L’effondrement du Trumpisme


Les premières déceptions d’un électeur de Trump.


Par John Derbyshire – Le 7 avril 2017 – Source UNZ Review

Quelle merde ! Et je ne vois aucun smiley à rajouter. Cette semaine était vraiment mauvaise pour les conservateurs du pays.

Il y avait toujours la possibilité que Trump nous la mette bien profond. Le rédacteur en chef de VDARE.com, Peter Brimelow, l’a envisagé dans son discours à la conférence sur la renaissance américaine, en mai dernier :

Bien, la deuxième question est : peut-on lui faire confiance s’il gagne?

Et la réponse est : absolument pas! Vous ne pouvez faire confiance à aucun de ces personnages.

Il est tout à fait possible qu’il puisse être un autre Schwarzenegger, qu’il puisse se contenter de régner plutôt que de diriger. Nous ne savons pas vraiment ce qu’il va faire quand il entrera à la Maison Blanche.

Mais nous savions ce que Jeb Bush allait faire. Et nous savions ce que Marco Rubio allait faire – même s’il avait la grâce de mentir à ce propos pendant la campagne.

Pourtant, je crois qu’aucun de nous ne pensait qu’il nous la mettrait si rapidement. Même pas cent jours à la présidence – pas même quatre-vingts – et notre homme, notre meilleur espoir, est devenu un vrai natif de Washington DC.

Suis-je déprimé? Bien sûr, que je le suis. Vous devriez l’être aussi. Je suis tombé dans un désespoir fataliste, en attendant les informations annonçant que des Marines américains débarquent sur les plages d’Iran, que Jeff Sessions a été expulsé du ministère de la Justice pour faire place à Al Sharpton et qu’un décret exécutif impose des quotas obligatoires pour les transsexuels dans tous les départements administratifs.

Bon, examinons ce qui me pousse à ce désespoir.

Mardi, Steve Bannon a été renvoyé de son poste de conseiller de Trump au Conseil de sécurité nationale (NSC).

On pourrait discuter du fait que Bannon ne convienne pas à ce poste. Il n’y a pas de raison logique ou nécessaire, pour laquelle un stratège politique du président doit être membre d’une unité consultative spécifique. Pourtant Bannon était affecté à la NSC, et maintenant il ne l’est plus. Cela sonne, sent, a le goût et ressemble à une reculade.

Jeudi, nous apprenions que notre administration a bombardé, plus précisément a tiré des missiles de croisière, sur une base aérienne militaire syrienne, soi-disant celle à partir de laquelle le gouvernement syrien avait lancé une attaque au gaz toxique sur une ville rebelle, en début de semaine.

Ce bombardement était, l’administration l’a clairement expliqué, en représailles contre l’attaque chimique ; une attaque qui n’a tué aucun Américain et n’a nui à aucun intérêt américain. Je suppose donc que nous pouvons dire adieu à “America First”.

En ce qui concerne le renvoi de Bannon, il y a plein de rumeurs et de spéculations. Il est difficile de les évaluer sans une bonne information interne. L’attaque contre la Syrie, cependant, est une répudiation complète du Trumpisme tel qu’on nous l’avait présenté.

Si l’on en croit le président Trump lui-même, c’est un sentiment d’indignation qui l’a poussé à ordonner le bombardement, sentiment provoqué par les images d’enfants tués par le gaz toxique:

En utilisant un gaz neurotoxique mortel, Assad a enlevé la vie à des hommes, des femmes et des enfants sans défense.

Cela a été une mort lente et horrible pour tant de personnes. Même de beaux bébés ont été cruellement assassinés dans cette attaque très barbare. Aucun enfant de Dieu ne devrait jamais subir une telle horreur.

Ce soir, j’ai ordonné une frappe militaire ciblée sur le terrain d’aviation syrien, d’où l’attaque chimique a été lancée.

Politico – Le 7 avril 2017

Donc, apparemment, le motif d’une telle décision a été les sentiments ressentis par le président – des sentiments Bouh-Bouh-Bouh. Nous pensions avoir élu un président conservateur à l’esprit concret, à la tête froide et apte à la négociation. Il semble qu’en fait nous ayons plutôt élu une fillette de 14 ans.

Bien sûr, c’est dommage que des gamins soient tués. Et l’empoisonnement par le gaz est une mauvaise méthode. Mais le monde est plein d’horreurs. En quoi cette horreur là est elle une préoccupation américaine ?

Laissons le président nous l’expliquer:

C’est dans l’intérêt vital de la sécurité nationale des États-Unis d’empêcher la propagation et de dissuader d’utiliser des armes chimiques mortelles.

L’est-ce vraiment ? Les armes chimiques, comme les armes nucléaires, sont horribles, et nous devrions certainement faire ce que nous pouvons pour les empêcher d’atterrir entre les mains de mauvaises entités.

