La Russie étudie désormais le degré de parti pris des médias internationaux

Par Alexey Khlebnikov – Le 25 février 2015 – Source Russia Direct

L’Institut russe d’études stratégiques a présenté son premier Index d’hostilité des médias grand public mondiaux, qui mesure l’éventuel biais anti-russe dans les publications des organes de presse de différents pays, puis attribue à chaque pays une note globale.

Photo Reuters

Le 18 février l’Institut russe d’études stratégiques (RISS), un groupe de réflexion créé par le président russe en 1992, a présenté son nouvel Index d’hostilité des médias grand public mondiaux, dont l’objectif principal est d’établir un classement des pays en fonction de leur degré d’amitié pour la Russie d’après le contenu de leurs médias dominants. Cette étude vise à identifier les États dont le traitement médiatique de la Russie est si agressif qu’il menace sa sécurité de l’information.

Ce rapport est le résultat d’une analyse détaillée des politiques éditoriales de différents pays réalisée en 2014, époque où la rhétorique employée par les médias occidentaux sur la Russie a changé du tout au tout. L’auteur de l’Index d’hostilité des médias de masse est un chercheur reconnu du RISS, le Dr Igor Nikolaichuk. Selon lui, au cours de l’année 2014, les médias occidentaux se sont mis à diffuser de la propagande anti-russe plus activement que jamais, ce qui constitue, à son sens, le début d’une guerre mondiale de l’information contre la Russie.

Le RISS présente son Index comme la première analyse exhaustive du contenu des médias internationaux sur la Russie. L’analyse est basée sur des données statistiques complexes (fournies par l’agence de presse russe Rossiya Segodnya) qui sont examinées grâce à une nouvelle discipline appliquée connue sous le nom de Médiamétrie politique. L’unité d’analyse est une publication médiatique importante qui offre au lecteur une certaine analyse de la Russie ou de son leadership. Les informations ordinaires ont été exclues de l’analyse.

Pourquoi un index d’hostilité des médias grand public mondiaux?

Du fait que le monde est entré dans l’ère de l’information, les médias jouent un grand rôle dans nos vies et, au cours de la dernière décennie, ils ont pris plus d’influence encore. Les médias de masse contribuent à la formation de l’opinion publique et favorisent la formation des narratives qui s’installent au cœur du discours politique d’un pays, d’une région ou même du monde entier.

Le mot propagande est devenu, au cours des dernières années, un des mots préférés du monde des médias. Google Trends montre que l’intérêt pour le mot propagande a augmenté au fil du temps dans la catégorie : recherche des nouvelles.

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Le conflit qui a éclaté en Ukraine en 2014 a intensifié la guerre médiatique et a contribué à la grande popularité du mot propagande, en lien avec l’information diffusée par les médias d’État, notamment les médias publics russes.

La propagande, selon la définition du dictionnaire d’Oxford, est l’information, et tout particulièrement l’information biaisée ou trompeuse, utilisée pour promouvoir une cause politique ou un point de vue. Le dictionnaire russe de Ozhegov la définit comme la diffusion dans la société d’une explication des idées, pensées, connaissances ou apprentissages.

La différence entre les définitions est évidente, tout comme la perception des différentes sortes d’informations. Du point de vue de la langue russe, la propagande sert surtout à expliquer certaines idées, pensées et visions politiques. La définition anglo-saxonne souligne la nature biaisée ou trompeuse de l’information présentée. C’est cette différence d’interprétation qui rend difficile à comprendre la guerre de l’information entre la Russie et l’Occident.
Un autre facteur contribue aussi à l’incompréhension entre la Russie et l’Occident. Du fait que les Anglo-saxons et les pays occidentaux dominent la sphère médiatique internationale, les médias russes se retrouvent dans une sorte de position défensive qui les contraint à devoir justifier une vision alternative et différente des événements, et qui peut ne pas plaire à l’Occident.

Cela a conduit inévitablement au clash sur le choix des informations diffusées par les médias, d’autant plus que nous traversons une époque de controverse géopolitique. Tout cela a généré une guerre de l’information dans laquelle les médias internationaux luttent pour la conquête des cœurs et des esprits comme jamais auparavant.

La méthodologie et les conclusions du nouvel Index

Le Dr Nikolaichuk dit que le volume des données analysées est d’environ 70 000 productions médiatiques publiées entre le 1er janvier et le 30 décembre 2014. Les données de soixante pays ont été analysées. Avant d’annoncer le résultat des recherches, le Dr Nikolaichuk a parlé de la sécurité de l’information, qui est devenue une question prioritaire de l’agenda international au cours de l’année dernière. Du fait de la crise ukrainienne, la rhétorique hostile à la Russie a augmenté dans les médias du monde entier, mais principalement à l’Ouest.

L’Index est établi à partir d’un ratio de publications négatives par rapport aux publications neutres. Le ratio de cinq publications négatives pour une neutre indique que le pays mène une guerre de l’information contre la Russie.

(Voir le tableau sur le site de Russia direct)

Selon ce ratio, il y a deux pays qui sont actuellement engagés dans une guerre de l’information contre la Russie: l’Allemagne et les États-Unis. Les pays qui les suivent de près tout en étant un peu moins agressifs dans leurs attaques médiatiques sont l’Autriche, la France, le Royaume-Uni et la Pologne.

Voici quelques conclusions du rapport. L’analyse des communications des médias concernant la Russie en 2014 montre sans conteste que le front médiatique anti-russe est composé principalement des pays anglo-saxons, des pays de l’UE, du Japon, de l’Ukraine, de la Géorgie et de la Jordanie, selon Nikolaichuk. En 2014, c’est l’Allemagne qui a consacré le plus grand nombre de publications significatives à la Russie, soit 8929, suivie par les Etats-Unis : 5771, le Royaume-Uni : 5209, la France : 4810, et la Suisse : 4105.

2015-03-02_11h47_26Bien que l’Italie soit un pays européen, elle ne fait pas partie du tableau du fait de sa rhétorique traditionnellement amicale envers la Russie. La Belgique suit son exemple. La Suède et le Danemark sont dominés par l’approche négative; la Norvège et l’Islande sont essentiellement neutres. Le seul pays dont la couverture médiatique de la Russie est globalement positive est la Syrie. Si l’on compare 2014 avec 2013, en 2013 le Royaume-Uni et la Géorgie avaient une approche médiatique neutre de la Russie, et les médias officiels d’Afrique du Sud, du Canada, du Japon, et d’Ukraine n’avaient pas de fort penchant anti-russe. D’une façon générale, conclut le rapport, l’environnement médiatique de la Russie s’est fortement dégradé en 2014.

L’index d’hostilité des médias publiera un rapport complet tous les ans, avec une analyse détaillée de l’évolution des tendances au cours de l’année. Le RISS publie également de courts rapports hebdomadaires sur les variations de l’indice d’hostilité des médias, pour analyser la façon dont l’environnement médiatique réagit à différents événements internationaux ou nationaux.

Le RISS considère ce nouvel Index comme un futur outil statistique complet qui permettra de mettre en lumière le caractère biaisé des médias occidentaux par rapport à la Russie, afin que les gens prennent conscience du problème et en débattent.

Traduit par Dominique, relu par jj et Diane pour le Saker Francophone

 

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