Le drame des élections afghanes menace l’accord de Trump avec les talibans


2015-05-21_11h17_05Par Moon of Alabama − Le 18 février 2020

Donald Trump veut un accord de paix foireux avec les talibans en Afghanistan pour améliorer ses chances de réélection. Une phase de “réduction de la violence” de sept jours devait commencer cette semaine, après quoi les talibans et les États-Unis signeraient un accord à plus long terme. Ce n’est qu’après cela que les pourparlers entre le gouvernement afghan et les talibans commenceront.

Mais un conflit autour de l’élection présidentielle en Afghanistan menace maintenant de faire exploser tout le processus.

Certaines personnes à Kaboul ont toujours détesté le plan de Trump car elles n’y étaient pas incluses :

Dans un signe clair de désagrégation interne, le directeur général du gouvernement afghan, Abdullah Abdullah, a critiqué lundi la gestion officielle du processus de paix avec les talibans.
 
Présidant une réunion des ministres dans son bureau, Abdullah a souligné que tous les partis et groupes politiques devraient être impliqués dans l'équipe de négociation proposée.

"La paix n'est pas le monopole d'une seule personne, le souhait d'une seule personne - mais c'est un désir collectif, et le peuple afghan a le droit de prendre position sur le processus de paix", a déclaré Tolo News, un diffuseur local, citant Abdullah.

Aujourd’hui, la commission électorale afghane a annoncé les résultats définitifs des élections et déclaré le président Ashraf Ghani vainqueur. Abdullah n’est pas satisfait de cela, comme en 2014, et menace maintenant d’installer un gouvernement parallèle :

Le candidat à l'élection présidentielle afghane, Abdullah Abdullah, a contesté mardi les résultats finaux qui ont déclaré le président sortant Ashraf Ghani vainqueur d'un scrutin présidentiel en septembre, jurant de former un gouvernement parallèle :

"Notre équipe, basée sur des votes propres et biométriques, est la gagnante et nous déclarons notre victoire. Les fraudeurs sont la honte de l'histoire et nous annonçons notre gouvernement inclusif", a déclaré Abdullah lors d'une conférence de presse à Kaboul.

Plus tôt mardi, les responsables électoraux afghans ont déclaré que les résultats définitifs avaient montré qu'il avait remporté 39,52% des suffrages de septembre dernier alors que Ghani avait obtenu 50,64%, au-dessus du seuil de 50% nécessaire pour éviter un nouveau second tour. ...
 
Ce nouveau délai retarde l'Afghanistan face à une crise politique au moment même où les États-Unis recherchent un accord avec les talibans qui leur permettrait de retirer des troupes en échange de diverses garanties de sécurité et une promesse que les militants tiendraient des pourparlers de paix avec le gouvernement afghan.

Abdullah a perdu contre Ghani en 2014 lors d'une élection conflictuelle qui a vu les États-Unis intervenir pour négocier un accord de partage du pouvoir délicat entre les deux rivaux.

Abdullah (en jaune sur la carte ci-dessous) est le représentant de l’“Alliance du Nord”. Ses électeurs sont principalement des Tadjiks, des Ouzbeks et des Hazara tandis que les électeurs pachtounes favorisent Ghani (en rouge).

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Source – AANAgrandir

Moins de 20% des électeurs inscrits ont participé aux élections du 28 septembre 2019. L’ensemble du processus et les résultats préliminaires ont été entachés d’irrégularités. L’annonce des résultats finaux a été déplacée encore et encore. Au 8 février, de nombreuses questions restaient en suspens :

Le taux de participation de 2 695 890 qui a été donné après le jour du scrutin est maintenant tombé à 1 824 401 électeurs dans les résultats préliminaires. Cela signifie que les commissions électorales ont jusqu'à présent jugé invalide près de 30% des votants. Avec cela, le taux de participation est passé de 28 à 19 % des électeurs inscrits.
 
Reste à savoir si les décisions de la [Commission des réclamations électorales] (CEC) pour des audits plus spéciaux (des 137 630 votes "suspects" et des 102 012 votes "hors délai") ainsi qu'un autre dépouillement dans 298 bureaux de vote et un autre audit, plus un dépouillement, dans plus de 300 bureaux de vote entraînera l'invalidation de l'une de ces catégories de votes. Il est important de voir comment ces audits et recomptages seront effectués ainsi que la manière dont la [Commission électorale indépendante] (CEI) et l'ECC se coordonneront entre elles et avec les campagnes électorales. 

Enfin, étant donné la marge étroite de Ghani au-dessus du seuil de 50% après les résultats préliminaires, n'importe quelle règle pourrait potentiellement changer le résultat des élections et décider s'il y aura un second tour ou non.

Alors que les résultats «définitifs» des élections ont été annoncés aujourd’hui, aucune explication n’a été donnée sur la manière dont les problèmes ci-dessus ont été résolus.

Avec deux personnes se déclarant président de l’Afghanistan, l’administration Trump a maintenant un problème.

Alarmé par la situation, l’envoyé américain Zalmay Khalilzad s’est précipité à Kaboul avec le chef du service d’espionnage militaire pakistanais (ISI). Ceux-ci et l’ambassadeur américain en Afghanistan se sont immédiatement rendus au siège d’Abdullah.

Des menaces seront proférées et plusieurs millions de dollars seront offerts. Mais Abdullah ne cédera pas. Ses électeurs et ses partisans veulent le voir se battre. Il exigera très probablement des élections de second tour pour bloquer tout autre processus. Ghani s’y opposera bien sûr.

On se demande qui dans l’administration Trump a autorisé ce cafouillage en permettant l’annonce du résultat final des élections ?

TOLOnews @TOLOnews - 16:09 UTC · 18 févr.2020

Urgent - Abdullah annonce la formation d'un «gouvernement inclusif».

Tout le drame électoral aurait pu et dû être réglé avant qu'il ne se produise.

Abdullah pourrait bien penser à séparer le nord, l’ouest et la région centrale de Hazara, en Afghanistan du sud, de l’est principalement Pachtoune. Ce serait un combat difficile, mais les voisins du nord de l’Afghanistan ainsi que la Russie et la Chine pourraient bien le soutenir. Ces derniers voient l’incompétence des États-Unis en Afghanistan et les négociations avec les talibans comme un danger pour leurs pays.

Moon of Alabama

Traduit par jj, relu par Hervé pour le Saker Francophone

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