Nous ne pouvons pourtant pas grand chose. Même pas autant que nous pouvons le faire pour les armes nucléaires, qui nécessitent au moins une expertise et une infrastructure industrielle importantes. Notre meilleure défense, comme pour les armes nucléaires, est la dissuasion.

Et la dissuasion marche. Lorsque la Grande-Bretagne a déclaré la guerre à l’Allemagne pendant la Deuxième Guerre mondiale, le gouvernement britannique a distribué des millions de masques à gaz à la population civile. Le gaz avait été utilisé comme arme dans la grande guerre précédente. Tout le monde a supposé qu’il jouerait un rôle majeur dans la nouvelle guerre.

Mais cela n’a pas été le cas. L’Allemagne savait que si elle l’utilisait contre la Grande-Bretagne, les Britanniques l’utiliseraient immédiatement en retour. La dissuasion a fonctionné.

Même les terroristes ont évité d’utiliser le gaz. Le gaz sarin, qui semble avoir été ce que les Syriens ont utilisé contre leurs rebelles, a été utilisé dans les attentats du métro de Tokyo en 1995. Il n’a plus, depuis, été utilisé dans les attaques terroristes suivantes.

Et tout ceci pré-suppose que l’attaque chimique de mardi en Syrie aurait effectivement été perpétrée par la force aérienne syrienne contre les rebelles. Comme beaucoup de commentateurs l’ont observé, Bachar al-Assad, le dictateur syrien, a pratiquement gagné sa guerre civile. Il n’avait pas besoin de mesures désespérées. En tant que gars intelligent, il s’est certainement rendu compte que l’utilisation de gaz lui ferait une très mauvaise publicité. Même s’il est fou – ce que je ne crois pas, il n’est pas si fou.

Alors, peut-être que tout cela n’était qu’un faux drapeau par… qui ? Les rebelles ? ISIS ? Les Saoudiens ? Les Israéliens ? Je ne l’exclurais pas.

Et s’il s’agit d’un faux drapeau, le monde entier sait maintenant que si A est en train de combattre B, et B est en train de se prendre une claque, et que B estime que cela aiderait bien si l’oncle Sam larguait  quelques bombes sur A, alors un petit théâtre d’atrocités ferait bien l’affaire.

Je me demande qui d’autre a pris ce message pour argent comptant.

Le président Trump est-il un nigaud si émotif, au point d’attaquer un pays étranger parce que certaines images de leur guerre civile l’ont bouleversé ? Des choses horribles ont eu lieu dans notre propre guerre civile, Dieu le sait, mais je n’ai jamais entendu dire que le gars chargé de la Syrie à l’époque, le sultan Abdulaziz l’Infortuné, estimait que c’étaient ses affaires.

Bien sûr, le sultan n’avait pas de télévision haute définition. C’est peut-être ce qui fait la différence.

Et en écoutant le président parler, tout ne sonne pas vraiment comme du Trump. Sur les sites de commentaires des informations, beaucoup de gens ont posté les tweets de Trump datant d’il y a quatre ans, quand il semblait que Barack Obama allait faire quelque chose contre la Syrie.

Exemple un :

  Donald J. Trump ✔ @realDonaldTrump

Nous ne devrions pas nous mêler de la Syrie, les « rebelles » sont tout aussi mauvais que le régime actuel. QU’EST-CE QUE NOUS OBTIENDRONS POUR NOS VIE PERDUES ET NOS MILLIARDS DE $ ? ZERO

8h33 – 16 juin 2013

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Exemple deux :

Que gagnerons-nous pour bombarder la Syrie, à part une dette et un éventuel conflit à long terme ? Obama a besoin de l’approbation du Congrès.

Exemple trois :

La seule raison pour laquelle le président Obama veut attaquer la Syrie est de sauver la face, pour sa stupide déclaration sur la LIGNE ROUGE. N’attaquons PAS la Syrie, réparons les États-Unis.

Qu’est-il arrivé à ce Donald Trump, celui pour qui j’ai voté en novembre dernier? Comment retombons-nous avec un George W. Bush II, et tous ses délires de Gendarme du Monde, de langage de Dieu et d’émotionnel ?

Une hypothèse a été proposée : le président a été récupéré par sa fille Ivanka et son mari, Jared Kushner, qui est l’un de ses conseillers principaux. Il est vrai que cette allocution de jeudi soir était certainement plus girlish que guyish et plus Gen-X que BabyBoomer. Et en tant que père d’une princesse, moi aussi je sais à quel point nous pouvons être influençables.

Pourtant, je m’attendais à plus de force de caractère, de la part de Trump. C’est une grave déception.

