Le grand numéro d’équilibriste des États-Unis au Proche-Orient


Le 28 avril 2015 – Source moonofalabama

Après la chute d’Idlib, une ville syrienne proche de la frontière turque, les forces anti-gouvernementales ont continué à attaquer les positions des militaires du gouvernement dans le nord-ouest. Ces forces anti-gouvernementales sont le front al-Nusra, allié à des brigades jihadistes salafistes. Au cours du mois précédent, ces attaquants très bien organisés ont utilisé au moins plusieurs dizaines de missiles anti-tank de fabrication américaine, des TOW, contre les positions de l’armée régulière syrienne.

Même si quelques missiles TOW livrés par les Etats-Unis aux brigades anti-syriennes contrôlées par la CIA ont été capturés par le front al-Nusra, la quantité utilisée pendant la campagne d’Idlib dépasse largement ce nombre. Cela veut dire que le front al-Nusra bénéficie maintenant d’un apport régulier en armes. Il y a eu aussi une quantité significative d’armes anti-tanks Milan utilisées, mais surtout dans la partie sud du pays, proche de la frontière jordanienne. Ces missiles sont de fabrication franco-allemande. On retrouve les missiles TOW et Milans dans les stocks militaires des différents pays du golfe Persique.

Les jihadistes ont aussi utilisé des radios cryptées que l’armée syrienne semble incapable de décoder. Les radios classiques à deux sens utilisées auparavant par les jihadistes étaient faciles à espionner et ce fait avait beaucoup aidé à défendre les positions des militaires. Mais se défendre contre un ennemi ayant une transmission sécurisée est plus difficile.

La CIA et les forces spéciales américaines sont impliquées dans la formation et la direction des forces anti-syriennes et participent aux  centres de contrôle des attaquants qui sont situés en Turquie et en Jordanie. Ils connaissent certainement tous les numéros de série des armes livrées au front al-Nusra et aux autres entités d’al-Qaida. Les probables fournisseurs des ces armes sont l’Arabie saoudite, le Qatar, la Turquie, Israël et probablement les États-Unis eux-mêmes.

L’armée syrienne semble être en difficulté. Cette année, ses attaques ont toutes échoué, ses lignes de front sont fragiles et ses troupes facilement dépassées si les attaquants concentrent leurs forces et leur puissance de feu. L’armée syrienne ne manque pas d’armes et de munitions, mais plutôt de militaires. Malheureusement elle a, une fois de plus, abandonné son matériel en battant en retraite à Idlib. Je ne comprends pas pourquoi ils ne font pas sauter leur stock d’armes ou ne les rendent pas inutilisables avant de les abandonner.

On retrouve toujours les mêmes pour déjà se féliciter de la fin proche d’Assad. Mais ils disent déjà cela depuis au moins 2012. Il est encore trop tôt pour parler de victoire, d’un côté comme de l’autre. Les combats en Syrie vont continuer encore un certain temps.

Pour trouver une solution dans ces temps difficiles, le chef de l’armée syrienne est à Téhéran à la recherche d’aide supplémentaire :

A la tête d’une délégation militaire, le chef des armées syriennes va avoir des entrevues avec son homologue iranien, le Colonel Hussain Dahqan, et d’autres officiels de l’armée pour discuter des coopérations possibles face au terrorisme et autres problèmes régionaux, selon le rapport.

Cette visite se fait au lendemain du jour ou le ministre de l’intérieur syrien, Mohammad al-Shaar, et son homologue russe, le général Vladimir Kolokoltsev, ont signé un accord de coopération pour lutter contre le terrorisme.

Cet accord fournit une nouvelle base légale pour approfondir les relations bilatérales, a déclaré Kolokoltsev.

On peut donc s’attendre à des livraisons d’armes russes ainsi qu’à plus de combattants entraînés et soutenus par les Iraniens, sur le champ de bataille syrien. Mais la réponse réaliste à cette nouvelle offensive doit être donnée par la sphère diplomatique. L’Iran et la Russie doivent arriver avec de nouvelles idées pour pousser les autres pays à cesser d’aider les jihadistes.

L’ONU a invité toutes les parties, dont l’Iran cette fois ci, pour de nouveaux pourparlers de paix à Genève. Mais je n’attends aucun résultat concret de cette initiative.

Donc, si l’on regarde d’un peu loin, on voit qu’une partie du monde arabe et musulman finance et fournit une aide, à la fois matérielle et politique, à al-Qaida et à d’autres groupes djihadistes wahhabites. Alors qu’une autre partie du monde musulman combat ces mêmes groupes. Pour l’instant, les vainqueurs semblent être les djihadistes eux-mêmes et les forces anti-arabes aux États-Unis et en Israël.

Dans la guerre saoudienne contre le Yémen, al-Qaida en péninsule arabique est le vainqueur et reçoit lui aussi, sous le nom de guerriers tribaux, des armes saoudiennes. Al Qaida en Syrie est, selon le vice président américain Joe Biden lui-même, largement aidé par les états wahhabites du Golfe, comme le sont les guerriers islamistes en Libye et en Irak. Les États-Unis essayent maintenant de jouer les arbitres entre ceux qui financent al-Qaida et ceux qui les combattent. Son objectif est de garder le contrôle sur toutes les parties impliquées et de s’assurer que personne ne gagne. Des pays sont détruits et ont donc besoin d’être reconstruits, des armes et des munitions sont achetées et utilisées, les prix du pétrole restent raisonnablement élevés. Que des bonnes nouvelles pour l’économie américaine. Les États-Unis vont donc prolonger tous ces conflits jusqu’au jour ou l’inévitable retour de bâton les fera changer, une fois de plus, de politique.

Traduit par Wayan, relu par jj pour le Saker Francophone

 

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