitalisme américain et de son besoin impératif d’impérialisme et de militarisme. La puissance mondiale américaine est en contradiction directe avec les besoins démocratiques d’une planète multipolaire.

Le président Joe Biden et ses émissaires maintiennent qu’ils ne veulent pas d’une escalade des tensions avec la Russie ou la Chine. Washington affirme qu’elle ne veut pas de guerre. À un niveau individuel, Joe Biden et ses collaborateurs peuvent avoir horreur d’une telle catastrophe. Mais à tous les autres égards, leur système politique est conçu pour la guerre. La folie de se mettre à dos la Russie et la Chine et de diviser le monde en alliés et ennemis sera le test décisif de leur rhétorique trompeuse.

Strategic Culture

Traduit par Wayan, relu par Hervé pour le Saker Francophone

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