En m’accrochant grave, j’essaie de trouver une raison quelconque, une raison conservatrice, pour justifier cet acte du président Trump.

Une possibilité envisagée : la stratégie de Nixon. Le président Nixon a cru qu’il était bon, pour les adversaires potentiels, d’avoir des doutes quant à son niveau de folie et de prévisibilité. Peut-être que Trump veut que Poutine, Xi Jinping et Kim Jong pensent : « Wow, ce type déclenche ses missiles de croisière quand il est en colère. Mieux vaut faire attention! »

Mais, c’est vraiment s’accrocher grave. Je préférerais plutôt que Poutine & Co. pensent : “Wow, ce type déclenche ses missiles de croisière en réponse à une attaque quelconque contre son pays ou ses citoyens.”

Je soupçonne que ce qu’ils pensent réellement est: “Wow, ce gars est tout aussi enthousiaste que cet abruti de George W. Bush, qui a dépensé des milliers de milliards de dollars de son peuple et des milliers de vie de ses citoyens, pour des guerres inutiles au Moyen-Orient. Comment puis-je me jouer de cet idiot à mon avantage?”

Aussi dérangeant que le bombardement syrien lui-même, est son coût, c’est-à-dire tout ce que le président ne fait pas pendant qu’il se penche sur les images de bébés syriens morts.

Une des choses qu’il ne fait pas : rien contre l’immigration – l’un de ses sujets favoris pendant la campagne, et celui qui l’a différencié de tous les autres candidats des deux partis.

Voici deux histoires concernant l’immigration cette semaine, des histoires du genre que j’espérais ne plus lire, une fois que l’administration de Trump se soit  installée :

La première histoire. Nous savons tous que sans ces millions d’étrangers illégaux, les cultures pourriraient dans les champs. Eh bien, apparemment, les choses sont pires. Sans les illégaux, les écoliers américains vont pourrir dans leurs salles de classe.

Cette histoire provient du Guardian, le journal d’extrême gauche des Blancs soumis de Grande-Bretagne (un Blanc soumis, au cas où vous ne le sauriez pas, est l’opposé d’un suprématiste blanc) : « Les dreamers ne doivent pas postuler: la pénurie d’enseignants dans la ville néglige les sans-papiers. » Par Amanda Holpuch, le 5 avril 2017.

La ville : Charlotte, Caroline du Nord. Une jeune femme, Madai Zamora 23 ans, étudie pour devenir enseignante. En plus d’étudier, elle enseigne dans les classes de bas niveau des écoles de Charlotte – d’un niveau assez bas pour ne pas avoir besoin d’une licence d’enseignant.

Diplôme qu’elle ne peut pas obtenir, car elle est une étrangère illégale. Oui, c’est une DREAMer, bénéficiant d’une exemption temporaire de déportation en vertu de l’initiative de Barack Obama 2012, la Deferred Action for Childhood Arrivals (DACA). Cependant, la Caroline du Nord, de même que la plupart des autres États, ne délivre pas de licences d’enseignement à des personnes illégales.

Citation de Holpuch, du Guardian :

Ce qui rend la situation encore plus désespérée, est que Charlotte connaît effectivement une pénurie d’enseignants. Ann Clark, la surintendante du district scolaire, a lancé des appels personnels pour rechercher des enseignants, allant jusqu’à inviter les gens de la communauté “à envoyer par courrier électronique, à signaler ou à appeler [les enseignants que vous connaissez] et à les inviter à enseigner à Charlotte”.

La pénurie est à l’échelle du pays. Les salles de classe américaines manquaient de 60 000 enseignants en 2015, selon le Learning Policy Institute. D’ici 2018, le nombre devrait augmenter à plus de 100 000. La pénurie est très grave en mathématiques, en sciences, en éducation spéciale, en formation bilingue et en langue anglaise.

Tout comme je l’ai dit : les étudiants pourrissent dans les salles de classe, partout aux États-Unis.

Bien sûr, vous pouvez dire qu’il n’y aurait pas tant d’étudiants si nous n’avions pas importé des gens du Tiers Monde, à haut taux de fertilité, depuis trente ans – des gens comme, oh, les parents de Mme Zamora. Si vous dites cela, vous êtes clairement un haineux rempli de haine.

Vous pouvez également dire que l’économie de base offre une prescription plutôt directe, pour tout type de pénurie : augmenter les salaires. Si vous dites cela, vous vous démasquerez comme un ignorant inculte.

Concernant DACA, le Guardian nous dit : “La Maison Blanche n’a pas annoncé ses plans pour le programme.”

C’est vrai, ils ne l’ont pas fait. Pourquoi donc ?

Étant donné que l’immunité contre l’expulsion en vertu du DACA ne dure que deux ans puis doit être renouvelée, la solution semble simple : arrêtez de la renouveler. DACA est entièrement une initiative de l’exécutif; le Congrès et les tribunaux n’ont rien à dire sur ce sujet.

