Par Andrew Korybko – Le 13 septembre 2018 – Source orientalreview.org
C’est le New York Times qui a publié ce qu’il considère comme une information de premier plan ce week end, quand bien même ce qu’il en écrit n’est que partiellement vrai : le FBI aurait développé depuis une dizaine d’années des liens troubles avec M. Deripaska, qui ont fini en flop après le refus de ce dernier de prendre part aux récits de fake news dans le cadre de la chasse aux sorcières du « Russiagate » contre Trump, ce qui l’a amené à se voir sanctionné par les autorités américaines.
Il reste difficile à ce stade d’évaluer le degré de véracité de ces informations, et il reste prudent de supposer, pour l’instant, que certains éléments ont pu être exagérés ou même fabriqués dans le cadre d’une nouvelle offensive de guerre de l’information contre la Russie ; et c’est exactement cela qui fait que cet article mérite d’être analysé.
Toutes nuances politiques purement internes aux USA et faits mis de côté, le simple fait que cet article ait été publié semble indiquer que le New York Times, ainsi que ses partenaires de l’« État profond », veulent pour partie envoyer un signal au président Poutine : les services secrets des USA s’emploient à pénétrer son cercle de confiance, dans lequel figure M. Deripaska parmi d’autres dirigeants d’entreprises en Russie, souvent décrits par la presse occidentale comme des « oligarques » ; on peut supposer qu’un nombre non déterminé d’entre eux ont également été contactés par le FBI. Si on extrapole là-dessus, on pourrait être amené à penser que les USA tentent de semer des graines de paranoïa dans les rangs de l’élite politique et économique russe, dans l’espoir de voir le gouvernement surréagir et ouvrir involontairement des lignes de fractures dans son fonctionnement, qui pourraient être exploitées depuis l’étranger.
Il est à parier que ce dessein restera lettre morte, pour la simple raison qu’il s’appuie sur une compréhension totalement erronée de l’establishement russe, irrémédiablement teintée de douces illusions et d’attentes vaines, mais une chose en ressort : il existe des vulnérabilités de sécurité nationale dès lors que des représentants de grandes entreprises disposent de patrimoine immobilier et/ou d’intérêts économiques dans les pays qui lancent des guerres hybrides contre le pays dont ils sont ressortissants. Non que nous mettions ici en question le niveau de patriotisme de ces personnes ; il s’agit plutôt ici d’établir que des puissances étrangères essayeront sans relâche d’en retirer quelque chose, en provoquant la mésentente entre ces personnes et leur gouvernement : l’attaque retorse relevant de la guerre de l’information du week-end dernier ne restera pas un acte isolé.
Le présent article constitue une retranscription partielle de l’émission radiophonique context countdown, diffusée sur Radio Sputnik le vendredi 7 septembre 2018.
Andrew Korybko est le commentateur politique américain qui travaille actuellement pour l’agence Sputnik. Il est en troisième cycle de l’Université MGIMO et auteur de la monographie Guerres hybrides : l’approche adaptative indirecte pour un changement de régime (2015). Le livre est disponible en PDF gratuitement et à télécharger ici.
Traduit par Vincent, relu par Cat pour le Saker Francophone