Le pouvoir exécutif n’a pas besoin de prendre de mesures, juste d’inciter les employés concernés à l’appliquer, en arrêtant de renouveler l’immunité.

Mais cela n’est pas le cas.

Quel est le problème ici, Monsieur le Président? C’est le genre de chose pour laquelle vous avez été élu, cela et aussi d’arrêter de s’impliquer dans des actions militaires inutiles à l’étranger.

Deuxième histoire : Tiffany Li, âgée de 31 ans, de San Francisco, est une immigrante chinoise. Elle a deux filles, dont le père est un homme nommé Keith Green. Ils ont vécu ensemble dans une propriété haut de gamme, dont elle était propriétaire.

Puis, elle a eu une relation avec un autre homme. Quand Green l’a découvert, elle l’a viré de la maison – Green, pas le petit ami.

Mme Li craignait de perdre la garde de ses filles à cause de Green. Keith Green a disparu, il y a quelques mois. Son corps a ensuite été retrouvé, avec une balle dans le cou.

La femme a été accusée, avec son petit ami et un associé à lui, pour le meurtre de Keith Green. Les trois passent en procès en septembre. Pendant ce temps, Mme Li est libérée sous caution.

Et c’est là que commence l’histoire : la caution de Mme Li a été fixée à 35 millions de dollars et elle a réussi à réunir une telle somme. Elle a payé 4 millions de dollars en espèces et hypothéqué des propriétés dans le quartier de la baie d’une valeur de dizaines de millions de dollars, des biens appartenant à elle-même, à sa famille et à leurs associés en affaire.

Les hypothèques immobilières ne valent que 50% de la valeur du bien lors du calcul du paiement de la caution, de sorte que le solde de 31 millions de dollars après l’encaisse nécessitait 62 millions de dollars en biens immobilier. C’est donc ce qu’elle a pu trouver : 4 millions de dollars en espèces et 62 millions de dollars en biens immobilier. [Le meurtrier présumé a payé une caution de 35 millions de dollars, au grand dam de la famille de la victime, par Paul Elias, Associated Press, 6 avril 2017].

Apparemment, elle a de bonnes relations en Chine. Compte tenu de l’état des choses en Chine, l’un des pays les plus corrompus du monde, cela signifie qu’elle a une forte possibilité d’approvisionnement en cash  sur laquelle s’appuyer – sans parler d’un endroit hors de portée pour fuir, maintenant qu’elle est sortie sous caution.

Les deux co-accusés restent en prison. Il semble qu’elle n’a pas voulu payer pour leur caution. Pourquoi le devrait-elle? Ce ne sont que deux nigauds américains, qui ne savent même pas s’enrichir.

Il est difficile de comprendre ce que les États-Unis ont à gagner en l’admettant en tant que résidente permanente. Ou plutôt, il est trop facile de voir ce que nous avons gagné : nous avons gagné une autre dose du genre de corruption sans vergogne et évasive, que le Parti communiste chinois permet et encourage, et dont les Chinois des classes moyenne et ouvrière se plaignent amèrement.

Sur l’échelle de valeur des choses que notre nouvelle administration devrait faire, accorder un peu plus de soin – faire beaucoup plus attention – à qui obtient le droit de s’installer aux États-Unis se classe beaucoup plus haut que de larguer des missiles de croisière sur le Trucmachinistan parce que, paraît-il, ils se balancent du gaz les uns contre les autres.

Quelques autres questions.

Plutôt que de nous charger de contrôles supplémentaires et de la surveillance de millions de résidents légaux que nous admettons chaque année, pourquoi ne pas simplifier les choses avec un moratoire sur l’immigration?

Les femmes et les enfants à charge des citoyens; les génies certifiés et accrédités; les étrangers qui ont risqué leur vie en notre nom; et les autres seulement par un mandat exécutif explicite, signé par le président.

Nous sommes un tiers de milliard de personnes. Pourquoi devons-nous en importer plus?

Pourquoi n’y a-t-il apparemment aucune restriction sur les étrangers qui achètent notre immobilier?

Avec nos propres jeunes chargés de la dette des étudiants, devrions-nous vraiment laisser augmenter les prix de l’immobilier hors de leur portée, afin qu’un escroc chinois puisse planquer son liquide grâce à l’immobilier de San Francisco ?

C’est pour ce genre de problèmes – les enjeux de notre pays, l’avenir de nos enfants – que nous vous avons élu, Monsieur le Président.

Ne pourrions-nous pas laisser les Syriens s’occuper de leurs propres affaires, pendant que nous nous occupons des nôtres ?

John Derbyshire

Traduit par Wayan, relu par nadine pour le Saker Francophone

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